LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 1er octobre 2020
Cassation partielle
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 972 F-D
Pourvoi n° C 19-15.534
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER OCTOBRE 2020
M. V... W..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° C 19-15.534 contre l'arrêt rendu le 8 avril 2019 par la cour d'appel de Basse-Terre (2e chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société [...] (Fimar), société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Somaf, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de M. W..., de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat des sociétés [...] (Fimar) et Somaf, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 juillet 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 8 avril 2019), la société [...] (la société Fimar) est une société holding d'un groupe composé de plusieurs sociétés, dont la société Somaf.
2. Son capital social est détenu par M. H... W... et M. V... W..., qui en étaient cogérants jusqu'au 21 mars 2016, date à laquelle ce dernier a été révoqué de ses fonctions.
3. Par une ordonnance en date du 7 décembre 2017, le président d'un tribunal mixte de commerce, saisi sur requête par M. V... W... sur le fondement des articles 145 et 875 du code de procédure civile, a ordonné diverses mesures d'instruction.
4. La demande de rétractation ayant été rejetée par une ordonnance en date du 6 juillet 2018, les sociétés Fimar et Somaf en ont interjeté appel.
Examen des moyens
Sur les premier et deuxième moyens et sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexés
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche, qui est recevable, comme étant de pur droit
Enoncé du moyen
6. M. V... W... fait grief à l'arrêt d'infirmer l'ordonnance et, statuant à nouveau, d'ordonner la rétractation des ordonnances des 7 décembre 2017 et 15 janvier 2018 et de le condamner à payer aux sociétés Fimar et Somaf la somme de 5 000 euros à chacune pour procédure abusive, outre 10 000 euros à chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que n'est pas abusive la procédure menée qui permet au demandeur d'obtenir gain de cause en tout ou partie ; qu'en l'espèce, en condamnant M. V... W... à verser des indemnités aux sociétés Fimar et Sofam pour procédure abusive, sans rechercher ni si M. V... W..., qui avait obtenu gain de cause devant le juge des référés du tribunal mixte, n'avait pas, dans les éléments qu'il invoquait, des motifs sérieux de solliciter une mesure d'instruction, ni s'il n'avait pas, comme le reconnaissaient expressément les sociétés Fimar et Sofam dans leurs écritures, grâce à cette procédure et à l'intervention de l'huissier, pu légitimement obtenir communication de pièces par ces sociétés, avant et pendant l'instance en rétractation ; que son action n'était dès lors pas abusive, puisqu'elle lui avait permis d'obtenir des pièces qui lui étaient refusées auparavant et dont il était pourtant bien créancier puisqu'elles lui ont été remises ; que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1240 du code civil, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1240 du code civil :
7. Une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières qu'il appartient alors au juge de spécifier, constituer un abus de droit, lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet en appel.
8. L'arrêt condamne M. V... W... à des dommages-intérêts pour procédure abusive.
9. En se déterminant ainsi, alors qu'il avait été fait droit à la requête de M. V... W... par la juridiction du premier degré, la cour d'appel, qui n'a pas retenu l'existence de circonstances particulières au sens de l'article susvisé, a privé sa décision de base légale.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du troisième moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. V... W... à payer aux sociétés [...] et Somaf la somme de 5 000 euros à chacune à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, l'arrêt rendu le 8 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;
Condamne les sociétés [...] et Somaf aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des sociétés [...] et Somaf et les condamne à payer à M. V... W... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. W...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR infirmé l'ordonnance et, statuant à nouveau, ordonné la rétractation des ordonnances des 7 décembre 2017 et 15 janvier 2018 et condamné M. V... W... à payer à la SARL Fimar 5.000 € et à la SAS Somaf 5.000 € pour procédure abusive, outre 10.000 € à chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS EN PARTICULIER QUE « Néanmoins, les éléments produits permettent à la cour de retenir :
- que les époux W... ont bien divorcé par jugement du 7 mars 2017, ce qui atteste de la réalité d'un conflit de couple au moment du départ de Mme W... de son poste au sein de la Fimar,
- que Mme W... a bénéficié de deux primes et d'une augmentation de salaire également accordées à un autre salarié, M. Q..., ce qui permet d'écarter toute notion de favoritisme à son profit ou toute idée de versement non-causés,
- que le montant de l'indemnité transactionnelle, certes très élevé, n'est pas exorbitant au regard de celui de l'indemnité accordée par ailleurs en 2014 par Fimar à M. X..., dont l'ancienneté était bien moindre alors que M. V... W... était co-gérant,
- que les motifs du versement de cette indemnité sont expressément indiqués dans la transaction produite en pièce 35 du dossier des appelantes et qu'aucun élément ne permet de penser que les mesures d'instruction sollicitées permettraient de révéler que ce document serait faux ou aurait été antidaté,
- qu'en ce qui concerne les parts sociales d'EMI dont l'usufruit a été concédé à Fimar, cette convention peut s'expliquer par l'intérêt financier que Mme Y... W... pouvait avoir à faire supporter le risque du démarrage d'un projet immobilier par Fimar nonobstant son divorce,
- que les intérêts de S... N... peuvent être distincts de ceux de sa mère et qu'il peut entretenir de bonnes relations avec M. H... W... sans que cela traduise une collusion frauduleuse autour des conditions de départ de Mme Y... W...,
- que M. H... W... a bien réglé la prestation compensatoire due à son ex-épouse sur ses deniers personnels et que compte tenu de la fongibilité l'argent, il n'est pas démontré que cette dette aurait été réglée de manière suspecte grâce aux sommes qui lui ont été versées par Fimar après approbation régulière de l'assemblée générale.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que la requête de M. V... W... tendant à établir le caractère fallacieux de cette rupture conventionnelle n'était basée que sur des soupçons non-étayés et qu'il ne disposait d'aucun motif légitime permettant de justifier que soient ordonnées de manière non contradictoire des mesures d'instruction particulièrement intrusives, puisqu'elles consistaient principalement à examiner des échanges de mails entre diverses personnes, les autres pouvant quant à elle obtenu dans le respect du contradictoire.
