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30/09/2020 | FRANCE | N°19-14524

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 septembre 2020, 19-14524


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 800 F-D

Pourvoi n° E 19-14.524

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

M. N... X..., domicilié [...] , a

formé le pourvoi n° E 19-14.524 contre l'arrêt rendu le 31 janvier 2019 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale, prud'hommes), dans le lit...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 800 F-D

Pourvoi n° E 19-14.524

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

M. N... X..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° E 19-14.524 contre l'arrêt rendu le 31 janvier 2019 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale, prud'hommes), dans le litige l'opposant au [...], dont le siège est [...] , anciennement dénommé Centre social Saint-Maurice Pellevoisin, défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Colin-Stoclet, avocat de M. X..., de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du [...], après débats en l'audience publique du 1er juillet 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 31 janvier 2019), M. X... a été engagé, le 22 mai 1992, par l'association Maison de quartier Saint-Maurice Pellevoisin, devenue le [...] (le centre social), en qualité de directeur, moyennant une rémunération mensuelle brute de 3 227,92 euros pour un temps de travail annuel forfaitaire de 210 jours ne pouvant dépasser 1 600 heures. La convention collective applicable est celle de l'animation socio-culturelle. Convoqué à un entretien préalable par lettre du 25 octobre 2011 lui notifiant sa mise à pied à titre conservatoire, le salarié a été licencié pour fautes graves le 25 novembre 2011.

2. Contestant le bien-fondé de son licenciement et s'estimant victime de faits de harcèlement, le salarié a saisi, le 9 février 2012, la juridiction prud'homale d'une demande tendant à dire son licenciement nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, et de demandes d'indemnisation.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement, alors « que le salarié soutenait que la procédure était irrégulière en ce que l'article 4 de la convention collective de l'animation prévoit que dans les entreprises où il n'y a ni représentant du personnel élu ni délégué syndical, le salarié peut se faire assister lors de l'entretien « par une personne de la profession appartenant à une entreprise dont l'activité est visée dans le champ d'application de la présente convention » et que cette faculté n'était pas mentionnée dans la lettre de convocation ; qu'en se bornant à relever que la lettre de convocation mentionnait que le salarié pouvait se faire assister par un membre du personnel, sans examiner si, comme le soutenait le salarié, la lettre n'aurait pas dû indiquer qu'il pouvait également se faire assister par toute personne appartenant à une entreprise entrant dans le champ d'application de la convention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4.4 de la convention collective de l'animation. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4.4 de la convention nationale de l'animation du 28 juin 1988, dans sa rédaction issue de l'avenant n° 136 du 11 avril 2011 :

5. Aux termes de ce texte, l'employeur ou son représentant, qui envisage de licencier un salarié, doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge en lui indiquant l'objet de la convocation.
« Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié.
« Lors de l'entretien, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise.
« Dans les entreprises où pour des raisons d'effectif ou de carence il n'y a ni représentant du personnel élu ni délégué syndical, le salarié peut se faire assister lors de l'entretien par une personne de la profession appartenant à une entreprise dont l'activité est visée dans le champ d'application de la présente convention.
« Ces possibilités doivent figurer dans la lettre de convocation. »

6. Pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement, l'arrêt retient que la lettre de convocation à l'entretien préalable adressée au salarié est conforme à l'article 4.4.1 de la convention collective applicable précisant qu'il peut se faire représenter par un salarié de l'entreprise.

7. En se déterminant ainsi, alors que le salarié soutenait que la lettre de convocation ne prévoyait pas la possibilité pour lui d'être assisté par une personne de la profession appartenant à une entreprise dont l'activité est visée dans le champ d'application de la convention et qu'il lui appartenait donc de rechercher s'il existait dans l'entreprise un représentant du personnel élu ou un délégué syndical, en l'absence desquels la possibilité pour le salarié de faire appel à une personne de la profession appartenant à une entreprise dont l'activité est visée dans le champ d'application de la présente convention devait figurer dans la lettre de convocation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement, l'arrêt rendu le 31 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée ;

Condamne le [...] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le [...] et le condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Colin-Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes tendant à voir dire qu'il a subi des agissements de harcèlement moral et à voir condamner le centre social Saint-Maurice Pellevoisin devenu centre social Albert Jacquard à lui verser des dommages-intérêts à ce titre ;

