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07/10/2020 | FRANCE | N°19-12996

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 octobre 2020, 19-12996


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 octobre 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 498 F-P+B

Pourvoi n° U 19-12.996

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 OCTOBRE 2020

1°/ Mme S... U... C..., domiciliée [...] ,
>2°/ Mme R... X..., veuve C..., domiciliée [...] ,

ont formé le pourvoi n° U 19-12.996 contre l'arrêt n° RG : 17/13046 rendu le 21 juin 2018 rectifié...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 octobre 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 498 F-P+B

Pourvoi n° U 19-12.996

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 OCTOBRE 2020

1°/ Mme S... U... C..., domiciliée [...] ,

2°/ Mme R... X..., veuve C..., domiciliée [...] ,

ont formé le pourvoi n° U 19-12.996 contre l'arrêt n° RG : 17/13046 rendu le 21 juin 2018 rectifié par l'arrêt n° RG : 18/10716 rendu le 12 juillet 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre A), dans le litige les opposant :

1°/ à M. Y... I..., domicilié [...] ,

2°/ à Mme S... I..., domiciliée [...] ,

3°/ à M. G... I..., domicilié [...] ,

tous trois pris en qualité d'associés de la société Mar Ca,

4°/ à M. H... N..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Mar Ca,

5°/ à M. B... F..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire ad hoc de la société Mar Ca,

6°/ à Mme S... C..., domiciliée [...] ,

défendeurs à la cassation.

Mme S... C... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

MM. Y... et G... et Mme S... I... ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation ci-après annexé.

Mme S... C... invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation ci-après annexé.

MM. Y... et G... et Mme S... I... invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation ci-après annexé.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de Mme S... U... C..., Mme X..., veuve C..., et Mme S... C..., de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de MM. Y... et G... et Mme S... I..., et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 juin 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 juin 2018 rectifié le 12 juillet 2018), la société Mar Ca, dont les parts sont détenues à égalité par les membres des familles C... et I... et dont M... C... était le gérant, a, le 16 mars 2010, fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, qui a été convertie en redressement judiciaire le 17 mai 2011.

2. Le 11 octobre 2011, le tribunal a arrêté un plan de cession au profit de M. G... I..., qui s'est substitué une société. Le jugement a été confirmé le 1er mars 2012 et l'acte de cession a été signé le 5 avril 2012. La société Mar Ca a été mise en liquidation judiciaire le 10 juillet suivant, M. N... étant désigné en qualité de liquidateur.

3. Le 21 août 2012, W... C..., ès qualités, a demandé l'inscription sur la liste des créances postérieures prévue par l'article L. 641-13, IV, du code de commerce, d'une créance résultant d'une inscription en compte courant d'associé après le jugement arrêtant le plan, dont le montant correspondait au paiement, sur son compte bancaire personnel, de factures d'honoraires de professionnels qu'il avait sollicités dans le cadre de l'activité de la société. Le liquidateur a refusé d'inscrire la créance.

4. Après le décès de M... C..., le 21 mai 2013, Mmes S... et S... C... et Mme R... X..., ses héritières (les consorts C...) ont contesté la liste des créances devant le juge-commissaire, qui a rejeté la contestation. Devant le tribunal saisi du recours des consorts C..., MM. Y... et G... et Mme S... I..., co-associés (les consorts I...), sont intervenus volontairement à l'instance. Leur intervention volontaire a été déclarée recevable.

Examen des moyens uniques du pourvoi principal et du pourvoi incident relevé par Mme S... C..., rédigés en des termes identiques, réunis

Sur les moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen unique du pourvoi incident relevé par les consorts I...

Enoncé du moyen

4. Les consorts I... font grief à l'arrêt d'ordonner l'inscription sur la liste des créances postérieures prévue par l'article L. 641-13, IV, du code de commerce des créances réglées par M... C... au titre des honoraires d'avocat à hauteur de 41 720,80 euros, alors :

« 1°/ que seules sont payées à leur échéance les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ; que la créance née en méconnaissance des pouvoirs de l'administrateur judiciaire n'est pas née régulièrement ; qu'en se bornant à énoncer que les créances d'honoraires d'avocat engagées pour le suivi de la procédure d'appel et la procédure d'appel, la procédure en référé suspension devant le premier président pour éviter l'exécution du jugement du 11 octobre 2011, la défense à la procédure de référé engagée par M. I... devant le tribunal de commerce de Cannes pour qu'il soit ordonné au gérant de la société Mar Ca de signer le procès-verbal de prise de possession et de l'autoriser à défaut à prendre possession du fonds, étaient des "créances utiles nées pour le besoin de la procédure" et non disproportionnées, circonstance inopérante pour caractériser en quoi ces créances étaient nées régulièrement, sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée par les consorts I..., si l'engagement de ces dépenses par M. C... sans l'accord explicite ou implicite de M. P..., administrateur judiciaire, et même contre son avis et celui du juge-commissaire, ne s'opposait pas à leur inscription sur la liste des créances de l'article L. 641-13 du code de commerce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte et de l'article L. 622-17 du même code ;

