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30/09/2020 | FRANCE | N°18-22076

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 septembre 2020, 18-22076


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 490 F-P+B

Pourvoi n° T 18-22.076

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

Mme H... Y..., veuve K... , dom

iciliée [...] , a formé le pourvoi n° T 18-22.076 contre l'arrêt rendu le 19 février 2018 par la cour d'appel de Basse-Terre (2e chambre civil...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 490 F-P+B

Pourvoi n° T 18-22.076

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

Mme H... Y..., veuve K... , domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° T 18-22.076 contre l'arrêt rendu le 19 février 2018 par la cour d'appel de Basse-Terre (2e chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. T... Y..., domicilié [...] ,

2°/ à M. O... Y..., domicilié [...] ,

3°/ à M. E... Y..., domicilié [...] ,

4°/ à Mme U... Y..., domiciliée [...] ,

5°/ à la société Caraïbe agricole, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

6°/ à la société [...] , société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

7°/ à Mme S... G..., épouse I..., domiciliée [...] ,

8°/ à Mme Q... G..., épouse V..., domiciliée [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de Mme H... Y... veuve K... , de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de MM. T..., O... et E... Y..., de Mme U... Y... et des sociétés Caraïbe agricole et [...] , et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 juin 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 19 février 2018), R... Y..., fondateur de la société [...] , entreprise de production et de commercialisation de rhum, et propriétaire du fonds de commerce de distribution de spiritueux à l'enseigne « [...] », est décédé le [...], laissant pour lui succéder ses enfants, N... Y..., M. E... Y... et Mme H... Y... épouse K... (Mme H... Y...).

2. Aux termes d'un protocole transactionnel des 13 et 20 octobre 2005, les héritiers ont, d'une part, réparti le solde des droits indivis des actions du défunt dans la société anonyme [...] entre M. E... Y... et N... Y... et, d'autre part, attribué le fonds de commerce [...] à M. E... Y... en pleine propriété, à charge pour lui d'en céder ou d'en apporter la propriété soit à la société [...] , soit à une société qui détiendrait les actions de cette société.

3. Le 6 juillet 2006, les actionnaires majoritaires de la société [...] , réunis en assemblée générale extraordinaire, en l'absence de N... Y..., ont approuvé l'apport du fonds de commerce [...] et décidé de l'augmentation du capital social par la création de 2 803 actions nouvelles attribuées à M. E... Y... en rémunération de l'apport.

4. N... Y... est décédée le [...], laissant pour lui succéder Mme H... Y..., Mme S... G... épouse I... (Mme I...) et Mme Q... G... épouse V... (Mme V...).

5. Estimant que cette opération d'apport et d'augmentation de capital, ce dernier ayant été sciemment sous-évalué, avait été réalisée dans des conditions fautives aboutissant à la dilution de ses droits d'associée, Mme H... Y... a assigné en responsabilité civile M. E... Y... et ses enfants, M. T... Y..., M. O... Y... et Mme U... Y... (les [...]), ainsi que les sociétés [...] et Caraïbe agricole. Mmes I... et V... sont intervenues volontairement à l'instance.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa cinquième branche, ci-après annexé

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en ses première et quatrième branches

Enoncé du moyen

7. Mme H... Y... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes alors :

« 1°/ que la fraude corrompt tout ; que la collusion frauduleuse des associés majoritaires au détriment des associés minoritaires peut être caractérisée quand bien même l'opération ayant donné son cadre à la fraude n'aurait pas porté atteinte à l'intérêt social ; qu'en retenant, pour écarter l'existence d'une fraude ayant consisté pour les [...] à sous-évaluer la société [...] , en lui conférant une valeur inférieure au seul capital social hors même son aptitude à réaliser des bénéfices, lors de l'opération d'apport par M. E... Y... du fonds de commerce de l'entreprise [...] de manière à octroyer à ce dernier un nombre d'actions plus important que celui qu'il aurait dû recevoir et à diluer corrélativement la représentation de N... Y... dans la société, qu'il n'était pas établi que la société n'aurait pas eu intérêt à cette opération d'apport, la cour d'appel s'est déterminée par un motif impropre à exclure l'existence d'une collusion frauduleuse des [...] au détriment de N... Y..., associée minoritaire, en méconnaissance du principe fraus A... corrumpit ;

