LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
CM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 23 septembre 2020
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 627 F-D
Pourvoi n° P 19-20.282
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 SEPTEMBRE 2020
1°/ M. X... I...,
2°/ Mme Y... C..., épouse I...,
tous deux domiciliés [...] ,
3°/ M. M... I..., domicilié [...] ,
4°/ M. A... I..., domicilié [...] ,
tous quatre agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentant de l'Indivision I...,
ont formé le pourvoi n° P 19-20.282 contre l'arrêt rendu le 20 mai 2019 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à la société SMABTP, dont le siège est [...] , pris en qualité d'assureur de la société Domitech,
2°/ à M. L... R..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Domitech,
3°/ à la société Domitech, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les neuf moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Boulloche, avocat des consorts I..., et après débats en l'audience publique du 23 juin 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à MM. X... I..., M... I..., A... I... et à Mme Y... C... épouse I... (les consorts I...) du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. R..., pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Domitech, et la société Domitech.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 20 mai 2019), à l'occasion de la construction d'un immeuble à usage d'habitation, les consorts I... ont confié le lot "menuiseries intérieures" à la société Domitech, désormais en liquidation judiciaire, assurée auprès de la SMABTP.
3. Se plaignant de désordres et de malfaçons affectant les menuiseries, les consorts I... ont, après expertise, assigné en réparation le liquidateur judiciaire de la société Domitech et la SMABTP.
Examen des moyens
Sur les deuxième, troisième, quatrième et huitième moyens, ci-après annexés
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
5. Les consorts I... font grief à l'arrêt de dire que les travaux ont été tacitement réceptionnés le 1er juillet 2011, alors « que le juge a l'obligation de ne pas méconnaître les termes du litige ; que dans ses conclusions d'appel la SMABTP, assureur de la société Domitech, seul assureur partie au litige, a conclu que la réception de l'ouvrage devait être fixée au 10 août 2010, jour de la signature du procès-verbal de réception au contradictoire des parties ; que pour refuser de prendre cette date en considération, la cour a retenu que l'assureur d'une des parties contestait à juste titre que ce procès-verbal puisse valoir réception ; qu'en statuant ainsi, la cour a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 4 du code de procédure civile :
6. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
7. Pour écarter le procès-verbal de réception du 10 août 2010 et fixer une date de réception tacite au 1er juillet 2011, l'arrêt retient que l'assureur d'une des parties conteste à juste titre que ce procès-verbal puisse valoir réception.
8. En statuant ainsi, alors que dans ses conclusions d'appel, la SMABTP, seul assureur partie à l'instance, se prévalait d'une réception au 10 août 2010, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.
Sur le cinquième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
9. Les consorts I... font grief à l'arrêt de limiter la condamnation à réparation de la SMBATP à la somme de 16 882 euros, alors « que la garantie décennale peut être mise en jeu lorsque les désordres rendent l'immeuble impropre à sa destination, laquelle est appréciée en fonction de la destination convenue de l'ouvrage ; que pour écarter en l'espèce la garantie décennale pour les désordres d'isolation phonique assurée par les portes, la cour a retenu que n'empêchant pas l'ouverture des portes, ils ne rendaient pas l'immeuble impropre à sa destination ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si le défaut affectant ces portes, empêchant l'isolation phonique qu'elles étaient censées assurer contractuellement, n'était pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination convenue, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l‘article 1792-2 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1792 et 1792-2 du code civil :
10. En application de ces textes, les désordres affectant un élément d'équipement, dissociable ou non, relèvent de la garantie décennale lorsqu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination.
11. Pour rejeter la demande en réparation présentée par les maîtres de l'ouvrage sur le fondement de la responsabilité décennale au titre de l'insuffisance de l'isolation phonique résultant du défaut de montage des portes, l'arrêt retient que ce défaut, qui n'empêche pas l'ouverture des portes, ne rend pas l'immeuble impropre à sa destination et ne relève donc pas de la garantie décennale des constructeurs.
12. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'insuffisante isolation phonique qui résultait du défaut de montage des portes ne rendait pas, en elle-même, l'immeuble impropre à sa destination, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Sur le sixième moyen
Enoncé du moyen
13. Les consorts I... font le même grief à l'arrêt, alors « que dans leurs conclusions d'appel, les consorts I... se sont référés au rapport d'expertise judiciaire de M. E... qui a retenu que les désordres affectant le joint du portail relevaient d'un défaut de fabrication du portail imputable à la société Domitech ; qu'en estimant que les désordres affectant le joint du portail ne relevaient pas de la garantie contractuelle de droit commun, car la preuve d'une faute imputable à la société Domitech dans la mise en oeuvre n'était pas rapportée, sans répondre aux conclusions d'appel des exposants fondées sur le rapport d'expertise, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
14. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse à conclusions constitue le défaut de motifs.
15. Pour rejeter la demande présentée par les consorts I... sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun de l'entreprise au titre du désordre affectant le joint du portail, l'arrêt retient que rien ne démontre que la dégradation du joint entre le panneau du portail et sa traverse intermédiaire soit due à une faute lors de sa mise en oeuvre.
16. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des consorts I..., qui soutenaient que le désordre résultait d'un défaut de fabrication du portail imputable à l'entreprise, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Sur le septième moyen
Enoncé du moyen
17. Les consorts I... font le même grief à l'arrêt, alors « que dans leurs conclusions d'appel, les consorts I... se sont référés au rapport d'expertise judiciaire de M. E... qui a admis que les barres de seuil étaient en revêtement stratifié ne convenant pas à leur destination (piétinement) et subissaient une usure prématurée à l'aplomb du trafic, ce qui caractérisait une impropriété à sa destination ; qu'en estimant que les désordres affectant les barres de seuil ne relevaient pas de la garantie contractuelle de droit commun car ils présentaient un défaut de teinte, ce qui constituait un vice apparent lors de la réception, sans répondre à aux conclusions d'appel des exposants faisant état d'une usure prématurée de ces barres de seuil, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
18. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif.
19. Pour rejeter la demande des consorts I... au titre des désordres affectant les barres de seuil, l'arrêt retient que celles-ci présentent un défaut de teinte, apparent à la réception, qui n'a pas fait l'objet de réserves.
20. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des consorts I... qui soutenaient également que les barres de seuil présentaient, à l'usage, un phénomène d'usure prématurée à l'aplomb du trafic, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Et sur le neuvième moyen
Enoncé du moyen
21. Les consorts I... font le même grief à l'arrêt, alors « que le juge ne peut relever un moyen d'office sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations sur son bien-fondé ; qu'en l'espèce, pour écarter la garantie de la SMABTP sur le terrain de la responsabilité de droit commun de son assurée au titre du désordre affectant les stores occultants, la cour d'appel a retenu que ce désordre avait été dénoncé dans l'année de parfait achèvement et que la SMABTP avait exclu sa garantie au titre du parfait achèvement ; qu'en soulevant d'office ce moyen tiré de la dénonciation du désordre dans l'année de parfait achèvement, quand cet élément n'était invoqué ni par l'expert judiciaire, ni par la SMABTP, et ne ressortait d'aucun élément du dossier, sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
22. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
23. Pour rejeter la demande dirigée contre l'assureur au titre du désordre ayant affecté les stores occultants, l'arrêt retient que le désordre ayant été dénoncé dans l'année de parfait achèvement, il entrait dans le champ de l'exclusion de la garantie opposée par l'assureur.
24. En statuant ainsi, en relevant d'office le moyen tiré d'une dénonciation du désordre durant l'année de parfait achèvement, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que les travaux en litige ont été tacitement réceptionnés le 1er juillet 2011, en ce qu'il déboute les consorts I... de leurs demandes indemnitaires au titre du défaut de l'isolation phonique et des désordres affectant le joint du portail, les barres de seuil et les stores occultants et en ce qu'il limite la condamnation à réparation de la SMABTP à la somme de 16 882 euros, outre la TVA au taux applicable, indexée sur l'évolution de l'indice BT01 depuis le 12 mai 2015, augmentée de 8 % au titre des honoraires de maîtrise d'oeuvre, l'arrêt rendu le 20 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la SMABTP aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour les consorts I...
Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que les travaux avaient été tacitement réceptionnés le 1er juillet 2011,
Aux motifs que « l'expert :
- fait état d'une réception du 10 août 2010 mais le document écrit portant cette date n'est signé que par la société DOMITECH, ce qui a été relevé par le juge des référés qui a institué l'expertise par ordonnance du 19 juin 2012,
- confirme que la prise de possession est intervenue le 1er juillet 2011,
- et énumère les désordres invoqués dénoncés dans l'année qui a suivi la prise de possession (non la réception).
Dans leurs écritures, tant la SMABTP que l'indivision I... déclarent vouloir prendre cette date comme date de réception. L'indivision demande ainsi que le point de départ des intérêts moratoires soit fixé à cette date alors que la SMABTP dénie sa garantie en se prévalant de ce que certains des désordres n'ont pas été réparés dans l'année de parfait achèvement à compter de cette date.
Cependant la réception est un acte unique ; en l'espèce l'acte du 10 août 2010 ne peut pas être considéré comme étant un acte de réception pour n'avoir été signé que par l'une des parties au procès ; l'assureur de l'une d'elle conteste à juste titre qu'il puisse valoir réception. Cet écrit ne peut valoir que comme fait juridique décrivant l'état d'avancement des travaux à sa date ; il ne vaut pas comme acte juridique » (arrêt p. 7 et 8) ;
1/ Alors que la réception, acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve, doit être prononcée contradictoirement, mais n'est soumise à aucun formalisme ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la SMABTP, assureur de la société Domitech, et les consorts I... étaient d'accord pour fixer la date de réception de l'ouvrage au 10 août 2010, jour de l'établissement d'un procès-verbal de réception au contradictoire de la société Domitech et des membres de l'indivision I... ; qu'en décidant cependant que la date du 10 août 2010 ne pouvait être retenue comme date de réception car le procès-verbal établi à cette date ne portait que la signature de la société Domitech, la cour d'appel a soumis la réception de l'ouvrage à une condition non requise et a violé l'article 1792-6 du code civil ;
2/ Alors que le juge a l'obligation de ne pas méconnaître les termes du litige ; que dans ses conclusions d'appel (p.5 al.5 et 13, p. 6 al.10) la SMABTP, assureur de la société Domitech, seul assureur partie au litige, a conclu que la réception de l'ouvrage devait être fixée au 10 août 2010, jour de la signature du PV de réception au contradictoire des parties ; que pour refuser de prendre cette date en considération, la cour a retenu que l'assureur d'une des parties contestait à juste titre que ce procès-verbal puisse valoir réception ; qu'en statuant ainsi, la cour a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile.
Le deuxième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli partiellement l'action directe des membres de l'indivision I... à l'encontre de la SMABTP et condamné celle-ci à payer la seule somme de 16 882 euros H.T ;
Aux motifs que, sur le désordre concernant la pose du parquet « L'indivision I... fonde son action en responsabilité et réparation de ce poste de préjudice exclusivement sur la garantie décennale des constructeurs qui suppose l'existence d'un vice caché à la date de la réception qui rend l'immeuble impropre à sa destination.
La réception du parquet est intervenue lors de la prise de possession en juillet 2011.
Aucune réserve n'a été faite ni avant ni à ce moment là ; l'expert précise que le défaut était encore caché lors de la prise de possession du 1er juillet 2011 ; il a été dénoncé dans l'année qui a suivie.
Le parquet posé est en bois tropical massif collé sur une chape enrobant le plancher chauffant, le support avait été accepté en mai 2010 par l'entreprise Domitech ; le tuilage est dû à une reprise d'humidité apparue qui est révélatrice d'un défaut généralisé d'exécution de la pose du parquet sur le sol prévu pour le plancher chauffant. Il dépasse les tolérances du DTU en état supérieur à 5 millimètres.
S'il exige la réfection complète du sol en s'assurant d'une déshumidification du support, le désordre ne relève pas de la garantie décennale des constructeurs car la preuve n'est pas rapportée en l'espèce, que l'immeuble est rendu impropre à sa destination par l'apparition de ce désordre ; il n'est relevé aucune impossibilité d'utilisation ni aucun danger pour les occupants. Le fait que le parquet puisse être partiellement solidaire de l'escalier dont la teinte est proche ne transforme pas la responsabilité encourue en responsabilité décennale car l'impropriété de l'immeuble à sa destination n'est toujours pas déterminée.
