La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/09/2020 | FRANCE | N°19-13748

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 septembre 2020, 19-13748


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 septembre 2020

Cassation

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 463 F-D

Pourvoi n° M 19-13.748

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 SEPTEMBRE 2020

La soc

iété BNP Paribas, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° M 19-13.748 contre l'arrêt rendu le 15 janvier 2019 par la cour...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 septembre 2020

Cassation

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 463 F-D

Pourvoi n° M 19-13.748

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 SEPTEMBRE 2020

La société BNP Paribas, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° M 19-13.748 contre l'arrêt rendu le 15 janvier 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Comptoir commercial d'Orient, société anonyme, dont le siège est [...] ,

2°/ à la société SMJ, dont le siège est [...] , représentée par M. Y... X... , prise en sa qualité de mandataire judiciaire et commissaire à l'exécution du plan de la société Comptoir commercial d'Orient,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de la société BNP Paribas, de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Comptoir commercial d'Orient, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 16 juin 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris,15 janvier 2019), la société Comptoir commercial d'Orient a été mise en redressement judiciaire le 8 juillet 2015, la société SMJ étant désignée en qualité de mandataire judiciaire.

2. La société BNP Paribas a déclaré une créance de 340 325,27 euros, au titre du solde débiteur d'un compte, contestée par le mandataire judiciaire qui en a proposé l'admission pour la somme de 255 328,38 euros.

3. Par une ordonnance du 28 septembre 2016, le juge-commissaire, qui a considéré que la contestation du mandataire judiciaire, qui portait sur le taux effectif global et les taux nominaux, excédait son pouvoir juridictionnel, a sursis à statuer et invité les parties à saisir le juge du fond.

4. Par une ordonnance du 27 septembre 2017, le juge-commissaire, après avoir constaté que ni le créancier ni le débiteur n'avaient saisi le juge du fond dans le délai imparti d'un mois et que la créance de la société BNP Paribas avait déjà été admise à hauteur de 255 328,38 euros, a déclaré la banque forclose pour le solde de 84 996,89 euros.

5. Les sociétés BNP Paris Paribas et Comptoir commercial d'Orient ont interjeté appel de cette décision.

Examen du moyen unique

Enoncé du moyen

6. La société BNP Paribas fait grief à l'arrêt de la déclarer forclose en sa demande d'admission de créance à hauteur de 340 325,27 euros au passif de la société Comptoir commercial d'Orient alors que, « si l'article R. 624-5 du code de commerce dispose qu'en cas de décision d'incompétence ou d'absence de pouvoir juridictionnel pour statuer sur la contestation élevée du juge-commissaire pour se prononcer sur une contestation de la créance déclarée, les parties disposent d'un délai d'un mois pour saisir la juridiction compétente, l'initiative de cette saisine revient exclusivement au débiteur lorsque celui-ci conteste le taux d'intérêt appliqué et le taux effectif global ; qu'il n'appartient pas au créancier lui-même, qui a pour seule obligation de déclarer sa créance et de fournir tous justificatifs à l'appui, de saisir le juge compétent pour se prononcer sur la validité d'une contestation élevée par son adversaire ; que la cour d'appel a constaté qu'à la suite de la déclaration de créance effectuée par la société BNP Paribas, le débiteur a contesté le taux d'intérêt pratiqué et le taux effectif global, contestation dont le juge-commissaire a estimé qu'elle excédait son pouvoir juridictionnel ; qu'il appartenait par conséquent au débiteur, demandeur à l'action en nullité, de saisir la juridiction compétente dans le délai fixé par l'article R. 624-5 précité, à défaut de quoi sa contestation était atteinte par la forclusion, de sorte que la créance déclarée par la banque devait être réputée définitivement admise ; qu'en énonçant, pour dire la société BNP Paribas forclose en sa demande d'admission de créance à hauteur de 340 325,27 euros au passif de la société Comptoir commercial d'Orient, qu'il appartenait à la banque, demanderesse à l'admission de sa créance, de saisir dans le délai requis la juridiction compétente pour se prononcer sur la contestation élevée par son adversaire, ce dont elle s'était abstenue, la cour d'appel a violé l'article R. 624-5 du code de commerce, ensemble l'article 1315 du code civil, devenu 1353 du même code et l'article 9 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles R. 624-5 du code de commerce, ce dernier dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, et 1315, devenu 1353, du code civil :

7. Lorsque le juge-commissaire ne désigne pas, contrairement à l'obligation qui lui est faite par le premier de ces textes, la partie devant saisir la juridiction compétente pour trancher la contestation sérieuse dont une créance déclarée est l'objet, et que cette juridiction n'est pas saisie dans le délai imparti, il appartient au juge de la vérification du passif, pour apprécier les conséquences de la forclusion qui en résulte, de déterminer, en fonction de la contestation en cause, la partie qui avait intérêt à en saisir le juge compétent.

8. Pour déclarer la société BNP Paribas intégralement forclose en sa demande d'admission de créance, l'arrêt retient qu'elle n'a pas saisi la juridiction compétente, ce qu'il lui appartenait de faire dès lors que le juge-commissaire avait considéré que la contestation émise excédait son pouvoir juridictionnel, que cette banque demandait l'admission de sa créance et qu'il appartenait à la juridiction de se prononcer sur l'étendue et le bien fondé de la créance qu'elle invoquait.

