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07/10/2020 | FRANCE | N°19-12071

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 octobre 2020, 19-12071


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 octobre 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 509 F-D

Pourvoi n° P 19-12.071

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 OCTOBRE 2020

M. W... O..., domicilié [...] , a formé le pourvoi

n° P 19-12.071 contre l'arrêt rendu le 6 décembre 2018 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la soc...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 octobre 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 509 F-D

Pourvoi n° P 19-12.071

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 OCTOBRE 2020

M. W... O..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° P 19-12.071 contre l'arrêt rendu le 6 décembre 2018 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société BRMJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , en la personne de M. E... J..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Maza constructions, défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. O..., de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société BRMJ, ès qualités, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 juin 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 6 décembre 2018) et les productions, la société Maza construction, dont M. O... est associé gérant, a été mise en liquidation judiciaire le 21 décembre 2015, la date de cessation des paiements étant fixée au 1er mai 2014 et la société BRMJ désignée liquidateur. Celle-ci a assigné M. O... pour voir la procédure de liquidation judiciaire étendue à son égard et voir prononcer ses faillite personnelle ou interdiction de gérer.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et le second moyen, pris en ses première, deuxième, troisième et quatrième branches, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le second moyen, pris en ses cinquième et sixième branches

Enoncé du moyen

3. M. O... fait grief à l'arrêt de prononcer à son encontre une interdiction de gérer pendant une durée de huit ans, alors :

« 1°/ que le tribunal qui prononce une mesure d'interdiction de gérer doit motiver sa décision, tant sur le principe que sur le quantum de la sanction, au regard de la gravité des fautes et de la situation personnelle de l'intéressé ; qu'en se bornant à se fonder, pour condamner M. O... à une interdiction de gérer pendant une durée de huit années, sur la gravité des fautes commises, sans se prononcer sur la situation personnelle de ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 653-8 du code de commerce ;

2°/ que le tribunal qui prononce une mesure d'interdiction de gérer doit motiver sa décision, tant sur le principe que sur le quantum de la sanction, au regard de la gravité des fautes et de la situation personnelle de l'intéressé ; qu'en se fondant de façon générale, pour condamner M. O... à une interdiction de gérer pendant une durée de huit années, sur la gravité des fautes que ce dernier avait commises, sans motiver de manière distincte sa décision sur le principe et sur le quantum de la sanction retenue, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de motivation et a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. M. O... n'ayant, dans ses conclusions, développé aucun moyen concernant la sanction de la faillite personnelle ou celle de l'interdiction de gérer, ni fait état d'un quelconque élément sur sa situation personnelle, la cour d'appel, en retenant que les faits devaient, en raison de leur gravité, être sanctionnés par une interdiction de gérer d'une durée de huit ans, a, par une décision motivée, légalement justifié sa décision.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. O... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. O... et le condamne à payer à la société BRMJ, en qualité de liquidateur de la société Maza constructions, la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour M. O...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

M. O... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ouvert une procédure de liquidation judiciaire sans période d'observation à son égard, par extension de celle déjà ouverte à l'égard de la société Maza construction, conformément aux articles L. 620-1 et L. 640-1 du code de commerce ;