La demande fondée sur la garantie décennale des constructeurs sera donc rejetée » (arrêt p.9, désordre n°1) ;
1/ Alors que, engage la responsabilité décennale du constructeur le dommage qui rend l'immeuble impropre à sa destination ; que dans leurs conclusions d'appel, les consorts I... s'étaient référés au rapport d'expertise judiciaire de M. E..., concluant (p. 28) que les désordres généralisés affectant le parquet collé tant au rez-de-chaussée qu'à l'étage rendaient l'ouvrage impropre à sa destination, dès lors que la flèche du tuilage était supérieure à 0,5 mm et non conforme au DTU ; qu'en estimant que les désordres affectant les planchers ne relevaient pas de la garantie décennale, car la preuve n'était pas rapportée que l'immeuble était rendu impropre à sa destination, sans répondre à ce moyen pertinent reposant sur les conclusions de l'expert judiciaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2/ Alors que, des désordres généralisés affectant une habitation de standing relèvent de la garantie décennale ; qu'en l'espèce, il ressort des conclusions de l'expert que les désordres affectant les parquets étaient généralisés, atteignant le rez-de-chaussée comme l'étage, et nécessitaient la dépose intégrale desdits parquets en bois de Jatoba d'une qualité et d'un coût supérieurs à la moyenne ; qu'en estimant que les désordres affectant les planchers ne relevaient pas de la garantie décennale sans rechercher si la gravité décennale ne ressortait pas de ses propres constatations et de celles de l'expert sur le caractère généralisé des désordres et la destination contractuelle convenue de l'ouvrage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil.
Le troisième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli partiellement l'action directe des membres de l'indivision I... à l'encontre de la SMABTP et d'avoir condamné celle-ci à leur payer la seule somme de 16 882 euros H.T. ;
Aux motifs que, sur le désordre concernant les plinthes blanches « L'indivision I... fonde son action en responsabilité et réparation de ce poste de préjudice exclusivement sur la garantie décennale des constructeurs qui suppose l'existence d'un vice caché à la date de la réception qui rend l'immeuble impropre à sa destination.
Les plinthes posées dans le salon, la salle à manger et l'une des chambres présentent un revêtement de surface qui se désolidarise du support lorsque la plinthe forme un angle un angle.
Il s'agit d'un vice caché lors de la réception mais il ne rend pas l'immeuble impropre à sa destination.
Le désordre a été dénoncé dans l'année de la prise de possession en juillet 2011.
Par conséquent, même caché, il ne peut pas être fait droit à l'action en réparation de ce désordre sur le fondement invoqué. On notera que si elle avait été retenue, la responsabilité encourue du chef des défauts des parquets aurait exigé une réparation avec le remplacement des plinthes ; cette responsabilité n'étant pas retenue pour les parquets, le coût du remplacement des plinthes n'est pas indemnisable en qualité de préjudice accessoire à cet autre désordre.
Il n'y a pas à examiner la question de la garantie de la SMABTP pour ce poste de préjudice » (arrêt p.10 et 11, désordre n°4) ;
Alors que, la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen relatif aux désordres concernant les parquets, entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a rejeté la demande au titre des plinthes blanches, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cour d'appel ayant admis l'indivisibilité entre ces deux désordres.
Le quatrième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli partiellement l'action directe des membres de l'indivision I... à l'encontre de la SMABTP et condamné celle-ci à leur payer la seule somme de 16 882 euros H.T.,
Aux motifs que sur les désordres affectant les placards « L'indivision I... fonde son action en responsabilité et réparation de ce poste de préjudice exclusivement sur la garantie légale de bon fonctionnement de l'article 1792-3 du code civil.
Ces placards sont considérés comme achevés à la date du 08 août 2010.
Le désordre a été dénoncé dans l'année qui a suivi la prise de possession en juillet 2011.
