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30/09/2020 | FRANCE | N°19-12146

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 septembre 2020, 19-12146


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 848 F-D

Pourvoi n° V 19-12.146

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

M. B... P..., domicilié [...] , a

formé le pourvoi n° V 19-12.146 contre l'arrêt rendu le 12 décembre 2018 par la cour d'appel de Montpellier (4e chambre B, chambre sociale), dan...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 848 F-D

Pourvoi n° V 19-12.146

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

M. B... P..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° V 19-12.146 contre l'arrêt rendu le 12 décembre 2018 par la cour d'appel de Montpellier (4e chambre B, chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Croc frais, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , venant aux droits de Mille et un Sud, défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. P..., de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Croc frais, après débats en l'audience publique du 15 juillet 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 12 décembre 2018), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 2 février 2017, pourvoi n° 15-21.846), M. P... a été engagé par la société Aromatt, aux droits de laquelle se trouve la société Croc frais (la société), en qualité de responsable logistique, sur le site des Angles. Il a été élu délégué du personnel titulaire à compter de décembre 2004. Par courrier du 25 septembre 2009, l'employeur a informé le salarié, ainsi que les quinze autres membres du personnel, du transfert des emplois dans les locaux de la société Croc frais, société soeur, à Mignières en Eure-et-Loir à compter du 1er janvier 2010 et lui a demandé, s'agissant d'une modification du contrat de travail, d'exprimer son accord préalable dans le délai d'un mois. Par lettre du 20 octobre 2009, le salarié a refusé la modification de son contrat de travail, comme treize autres salariés, précisant que ce poste de travail était à 700 kilomètres de son domicile. Il a été licencié pour motif économique le 28 décembre 2009, après décision d'autorisation de l'inspecteur du travail du 22 décembre 2009. Par décision du 23 juin 2010, le ministre du travail a, sur recours hiérarchique, annulé la décision de l'inspecteur du travail et refusé l'autorisation de licenciement. Par arrêt du 25 juin 2013, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif du 24 novembre 2011 qui avait rejeté le recours de la société, ainsi que la décision du ministre du travail du 23 juin 2010.

2. Le salarié a saisi, le 9 novembre 2011, la juridiction prud'homale de diverses demandes.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à dire le licenciement prononcé par la société sans cause réelle et sérieuse et par conséquent de la demande de condamnation de la société à lui verser des dommages-intérêts à ce titre, alors « que l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement par l'autorité hiérarchique ne laisse rien subsister de celle-ci, peu important l'annulation ultérieure par la juridiction administrative de la décision de l'autorité hiérarchique ; qu'en l'absence de confirmation par l'employeur de la demande d'autorisation administrative du licenciement du salarié protégé, il appartient au juge judiciaire de statuer sur la demande du salarié tendant à contester le caractère réel et sérieux de son licenciement ; que l'absence de confirmation par l'employeur de cette demande d'autorisation prive le licenciement de toute cause réelle et sérieuse ; qu'en jugeant le licenciement justifié, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si l'absence de confirmation par l'employeur de la demande d'autorisation administrative du licenciement ne privait pas ce licenciement de toute cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 2411-5 et L. 1235-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

4. L'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement ne résulte pas, en soi, de l'annulation de l'autorisation de licenciement ni de l'absence de confirmation par l'employeur de sa demande d'autorisation.

5. Il en résulte que la cour d'appel, qui a constaté que l'autorisation administrative de licenciement pour motif économique du salarié a été annulée par décision du ministre du travail, en a exactement déduit qu'il lui appartenait de se prononcer sur l'existence d'une cause réelle et sérieuse au licenciement.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen, pris en sa cinquième branche