2°/ que ne sont pas nées pour les besoins du déroulement de la procédure les dépenses en honoraires d'avocat ayant pour objet de s'opposer à la cession de la société au profit de l'auteur de l'offre la mieux-disante, engagées par l'auteur de la seule autre offre rejetée par le tribunal, de contester la mise en oeuvre du plan de cession et l'entrée en possession du cessionnaire ; qu'en retenant que les honoraires d'avocat engagés par M... C... pour le suivi de la procédure d'appel et la procédure d'appel du jugement du 11 octobre 2011 ayant arrêté le plan de cession au profit des consorts I..., la procédure en référé suspension devant le premier président du jugement du 11 octobre 2011, la défense à la procédure de référé engagée par M. I... devant le tribunal de commerce de Cannes pour être autorisé à prendre possession du fonds et les honoraires de l'avoué devant la cour d'appel, étaient utiles et que ces créances étaient nées pour les besoins du déroulement de la procédure, la cour d'appel a violé les articles L. 641-13 et L. 622-17 du code de commerce ;

3°/ qu'en retenant que les créances d'un montant de 41 262 euros n'étaient pas "disproportionnées" du seul fait que la société Mar Ca n'avait pas obtenu satisfaction, sans s'interroger sur l'importance de ces dépenses, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 641-13 et L. 622-17 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

5. D'une part, l'exercice du droit propre du débiteur à relever appel du jugement arrêtant le plan de cession de son entreprise échappe, par principe, puisqu'il peut exercer seul un tel droit, à la répartition des pouvoirs entre le débiteur et les organes de sa procédure collective. Il en résulte que la créance d'honoraires de l'avocat du débiteur assistant celui-ci dans l'exercice de ses droits propres est toujours née régulièrement.

6. L'arrêt relève que c'est en vertu du droit propre de la société débitrice que son gérant a interjeté appel du jugement arrêtant le plan de cession, a agi en référé pour arrêter l'exécution provisoire et a défendu à l'action en référé engagée par le cessionnaire de l'entreprise pour entrer en possession de celle-ci. La cour d'appel a ainsi fait ressortir que les honoraires réclamés par l'avocat, dans le cadre de ces actions, étaient des créances nées régulièrement.

7. D'autre part, l'arrêt relève que les procédures conduites par l'avocat étaient en lien avec l'adoption du plan de cession, que les recours et le suivi des procédures ont permis de consolider et de sécuriser, eu égard aux craintes qui pouvaient naître sur la pérennité de l'entreprise et la préservation de l'emploi, du fait de la personnalité du repreneur, ex-salarié licencié et ex-concubin d'une fille du gérant. La cour d'appel a pu en déduire que la créance d'honoraires était née pour les besoins du déroulement de la procédure.

8. Enfin, la cour d'appel, qui a indiqué précisément le montant des honoraires correspondant à chacune des procédures menées par la société débitrice dans l'exercice de ses droits propres, a souverainement apprécié le caractère proportionné de la créance et sa conformité aux besoins de la procédure.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme S... U... C... et Mme X..., veuve C..., rédigé en termes identiques au pourvoi incident relevé par Mme S... C...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la créance relative aux factures du cabinet [...], réglées par M... C... à partir de son compte bancaire personnel, n'était pas née régulièrement et d'avoir en conséquence déclaré non fondée l'opposition des héritières de M... C... à l'ordonnance du 31 juillet 2015 par laquelle le juge-commissaire les avait déboutées de leurs contestations de la liste des créances postérieures s'agissant de ces créances ;