Les portes des placards présentent des défauts d'aplomb qui sont révélateurs d'un mauvais montage, donc d'un défaut d'exécution. La simple observation de la photographie montre que ces défauts étaient apparents lors de la réception.
L'entreprise ne doit aucune garantie en l'absence de réserve faite lors de la réception.
Ce chef de demande sera rejeté.
Il n'y a pas à examiner la question de la garantie de la SMABTP pour ce poste de préjudice » (arrêt p.11, désordre n°6) ;
Alors que dans leurs conclusions d'appel (p.12, poste n°6), les consorts I... se sont référés au rapport d'expertise judiciaire de M. E... concluant (p. 26 et 50), que les désordres affectant les placards étaient cachés au moment de la prise de possession et étaient survenus dans le cadre de la prise d'ensemble des grands éléments menuisés en oeuvre ; qu'en estimant que les désordres affectant les placards ne relevaient pas de la garantie légale de bon fonctionnement, car les défauts révélateurs d'un mauvais montage étaient apparents lors de la réception, sans répondre au moyen pertinent des exposants reposant sur les conclusions de l'expert judiciaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Le cinquième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli partiellement l'action directe des membres de l'indivision I... à l'encontre de la SMABTP et condamné celle-ci à leur payer la seule somme de 16 882 euros H.T.
Aux motifs que sur les « désordres affectant les cornières des portes de marque Rozières
Ce poste de préjudice fait l'objet d'un double traitement par l'expert car ces ouvrages ont donné lieu à deux dénonciations de désordres qui sont en fait liés ; il est renvoyé au désordre n°12 ci-dessous » (arrêt p.12 désordre n° 10) ;
« Défaut concernant l'isolation phonique des portes des chambres
« L'indivision I... fonde son action en responsabilité et réparation de ce poste de préjudice :
- principalement sur la garantie décennale des constructeurs qui suppose l'existence d'un vice caché à la date de la réception qui rend l'immeuble impropre à sa destination,
- subsidiairement sur la responsabilité contractuelle de droit commun pour les désordres intermédiaires qui suppose l'existence d'un vice caché lors de la réception, dû à une faute commise par le responsable recherché, sans que ce vice rende l'immeuble impropre à sa destination.
Le défaut de montage tient à ce que ces portes ont été fixées sur les cloisons en placoplâtre déjà montées, alors qu'elles auraient dû être posées avant l'intervention du plaquiste et en coordination avec ce dernier ; les fixations sont inesthétiques et l'isolation phonique est déficiente car, en raison de cette chronologie inversée, la fixation des portes n'a pu se faire par l'intérieur de la cloison ; il a fallu que le plaquiste laisse une réservation et cet espace est dépourvu d'isolant phonique.
Ce désordre ne rend pas l'immeuble impropre à sa destination et ne relève donc pas de la garantie décennale des constructeurs il n'empêche pas l'ouverture des portes, prises comme élément d'équipement.
Mais il traduit une inexécution fautive de la distribution interne de l'immeuble.
Il relève donc de la responsabilité pour désordres intermédiaires.
L'entreprise Domitech doit être déclarée responsable sur le fondement de l'article 1147 du code civil et l'indivision I... obtiendra donc une indemnité de 26.852 euros H.T. de ce chef, à réactualiser conformément à l'évolution de l'indice BT 01 depuis la date de dépôt du rapport d'expertise qui a apprécié le coût de la réparation, et non depuis la date de la réception.
La SMABTP ne doit pas garantie car le désordre a été dénoncé dans l'année de parfait achèvement et entre dans le champ d'exclusion de garantie qu'elle oppose pour ne pas entrer par ailleurs dans les champs d'application des garanties légales décennales ou de bon fonctionnement » (arrêt p.13 désordre n° 12) ;
1/ Alors que la garantie décennale peut être mise en jeu lorsque les désordres rendent l'immeuble impropre à sa destination, laquelle est appréciée en fonction de la destination convenue de l'ouvrage ; que pour écarter en l'espèce la garantie décennale pour les désordres d'isolation phonique assurée par les portes, la cour a retenu que n'empêchant pas l'ouverture des portes, ils ne rendaient pas l'immeuble impropre à sa destination ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si le défaut affectant ces portes, empêchant l'isolation phonique qu'elles étaient censées assurer contractuellement, n'était pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination convenue, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l‘article 1792-2 du code civil ;
2/ Alors qu'en toute hypothèse, le désordre d'isolation phonique n'a pas été dénoncé dans l'année qui a suivi la prise de possession des lieux le 1er juillet 2011 puisque la réception a été prononcée contradictoirement le 10 août 2010 ; si bien que la cassation qui sera prononcée sur ce point sur le premier moyen de cassation entraînera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a rejeté la demande de garantie de la SMABTP au motif que le désordre a été dénoncé dans l'année suivant la prise de possession des lieux en juillet 2011, soit dans l'année de parfait achèvement.