2°/ que toute société doit être constituée dans l'intérêt commun des associés ; que l'intérêt commun des associés, qui est le même pour chaque associé et permet à chacun d'eux de retirer un bénéfice personnel à proportion du bénéfice collectif, est distinct de l'intérêt social ; qu'en retenant, pour conclure à "l'absence de comportement fautif clairement démontré" de M. E... Y... et de ses enfants, qu'il n'était pas démontré que "la décision d'approbation de l'opération a été prise contrairement à l'intérêt général de la société", sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'opération d'apport orchestrée par les [...] n'avait pas conduit, par une sous-évaluation de la société et un octroi d'actions nouvelles trop nombreuses à M. E... Y..., à priver illégitimement N... Y..., associée minoritaire, d'une partie de ses droits en diluant sa représentation au capital de la société [...] , ce qui était de nature à caractériser une violation de l'intérêt commun, indépendamment de l'intérêt social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1833 du code civil, ensemble l'article 1134 alinéa 3 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ; »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1382 du code civil et le principe selon lequel la fraude corrompt tout :

8. Aux termes de ce texte, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

9. Pour rejeter les demandes de Mme H... Y..., l'arrêt retient qu'elle n'établit pas que la société [...] ne pouvait tirer un avantage suffisant de la maîtrise du réseau de distribution par l'apport du fond de commerce [...], pour justifier l'avantage consenti à M. E... Y....

10. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure l'existence d'une collusion frauduleuse des [...] au détriment de N... Y..., associée minoritaire, de nature à engager leur responsabilité civile, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si l'opération d'apport orchestrée par les [...] n'avait pas conduit, par la sous-évaluation de la société et l'octroi corrélatif d'actions nouvelles nombreuses à M. E... Y..., à priver illégitimement N... Y..., associée minoritaire, d'une partie de ses droits en diluant sa participation au capital de la société [...] , a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que Mme H... Y... n'est pas prescrite en son action en responsabilité engagée contre la SARL Société Caraïbe agricole, la SARL Société [...] , MM. T..., O..., E... Y... et Mme U... Y..., l'arrêt rendu le 19 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;

Condamne MM. E..., T... et O... Y..., Mme U... Y... et les sociétés [...] et Caraïbe agricole aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par MM. E..., T... et O... Y..., Mme U... Y... et les sociétés [...] et Caraïbe agricole et les condamne à payer à Mme H... Y... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour Mme H... Y... veuve K... .

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a débouté Mme H... Y... veuve K... de ses demandes formées contre la SARL Société Caraïbe Agricole, de la SARL Société [...] , M. T... Y..., M. O... Y..., M. E... Y... et Mme U... Y... tendant à voir dire et juger qu'ils ont commis une faute de nature à engager leur responsabilité en minorant, lors de l'apport du fonds de commerce de l'entreprise [...] la valeur de la société [...] SA et que la faute lui a causé un préjudice, à voir désigner un expert en vue de déterminer le montant du préjudice, et, en tout état de cause, à les voir condamner dores et déjà solidairement à payer la somme de un euro à titre de provision à valoir sur l'indemnisation définitive ;