Enoncé du moyen

7. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à dire le licenciement prononcé par la société sans cause réelle et sérieuse et par conséquent de la demande de condamnation de la société à lui verser des dommages-intérêts à ce titre, alors « que l'employeur est tenu avant tout licenciement économique, d'une part, de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettant d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, d'autre part, de proposer ensuite aux salariés dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d'une catégorie inférieure ; qu'il ne peut limiter ses recherches de reclassement et ses offres en fonction de la volonté présumée du salarié, exprimée à l'occasion du refus d'un poste proposé par l'employeur dans le cadre d'une proposition de modification du contrat de travail ; qu'en jugeant qu'il ne peut être reproché à l'employeur de ne pas lui avoir proposé le poste situé dans le département de l'Eure-et-Loire qu'il avait refusé, cependant qu'il s'agissait du poste qu'il avait refusé à l'occasion de la proposition par l'employeur de la modification de son contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1233-4 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2010-499 du 18 mai 2010 :

8. En application de ce texte, l'employeur est tenu avant tout licenciement économique, de proposer aux salariés dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d'une catégorie inférieure.

9. Pour dire que l'employeur a rempli son obligation de recherches loyales et sérieuses aux fins de reclasser le salarié, l'arrêt retient que, contrairement à ce que soutient le salarié, il ne peut être reproché à l'employeur de ne pas lui avoir proposé le poste sur le site du département de l'Eure-et-Loir alors qu'il avait refusé cette offre de façon circonstanciée en indiquant en substance que ce poste était trop éloigné géographiquement de son domicile.

10. En statuant ainsi, alors que la proposition d'une modification du contrat de travail pour motif économique refusée par le salarié ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement et par suite de lui proposer éventuellement le même poste dans l'exécution de cette obligation, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième, troisième, quatrième et sixième branches du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande en paiement de dommages-intérêts de M. P... au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse au licenciement du 28 décembre 2009, l'arrêt rendu le 12 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Croc frais aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Croc frais et la condamne à payer à M. P... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. P...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur B... P... de sa demande tendant à voir dire le licenciement prononcé par la société SAS Croc'Frais sans cause réelle et sérieuse et par conséquent de sa demande que la société soit condamnée à lui verser des dommages et intérêts à ce titre ;