AUX MOTIFS QUE M. X..., qui prétend avoir été victime de harcèlement moral par des pressions exercées par les agents de la ville de Lille, et en particulier de Mme C..., produit une attestation de M. A..., président du conseil d'administration, qui témoigne de ce qu'il a été le témoin "de comportements et propos répétés de représentants municipaux mettant en cause M. X..., notamment de la part de Mme C... I..., chargée de mission au sein de la délégation des centres sociaux dont M. J... est l'adjoint" ; que M. A... y relate que lors d'une réunion du 11 février 2011, Mme C... s'est montrée véhémente à l'égard de M. X... en lui disant "ce qui va se passer, c'est que le centre social va perdre son agrément. Si la CAF se retire, la ville de Lille va se retirer. Vous allez vous retrouver en cessation de paiements et tu seras responsable du dépôt de bilan et de la mise au chômage de l'ensemble des salariés du centre social qui auront perdu leur emploi à cause de toi" ; qu'il témoigne également de ce que lors d'une réunion du comité de pilotage du 25 mai 2011, Mme C... a dit à M. X... : "je ne suis vraiment pas contente, à cause de toi, je vais être obligée de faire ton travail, parce que tu ne l'as pas fait" et a, à nouveau, remis en cause ses compétences en lui disant, lors d'un comité de suivi du 9 juin 2011, "le problème ce n'est pas le conseil d'administration, mais le directeur" ; que M. U..., secrétaire de direction du centre social, qui témoigne de la dégradation du climat de travail depuis l'obtention de l'agrément, atteste également que le 13 septembre 2011, Mme C... a déclaré à M. X... lors d'une discussion avant de quitter les lieux, "toi, je ne te parle plus ! De toutes façons, on n'en a pas fini avec toi !" ; qu'il ressort également de la lettre de licenciement de M. X... que le président du conseil d'administration a écrit : "j'ai manifesté ainsi que la plupart des membres du conseil d'administration une totale solidarité envers vous lorsque vous vous plaigniez de l'attitude des financeurs qui, selon vous, vous dénigraient et vous faisaient subir, selon vos termes, une forte pression" ; que M. X... justifie souffrir depuis 2009 d'une sténose oesophagienne nécessitant des interventions chirurgicales régulières liée en grande partie à un état de stress chronique et d'un syndrome anxio-dépressif réactionnel selon lui à des difficultés professionnelles constatées par son médecin traitant le 18 juillet ; qu'il produit également un compte rendu d'entretien avec un psychologue, postérieur au licenciement, constatant une fragilisation psychologique et une altération majeure du bien-être au travail ; qu'il établit ainsi l'existence de critiques répétées de la part de Mme C..., chargée de mission à la ville de Lille et participant au comité de pilotage, sur son activité professionnelle et ses actions destinées à obtenir et renouveler l'agrément CAF du centre social, permettant de présumer l'existence d'un harcèlement ; que l'employeur justifie cependant du soutien accordé par le conseil d'administration à M. X... par des lettres adressées à la ville de Lille dénonçant une certaine ingérence de la ville dans sa gestion et dans les prérogatives du conseil d'administration, comme rappelé dans la lettre de licenciement ; qu'il rappelle que les financeurs du centre social que sont la CAF et la ville de Lille ont un droit de regard et de contrôle sur la mise en place d'un projet de centre social ainsi que sur sa gestion et que leurs inquiétudes s'avéraient justifiées au regard des manquements constatés motivant son licenciement qualifiés "d'indignes de sa fonction" ; qu'il apparaît, après examen de ces différents éléments, que les pressions et critiques apportées par Mme C..., en sa qualité de chargée de mission de la ville de Lille, dans le cadre de ses fonctions de conseiller technique et de contrôle, sont justifiées par des éléments objectifs et ne peuvent être considérés comme étant constitutifs d'un harcèlement ;

1) ALORS QUE, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement puis, dans l'affirmative, d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en se bornant à affirmer que les inquiétudes des financeurs s'étaient avérées justifiées au regard des manquements constatés et que les pressions et critiques formulées par la chargée de mission étaient justifiées par des éléments objectifs, sans préciser la nature des manquements constatés, ni expliquer en quoi les pressions et critiques auxquelles M. X... avait été exposé étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1154-1 du code du travail ;