AUX MOTIFS QU'aux termes du 2ème alinéa de l'article L. 621-2 du code de commerce applicable en liquidation judiciaire en vertu de l'article L. 641-1-I, la procédure ouverte peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale ; que la Selarl BRMJ agit sur le fondement des relations financières anormales et qu'il est donc inopérant de soutenir que l'ensemble des opérations critiquées ait fait l'objet d'une inscription comptable permettant d'en reconstituer la traçabilité puisque cette inscription ne supprime pas le caractère anormal des relations financières ; que par contre, il incombe à la Selarl BRMJ de démontrer l'existence de ces relations anormales lesquelles se traduisent par un mélange et un déséquilibre d'ordre patrimonial (sans contrepartie) et doivent résulter d'une volonté systématique de la part de son auteur ; qu'en l'occurrence, la Selarl BRMJ dénonce les fluctuations erratiques du compte-courant d'associé dont il convient de reprendre l'évolution sur trois années : - débiteur du 23 juillet 2010 (300 euros) au 31 décembre 2010 (2.105 euros), date à laquelle il redevient créditeur jusqu'au 9 janvier 2011 par les inscriptions en crédit de différentes sommes en OD (opérations diverses ayant pour objectif de faire passer une somme d'un poste comptable à un autre) – débiteur du 9 septembre 2011 (3.255,07 euros) au 15 décembre 2011 (15.478,03 euros), date à laquelle il devient créditeur jusqu'au 27 décembre 2011 par jeu d'écritures OD (fournisseurs pour 20.748€), - débiteur du 2 janvier 2012 (140 euros) au 31 décembre 2012 (201.391,31 euros), - débiteur du 2 janvier 2013 (201.541,31 euros) jusqu'au 28 novembre 2013 (233.594,84 euros), date à laquelle il redevient créditeur par le jeu de 2 écritures en OD d'un montant respectif de 3.216,15 euros (Chausson) et 249.272,02 euros (Philibert) ; que l'examen du grand livre global définitif laisse ensuite apparaître que le compte courant d'associé de M. O... lui a mensuellement servi à payer des dépenses personnelles de loisirs, d'habillement et de nourriture tout au long des trois exercices (Eurodisney, Planete Saturn, retraits, Decathlon, Casa, Camaïeu, Mac dan, Aquatropic, patinoire, Citysport, Jacqueline Riu, Intermarché, Carrefour, boucherie etc) ;

que cette répétition dans le temps traduit une volonté délibérée d'utiliser le compte-courant d'associé comme un compte bancaire à des fins personnelles jusqu'à le rendre débiteur dans des proportions particulièrement importantes en 2012 et 2013, le tout en violation de la règle selon laquelle un compte-courant d'associé ne doit jamais être débiteur et de celle posée à l'article L. 223-21 du code de commerce interdisant au gérant de contracter un emprunt auprès de la société ; que cette utilisation systématique a induit un déséquilibre patrimonial et qu'elle traduit des relations financières anormales dans la mesure où M. O... a bénéficié sans contrepartie d'un financement de ses dépenses personnelles via et au détriment de la société qui a par ailleurs contribué au réapprovisionnement de ce compte par des jeux d'écritures OD se rapportant pourtant à des fournisseurs ou des avoirs dont la cause ou la réalité n'est pas justifiée ni davantage la raison pour laquelle les sommes correspondantes seraient légitimes à être inscrites au crédit du compte-courant d'associé ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a étendu les opérations de liquidation judiciaire de la Sarl Maza Construction à M. O... ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE par jugement en date du 21 octobre 2015, le tribunal de commerce de céans a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la Sarl Maza Construction ; que par jugement du 21 octobre 2015, la procédure a été convertie en liquidation judiciaire et que Me J... E... a été désigné en qualité de liquidation judiciaire ; que sur l'extension de la procédure de liquidation judiciaire, en application de l'article L. 641-1, I du code de commerce, l'article L. 621-2 dudit code est applicable à la procédure de liquidation judiciaire de la Sarl Maza Construction ; qu'en application de cet article, une procédure de liquidation judiciaire peut être étendue à une ou plusieurs personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale ; qu'il ressort des pièces produites aux débats qu'en 2010, 2011, 2012 et 2013, le compte-courant d'associé de M. O... W... est, à de très nombreuses reprises, débiteur, atteignant un solde débiteur particulièrement important de 201.391,31 euros en 2012, solde qui contrairement aux règles élémentaires de comptabilité ne sera pas repris dans les « à nouveau de l'exercice 2013 » ; que ce compte est de plus régulièrement soldé par des opérations diverses non justifiées ne respectant pas les principes de comptabilité ; qu'enfin, le compte courant d'associé supporte des achats de M. O... W... pour des dépenses de la vie courante (vêtements, chaussures, nourriture, voyages
) montrant sans équivoque le mélange des patrimoines de la société et de M. O... et la pratique de relations financières anormales entre la société et son gérant ;
que tous ces éléments conjugués suffisent à caractériser l'existence de relations financières anormales entre les deux entités, relations caractéristiques d'une confusion de patrimoines ; que dans ces conditions, devant la confusion manifeste résultant de l'imbrication des patrimoines des deux personnes, vu les articles L. 641-1 et L. 621-2 du code de commerce, le tribunal ne peut que faire droit à la demande présentée par le mandataire et étendre la procédure de liquidation judiciaire de la Sarl Maza Construction à M. O... W... ;