Le sixième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli partiellement l'action directe des membres de l'indivision I... à l'encontre de la SMABTP et condamné celle-ci à leur payer la seule somme de 16 882 euros H.T.,
Aux motifs que sur le désordre affectant le joint du portail.
« L'indivision I... fonde son action en responsabilité et réparation de ce poste de préjudice exclusivement sur la responsabilité contractuelle de droit commun pour désordres intermédiaires qui suppose l'existence d'un vice caché lors de la réception, dû à une faute commise par le responsable recherché, sans que ce vice rende l'immeuble impropre à sa destination.
Le joint entre le panneau du portail et sa traverse intermédiaire s'est dégradé ; le vice n'était pas apparent lors de la réception ; rien ne démontre que la défaillance soit due à une faute lors de la mise en oeuvre ; les conditions de la responsabilité pour dommages intermédiaires ne sont pas réunies.
La demande sera rejetée.
Il n'y a pas à examiner la question de la garantie de la SMABTP pour ce poste de préjudice » (arrêt p. 15) ;
Alors que dans leurs conclusions d'appel (p.26), les consorts I... se sont référés au rapport d'expertise judiciaire de M. E... (p.24) qui a retenu que les désordres affectant le joint du portail relevaient d'un défaut de fabrication du portail imputable à la société Domitech ; qu'en estimant que les désordres affectant le joint du portail ne relevaient pas de la garantie contractuelle de droit commun, car la preuve d'une faute imputable à la société Domitech dans la mise en oeuvre n'était pas rapportée, sans répondre aux conclusions d'appel des exposants fondées sur le rapport d'expertise, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Le septième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli partiellement l'action directe des membres de l'indivision I... à l'encontre de la SMABTP et condamné celle-ci à leur payer la seule somme de 16 882 euros H.T.,
Aux motifs que sur le désordre affectant les barres de seuil
« L'indivision I... fonde son action en responsabilité et réparation de ce poste de préjudice exclusivement sur la responsabilité contractuelle de droit commun pour désordres intermédiaires qui suppose l'existence d'un vice caché lors de la réception, dû à une faute commise par le responsable recherché, sans que ce vice rende l'immeuble impropre à sa destination.
Les barres de seuils présentent un défaut de teinte pour ne pas être du même ton que le parquet voisin ; le vice est donc un vice apparent lors de la réception et il n'a pas été fait de réserve le concernant ; l'entreprise est donc dégagée de toute responsabilité.
Ce chef de demande sera rejeté.
Il n'y a pas à examiner la question de la garantie de la SMABTP pour ce poste de préjudice » (arrêt p. 15, désordre n° 17) ;
Alors que dans leurs conclusions d'appel (p.27), les consorts I... se sont référés au rapport d'expertise judiciaire de M. E... (p.30) qui a admis que les barres de seuil étaient en revêtement stratifié ne convenant pas à leur destination (piétinement) et subissaient une usure prématurée à l'aplomb du trafic, ce qui caractérisait une impropriété à sa destination ; qu'en estimant que les désordres affectant les barres de seuil ne relevaient pas de la garantie contractuelle de droit commun car ils présentaient un défaut de teinte, ce qui constituait un vice apparent lors de la réception, sans répondre à aux conclusions d'appel des exposants faisant état d'une usure prématurée de ces barres de seuil, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Le huitième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli partiellement l'action directe des membres de l'indivision I... à l'encontre de la SMABTP et condamné celle-ci à leur payer la seule somme de 16 882 euros H.T. ;
Aux motifs que sur le désordre affectant les stores bannes
« L'indivision I... fonde son action en responsabilité et réparation de ce poste de préjudice exclusivement sur la garantie décennale des constructeurs qui suppose l'existence d'un vice caché à la date de la réception qui rend l'immeuble impropre à sa destination.