AUX MOTIFS QUE Sur le licenciement ; l'article L. 2411-5 du code du travail dans sa rédaction applicable dispose que le licenciement d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ; qu'en l'espèce, l'autorisation administrative de licenciement pour motif économique de M. B... P... a été annulée par décision du ministre du travail, elle-même annulée ultérieurement et la SAS Aromatt n'a déposé aucune nouvelle demande d'autorisation de licenciement, de sorte que le salarié, délégué du personnel, a été licencié par lettre du 28 décembre 2009 sans autorisation administrative ; qu'en conséquence, il y aura lieu de constater que son licenciement pour motif économique est nul ; qu'aucune demande tendant à l'indemnisation prévue par l'article L. 2422-4 du code du travail n'est présentée ; qu'en cas d'annulation définitive d'une autorisation administrative de licenciement, les effets de la décision administrative étant anéantis, le juge du contrat de travail retrouve pleine compétence pour accorder des dommages et intérêts en fonction du préjudice subi du fait de la nullité du licenciement et pour apprécier la cause réelle et sérieuse du licenciement ; Qu'en premier lieu l'article 1233-3 alinéa 1 du code du travail dans sa rédaction applicable, dispose que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectuée par un employeur pour ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emplois ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques des mutations technologiques ; que par ailleurs, le licenciement pour motif économique peut aussi être décidé lorsqu'il est nécessaire de réorganiser l'entreprise pour sauvegarder sa pérennité et sa compétitivité ; l'article L. 1226-26 du même code, dans sa rédaction applicable, dispose que lorsque l'employeur envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3, il en fait la proposition aux salariés par lettre recommandée avec avis de réception ; la lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus ; À défaut de réponse dans le délai d'un mois, le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée ; Qu'en l'espèce, il est constant que la SAS Aromatt a fait savoir à Monsieur B... P..., dans le respect des dernières dispositions ci-dessus rappelées, qu'elle avait décidé de procéder au transfert de l'unité de production situé aux angles dans le département de l'Eur-et-Loire où le groupe auquel elle appartenait disposait de locaux adaptés à sa production ; Que contrairement à ce que soutient le salarié, la lettre du 25 septembre 2009 proposant la modification du contrat de travail est clairement motivée par la nécessité de réorganiser l'entreprise en vue de la sauvegarde de la pérennité de l'entreprise ; ainsi il y ait mentionné notamment–la conformité des locaux six aux Angles, Loués, notamment des salles de préparation, aux normes de certification tel que l'IFS désormais applicables en raison de l'élargissement de son activité aux marques de distributeurs et aux produits premiers prix, –la non-application des procédures de sécurisation et de fermeture de site,–La non-traçabilité des produits du fait du recours nécessaire à un grossiste au motif que les locaux ne permettent pas de stocker, dessaler les olives sur place compte-tenu de la configuration des lieux (aire de stockage local de dessalage trop exigu) ; la non-conformité de l'environnement de production (effluents envoyés dans le réseau des zoos usagers de la ville sans convention et sans traitement des Saumur, ce qui expose « à des sanctions pouvant aller jusqu'à la fermeture définitive du site »), les mauvaises conditions de travail du fait de l'éclatement du site en trois parties, sa vétusté, son absence d'équipements propices au confort du personnel, –la non-conformité de la circulation des personnes à l'extérieur du site et de sa sécurisation, le bailleur ayant loué une partie des locaux a un magasin « bio ». Qu'il est précisé que cette situation pose des « problèmes de qualité » ce qui oblige la direction à « des efforts commerciaux importants » sans commune mesure avec le chiffre d'affaires réalisé. Le recours à un grossiste pour stocker ou dessaler les olives entraîne un surenchérissement du coût des matières premières, qui n'est pas compensé eu égard aux problèmes ci-dessus évoqués. La productivité s'en ressent également, à raison des cadences de livraison de ce grossiste inadaptées aux contraintes de livraison des clients » ; Que l'employeur précise enfin que malgré ses recherches, aucun site déjà prêt pour accueillir une activité de production agroalimentaire n'a été trouvé, et les quelques sites à équiper induiraient des « coûts prohibitifs » et des délais incompatibles avec la pérennité de l'entreprise, alors que le site de la société soeur « répond d'ores et déjà aux normes de certification exigées par les distributeurs et est conforme à la réglementation nationale en matière de sécurité notamment et de traçabilité alimentaire (