1°) ALORS QUE le seul fait pour un associé de détenir un compte-courant d'associé débiteur et de l'utiliser à des fins personnelles est insuffisant à caractériser l'existence de relations financières anormales constitutives d'une confusion de patrimoines entre la société et ledit associé, justifiant l'extension de la procédure de liquidation de la première au second ; qu'en retenant, pour étendre à l'égard de M. O... la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'égard de la Sarl Maza Construction dont il était l'associé-gérant, que son compte-courant d'associé lui avait mensuellement servi à payer des dépenses personnelles jusqu'à le rendre débiteur dans des proportions particulièrement importantes en 2012 et 2013, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser l'existence de relations financières anormales justifiant l'extension de la procédure de liquidation judiciaire, et a ainsi violé les articles L. 621-2 et L. 641-1, I du code de commerce ;

2°) ALORS QUE le seul fait que des opérations réalisées au sein d'une société au profit de son associé-gérant soient irrégulières au regard des règles comptables et des règles relatives aux conventions réglementées est insuffisant à caractériser l'existence de relations financières anormales constitutives d'une confusion de patrimoines entre la société et ledit associégérant et partant une confusion de patrimoines, justifiant l'extension de la procédure de liquidation de la première au second ; qu'en retenant, pour étendre à l'égard de M. O... la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'égard de la Sarl Maza Construction, que son compte-courant d'associé était débiteur dans des proportions importantes en 2012 et 2013, en violation de l'article L. 223-21 du code de commerce interdisant au gérant de contracter un emprunt auprès de la société, que le solde débiteur de ce compte n'avait pas été repris dans les « à nouveau de l'exercice 2013 » et que la société avait contribué au réapprovisionnement de ce compte par des jeux d'écritures « opérations diverses » se rapportant à des fournisseurs ou des avoirs dont la cause ou la réalité n'est pas justifiée, au mépris des règles comptables, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser l'existence de relations financières anormales justifiant l'extension de la procédure de liquidation judiciaire, et a ainsi violé les articles L. 621-2 et L. 641-1, I du code de commerce.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

M. O... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé à son encontre une interdiction de gérer pendant une durée de huit ans ;