En conséquence, il convient d'infirmer l'ordonnance déférée du 6 juillet 2018 et de rétracter les ordonnances du 7 décembre 2917 et du 15 janvier 2018 en ce qu'elles ont autorisé l'huissier à rechercher et à se faire remettre les documents concernant la rupture conventionnelle du contrat de travail de Mme Y... W... » ;
1°) ALORS QUE, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé ; qu'en l'espèce, pour affirmer que l'exposant ne pouvait solliciter la désignation d'un huissier pour collecter des éléments de preuve permettant d'établir les conditions de la rupture du contrat de travail de Mme W..., laquelle était concomitante de son divorce d'avec M. H... W..., gérant de la SARL Fimar, la cour d'appel a retenu, d'une part, que, « en ce qui concerne les parts sociales d'EMI dont l'usufruit a été concédé à Fimar, cette convention peut s'expliquer par l'intérêt financier que Mme Y... W... pouvait avoir à faire supporter le risque du démarrage d'un projet immobilier par Fimar, nonobstant son divorce » et, d'autre part, que « les intérêts de S... N... peuvent être distincts de ceux de sa mère et qu'il peut entretenir de bonnes relations avec M. H... W... sans que cela traduise une collusion frauduleuse autour des conditions de départ de Madame Y... W... » ; qu'en constatant ainsi l'existence d'un doute sur les raison d'être et les modalités d'une opération objectivement anormale et sur la nature des intérêts des personnes impliquées, tout en infirmant l'ordonnance ayant ordonné une mesure d'instruction sur ce point, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, d'où il ressortait que, au vu du contexte dans lequel cette opération et le licenciement avait été mise en oeuvre, M. V... W..., en sa qualité d'associé minoritaire de la SARL Fimar, justifiait bien d'un motif légitime à voir établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige sur cette opération, et a violé l'article 496 du Code de procédure civile, ensemble l'article 145 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sans que ni le juge des requêtes, ni celui de la rétractation ne puisse exiger du requérant qu'il prouve le bien-fondé des doutes que la mesure d'instruction tend précisément à lever ; qu'en l'espèce, pour affirmer que l'exposant ne pouvait solliciter la désignation d'un huissier pour collecter des éléments de preuve permettant d'établir les conditions de la rupture du contrat de travail de Mme W..., laquelle était concomitante de son divorce d'avec M. H... W..., gérant de la SARL Fimar, la cour d'appel a retenu, d'une part, que, « en ce qui concerne les parts sociales d'EMI dont l'usufruit a été concédé à Fimar, cette convention peut s'expliquer par l'intérêt financier que Madame Y... W... pouvait avoir à faire supporter le risque du démarrage d'un projet immobilier par Fimar, nonobstant son divorce » et, d'autre part, que « les intérêts de S... N... peuvent être distincts de ceux de sa mère et qu'il peut entretenir de bonnes relations avec M. H... W... sans que cela traduise une collusion frauduleuse autour des conditions de départ de Madame Y... W... » ; qu'en statuant ainsi, et en opposant ces doutes au requérant qu'elle déboutait à raison de leur existence, la cour d'appel, qui a exigé de l'exposant qu'il prouve le bien-fondé des faits qui constituaient l'objet de la mesure sollicitée, bien que ces doutes suffisaient à rendre crédibles une future action et justifiaient ladite mesure d'instruction, a violé l'article 496 du Code de procédure civile, ensemble l'article 145 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête, sans que ni le juge des requêtes, ni celui de la rétractation ne puisse exiger du requérant qu'il prouve le bien-fondé des doutes que la mesure d'instruction tend précisément à clarifier ; qu'en l'espèce, pour affirmer que l'exposant ne pouvait solliciter la désignation d'un huissier pour collecter des éléments de preuve permettant d'établir les conditions de la rupture du contrat de travail de Mme W..., laquelle était concomitante de son divorce d'avec M. H... W..., gérant de la SARL Fimar, la cour d'appel a encore retenu que « M. H... W... a bien réglé la prestation compensatoire due à son ex-épouse sur ses deniers personnels et que, compte tenu de la fongibilité de l'argent, il n'est pas démontré que cette dette aurait été réglée de manière suspecte grâce aux sommes qui lui ont été versées par Fimar après approbation régulière de l'assemblée générale », avant de rejeter la demande au motif que la requête de l'exposant n'était fondée « que sur des soupçons, non-étayés » ; qu'en statuant ainsi, et en