AUX MOTIFS QU' il incombe aux appelantes de démontrer que les dépenses effectuées par W... (M...) C... à titre personnel constituent des créances nées régulièrement après le jugement ayant ouvert la procédure collective pour les besoins du déroulement de la procédure ; que pour bénéficier de l'article L. 622-17 et de l'article L. 641-13, la créance postérieure doit être née régulièrement, c'est à dire conformément aux règles gouvernant les pouvoirs du débiteur ou de l'administrateur, et le cas échéant du juge-commissaire ; que toutes les factures précitées sont postérieures au jugement du 11 octobre 2011 ayant arrêté le plan de cession au bénéfice de M. I... et antérieures à l'ouverture de la liquidation judiciaire ; que s'agissant des factures du cabinet [...], M. O... L... a attesté le 16 février 2015 que M. C... lui avait réglé une note de débours du 22 février 2012 de 164,77 € et quatre notes d'honoraires de montant de 6.099,60 € TTC du 30 décembre 2011 au 2 avril 2012 ; qu'il a par ailleurs précisé dans une attestation établie le 13 février 2015 que sa mission avait consisté à assister le gérant de la société Mar Ca dans les domaines suivants : gestion courante de l'entreprise tant dans le domaine du management, que de la gestion sociale et financière en particulier, au regard notamment des situations hebdomadaires adressées à l'administrateur judiciaire pendant la période d'observation, et à assurer des diligences auprès des organes des différentes procédures (juge-commissaire, mandataire de justice, experts judiciaires) ; que Maître P... a été désigné en qualité d'administrateur judiciaire à la procédure de sauvegarde et de redressement judiciaire de la société Mar Ca avec mission d'assistance sans aucune restriction, ce qui supposait l'intervention aux actes de gestion du débiteur et de l'administrateur judiciaire, au nombre desquels figure le fonctionnement des comptes bancaires sous leur double signature ; que les premiers juges ont retenu à bon droit qu'en réglant sur son compte bancaire personnel les factures du cabinet [...] sans en référer à l'administrateur judiciaire, M. C... avait empêché Maître P... d'exercer sa mission d'assistance ; que l'objet et le montant de ces dépenses n'ayant pas été expressément ratifiés par l'administrateur judiciaire, les appelantes ne peuvent valablement invoquer un accord implicite de l'administrateur judiciaire sur les missions confiées au cabinet [...], au demeurant non établi, pour soutenir que ces créances résultant du règlement des factures établies après le 11 octobre 2011 dont Maître P... n'avait pas connaissance seraient nées régulièrement ; qu'au demeurant il sera relevé que la créance antérieure déclarée au passif de la procédure collective par le cabinet [...] a été rejetée par ordonnance du juge-commissaire en date du 15 décembre 2014 pour défaut de justification des prestations ni d'un accord sur la tarification des honoraires ; que la créance relative aux factures du cabinet [...] réglées par M. M... C... n'étant pas née régulièrement, le jugement ayant débouté Mmes C... de leur opposition à l'ordonnance et de leurs demandes présentées de ce chef sera confirmé ;

ALORS, D'UNE PART, QUE tout jugement doit être motivé et que la contradiction entre les motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, après avoir réformé le jugement entrepris sauf en ce qu'il avait déclaré recevables l'opposition formée par les héritières de M... C... et l'intervention volontaire accessoire des consorts I... et en ce qu'il avait débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile (dispositif de l'arrêt attaqué, p. 10 in limine), la cour d'appel a expressément adopté les motifs du jugement par lesquels les premiers juges avaient débouté au fond les héritières de M... C... de leurs demandes portant sur la créance relative aux factures du cabinet [...] (arrêt attaqué, p. 8, 4ème et 7ème attendus) ; qu'en se déterminant ainsi par des motifs contradictoires, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE constituent des créances postérieures privilégiées au sens de l'article L. 622-17 du code de commerce, les créances qui sont nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou qui sont la contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant la période d'observation ; que l'appréciation du caractère utile d'une créance doit se faire en considération de l'utilité potentielle de l'opération et non de son utilité réelle appréciée a posteriori ; que constitue nécessairement, au sens de ce texte, une prestation utile fournie pour le compte du débiteur le concours apporté par un cabinet de gestion qui, en l'absence de salarié affecté à la gestion courante de l'entreprise, assiste le gérant dans ce domaine et lui apporte son expertise en matière de management et de questions sociales et financières ; qu'en jugeant toutefois que la créance relative aux factures du cabinet [...] réglée par M... C... n'était pas née régulièrement, aux motifs inopérants que ces factures n'avaient pas été expressément ratifiées par l'administrateur judiciaire et que celui-ci se serait ainsi trouvé empêché d'exercer sa mission d'assistance (arrêt attaqué, p. 8, 4ème et 5ème attendus), cependant que le seul critère qu'il convenait de mettre en oeuvre tenait à l'utilité de la prestation litigieuse pour le débiteur, la cour d'appel a violé l'article L. 622-17 du code de commerce, outre l'article L. 641-13 du même code ;