AUX MOTIFS QUE l'article L. 653-4, 4° du code de commerce sanctionne par la faillite personnelle du dirigeant ayant poursuivi abusivement dans un intérêt personnel une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements ; que l'extrait K-bis du 21 octobre 2015 porte effectivement la mention d'une « cessation totale d'activité à compter du 31 mars 2014 » et la date de cessation des paiements de la SARL Maza Construction a été fixée au 1er mai 2014 par jugement aujourd'hui définitif du 21 octobre 2015 ; que la Selarl BRMJ ne peut donc imputer à M. O... une poursuite d'activité déficitaire au-delà du 31 mars 2014 mais qu'il n'en demeure pas moins qu'elle peut invoquer ce grief pour la période antérieure, à condition de démontrer le caractère déficitaire de l'exploitation, l'intérêt personnel du dirigeant et le fait que l'exploitation déficitaire ne pouvait que conduire à la cessation des paiements ; qu'elle produit le grand livre global définitif et les bilans simplifiés pour les exercices 2011, 2012 et 2013 laissant apparaître que le résultat de l'exercice a été négatif à partir de 2012 ; qu'au vu des grands livres, le compte-courant d'associé est devenu débiteur au cours des deux exercices 2012 et 2013 dans les conditions et proportions ci-dessus rappelées ; qu'au 31 décembre 2012, les comptes bancaires affichaient un résultat positif de 8.922,89 euros pour être égal à 0 euros au 31 décembre 2013 ; que le passif est essentiellement constitué de dettes fiscales pour des montant admis, après redressements et réclamations, de 79.167,00 euros au titre de la TVA 2012 et 80.526,00 euros au titre du redressement d'un impôt sur les sociétés sur le même exercice ; que durant l'exercice 2012 puis encore en 2013, M. O... continuait à se verser une rémunération concomitamment à l'utilisation du compte-courant d'associés pour ses dépenses personnelles ; et qu'il ne justifie d'aucune mesure concrète pour redresser la situation de la société qui ne cessait de se dégrader depuis 2012 pour aboutir dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire à un passif admis de 262.296 euros, qu'il convient de retenir ce grief ; que l'article L. 653-8 du code de commerce sanctionne par une interdiction de gérer toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 ayant sciemment omis de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements ; que le fait que la société ait été mise en sommeil depuis le 31 mars 2014 n'exonérait pas le gérant de ses obligations légales, fiscales et sociales ; que le 3 décembre 2013, l'administration avait déjà informé M. O... d'une vérification de sa comptabilité pour les exercices écoulés qui devait aboutir au redressement fiscal de la SARL Maza Cosntruction mais que M. O... n'était pas présent au jour indiqué bien que l'avis de réception du courrier d'information ait été retourné signé à l'administration fiscale ; que dans sa proposition de rectification dressée le 26 août 2014, elle relatait que le comptable de la SARL Maza Construction lui avait confirmé être dans l'impossibilité d'établir le bilan concernant l'exercice 2013 à défaut de pièces justificatives, outre le faut que la SARL Maza Construction par son gérant faisait l'objet d'un procès-verbal de travail dissimulé ; qu'ainsi, le défaut de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours s'inscrit dans le prolongement d'un comportement d'évitement quant au respect des règles pesant sur sa qualité de gérant ; que M. O... ne justifie d'ailleurs d'aucune circonstance susceptible d'expliquer le défaut de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours, alors qu'il ne pouvait ignorer les difficultés financières de son entreprise qui avait enregistré un résultat net négatif au 31 décembre 2012, qui ne disposait que très peu de trésorerie et qui n'était pas en règle au regard de du reversement de TVA notamment ;
que ces deux fautes étant retenues, il convient, tenant les dispositions de l'article L. 653-8 du code de commerce, de prononcer à la place de la faillite personnelle, une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, pour une durée de huit années au regard de la gravité des fautes commises ;

1°) ALORS QUE l'interdiction de gérer ne peut être prononcée que pour les fautes du dirigeant limitativement énumérées à l'article L. 653-8 du code de commerce dont celle consistant à avoir omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements ; qu'en retenant, pour condamner M. O... à une interdiction de gérer pendant une durée de huit années, que ce dernier, bien qu'informé, n'avait pas été présent lors de la vérification de comptabilité effectuée par l'administration fiscale en 2013 et que cette dernière relatait dans sa proposition de rectification en date du 26 août 2014, que le comptable de la société Maza Construction avait confirmé avoir été dans l'impossibilité d'établir le bilan concernant l'exercice 2013 à défaut de pièces justificatives, outre le fait que la société faisait par son gérant l'objet d'un procès-verbal de travail dissimulé et qu'en conséquence, le défaut de déclaration de paiement s'inscrivait dans le prolongement d'un comportement d'évitement quant au respect des règles pesant sur sa qualité de gérant, la cour d'appel qui s'est fondée sur des manquements étrangers à l'obligation de déclaration d'état de cessation des paiements pour prononcer une mesure d'interdiction de gérer à ce titre a violé l'article L. 653-8 du code de commerce ;

