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17/09/2020 | FRANCE | N°19-14825

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 17 septembre 2020, 19-14825


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 septembre 2020

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 563 F-D

Pourvoi n° H 19-14.825

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 SEPTEMBRE 2020

M. V... P..., domicilié [...] , a formé le pourvo

i n° H 19-14.825 contre l'arrêt rendu le 5 février 2019 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant à la socié...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 septembre 2020

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 563 F-D

Pourvoi n° H 19-14.825

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 SEPTEMBRE 2020

M. V... P..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° H 19-14.825 contre l'arrêt rendu le 5 février 2019 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant à la société Cité Nouvelle, société anonyme, dont le siège est [...] , anciennement dénommée société HLM Le Toit Familial, défenderesse à la cassation.

La société Cité Nouvelle a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt ;

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. P..., de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de la société Cité Nouvelle, et après débats en l'audience publique du 9 juin 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1.Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 5 février 2019), par acte du 12 février 2014, la société HLM Le Toit familial, devenue Cité nouvelle, a vendu une maison d'habitation à M. P....

2. Soutenant que l'immeuble avait été vendu comme étant raccordé au réseau d'assainissement alors qu'il l'était à une fosse septique pour laquelle aucun diagnostic n'avait été délivré, M. P... a assigné son vendeur en paiement des frais de raccordement au réseau d'assainissement.

Examen des moyens

Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable

Enoncé du moyen

3. La société Cité nouvelle fait grief à l'arrêt de juger qu'elle a manqué à son obligation de délivrance et de la condamner au paiement de dommages-intérêts, alors :

« 1°/ que le juge, tenu d'observer et de faire respecter le principe de la contradiction, ne peut retenir, dans sa décision, les documents produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'en l'espèce, le bordereau de communication annexé aux conclusions de M. P... ne mentionne aucune attestation d'un notaire relative à la communication du plan de masse à l'acquéreur ; qu'en retenant à l'appui de sa décision, pour juger que « le vendeur ne rapporte pas la preuve que M. P... (
) a signé l'acte de vente en pleine connaissance de cause », que « le notaire a attesté, pièce produite à hauteur d'appel, que le plan de masse, qui décrivait ce raccordement indirect, n'a pas été joint à l'acte de vente », sans constater que cette prétendue attestation – à supposer qu'elle existe - avait été communiquée à la société Cité nouvelle, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que la conformité de la chose livrée doit être appréciée au regard des seules prévisions contractuelles ; qu'en l'espèce, il était constant que l'acte authentique de vente mentionnait que l'immeuble vendu était raccordé à l'assainissement communal, mais que le vendeur ne garantissait pas la conformité des installations aux normes en vigueur ; que la cour d'appel a elle-même constaté que la maison d'habitation acquise par M. P... bénéficiait d'une évacuation accédant un collecteur public, situé sur le quai de l'île ; qu'il en résultait que le bien litigieux était raccordé au réseau d'assainissement public en conformité avec les énonciations de l'acte de vente ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1603 et 1604 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. La cour d'appel a relevé que l'immeuble était raccordé au réseau d'assainissement par le biais d'une fosse septique dont le trop plein se déversait sur la parcelle voisine afin de rejoindre le réseau gravitaire sans servitude conventionnelle et retenu, sans violation du principe de la contradiction, qu'il n'était pas établi que l'acquéreur avait connaissance de cette situation.

5. Elle a pu en déduire, alors que l'acte de vente stipulait que l'immeuble vendu était raccordé au réseau d'assainissement, ce dont il résultait que le vendeur s'était engagé à délivrer un bien dont toutes les évacuations y étaient directement raccordées, que la société venderesse avait manqué à son obligation de délivrance.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. M. P... fait grief à l'arrêt de limiter la réparation de son préjudice au tiers de la facture de raccordement, alors « que le juge doit en toutes circonstances, observer et faire respecter le contradictoire ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la cour d'appel qui a d'office soulevé le moyen déduit de ce que l'estimation à laquelle il aurait été procédé par l'administration du coût des travaux de raccordement au réseau public d'assainissement des eaux usées aurait tenu compte du nombre de parcelles à créer par M. P... sur la parcelle existante, sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer, a par-là même méconnu l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

7. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

8. Pour réduire au tiers le montant du coût du raccordement de l'immeuble au réseau d'assainissement, la cour d'appel retient que le projet immobilier de l'acquéreur était de construire trois immeubles en lieu et place de l'immeuble vendu.

9. En statuant ainsi, sans inviter préalablement les parties à s'expliquer sur le moyen relevé d'office et tiré de l'impact de la construction de trois logements en lieu et place de l'immeuble acquis sur le prix du raccordement, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique du pourvoi principal, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite l'indemnisation du raccordement au réseau d'assainissement à la somme de 9 273,60 euros,
l'arrêt rendu le 5 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée ;

Condamne la société Cité nouvelle aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour M. P...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Cité Nouvelle, anciennement Le Toit Familial, à ne payer à Monsieur P... que la somme de 9 273,60 euros en réparation du préjudice causé par son manquement à son obligation de délivrance et d'avoir débouté Monsieur P... du surplus de ses demandes ;