), offre aux collaborateurs de l'entreprise des conditions de travail sans commune mesure avec celle » du site actuel ; que, dès lors l'argumentation relative à l'absence de mentions de difficultés économiques ou l'absence de restructuration pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise sera écartée ; Que ensuite pour être valablement proposée aux salariés la modification doit être justifiée et sa cause doit être réelle et sérieuse. En l'espèce, l'employeur verse au débat les pièces suivantes : -un courrier du 16 octobre 2007 du service qualité produits frais du magasin Auchan adressé à Croc'frais relatif au compte-rendu de l'audit réalisé le 5 octobre 2007 au sein de la SAS Aromates, précisant que la conclusion de l'audit est favorable sous conditions de réalisation du plan d'action et sous réserve d'un nouvel audit réalisé six mois plus tard, –le compte-rendu d'audit de Auchan dont la synthèse globale mentionne que la totalité du plan d'action proposée lors de la précédente visite n'a pas été traitée intégralement au vu de la courte période entre les deux visites ; suis le plan d'action et son échéancier, –l'état des ventes comparatifs du 1er janvier au 30 juin 2007/2008 concernant les clients, dont Auchan, dont il résulte qu'une baisse de 23,40 % a été enregistrée, –L'état des ventes comparatif du 1er janvier au 30 juin 2008/2009 concernant les mêmes clients dont il résulte qu'une baisse des ventes est confirmée, soit 704 348 sur l'année 2008 contre 1 669, 154 pour l'année 2009, –Les plans du site, –Le contrat de bail commercial dans la commune des Angles et son renouvellement amiable du 6 juin 2003, la convention d'occupation précaire pour 2006–2007 d'un local en rez-de-chaussée dans la commune des angles, –un extrait du POS des Angles sur la zone d'activités économiques mentionnant notamment les conditions d'occupation du sol, avec obligation d'évacuer les eaux usées après traitement,–les documents comptables relatifs aux années 2007, 2008, 2009 qui montrent un résultat d'exploitation négatif au 31 décembre 2009 et une perte de 149 484 € ; Que par la production de ces éléments la SMS aromates établi la nécessité d'une réorganisation pour sauvegarder la pérennité de l'entreprise et justifie la proposition de modification du contrat de travail de M. B... P... ; Que en second lieu, l'article 1233-4 du code du travail dans sa rédaction applicable, prévoit que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise où les entreprises du groupe dont l'entreprise appartient. Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qui occupe ou sur un emploi équivalent assortis d'une rémunération équivalente. À défaut, et sous réserve de l'accord express du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées aux salariés sont écrites et précises ; qu'il résulte de ces dispositions que le refus d'une modification du contrat de travail par le salarié ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement et que les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l'intérieur du groupe parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en l'espèce, pour établir que la S.A.S. Aromatt a recherché de façon loyale et sérieuse à reclasser Monsieur B... P..., l'employeur verse au débat –L'organigramme du groupe auquel la société appartient, dont il résulte que le groupe est composé de la S A.S. Olive et Co à laquelle appartiennent la S A.S. Aromatt, la SAS Croc' Frais, la SA SNARG et la SA MHPP, –Les registres d'entrée est de sortie du personnel des quatre sociétés du groupe (Croc' Frais anciennement dénommée la SAS Aromatt, MHPP, SNARG et Olives et Co) ; –le contrat de travail de Monsieur L... K... avec olive et Co, –le courrier adressé à Monsieur B... P... lui proposant deux postes, l'un à Frontignan au sein de la société MHBP, l'autre à Nîmes au sein de la société Raymond Geoffroy et son courrier de refus. Que tout d'abord, contrairement à ce que soutient le salarié, il ne peut être reproché à l'employeur de ne pas lui avoir proposé le poste sur le site du département de l'Eure-et-Loire alors qu'il avait refusé cette offre de façon circonstanciée en indiquant en substance que ce poste était trop éloigné géographiquement de son domicile. Ensuite, l'employeur démontre par la production des registres susvisés qu'il n'y avait pas de postes à pourvoir dans les autres sociétés du groupe susceptible d'être proposé à Monsieur B... P... au moment de son licenciement à l'exception de deux postes offerts, lesquels prenaient en compte le fait que l'éloignement géographique était refusé par le salarié. D'ailleurs, celui-ci ne revendique aucun autre qu'il aurait su être libre à la date de son licenciement. Enfin, certes la société a engagé un intérimaire au service comptabilité le 4 janvier 2010, mais cette date est postérieure au licenciement de Monsieur B... P... et, surtout, le poste n'apparaît pas être de la même catégorie que celui qu'il occupait ou équivalent assorti d'une rémunération équivalente. Dès lors, il résulte de l'ensemble de ses éléments que l'employeur a rempli son obligation de recherches loyales et sérieuses aux fins de reclasser Monsieur B... P.... La demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sera rejetée ;