Ces stores présentent d'abord un défaut d'implantation car, une fois déployés, leur extrémité atteint un niveau trop bas pour permettre une évolution normale sur la terrasse sans se courber ; il s'agit cependant d'un défaut apparent lors de la réception. La responsabilité de l'entreprise ne peut donc pas être engagée de ce chef.
Les stores présentent cependant un défaut qui tient à la dégradation accélérée de leur peinture protectrice et ils devront être remplacés à terme ; mais ce désordre ne rend pas l'immeuble lui-même impropre à sa destination et n'est donc pas d'une gravité suffisante pour engager la responsabilité décennale de l'entreprise.
La demande doit donc être rejetée pour ne pas remplir les conditions légales de la garantie invoquée.
Il n'y a pas à examiner la question de la garantie de la SMABTP pour ce poste de préjudice » (arrêt p.17, désordre n° 26) ;
Alors que la garantie décennale peut être mise en jeu lorsque les désordres rendent l'immeuble impropre à sa destination, celle-ci étant appréciée en fonction de la destination convenue de l'ouvrage ; qu'en écartant en l'espèce la garantie décennale pour les désordres affectant les stores bannes, aux motifs que bien que présentant un défaut tenant à la dégradation accélérée de leur peinture protectrice qui nécessitera leur remplacement à terme, ils ne rendent pas l'immeuble impropre à sa destination, sans rechercher si le défaut affectant ces stores, entraînant un vieillissement accéléré, n'était pas de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination convenue, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l‘article 1792-2 du code civil.
Le neuvième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli partiellement l'action directe des membres de l'indivision I... à l'encontre de la SMABTP et condamné celle-ci à leur payer la seule somme de 16 882 euros H.T. ;
Aux motifs que sur le désordre des stores occultants
« L'indivision I... fonde son action en responsabilité et réparation de ce poste de préjudice :
- principalement sur la garantie décennale des constructeurs qui suppose l'existence d'un vice caché à la date de la réception rendant l'immeuble impropre à sa destination,
- subsidiairement sur la responsabilité contractuelle de droit commun pour désordres intermédiaires qui suppose l'existence d'un vice caché lors de la réception, dû à une faute commise par le responsable recherché, sans que ce vice rende l'immeuble impropre à sa destination.
Le store a chuté en raison d'un défaut de fixation ; il y a donc vice caché et faute d'exécution mais il n'y a pas désordre décennal car l'immeuble n'est pas rendu impropre à sa destination.
L'entreprise Domitech doit être déclarée responsable sur le fondement de l'article 1147 du code civil et l'indivision I... obtiendra donc une indemnité de 940 euros H.T. de ce chef, à réactualiser conformément à l'évolution de l'indice BT 01 depuis la date de dépôt du rapport d'expertise qui a apprécié le coût de la réparation, et non depuis la date de la réception.
La SMABTP ne doit pas garantie car le désordre a été dénoncé dans l'année de parfait achèvement et entre dans le champ d'exclusion de garantie qu'elle oppose pour ne pas entrer par ailleurs dans les champs d'application des garanties légales décennales ou de bon fonctionnement » (arrêt p. 18, désordre n°27) ;
Alors que le juge ne peut relever un moyen d'office sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations sur son bien-fondé ; qu'en l'espèce, pour écarter la garantie de la SMABTP sur le terrain de la responsabilité de droit commun de son assurée au titre du désordre affectant les stores occultants, la cour d'appel a retenu que ce désordre avait été dénoncé dans l'année de parfait achèvement et que la SMABTP avait exclu sa garantie au titre du parfait achèvement ; qu'en soulevant d'office ce moyen tiré de la dénonciation du désordre dans l'année de parfait achèvement, quand cet élément n'était invoqué ni par l'expert judiciaire, ni par la SMABTP, et ne ressortait d'aucun élément du dossier, sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.