Aux motifs que « Mme H... K... et Mme V... en leur qualité d'héritières des actions détenues par feue Mme N... Y... dans le capital social de la société [...] , soutiennent que les intimés ont commis une faute de nature à engager leur responsabilité, en sous-évaluant sciemment la valeur de la société [...] SA retenue dans le cadre de l'apport du fonds de commerce de négoce de spiritueux [...] , ayant eu pour effet de diluer la représentation des associés minoritaires en les privant ainsi d'une partie des dividendes devant leur revenir ; que les héritiers de feu M. E... Y... ont convenu aux termes d'un acte authentique intitulé « partage transactionnel » reçu les 13 et 20 octobre 2005 par Maître P... M... notaire à Paris désigné par le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre dans le cadre des opérations de partage judiciaire, de mettre fin au litige les opposant ; que Mme H... K... est intervenue à cet acte tant en son nom personnel qu'en qualité de mandataire de sa soeur Mme N... Y... ; qu'il a été prévu que les évaluations données quant aux biens et actifs partageables composant les lots étaient « faites à titre forfaitaire, transactionnel et global » ; qu'il a été indiqué (article 8, p. 17 de l'acte authentique de partage) que le fonds de commerce de négoce de spiritueux dénommé « Héritiers E... Y... » attribué à M. E... Y... était évalué à la somme de 1.697.064 euros, tandis que les 11.000 actions comprises dans les 20.000 actions composant le capital social de la société [...] SA (article 9, p. 23 de l'acte) à partager entre M. E... Y... et Mme H... K... étaient évaluées à la somme de 6.661 215 euros, soit une valeur unitaire de 605,565 euros ; que Mme H... K... soutient à juste titre que l'apport en nature du fonds de commerce [...] par E... Y... à la société [...] SA en exécution des clauses et conditions définies au partage transactionnel, ne doivent pas prévaloir sur les règles légales particulières régissant les apports ; qu'elle fait valoir exactement que le commissaire aux apports désigné n'a pu apprécier sous sa responsabilité la valeur des actions (valeur d'échange) et par extension, celle de la société, alors que cette mission ne lui incombe pas aux termes mêmes de l'article L. 225-147 du code de commerce ; que cependant, Mme K... et Mme V... ne peuvent se borner à prétendre que M. E... Y... et ses enfants, administrateurs de la société [...] SA en ayant la maîtrise de l'intégralité de l'opération réalisée, ont sciemment oeuvré au détriment des intérêts de Mme N... Y..., par le biais d'une valorisation inférieure à la valeur réelle de la société ; que le contrôle de l'opportunité de l'opération à l'intérêt social revient à l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires à laquelle Mme N... Y... s'est abstenue de participer, de s'y faire représenter ou d'élever une quelconque opposition ; que la cour comme les premiers juges n'ont relevé aucun acte contraire à la bonne tenue de l'assemblée générale extraordinaire du 6 juillet 2006 ayant approuvé l'apport ; que, toutefois, l'appelante et Mme Q... V... prétendent à l'octroi injustifié à M. E... Y... de 2803 actions nouvelles dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des membres de la minorité ; que toutefois, le contrat d'apport ne peut être préjudiciable aux intérêts des associés minoritaires que s'il est démontré que la décision d'approbation de l'opération a été prise contrairement à l'intérêt général de la société ; qu'en l'espèce, l'appelante et Mme V... omettent d'établir que la société [...] SA ne pouvait tirer aucun avantage suffisant de maîtriser le réseau de distribution par l'apport du fonds de commerce [...], pour justifier l'avantage consenti à M. E... Y... ; que l'opération d'apport en nature a été approuvée à l'unanimité des membres présents ou représentés ; qu'il n'est pas davantage établi pour le calcul du quorum et de la majorité par la non-prise en compte des actions détenues par M. E... Y... en application de l'article L. 225-10 du code de commerce ait abouti à des changements significatifs dans la prise de décision des associés ; qu'enfin, la célérité que Mme K... et Mme Q... V... estiment utile de souligner dans la délivrance des convocations et l'accomplissement des formalités, ne traduit pas nécessairement une volonté d'évincer les associés minoritaires, dès lors que l'assiduité aux précédentes assemblées générales de Mme N... Y... ne transparaît d'aucun document ; qu'en l'absence de comportement fautif clairement démontré, de la part des intimés, il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions » (arrêt, p. 6-8) ;

1°) Alors que la fraude corrompt tout ; que la collusion frauduleuse des associés majoritaires au détriment des associés minoritaires peut être caractérisée quand bien même l'opération ayant donné son cadre à la fraude n'aurait pas porté atteinte à l'intérêt social ; qu'en retenant, pour écarter l'existence d'une fraude ayant consisté pour les [...] à sous-évaluer la société [...] SA, en lui conférant une valeur inférieure au seul capital social hors même son aptitude à réaliser des bénéfices, lors de l'opération d'apport par M. E... Y... du fonds de commerce de l'entreprise [...] de manière à octroyer à ce dernier un nombre d'actions plus important que celui qu'il aurait dû recevoir et à diluer corrélativement la représentation de Mme N... Y... dans la société, qu'il n'était pas établi que la société n'aurait pas eu intérêt à cette opération d'apport, la cour d'appel s'est déterminée par un motif impropre à exclure l'existence d'une collusion frauduleuse des [...] au détriment de Mme N... Y..., associée minoritaire, en méconnaissance du principe fraus A... corrumpit ;