ALORS en premier lieu QUE l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement par l'autorité hiérarchique ne laisse rien subsister de celle-ci, peu important l'annulation ultérieure par la juridiction administrative de la décision de l'autorité hiérarchique ; qu'en l'absence de confirmation par l'employeur de la demande d'autorisation administrative du licenciement du salarié protégé, il appartient au juge judiciaire de statuer sur la demande du salarié tendant à contester le caractère réel et sérieux de son licenciement ; que l'absence de confirmation par l'employeur de cette demande d'autorisation prive le licenciement de toute cause réelle et sérieuse ; qu'en jugeant le licenciement justifié, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si l'absence de confirmation par l'employeur de la demande d'autorisation administrative du licenciement ne privait pas ce licenciement de toute cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 2411-5 et L. 1235-3 du code du travail ;

ALORS en second lieu QUE l'existence d'une menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise est caractérisée dès lors que le marché sur lequel elle intervient s'est dégradé ou transformé et que cette dégradation est annonciatrice de difficultés économiques futures ; que la vétusté et la non-conformité des locaux aux exigences de sécurité et de qualité des produits ne constituent aucunement des motifs propres à établir une nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise dès lors qu'ils sont la résultante d'une politique de gestion de l'entreprise et ne proviennent pas d'une dégradation ou transformation du marché ; que la cour d'appel a jugé que la lettre de licenciement faisait état d'une nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise au motif d'une non-conformité de l'environnement de production, de la vétusté des locaux, de l'absence d'équipements propices au confort du personnel ; qu'en statuant ainsi elle a violé les articles L. 1233-3 et L. 1233-16 du code du travail ;

ALORS en troisième lieu QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige et que le juge ne peut examiner des motifs non invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que la lettre de licenciement faisait état d'une nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise au motif d'une non-conformité de l'environnement de production, de la vétusté des locaux, de l'absence d'équipements propices au confort du personnel ; que la cour d'appel a jugé que le licenciement était justifié eu égard notamment à la baisse des ventes et au résultat d'exploitation négatif cependant que le juge ne pouvait pas analyser ces éléments, dès lors qu'il résultait de ses constatations qu'ils n'étaient pas invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'en statuant ainsi, elle n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses constatations et a violé les articles L. 1233-3 et L. 1233-16 du code du travail ;

ALORS en quatrième lieu QUE le licenciement pour motif économique peut être prononcé notamment s'il procède d'une réorganisation en vue de sauvegarder la compétitivité ; que le juge, pour en apprécier le caractère réel et sérieux, doit vérifier l'existence d'une menace pesant sur la survie de l'entreprise, la finalité de la réorganisation entreprise et le lien de causalité entre la mise en cause de l'emploi du salarié et la réorganisation invoquée ; que pour juger le licenciement pourvu d'une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel s'est bornée, après avoir rappelé que l'employeur versait différents documents tels le contrat de bail commercial, le POS, les plans du site, l'état des ventes comparatifs et les documents comptables, à affirmer que la SAS Aromatt établit la nécessité d'une réorganisation pour sauvegarder la pérennité de l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;

ALORS en cinquième lieu QUE l'employeur est tenu avant tout licenciement économique, d'une part, de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettant d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, d'autre part, de proposer ensuite aux salariés dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d'une catégorie inférieure ; qu'il ne peut limiter ses recherches de reclassement et ses offres en fonction de la volonté présumée du salarié, exprimée à l'occasion du refus d'un poste proposé par l'employeur dans le cadre d'une proposition de modification du contrat de travail ; qu'en jugeant qu'il ne peut être reproché à l'employeur de ne pas lui avoir proposé le poste situé dans le département de l'Eure-et-Loire qu'il avait refusé, cependant qu'il s'agissait du poste qu'il avait refusé à l'occasion de la proposition par l'employeur de la modification de son contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;

ALORS en sixième lieu QUE la charge de la preuve de l'impossibilité du reclassement pèse sur l'employeur ; qu'il appartient dès lors aux juges de fond de rechercher si l'employeur a effectivement satisfait à son obligation probatoire, en vérifiant qu'il a bien effectué des recherches infructueuses de reclassement ou qu'il a bien justifié de l'absence de postes de reclassement ; qu'en affirmant que le salarié ne faisait pas valoir un autre poste qu'il aurait su libre à la date de son licenciement, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et, partant, a violé l'article L. 1233-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-12146
Date de la décision : 30/09/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 12 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 sep. 2020, pourvoi n°19-12146


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12146
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