ALORS, ENFIN, QUE constituent des créances postérieures privilégiées au sens de l'article L. 622-17 du code de commerce, les créances qui sont nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou qui sont la contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant la période d'observation ; que l'appréciation du caractère utile d'une créance doit se faire en considération de l'utilité potentielle de l'opération et non de son utilité réelle appréciée a posteriori ; qu'en ajoutant, à l'appui de sa décision, « que la créance antérieure déclarée au passif de la procédure collective par le Cabinet L... a été rejetée par ordonnance du juge-commissaire en date du 15 décembre 2014 pour défaut de justification des prestations ni d'un accord sur la tarification des honoraires » (arrêt attaqué, p. 8, 6ème attendu), cependant qu'elle ne pouvait apprécier le caractère régulier de la créance qui était en cause dans le cadre de la présente instance en se référant à une autre créance, antérieure, qui avait été rejetée dans le cadre d'une autre procédure, la cour d'appel, qui s'est déterminée par une motivation inopérante, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-17 et L. 641-13 du code de commerce. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour MM. Y... et G... et Mme S... I...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la créance d'honoraires d'avocat pour le suivi de la procédure d'appel et la procédure d'appel du jugement du 11 octobre 2011 ayant arrêté le plan de cession, de la procédure en référé suspension devant le premier président du jugement du 11 octobre 2011, de la défense à la procédure de référés engagée par M. I... devant le tribunal de commerce de Cannes pour être autorisé à prendre possession du fonds et celle des honoraires de l'avoué devant la cour d'appel, étaient des créances nées régulièrement après l'ouverture de la procédure collective pour les besoins du déroulement de la procédure, d'avoir ordonné, en conséquence, l'inscription sur la liste des créances postérieures de l'article L. 641-13 du code de commerce des créances réglées par M. W... C... au titre des honoraires d'avocat à hauteur de la somme de 41 720,80 euros ;

Aux motifs que la créance d'honoraires du Cabinet J..., réglée par Monsieur M... C..., correspond à des honoraires facturés par cet avocat d'une part dans le cadre d'actions en justice exercées par la société MAR CA en vertu de son droit propre : appel du jugement arrêtant le plan de cession, action en référé suspension de l'exécution provisoire, défense à l'action en référé engagée par le cessionnaire devant le tribunal de commerce pour être autorisée à entrer en possession, et, d'autre part, pour la rédaction d'un dire à l'expert judiciaire M. K... désigné par ordonnance du 12 avril 2011 du juge-commissaire sur requête de l'administrateur judiciaire pour rechercher s'il existait des flux financiers anormaux entre la société MAR CA et les sociétés Scala (créée par Monsieur G... I... deux mois avant l'ouverture de la procédure de sauvegarde) et Batpro ou d'autres sociétés, et si des transferts de clientèle étaient intervenus au préjudice de la société MAR CA au profit des sociétés Scala et Batpro ou d'autres sociétés ; que les créances d'honoraires d'avocat ont été exposées dans le cadre de l'exercice par le débiteur de ses droits propres ; qu'il ne peut être exclu par principe que la créance d'honoraires de l'avocat assistant celui-ci dans l'exercice de ses droits propres puisse naître pour les besoins du déroulement de la procédure (Com. 1er décembre 2015, n° 14-20668, rapport M. E...) ; que l'appréciation du caractère utile d'une créance se fait en considération de l'utilité potentielle de l'opération et non de son utilité réelle appréciée a posteriori (Com. 15 octobre 2013 n° 12-23830 et 9 mai 2018 n° 16-24065) ; que les notions d'exercice d'un droit propre et de besoins de déroulement de la procédure peuvent se rejoindre (Com. 15 octobre 2013 n° 12-23830 précité) ; s'agissant des procédures en lien avec l'adoption du plan de cession, qu'il sera rappelé que le débiteur bénéficie du droit de faire appel des jugements arrêtant le plan de cession en vertu de l'article L 661-6 III du code de commerce ; qu'en l'espèce, eu égard aux graves dissensions existant entre les deux groupes d'associés ayant des répercussions sur le sort de l'entreprise, aux craintes avancées sur la pérennité de l'entreprise et la préservation de l'emploi du fait de la reprise par M. I... ex-salarié licencié et ex concubin de Mme C... ayant créée une société concurrente de la société MAR CA, craintes relayées par le représentant des salariés déclaré recevable en son appel aux côtés de la société MAR CA, aux perspectives de résorption du passif offertes par les deux projets, l'appel a permis de consolider l'adoption du plan de cession et d'apporter la sécurité juridique à la poursuite de la procédure collective, la cour ayant jugé le 1er mars 2012, après avoir analysé les différents moyens des parties, que les premiers juges avaient fait une exacte appréciation des éléments de la cause et de la valeur des deux offres de reprises qui leur étaient soumises en désignant comme repreneur M. G... I..., précisant que les éléments d'appréciation fournis ayant permis la discussion, aucun abus d'aucune sorte ne pouvait être retenu ; que les créances d'honoraires d'avocat pour le suivi de la procédure d'appel et la procédure d'appel, la procédure en référé suspension devant le Premier président pour éviter la mise à exécution du jugement du 11 octobre 2011, la défense à la procédure de référés engagée par M. I... devant le tribunal de commerce de Cannes pour qu'il soit ordonné au gérant de la société MAR CA de signer le procès-verbal de prise de possession et de l'autoriser à défaut à prendre possession du fonds, doivent être considérée comme une créance utile née pour le besoin de la procédure ; qu'elles ne peuvent être considérées « disproportionnées » du seul fait que la société MAR CA n'a pas obtenu satisfaction ; que ces créances s'élèvent au montant de 41 262 € (11 960 € x 2, 4.545 €, 5 382 € et 7 415 €) ; (factures du 19 octobre 2011, du 3 janvier 2012, du 3 novembre 2011, du 4 novembre 2011, du 5 décembre 2011) ; que seront par conséquent inscrites sur la liste des créances postérieures de l'article L. 641-13 du code de commerce les créances réglées par Feu W... (M...) C... au titre d'honoraires d'avocat à hauteur de 41 720,80 € (41 262 € + 358,80 €) ;