2) ALORS, en toute hypothèse, QUE, dans la mesure où la cour d'appel considère que l'employeur établit que les agissements invoqués seraient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement en se référant aux manquements constatés motivant le licenciement de M. X..., la cassation à intervenir sur la base du second moyen de cassation, relatif au licenciement du salarié, entraînera l'annulation des dispositions de l'arrêt relatives au harcèlement moral, par application des articles 624 et 625 du code de procédure civile ;

ET AUX MOTIFS, à les supposer adoptés, QUE M. X... a spécifié, dans son courrier du 14 octobre 2011, qu'il était "harcelé par des représentants de la mairie de Lille, sans que son employeur, c'est-à-dire le conseil d'administration, représenté par son président, n'ait cessé ou tenté de faire cesser ce type de comportement" ; que la procédure d'agrément par la CAF dans laquelle est engagé le centre social nécessite une convention dans laquelle il est précisé que le financement est à hauteur de 40 % du prix de revient et qu'en contrepartie, la CAF procède à des contrôles afin de vérifier la justification des dépenses effectuées au titre de la convention, sans que le gestionnaire ne puisse s'y opposer ; qu'il était donc logique qu'en tant que financeur, la CAF réalise ce type de contrôle sans pour autant que M. X... considère qu'il s'agisse de harcèlement ; que d'ailleurs, il a répondu prendre bonne note des observations formulées ; que la CAF a réalisé un contrôle du centre social le 17 septembre 2009, au cours duquel elle a identifié des écarts ; que le compte rendu du conseil d'administration du 12 octobre 2011 à l'ordre du jour duquel figurait le licenciement de M. X..., précise que "lors des CA précédents, il a été demandé au directeur de réaliser : un budget pour prévoir la gestion, un retro planning notamment pour prévoir le renouvellement du centre social, un plan de trésorerie ; que le CA ne dispose pas à l'heure actuelle de ces réalisations ; qu'il est demandé à un employé d'y pourvoir" ; que ces demandes ne relèvent pas plus de harcèlement moral, mais du pouvoir de direction de l'employeur ; que si ce dernier a refusé l'embauche de deux personnes, ce refus entrait dans son pouvoir de direction, estimant que ces fonctions étaient du ressort du directeur ou pour des raisons financières, sans être une preuve de harcèlement ; que les pièces versées aux débats et notamment l'attestation de M. A..., président du centre social, laissent apparaître une réelle mésentente entre Mme C..., employée de la ville de Lille, et M. X..., que le Conseil ne retiendra pas comme des faits avérés de harcèlement moral ; que le demandeur verse une attestation de M. A... en sa faveur puisque certes il décrit la difficulté de ses relations professionnelles avec Mme C..., mais également les arguments et les documents que M. X... a fourni pour sa défense, lors de ses "attaques" ; que l'employeur verse aux débats les mails de M. A..., démontrant que nombreuses sont ses demandes qui restent sans réponse (élections des délégués du personnel, cahier d'infirmerie, budget à refaire, plan de formation du personnel, entretiens pour le changement de convention, compte-rendu de conseil d'administration manque de signature du trésorier à la banque alors que celui-ci est en poste depuis plus d'un an, ...) pendant plusieurs mois (novembre 2010 jusqu'octobre 2011) ; que l'ordre du jour du 16 décembre 2010 décide de la mise en place de la nouvelle convention collective trois mois plus tard soit le 16 mars 2011, mais que les mails de juillet 2011 versés aux débats démontrent que celle-ci n'est toujours pas appliquée à cette date ; que l'attestation de Mme O... P... fait état de manquements graves de la part de M. X... : "présence trop importante d'enfants au regard des dispositions de l'agrément, salariées récemment embauchées par M. X... et reconnues inaptes par épuisement, dénigrement de certains salariés, oubli d'une petite fille à l'accueil du centre de loisirs, rappel à l'ordre de l'inspection du travail sur des manquements à l'obligation de sécurité sur une salariée, heures supplémentaires non régularisées et absence de remboursement des frais de transport" ; que les problèmes de santé de M. X... ont démarré en 2009, date à laquelle d'après l'attestation de M. A..., il avait alors sa confiance ; qu'il est surprenant de verser aux débats un compte rendu du CA de 2004, écrit à la main, non signé d'aucun participant, alors que des décisions financières importantes y ont été prises et que les autres comptes rendus, certes plus récents, se font avec signature du président, entête du centre social, et non manuscrits ; que le salarié ne démontre nullement les faits de harcèlement moral dont il prétend avoir été l'objet ;