2°) Alors que la fraude corrompt tout ; que pour écarter l'existence d'une collusion frauduleuse des [...], la cour d'appel a énoncé que l'opération d'apport avait été approuvée par l'assemblée générale extraordinaire du 6 juillet 2016, à laquelle Mme N... Y... s'était abstenue de participer, de se faire représenter ou d'élever une quelconque opposition, et qu'elle ne relevait aucun acte contraire à la bonne tenue de l'assemblée générale extraordinaire ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions p. 33), si M. E... Y..., en manquant à l'engagement contractuel qu'il avait pris dans l'acte de partage des 13-20 octobre 2005 d'instaurer un système de consultation écrite pour permettre à Mme N... Y... de participer aux décisions collectives, n'avait pas empêché Mme N... Y... de participer à l'assemblée générale du 6 juillet 2016, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus A... corrumpit ;

3°) Alors que la fraude corrompt tout ; que pour écarter l'existence d'une collusion frauduleuse des [...], la cour d'appel a énoncé que l'opération d'apport avait été approuvée par l'assemblée générale extraordinaire du 6 juillet 2016, à laquelle Mme N... Y... s'était abstenue de participer, de se faire représenter ou d'élever une quelconque opposition, et qu'elle ne relevait aucun acte contraire à la bonne tenue de l'assemblée générale extraordinaire ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions p. 33), si la convocation à l'assemblée générale extraordinaire du 6 juillet 2006 n'avait pas été envoyée à Mme N... Y... à une mauvaise adresse, soit au [...] dans le 16e arrondissement à Paris, et non au [...] , à Lourdes, lieu de son domicile, qui était également l'adresse mentionnée dans les statuts de la société [...] SA, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus A... corrumpit ;

4°) Alors que toute société doit être constituée dans l'intérêt commun des associés ; que l'intérêt commun des associés, qui est le même pour chaque associé et permet à chacun d'eux de retirer un bénéfice personnel à proportion du bénéfice collectif, est distinct de l'intérêt social ; qu'en retenant, pour conclure à « l'absence de comportement fautif clairement démontré » de M. E... Y... et de ses enfants, qu'il n'était pas démontré que « la décision d'approbation de l'opération a été prise contrairement à l'intérêt général de la société », sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions d'appel de l'exposante, p. 17- 38), si l'opération d'apport orchestrée par les [...] n'avait pas conduit, par une sous-évaluation de la société et un octroi d'actions nouvelles trop nombreuses à M. E... Y..., à priver illégitimement N... Y..., associée minoritaire, d'une partie de ses droits en diluant sa représentation au capital de la société [...] SA, ce qui était de nature à caractériser une violation de l'intérêt commun, indépendamment de l'intérêt social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1833 du code civil, ensemble l'article 1134 alinéa 3 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

5°) Alors que les dirigeants sont tenus d'un devoir de loyauté envers tous les associés ; qu'en l'espèce, en concluant à « l'absence de comportement fautif clairement démontré » des [...], sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions d'appel de l'exposante p. 38-40), si, en leurs qualités de dirigeants, ils n'avaient pas manqué à leur devoir de loyauté envers Mme N... Y... en lui dissimulant l'évaluation qui avait été faite de la société lors de l'opération d'apport, ainsi que sa valeur réelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu l'article 1240 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-22076
Date de la décision : 30/09/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

SOCIETE (règles générales) - Assemblée générale - Délibération - Fraude des associés majoritaires - Applications diverses - Augmentation de capital - Dilution de la participation au capital social

SOCIETE ANONYME - Assemblée générale - Décision - Fraude - Fraude des associés majoritaires - Applications diverses

La justification d'une délibération sociale approuvant l'apport d'un fonds de commerce, par un associé, qui confère à la société la maîtrise d'un réseau de distribution, ne suffit pas à exclure une fraude des associés majoritaires de nature à engager leur responsabilité civile à l'égard d'un associé minoritaire. La cour d'appel devait donc rechercher, comme elle y était invitée, si l'opération d'apport orchestrée par des associés majoritaires n'avait pas conduit, par la sous-évaluation de la société et l'octroi corrélatif d'actions nouvelles nombreuses à l'un d'entre eux, à priver illégitimement une associée minoritaire d'une partie de ses droits en diluant sa participation au capital de la société


Références :

article 1382 du code civil.

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 19 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 sep. 2020, pourvoi n°18-22076, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.22076
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