Alors 1°) que seules sont payées à leur échéance les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ; que la créance née en méconnaissance des pouvoirs de l'administrateur judiciaire n'est pas née régulièrement ; qu'en se bornant à énoncer que les créances d'honoraires d'avocat engagées pour le suivi de la procédure d'appel et la procédure d'appel, la procédure en référé suspension devant le Premier président pour éviter l'exécution du jugement du 11 octobre 2011, la défense à la procédure de référé engagée par M. I... devant le tribunal de commerce de Cannes pour qu'il soit ordonné au gérant de la société Mar Ca de signer le procès-verbal de prise de possession et de l'autoriser à défaut à prendre possession du fonds, étaient des « créances utiles nées pour le besoin de la procédure » et non disproportionnées, circonstance inopérante pour caractériser en quoi ces créances étaient nées régulièrement, sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée par les consorts I..., si l'engagement de ces dépenses par M. C... sans l'accord explicite ou implicite de Me P..., administrateur judiciaire, et même contre son avis et celui du juge-commissaire, ne s'opposait pas à leur inscription sur la liste des créances de l'article L. 641-13 du code de commerce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte et de l'article L. 622-17 du même code ;

Alors 2°) que ne sont pas nées pour les besoins du déroulement de la procédure, les dépenses en honoraires d'avocat ayant pour objet de s'opposer à la cession de la société au profit de l'auteur de l'offre la mieux-disante, engagées par l'auteur de la seule autre offre rejetée par le tribunal, de contester la mise en oeuvre du plan de cession et l'entrée en possession du cessionnaire ; qu'en retenant que les honoraires d'avocat engagés par M. M... C... pour le suivi de la procédure d'appel et la procédure d'appel du jugement du 11 octobre 2011 ayant arrêté le plan de cession au profit des consorts I..., la procédure en référé suspension devant le Premier président du jugement du 11 octobre 2011, la défense à la procédure de référé engagée par M. I... devant le tribunal de commerce de Cannes pour être autorisé à prendre possession du fonds et les honoraires de l'avoué devant la cour d'appel, étaient utiles et que ces créances étaient nées pour les besoins du déroulement de la procédure, la cour d'appel a violé les articles L. 641-13 et L. 622-17 du code de commerce ;

Alors 3°) qu'en retenant que les créances d'un montant de 41 262 € n'étaient pas « disproportionnées » du seul fait que la société Mar Ca n'avait pas obtenu satisfaction, sans s'interroger sur l'importance de ces dépenses, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 641-13 et L. 622-17 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-12996
Date de la décision : 07/10/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Liquidation judiciaire - Jugement - Créanciers postérieurs - Régime de faveur - Domaine d'application - Créance née régulièrement - Cas - Créance d'honoraires de l'avocat du débiteur assistant celui-ci dans l'exercice de ses droits propres

L'exercice du droit propre du débiteur à relever appel du jugement arrêtant le plan de cession de son entreprise échappe, par principe, puisqu'il peut exercer seul un tel droit, à la répartition des pouvoirs entre le débiteur et les organes de sa procédure collective. Il en résulte que la créance d'honoraires de l'avocat du débiteur assistant celui-ci dans l'exercice de ses droits propres est toujours née régulièrement


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 21 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 oct. 2020, pourvoi n°19-12996, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12996
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