Aux motifs que pour justifier de son préjudice, Monsieur P... produit un contrat pour la réalisation de travaux de Roannais Agglomération faisant état d'un montant estimé de travaux de 23 184 HT (27 820,80 TTC) ; que cependant le projet immobilier de l'acquéreur étant de construire trois immeubles en lieu et place de l'immeuble vendu, il y a lieu de fixer son préjudice à la somme de 9 273,60 euros et de le débouter de sa demande au titre des frais d'enlèvement de la fosse septique, ne s'agissant pas d'un préjudice en lien avec le non-respect par le vendeur de son obligation de délivrance, mais de frais liés au projet de démolition/reconstruction ;

Alors, d'une part, que le juge doit en toutes circonstances, observer et faire respecter le contradictoire ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la cour d'appel qui a d'office soulevé le moyen déduit de ce que l'estimation à laquelle il aurait été procédé par l'administration du coût des travaux de raccordement au réseau public d'assainissement des eaux usées aurait tenu compte du nombre de parcelles à créer par Monsieur P... sur la parcelle existante, sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer, a par-là même méconnu l'article 16 du Code de procédure civile ;

Alors, d'autre part, qu'on ne peut interpréter les clauses claires et précises à peine de dénaturation ; qu'il résulte des termes clairs et précis du contrat d'offre de concours pour la réalisation de travaux passé entre Monsieur P... et Roannais Agglomération, auquel se réfère la cour d'appel à l'appui de sa décision, que le coût des travaux nécessaires au raccordement au réseau public d'assainissement des eaux usées a été estimé au regard de la demande de Monsieur P... tendant au raccordement du seul « immeuble existant » à ce réseau, sans tenir compte de la division de cet immeuble à laquelle il envisageait de procéder ; qu'en estimant le contraire pour procéder à la division par trois du coût ainsi estimé, en fonction du nombre de parcelles que Monsieur P... entendait créer aux lieu et place de la parcelle et de l'immeuble existants, la cour d'appel a nécessairement dénaturé les termes clairs et précis du contrat précité, et ainsi violé l'article 1192 nouveau du Code civil, ensemble l'ancien article 1134 du même code ;
Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Delamarre et Jehannin, avocat aux Conseils, pour la société Cité Nouvelle

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que la société Cité Nouvelle, anciennement Le Toit Familial, avait manqué à son obligation de délivrance, et de l'avoir, en conséquence, condamnée à payer à M. P... la somme de 9 273,60 euros à titre de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « tout vendeur est tenu à une obligation de délivrance résultant de l'article 1603 du code civil ; que page 21 de l'acte de vente, il est précisé que le vendeur déclare que l'immeuble vendu est raccordé au réseau d'assainissement mais ne garantit aucunement la conformité des installations aux normes actuellement en vigueur,
Qu'il s'est avéré et résulte du dossier que les occupants précédents étaient raccordés au réseau par le biais d'une fosse septique dont le trop plein se déversait sur la parcelle voisine en traversant l'ensemble immobilier [...] afin de rejoindre le réseau gravitaire situé au [...] , Que le notaire a attesté, pièce produite à hauteur d'appel, que le plan de masse, qui décrivait ce raccordement indirect, n'a pas été joint à l'acte de vente, que dès lors le vendeur ne rapporte pas la preuve que M. P... avait connaissance de la situation et a signé l'acte de vente en pleine connaissance de cause,
Que le conseil syndical de l'immeuble en copropriété traversé par le raccordement au collecteur public, a refusé de considérer qu'il existait une servitude de tréfonds acquise par prescription,
Que dès lors, à défaut de servitude conventionnelle au profit du fonds litigieux, en dehors de tout respect des normes en vigueur dont il n'est pas question en l'espèce, il ne peut être considéré que le bien vendu était raccordé au réseau d'assainissement, que le vendeur n'a donc pas satisfait à son obligation de délivrance » ;

ALORS QUE le juge, tenu d'observer et de faire respecter le principe de la contradiction, ne peut retenir, dans sa décision, les documents produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'en l'espèce, le bordereau de communication annexé aux conclusions de M. P... ne mentionne aucune attestation d'un notaire relative à la communication du plan de masse à l'acquéreur ; qu'en retenant à l'appui de sa décision, pour juger que « le vendeur ne rapporte pas la preuve que M. P... (
) a signé l'acte de vente en pleine connaissance de cause », que « le notaire a attesté, pièce produite à hauteur d'appel, que le plan de masse, qui décrivait ce raccordement indirect, n'a pas été joint à l'acte de vente » (arrêt, p. 5 § 2), sans constater que cette prétendue attestation – à supposer qu'elle existe - avait été communiquée à la société Cité nouvelle, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

2) ALORS QUE la conformité de la chose livrée doit être appréciée au regard des seules prévisions contractuelles ; qu'en l'espèce, il était constant que l'acte authentique de vente mentionnait que l'immeuble vendu était raccordé à l'assainissement communal, mais que le vendeur ne garantissait pas la conformité des installations aux normes en vigueur ; que la cour d'appel a elle-même constaté que la maison d'habitation acquise par M. P... bénéficiait d'une évacuation accédant un collecteur public, situé sur le quai de l'île ; qu'il en résultait que le bien litigieux était raccordé au réseau d'assainissement public en conformité avec les énonciations de l'acte de vente ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1603 et 1604 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-14825
Date de la décision : 17/09/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 05 février 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 17 sep. 2020, pourvoi n°19-14825


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Delamarre et Jehannin, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.14825
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