9. En se déterminant ainsi, après avoir constaté que, le mandataire judiciaire ayant proposé sans discussion l'admission partielle de la créance à concurrence de la somme de 255 328,38 euros, seul restait en litige l'admission des intérêts de cette créance, en raison d'une contestation de leurs taux par le débiteur, la cour d'appel, qui s'est bornée à faire peser, par principe, sur l'établissement de crédit, en sa seule qualité de demandeur à l'admission de sa créance, l'obligation de saisir le juge du fond compétent, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce n'était pas plutôt au débiteur à le faire, en tant qu'auteur de la contestation des taux d'intérêts, n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Comptoir commercial d'Orient aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société BNP Paribas.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit BNP Paribas forclose en sa demande d'admission de créance à hauteur de 340.325,27 euros au passif de la société Comptoir commercial d'Orient ;

AUX MOTIFS QU'au fond, aucune des pièces versées au débat, et notamment l'état des créances, ne permet d'établir, contrairement à ce qu'affirme le juge commissaire dans l'ordonnance dont appel, alors que ce point est contesté par l'appelante, que la créance de BNP Paribas a été admise partiellement au passif de la société Comptoir Commercial d'Orient à titre chirographaire, pour la somme de 255 328,38 euros ; qu'il est revanche établi que dans son ordonnance du 28 septembre 2016, le juge commissaire, statuant sur la contestation partielle de la créance de BNP Paribas par le mandataire judiciaire, lequel proposait son admission à hauteur de 255 328,38 euros et son rejet pour le surplus au titre des taux nominaux et des TEG stipulés, a, constatant l'existence d'une contestation, invité les parties à saisir le juge du fond et sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive, et ce, pour l'intégralité de la créance ; qu'il n'a pas été relevé appel de cette ordonnance ; que dès lors, et contrairement à ce qu'a indiqué le juge commissaire dans l'ordonnance dont appel, la créance de BNP Paribas n'a pas été admise même partiellement ; que ni BNP Paribas ni la société Comptoir Commercial d'Orient n'ont saisi la juridiction compétente pour qu'il soit statué sur la créance dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'ordonnance du 28 septembre 2016, comme l'y invitait le juge commissaire ; que faute pour BNP Paribas d'avoir saisi la juridiction compétente, ce qu'il lui appartenait de faire compte tenu de ce que le juge commissaire a considéré que la contestation émise excédait son pouvoir juridictionnel et qu'elle est demanderesse à l'admission de la créance, juridiction à qui il appartenait dès lors de se prononcer sur le bien-fondé et l'étendue de la créance invoquée à l'égard de la société sous procédure et le cas échéant d'en fixer le montant qui aurait alors été inscrit au passif de la procédure par application de l'article R 624-11 du code de commerce, elle est forclose en sa demande d'admission ;

1/ALORS QUE si l'article R. 624-5 du code de commerce dispose qu'en cas de décision d'incompétence ou d'absence de pouvoir juridictionnel pour statuer sur la contestation élevée du juge-commissaire pour se prononcer sur une contestation de la créance déclarée, les parties disposent d'un délai d'un mois pour saisir la juridiction compétente, l'initiative de cette saisine revient exclusivement au débiteur lorsque celui-ci conteste le taux d'intérêt appliqué et le taux effectif global ; qu'il n'appartient pas au créancier lui-même, qui a pour seule obligation de déclarer sa créance et de fournir tous justificatifs à l'appui, de saisir le juge compétent pour se prononcer sur la validité d'une contestation élevée par son adversaire ; que la cour d'appel a constaté qu'à la suite de la déclaration de créance effectuée par BNP Paribas, le débiteur a contesté le taux d'intérêt pratiqué et le taux effectif global, contestation dont le juge-commissaire a estimé qu'elle excédait son pouvoir juridictionnel ; qu'il appartenait par conséquent au débiteur, demandeur à l'action en nullité, de saisir la juridiction compétente dans le délai fixé par l'article R. 624-5 précité, à défaut de quoi sa contestation était atteinte par la forclusion, de sorte que la créance déclarée par la banque devait être réputée définitivement admise ; qu'en énonçant, pour dire BNP Paribas forclose en sa demande d'admission de créance à hauteur de 340.325,27 euros au passif de la société Comptoir commercial d'Orient, qu'il appartenait à BNP Paribas, demanderesse à l'admission de sa créance, de saisir dans le délai requis la juridiction compétente pour se prononcer sur la contestation élevée par son adversaire, ce dont elle s'était abstenue, la cour d'appel a violé l'article R. 624-5 du code de commerce, ensemble l'article 1315 du code civil, devenu 1353 du même code et l'article 9 du code de procédure civile ;

2/ ALORS subsidiairement QUE la forclusion ne peut être encourue par l'une des parties quand le juge-commissaire n'a pas désigné la partie devant saisir le juge du fond ; que dans ses conclusions d'appel, BNP Paribas faisait valoir que le forclusion ne pouvait être prononcée à son encontre, le juge-commissaire n'ayant pas désigné la partie chargée de saisir la juridiction compétente ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3/ ALORS subsidiairement QUE la cour d'appel a constaté que la créance d'un montant de 340.325,27 € était contestée à hauteur uniquement de la somme de 84.996,89 € au titre des taux nominaux et des TEG stipulés ; qu'il se déduisait que l'absence de saisine de la juridiction compétente pour trancher cette contestation partielle, dans le délai requis, ne pouvait conduire qu'à une forclusion partielle de la banque ; qu'en jugeant BNP Paribas forclose en sa demande d'admission pour la totalité de la créance, quand elle avait le pouvoir de se prononcer sur la partie de la créance non contestée, la cour d'appel a violé les articles L. 624-2 et R. 624-5 du code de commerce ;

4/ ALORS subsidiairement QUE le juge ne peut dénaturer les termes du litige qui lui est soumis ; qu'en affirmant que l'admission partielle de la créance était contestée, quand aucune des parties ne contestait l'existence légale de l'ordonnance du 29 juin 2016 d'admission de la créance, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-13748
Date de la décision : 23/09/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 sep. 2020, pourvoi n°19-13748


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent , SCP Marc Lévis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.13748
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award