rétractant l'ordonnance en reprochant à l'exposant de ne pas prouver ce qui constituait l'objet même de la mesure d'instruction sollicitée et sans faire des états des éléments de preuve étayant les doutes qui fondait la demande et justifiaient qu'il y soit fait droit, la cour d'appel a violé l'article 496 du Code de procédure civile, ensemble l'article 145 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QUE le juge du référé-rétractation doit apprécier le bien-fondé de la demande de mesure d'instruction et la réunion des conditions de son octroi au moment où le juge des requêtes a statué, sans pouvoir prendre en considération les résultats de celle-ci, ni, partant, des éléments dont le juge des requêtes ne disposait pas lorsqu'il a ordonné la mesure ; qu'en l'espèce, pour apprécier la demande en rétractation des ordonnances sur requête, la cour d'appel s'est prononcée comme si elle statuait en référé de droit commun, au vu des « éléments produits » par les deux parties, sans préciser si ces pièces étaient connues du juge des requêtes ou si elles avaient été communiquées par les sociétés Fimar et Somaf suite à l'exécution de la mesure ; que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 496 du Code de procédure civile ;
5°) ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QUE les juges du fait doivent préciser les pièces sur lesquelles ils se fondent sans pouvoir se contenter de viser les pièces du dossier ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est contentée de viser les « éléments produits » sans préciser les pièces sur lesquelles elle fondait l'ensemble de ces assertions factuelles, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
6°) ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QUE ne peuvent être ordonnées sur requête que des mesures qui ne peuvent être ordonnées contradictoirement ; qu'en l'espèce, en affirmant que seuls les échanges de courriels sollicités devaient être obtenus sans contradiction, sans s'expliquer sur les demandes relatives à des pièces dont l'existence dans les dossiers des sociétés Fimar et Somaf n'étaient pas certaine et qui auraient pu être dissimulées par les responsables de celles-ci si un huissier n'était pas mandaté pour procéder à des recherches par surprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 145 du Code de procédure civile, ensemble l'article 496 du Code de procédure civile ;
7°) ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QUE les requêtes de M. V... W... étaient fondées sur les articles 145 et 875 du Code de procédure civile ; qu'en ne statuant qu'en considération de l'article 145 du Code de procédure civile et sans rechercher si la demande n'était pas fondée sur le fondement de l'article 875, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 875 du Code de procédure civile.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR infirmé l'ordonnance et, statuant à nouveau, ordonné la rétractation des ordonnances des 7 décembre 2017 et 15 janvier 2018 et condamné M. V... W... à payer à la SARL Fimar 5.000 € et à la SAS Somaf 5.000 € pour procédure abusive, outre 10.000 € à chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS EN PARTICULIER QUE « néanmoins l'accusation tenant au fait que M. H... W... aurait touché la somme de 11.118 € provenant de Hold'In n'est pas démontrée et il est au contraire établi qu'il a effectué un versement de ce montant au profit de Hold'in pour le compte de Fimar qui a inscrit cette somme au crédit de son compte courant.
Par ailleurs, l'article de presse produit en pièce 64 du dossier des appelantes permet de retenir que le besoin en investissement a été bien supérieur aux 180.000 € initialement annoncée puisque le projet développé par la SARL Hold'in a nécessité une levée de fonds de 620.000 € depuis 2016.
Dès lors les soupçons de M. V... W... concernant le caractère douteux de cette opération ne sont pas étayés et aucun motif légitime ne justifie d'autoriser de manière non contradictoire un huissier à rechercher la copie de factures, de contrats, de bons de commande et plus généralement tout document établi entre la société Fimar et la société Hold'In ainsi que les échanges de mails entre M. H... W..., M. F... E... et M. I... W..., d'une part, et Mme O... L... et M. N... M... d'autre part, alors que ses investigations sont de nature à porter gravement atteinte au secret des affaires et qu'il est indifférent sur ce point que M. V... W... soit associé à 49,96 % de Fimar, Par ailleurs les autres documents sollicités pouvaient parfaitement être obtenus dans le respect du principe du contradictoire.