3) ALORS QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement et, dans l'affirmative, d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en rejetant la demande de M. X... sans respecter ce mécanisme probatoire, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

4) ALORS en tout état de cause QUE M. X... affirmait avoir été victime d'agissements de harcèlement moral commis en particulier par Mme C..., mettant régulièrement en cause ses compétences et son travail ; qu'en se bornant à relever que « les pièces versées aux débats laissent effectivement apparaître et notamment l'attestation de M. A... (
), président, laisse apparaître une réelle mésentente entre Mme C... (employée de la ville de Lille, l'un des financeurs) et M. N... X..., que le Conseil ne retiendra pas comme des faits avérés de harcèlement moral » (sic), sans se prononcer clairement sur les critiques et pressions répétées émanant de Mme C... qu'elle a considérées comme laissant supposer l'existence d'un harcèlement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes tendant à voir dire son licenciement nul, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse, et à voir condamner le centre social Saint-Maurice Pellevoisin devenu centre social Albert Jacquard à lui verser les sommes de 12 205,18 €, 1 220,51 €, 24 255,31 € et 156.724,56 € à titre, respectivement, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement est motivée par des griefs tenant au refus de communiquer aux organes de contrôle les documents nécessaires, de s'être accordé une rémunération exorbitante sans autorisation, d'avoir commis un faux en se désignant personnellement comme étant un animateur, de ne pas avoir respecté les normes d'accueil et d'encadrement des enfants, de ne pas avoir établi les documents nécessaires au bon fonctionnement de la structure, de ne pas avoir mis en oeuvre les tâches demandées ainsi qu'une mauvaise gestion du personnel ; que l'employeur produit un rapport de contrôle de la CAF initié en septembre 2011, pour lequel des documents ont été réclamés à M. X... qui a exprimé ses réticences à les transmettre, relevant de nombreux dysfonctionnements de l'association ; que ce rapport indique que les capacités d'accueil autorisées et les normes d'encadrement requises n'étaient pas respectées et que le directeur de la structure a déclaré être encadrant le mercredi, alors que ce n'était pas le cas ; qu'il relève que la structure avait accueilli des enfants de moins de 3 ans sans avoir l'agrément des services de la PMI et que la capacité d'accueil autorisée des enfants a été dépassée régulièrement, notamment à hauteur de 83 % des jours d'accueil périscolaire des 3-5 ans ; que cette absence de respect des normes d'encadrement est confirmée par Mme Q..., directrice d'accueil de loisir et périscolaire, qui a dénoncé en septembre 2011 auprès de diverses instances l'absence de respect des normes d'encadrement et de la capacité d'accueil, la falsification des dates de naissances des enfants de moins de trois ans pour leur permettre d'être accueillis ainsi que le manque de moyens mis à leur disposition ; qu'en ce qui concerne la gestion du personnel, le rapport mentionne que le registre du personnel n'était pas tenu sérieusement et que les salariés embauchés dans le cadre d'un CAE n'avaient pas bénéficié de formations pourtant nécessaires, ce qui a été dénoncé auprès de Pôle Emploi par trois salariés ; qu'ainsi, M. D... a, dans une lettre ouverte au conseil d'administration du 12 octobre 2011 expliqué ne pas avoir pu bénéficier de la formation prévue car il avait signalé des dysfonctionnements sur l'encadrement au directeur qui lui avait dire de choisir son clan et qu'en conséquence, son contrat n'a pas été renouvelé ; que trois salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir une indemnisation en absence de formation ; que Mme Q... a dénoncé à l'inspection du travail avoir fait l'objet de pressions ayant entraîné un état dépressif, la rendant inapte temporairement à son emploi et que l'inspection du travail a rappelé à l'employeur son obligation de sécurité de résultat ; que par ailleurs, si le rapport de la CAF relève que le directeur utilisait le véhicule Jumper du centre social à titre personnel, ce dont avait nécessairement connaissance son employeur, cet avantage en nature n'était pas mentionné sur son bulletin de salaire, le comptable ayant déclaré ne pas en avoir eu connaissance, et que des heures supplémentaires ont été accordées uniquement au directeur, à l'agent d'accueil, qui est sa soeur, et au secrétaire de direction, mais non au personnel à qui des missions de nettoyage ont été confiées en sus de leur missions contractuelles ; que M. X... a perçu la somme de 1.283 euros en juin 2011 au titre des heures supplémentaires ; qu'alors que M. A..., ancien président du CA, a écrit avoir pris conscience de son erreur en ayant soutenu M. X... au regard de sa négligence dans la gestion du centre social, il est ainsi démontré, sans qu'il n'y ait lieu d'examiner l'ensemble des griefs énoncés dans la lettre de licenciement, que M. X... a commis une multitude de manquements graves qui justifient la rupture immédiate de son contrat de travail ;

