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09/09/2020 | FRANCE | N°19-15422

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 09 septembre 2020, 19-15422


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 septembre 2020

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 417 F-P+B

Pourvoi n° F 19-15.422

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 SEPTEMBRE 2020

La société Groupe française de gastronom

ie, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° F 19-15.422 contre l'arrêt rendu le 19 février 2019 par la cour d'appel de R...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 septembre 2020

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 417 F-P+B

Pourvoi n° F 19-15.422

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 SEPTEMBRE 2020

La société Groupe française de gastronomie, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° F 19-15.422 contre l'arrêt rendu le 19 février 2019 par la cour d'appel de Rennes (3e chambre commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Larzul, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ au procureur général près la cour d'appel de Rennes, domicilié en son parquet général, place du Parlement de Bretagne, CS 66423, 35064 Rennes cedex,

3°/ à la société Vectora, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Guerlot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de la société Groupe française de gastronomie, de la SCP Gaschignard, avocat de la société Larzul et de la société Vectora, après débats en l'audience publique du 3 juin 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Guerlot, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 19 février 2019), par un acte du 14 décembre 2004, la société UGMA, filiale de la société Groupe française de gastronomie (la société FDG), qui était son associée unique, a conclu avec la société Larzul un traité d'apport à cette dernière de son fonds de commerce. Par des délibérations du 30 décembre 2004, la société Vectora, associée unique de la société Larzul, a approuvé cette opération d'apport et l'augmentation de capital subséquente.

2. Par un acte du 20 septembre 2005, la société FDG a décidé la dissolution de la société UGMA.

3. Un arrêt irrévocable du 24 janvier 2012 a annulé les délibérations de la société Vectora du 30 décembre 2004 et constaté la caducité du traité d'apport du 14 décembre 2004.

4. Le 3 avril 2012, la société Larzul a obtenu du greffier d'un tribunal de commerce que des modifications soient apportées à son inscription au registre du commerce et des sociétés en y mentionnant l'arrêt du 24 janvier 2012 et en précisant un ensemble de modifications « suite à cette décision ».

5. Sur requête de la société FDG, le juge commis à la surveillance de ce registre a, par une ordonnance du 6 juillet 2012, enjoint au greffier de procéder à l'annulation de ces modifications et de rétablir l'état antérieur de ces inscriptions.

Examen du moyen unique

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. La société FDG fait grief à l'arrêt d'infirmer l'ordonnance du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés du 6 juillet 2012, alors « que le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés peut, soit d'office, soit à la requête de toute personne justifiant y avoir intérêt, enjoindre à toute personne immatriculée de faire procéder aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclarations inexactes ou incomplètes ; qu'en infirmant l'ordonnance du juge commis à la surveillance du registre du 6 juillet 2012 en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'elle faisait injonction à la société Larzul de mettre ses statuts en conformité avec sa situation juridique telle qu'elle résultait de l'arrêt de la cour d'appel d'Angers du 24 janvier 2012 au motif que la société FDG n'avait pas qualité pour saisir le juge commis à la surveillance du registre à cette fin, la cour d'appel a violé l'article L. 123-3 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 123-3, alinéas 1 et 2, du code de commerce :

7. Il résulte de ce texte que le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés peut, à la requête de toute personne, justifiant y avoir intérêt, enjoindre à toute personne immatriculée au registre du commerce et des sociétés qui ne les aurait pas requises de faire procéder soit aux mentions complémentaires ou rectifications qu'elle doit y faire porter, soit aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclarations inexactes ou incomplètes, soit à la radiation.

8. Pour déclarer irrecevable la requête de la société FDG, et infirmer l'ordonnance du 6 juillet 2012, l'arrêt retient qu'aucun texte ne lui permettait de saisir le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés d'une demande d'annulation d'une mention de ce registre afférente à l'inscription d'une autre société.