2°) ALORS QUE c'est à la date de la cessation des paiements qu'il convient d'apprécier si le dirigeant d'une société placée en liquidation judiciaire a sciemment omis de procéder à la déclaration d'état de cessation des paiements dans le délai de quarante-cinq jours ; qu'en retenant, pour condamner M. O... à une interdiction de gérer pendant une durée de huit années pour ne pas avoir déclaré dans le délai légal l'état de cessation des paiements qui avait été fixé par le jugement d'ouverture à la date du 1er mai 2014, que cette omission s'inscrivait dans le prolongement d'un comportement d'évitement quant au respect des règles pesant sur sa qualité de gérant, dans la mesure où bien qu'informé, il n'avait pas été présent lors de la vérification de comptabilité effectuée par l'administration fiscale en 2013 et que cette dernière relatait dans sa proposition de rectification en date du 26 août 2014, que le comptable de la société Maza Construction avait confirmé avoir été dans l'impossibilité d'établir le bilan concernant l'exercice 2013 à défaut de pièces justificatives, outre le fait que la société faisait par son gérant l'objet d'un procès-verbal de travail dissimulé, la cour d'appel s'est fondée sur des faits antérieurs à la date de cessation des paiements et a ainsi violé l'article L. 653-8 du code de commerce ;

3°) ALORS QU'il appartient au demandeur qui sollicite une interdiction de gérer à l'encontre du dirigeant d'une société placée en liquidation judiciaire d'apporter la preuve que ce dernier a sciemment omis de demander l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements ; qu'en retenant, pour condamner M. O... à une interdiction de gérer pendant une durée de huit années pour ne pas avoir déclaré l'état de cessation des paiements dans le délai légal, que ce dernier ne pouvait ignorer les difficultés financières de son entreprise et qu'il ne justifiait d'aucune circonstance susceptible d'expliquer le défaut de déclaration de cessation des paiements dans le délai légal, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil, ensemble l'article L. 653-8 du code de commerce ;

4°) ALORS QUE c'est à la date de la cessation des paiements qu'il convient d'apprécier si le dirigeant d'une société placée en liquidation judiciaire a sciemment omis de procéder à la déclaration d'état de cessation des paiements dans le délai de quarante-cinq jours ; qu'en retenant, pour condamner M. O... à une interdiction de gérer pendant une durée de huit années pour ne pas avoir déclaré dans le délai légal l'état de cessation des paiements qui avait été fixé par le jugement d'ouverture à la date du 1er mai 2014, que ce dernier ne pouvait avoir ignoré les difficultés financières de son entreprise qui avait enregistré un résultat net négatif au 31 décembre 2012, qui ne disposait que très peu de trésorerie et qui n'était pas en règle au regard du reversement de TVA, la cour d'appel s'est fondée sur la connaissance présumée de la situation financière de la société par M. O... à une date antérieure à l'état de cessation des paiements et a ainsi violé l'article L. 653-8 du code de commerce ;

5°) ALORS QUE le tribunal qui prononce une mesure d'interdiction de gérer doit motiver sa décision, tant sur le principe que sur le quantum de la sanction, au regard de la gravité des fautes et de la situation personnelle de l'intéressé ; qu'en se bornant à se fonder, pour condamner M. O... à une interdiction de gérer pendant une durée de huit années, sur la gravité des fautes commises, sans se prononcer sur la situation personnelle de ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 653-8 du code de commerce ;

6°) ALORS QUE le tribunal qui prononce une mesure d'interdiction de gérer doit motiver sa décision, tant sur le principe que sur le quantum de la sanction, au regard de la gravité des fautes et de la situation personnelle de l'intéressé ; qu'en se fondant de façon générale, pour condamner M. O... à une interdiction de gérer pendant une durée de huit années, sur la gravité des fautes que ce dernier avait commises, sans motiver de manière distincte sa décision sur le principe et sur le quantum de la sanction retenue, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de motivation et a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-12071
Date de la décision : 07/10/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 06 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 oct. 2020, pourvoi n°19-12071


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Buk Lament-Robillot, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12071
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