ET AUX MOTIFS adoptés QUE la CAF a réalisé un contrôle du centre social le 17 septembre 2009, au cours duquel elle a identifié des écarts ; que, dans le compte rendu du conseil d'administration du 12 octobre 2011 à l'ordre du jour duquel figurait le licenciement de M. X..., il est précisé que "lors des CA précédents, il a été demandé au directeur de réaliser : un budget pour prévoir la gestion, un retro planning notamment pour prévoir le renouvellement du centre social, un plan de trésorerie ; que le CA ne dispose pas à l'heure actuelle de ces réalisations ; qu'il est demandé à un employé d'y pourvoir" ; que l'employeur verse aux débats les mails de M. A..., président du Centre social, démontrant que nombreuses sont ses demandes qui restent sans réponse (élections des délégués du personnel, cahier d'infirmerie, budget à refaire, plan de formation du personnel, entretiens pour le changement de convention, compte rendu de conseil d'administration manque de signature du trésorier à la banque alors que celui-ci est en poste depuis plus d'un an, ...) pendant plusieurs mois (novembre 2010 jusqu'octobre 2011) ; que l'ordre du jour du 16 décembre 2010 décide de la mise en place de la nouvelle convention collective trois mois plus tard soit le 16 mars 2011, mais que les mails de juillet 2011 versés aux débats démontrent que celle-ci n'est toujours pas appliquée à cette date ; que l'attestation de Mme O... P... fait état de manquements graves de la part de M. X... : « présence trop importante d'enfants au regard des dispositions de l'agrément, salariées récemment embauchées par M. X... et reconnues inaptes par épuisement, dénigrement de certains salariés, oubli d'une petite fille à l'accueil du centre de loisirs, rappel à l'ordre de l'inspection du travail sur des manquements à l'obligation de sécurité sur une salariée, heures supplémentaires non régularisées et absence de remboursement des frais de transport » ; que les faits reprochés sont avérés et d'une nature telle que le licenciement pour faute grave est justifié ;

1) ALORS QU'aucun fait fautif ne peut donner lieu, à lui seul, à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; que l'appelant invoquait l'ancienneté des faits qui lui étaient reprochés, en soutenant que certains remontaient à plusieurs années (conclusions, p. 22), que d'autres étaient connus de l'employeur depuis plus de trois mois avant l'engagement des poursuites disciplinaires (p. 25), que les divers retards lui avaient déjà été reprochés plus de deux mois avant l'ouverture de la procédure disciplinaire et que l'employeur ne pouvait engager une procédure disciplinaire plus de deux mois après la connaissance des faits (p. 26) ; qu'en omettant de vérifier, comme elle y était invitée, si les faits sanctionnés par le licenciement contesté n'étaient pas prescrits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-4 du code du travail ;

2) ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que selon les constatations de l'arrêt, la lettre de licenciement adressée à M. X... énonçait uniquement, sur la question des heures supplémentaires : « vous devriez, selon les usages, percevoir un salaire mensuel d'environ 2 500 euros. Or vos fiches de paye font apparaître un salaire bien plus élevé en vous accordant, de vous-même, des heures supplémentaires non réalisées ni justifiées » (p. 3 dernier §) ; qu'en retenant, comme circonstance justifiant un licenciement pour faute grave, que des heures supplémentaires avaient été accordées à l'agent d'accueil, soeur de M. X..., et au secrétaire de rédaction mais ne l'avaient pas été au personnel effectuant des tâches de nettoyage en sus de ses missions contractuelles, la cour d'appel, qui a ainsi dépassé les limites du litige fixées par la lettre de licenciement, a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

3) ALORS QUE la lettre de licenciement reprochait à M. X... de s'être octroyé le paiement d'heures supplémentaires non réalisées ni justifiées (p. 3 dernier §) ; qu'en retenant que M. X... avait perçu 1 283 € en juin 2011 au titre des heures supplémentaires, sans rechercher si ces heures supplémentaires payées à M. X... avaient ou non été effectivement réalisées et si elles étaient ou non justifiées par l'ampleur des tâches qu'il devait effectuer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1235-3 du code du travail.