9. En statuant ainsi, alors que la société FDG , en qualité d'associé de la société Larzul assujettie à l'obligation d'immatriculation, avait un intérêt à saisir le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés pour faire procéder à la rectification de déclarations inexactes de l'assujettie, mentionnées au registre, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne la société Larzul et la société Vectora aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Larzul et la société Vectora et les condamne à payer à la société Groupe française de gastronomie la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société Groupe française de gastronomie.

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés en date du 6 juillet 2012 et d'avoir déclaré irrecevable la requête de la société Groupe française de gastronomie en date du 20 juin 2012 par laquelle elle a demandé au juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés d'enjoindre au greffe du tribunal de commerce de Quimper de procéder à l'annulation des modifications inscrites à l'extrait Kbis de la société Larzul le 3 avril 2012 et de remettre les inscriptions en l'état antérieur à ces modifications ;

Aux motifs que « La société Larzul fait valoir que la société FDG était irrecevable à saisir le juge commis à la surveillance du registre comme n'étant pas la personne dont les mentions sur le registre étaient en cause. La société FDG fait valoir que c'est sur le fondement des dispositions de l'article R. 123-87 du code de commerce qu'elle a demandé la modification des inscriptions sur le registre du commerce.

Ce texte prévoit que les demandes d'inscription modificative et de radiation peuvent être signées par toute personne justifiant y avoir un intérêt :

‘Article R. 123-87 du code de commerce :

Les demandes d'inscription modificative et de radiation peuvent être signées par toute personne justifiant y avoir intérêt.

Le greffier en informe la personne immatriculée'.

Mais ce texte ne permet pas à toute personne intéressée de présenter une demande de modification, et ce d'autant moins que les textes législatifs, notamment les articles L. 123-3 et L. 123-5-1 du code de commerce, réservent à certaines qu'ils qualifient le droit de demander une inscription ou modification du registre. Sauf dans certains cas où des inscriptions ou modifications sont prévues d'office, c'est à la personne physique ou morale assujettie qu'il revient de présenter une demande de modification ou de radiation du registre, les textes prévoyant les cas dans lesquels elle peut y être enjointe.

La société FDG n'avait pas qualité pour demander la modification du registre.

Le juge commis à la surveillance du registre a statué dans son ordonnance de 6juilet 2012 au visa de l'article R. 123-84 du code de commerce. Ce texte régit les modalités de présentation des déclarations dont il est demandé l'inscription mais ne prévoit pas la possibilité pour tout intéressé de demander l'annulation d'une mention portée au RCS :

‘§ 2 Des inscriptions sur déclaration

Sous-§ 1er De la présentation des déclarations

Article R123-84 du code de commerce (rédaction en vigueur du 27 mars 2007 au 1er septembre 2012) :

Sous réserve de la procédure prévue aux articles R. 123-1 et suivants, les demandes sont présentées en deux exemplaires au greffe du tribunal compétent sur des formulaires définis par l'arrêté prévu à l'article R. 123-166.

Elles sont accompagnées des actes et pièces mentionnées aux articles R. 123-102 à R. 123-110 ainsi que des pièces répondant aux prescriptions de l'article L. 123-2.

La liste des pièces justificatives est fixée par l'arrêté mentionné au premier alinéa.

Toutefois, dispense d'une pièce peut être accordée par le juge, soit définitivement, soit provisoirement. Dans ce dernier cas, il est procédé à la radiation d'office si la pièce n'est pas produite dans le délai imparti'.

Si le greffier peut inviter la personne immatriculée à régulariser son dossier en application des dispositions de l'article R.123-110 du code de commerce, ce texte n'est pas applicable en l'espèce, l'annulation de la mention du registre n'ayant pas été effectuée par le juge commis à l'initiative du greffier mais à la demande d'un tiers :

‘Article R123-100 du code de commerce :

Le greffier peut à tout moment, vérifier la permanence de la conformité des inscriptions effectuées aux dispositions mentionnées aux articles R. 123-95 et R. 123-96.