En conséquence, il convient d'infirmer l'ordonnance déférée du 6 juillet 2018 et de rétracter les ordonnances du 7 décembre 2017 et du 15 janvier 2018 en ce qu'elles ont autorisé l'huissier à rechercher et à se faire remettre les documents concernant l'acquisition des parts de la société Hold'In par la société Fimar » ;
1°) ALORS QUE, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête, sans que ni le juge des requêtes, ni celui de la rétractation ne puisse exiger du requérant qu'il prouve le bien-fondé des doutes que la mesure d'instruction tend précisément à clarifier ; qu'en l'espèce, pour affirmer que l'exposant ne pouvait solliciter la désignation d'un huissier pour collecter des éléments de preuve permettant d'établir d'éventuelles irrégularités dans l'acquisition des parts de la société Hold'In, la cour d'appel a retenu que « l'accusation tenant au fait que M. H... W... aurait touché la somme de 11.118 € provenant de Hold'In n'est pas démontré » ; qu'en statuant ainsi et en exigeant du requérant qu'il prouve les allégations fondant sa demande et qui constituaient l'objet de la mesure sollicitée, la cour d'appel a violé l'article 496 du Code de procédure civile, ensemble l'article 145 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le secret des affaires ne peut faire échec à la communication sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile à un associé d'une société de documents commerciaux impliquant cette dernière ; qu'en l'espèce, en affirmant l'inverse, la cour d'appel a violé l'article 496 du Code de procédure civile, ensemble l'article 145 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QUE les requêtes de M. V... W... étaient fondées sur les articles 145 et 875 du Code de procédure civile ; qu'en ne statuant qu'en considération de l'article 145 du Code de procédure civile et sans rechercher si la demande n'était pas fondée sur le fondement de l'article 875, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 875 du Code de procédure civile.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR infirmé l'ordonnance et, statuant à nouveau, condamné M. V... W... à payer à la SARL Fimar 5.000 € et à la SAS Somaf 5.000 € pour procédure abusive, outre 10.000 € à chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS EN PARTICULIER QUE « en l'espèce, M. V... W... a fait dans sa requête une présentation particulièrement contestable des éléments de fait, notamment de ceux concernant la prétendue démission de Mme Y... W... qui aurait été transformée en rupture conventionnelle afin d'induire une décision favorable, alors qu'en réalité ses demandes n'étaient fondées que sur des allégations non-étayées.
Ces agissements qui attestent d'une évidente mauvaise foi constituent une faute dans l'exercice du droit d'agir en justice qui a causé un préjudice aux sociétés Fimar et Somaf puisqu'elles ont été contraintes d'engager des procédures afin d'obtenir la rétractation des ordonnances sur la base de ce procédé déloyal » ;
1°) ALORS QUE la condamnation de M. V... W... à verser des indemnités pour procédure abusive sera cassée par voie de conséquence de la censure qui sera prononcée sur le fondement des précédents moyens, en application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE n'est pas abusive la procédure menée qui permet au demandeur d'obtenir gain de cause en tout ou partie ; qu'en l'espèce, en condamnant l'exposant à verser des indemnités aux sociétés Fimar et Sofam pour procédure abusive, sans rechercher ni si M. V... W..., qui avait obtenue gain de cause devant le juge des référés du tribunal mixte, n'avait pas, dans les éléments qu'il invoquait, des motifs sérieux de solliciter une mesure d'instruction, ni s'il n'avait pas, comme le reconnaissaient expressément les sociétés Fimar et Sofam dans leurs écritures, grâce à cette procédure et à l'intervention de l'huissier, pu légitimement obtenir communication de pièces par ces sociétés, avant et pendant l'instance en rétractation ; que son action n'était dès lors pas abusive, puisqu'elle lui avait permis d'obtenir des pièces qui lui étaient refusées auparavant et dont il était pourtant bien créancier puisqu'elles lui ont été remises, ; que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1240 du Code civil, ensemble l'article 6, §1 de la Convention ESDH ;
3°) ALORS QU'un préjudice ne peut être indemnisé deux fois ; qu'en l'espèce, pour allouer aux sociétés Fimar et Somaf une indemnité pour procédure abusive, la cour d'appel a retenu que celles-ci avaient subi préjudice, puisqu'elles avaient été contraintes d'engager des procédures afin d'obtenir la rétractation des ordonnances sur la base de ce procédé déloyal ; qu'en statuant ainsi, tout en leur allouant parallèlement une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, laquelle indemnise le coût de la procédure, la cour d'appel a violé l'article 1240 du Code civil et le principe de réparation intégrale.