4) ALORS QUE la lettre de licenciement reprochait à M. X... d'avoir commis un faux en écriture en se désignant comme animateur durant les petites vacances, les mercredis et lors des activités périscolaires, alors que telle n'était pas sa fonction et qu'il n'était pas présent (p. 3, § 5) ; que la cour d'appel a uniquement relevé, sur ce point, qu'était produit un rapport de la CAF indiquant que le directeur de la structure avait déclaré être encadrant le mercredi alors que ce n'était pas le cas (p. 7, dernier §) ; que la cour d'appel n'a donc ni constaté l'existence d'un mensonge écrit, ni relevé de déclaration erronée concernant les vacances et les activités périscolaires ; qu'en décidant néanmoins que le centre social établissait l'existence du manquement grave invoqué pour prononcer la rupture immédiate du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1235-3 du code du travail ;

5) ALORS QUE le juge ne peut déclarer justifié un licenciement pour faute grave sans avoir examiné l'ensemble des principaux griefs énoncés par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; que la lettre de licenciement invoquait des faits justifiant à eux seuls, selon le centre social, le licenciement pour faute grave de M. X..., et en premier lieu, le fait de s'être accordé une rémunération exorbitante sans l'accord du conseil d'administration (p. 3, § 2 et 3 ; p. 7 avant-dernier §) ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes sans se prononcer sur la réalité et la gravité de ce grief déterminant de la décision de l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1235-3 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de convocation à l'entretien préalable adressée à M. X... est conforme à l'article 4.4.1 de la convention collective applicable précisant qu'il peut se faire représenter par un salarié de l'entreprise ; que Mme W..., secrétaire du conseil d'administration ayant assisté l'employeur lors de l'entretien préalable, est bien salariée du centre social comme figurant sur le registre du personnel, contrairement aux allégations de M. X... ;

1) ALORS QUE l'employeur ne contestait pas que la procédure de licenciement ait été irrégulière puisqu'il ne se prononçait, à aucun moment, sur l'irrégularité invoquée par l'appelant ; qu'en soulevant elle-même des moyens de défense pour justifier de la régularité de la procédure de licenciement et notamment celui tiré de ce que Mme W... faisait bien partie du personnel de l'entreprise, la cour d'appel, qui n'a pas invité les parties à s'expliquer sur ce point, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2) ALORS, en toute hypothèse, d'une part QUE le juge ne peut fonder son appréciation que sur des pièces régulièrement versées aux débats ; qu'en relevant que Mme W... ayant assisté l'employeur lors de l'entretien préalable était bien employée du centre social comme figurant sur le registre du personnel, quand le registre du personnel ne figurait dans aucune des listes de pièces communiquées jointes aux conclusions des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°) ALORS d'autre part QUE le salarié soutenait que la procédure était irrégulière en ce que l'article 4 de la convention collective de l'animation prévoit que dans les entreprises où il n'y a ni représentant du personnel élu ni délégué syndical, le salarié peut se faire assister lors de l'entretien « par une personne de la profession appartenant à une entreprise dont l'activité est visée dans le champ d'application de la présente convention » et que cette faculté n'était pas mentionnée dans la lettre de convocation ; qu'en se bornant à relever que la lettre de convocation mentionnait que M. X... pouvait se faire assister par un membre du personnel, sans examiner si, comme le soutenait le salarié, la lettre n'aurait pas dû indiquer qu'il pouvait également se faire assister par toute personne appartenant à une entreprise entrant dans le champ d'application de la convention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4.4 de la convention collective de l'animation.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-14524
Date de la décision : 30/09/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 31 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 sep. 2020, pourvoi n°19-14524


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Colin-Stoclet, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.14524
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