En cas de non-conformité, invitation est faite à la personne immatriculée d'avoir à régulariser son dossier. Faute par celle-ci de déférer à cette invitation dans le délai d'un mois à compter de la date de cette dernière, le greffier saisit le juge commis à la surveillance du registre'.

Aucun texte ne permettait à la société FDG de saisir le juge commis à la surveillance du registre d'une demande d'annulation d'une mention de ce registre afférente à l'inscription d'une autre société qu'elle-même.

Il y a lieu d'infirmer l'ordonnance 6 juillet 2012 et de déclarer irrecevable la requête de la société FDG en date du 20 juin 2012.

Il convient de faire remarquer, en outre et en tout état de cause, que les mentions figurant au registre du commerce n'ont qu'un effet informatif à destination des tiers. Un actionnaire ne pourrait ainsi être évincé ou un dirigeant révoqué du seul fait d'une modification des mentions du registre du commerce et des sociétés. Une telle éviction ou révocation ne pourrait en effet résulter que d'une décision de justice ou des organes sociaux. La société FDG n'a donc pas été évincée du seul fait des inscriptions sur le registre qu'elle a contestées ».

1°) Alors que, d'une part, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés peut, soit d'office, soit à la requête de toute personne justifiant y avoir intérêt, enjoindre à toute personne immatriculée de faire procéder aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclarations inexactes ou incomplètes ; qu'en infirmant l'ordonnance du juge commis à la surveillance du registre du 6 juillet 2012 en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'elle faisait injonction à la société Larzul de mettre ses statuts en conformité avec sa situation juridique telle qu'elle résultait de l'arrêt de la cour d'appel d'Angers du 24 janvier 2012 au motif que la société FDG n'avait pas qualité pour saisir le juge commis à la surveillance du registre à cette fin, la cour d'appel a violé l'article L. 123-3 du code de commerce ;

2°) Alors que, d'autre part, les demandes d'inscription modificative relatives aux mentions inscrites au registre du commerce et des sociétés peuvent être signées par toute personne justifiant y avoir un intérêt ; que tout demandeur à une inscription au registre peut saisir le juge commis à la surveillance du registre lorsque le greffier ne procède pas à l'inscription demandée dans le délai qui lui est imparti ; qu'en déclarant irrecevable la requête de la société Française de gastronomie en date du 20 juin 2012 par laquelle cette société avait saisi le juge commis à la surveillance du registre faisant suite au refus du greffier du tribunal de commerce de Quimper de procéder à une inscription modificative concernant la société Larzul, cependant que la société Française de gastronomie avait intérêt à cette inscription modificative en sa qualité d'associé, la cour d'appel a violé les articles R. 123-87 et R. 123-97 du code de commerce.


Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REGISTRE DU COMMERCE ET DES SOCIETES - Juge commis à sa surveillance - Pouvoirs - Actes déposés à l'appui d'une requête - Intérêt à agir du requérant - Associé de la société immatriculée

Il résulte de l'article L. 123-3, alinéas 1 et 2, du code de commerce que le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés peut, à la requête de toute personne justifiant y avoir intérêt, enjoindre à toute personne immatriculée au registre du commerce et des sociétés qui ne les aurait pas requises de faire procéder soit aux mentions complémentaires ou rectifications qu'elle doit y faire porter, soit aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclarations inexactes ou incomplètes, soit à la radiation. Justifie d'un tel intérêt l'associé d'une société immatriculée au registre du commerce, qui, sollicite la rectification de déclarations inexactes de cette société mentionnées au registre


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 19 février 2019


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 09 sep. 2020, pourvoi n°19-15422, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles
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Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 09/09/2020
Date de l'import : 16/02/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19-15422
Numéro NOR : JURITEXT000042348754 ?
Numéro d'affaire : 19-15422
Numéro de décision : 42000417
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2020-09-09;19.15422 ?
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