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08/07/2020 | FRANCE | N°19-11367

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juillet 2020, 19-11367


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juillet 2020

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 675 FS-D

Pourvoi n° Y 19-11.367

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 JUILLET 2020

1°/ M. S... SW... , domicilié [...] ,

2°/ M. P... K..., domicilié [...] ,

3°/ Mme N... M..., domiciliée [...] ,

4°/ M. NV... W..., domicilié [...] ,

5°/ Mme Y... R..., domiciliée [...] ,

6°/ Mme N... J..., domiciliée [...] ,

7...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juillet 2020

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 675 FS-D

Pourvoi n° Y 19-11.367

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 JUILLET 2020

1°/ M. S... SW... , domicilié [...] ,

2°/ M. P... K..., domicilié [...] ,

3°/ Mme N... M..., domiciliée [...] ,

4°/ M. NV... W..., domicilié [...] ,

5°/ Mme Y... R..., domiciliée [...] ,

6°/ Mme N... J..., domiciliée [...] ,

7°/ M. G... O..., domicilié [...] ,

8°/ Mme V... XE... , domiciliée [...] ,

9°/ M. F... U..., domicilié [...] ,

10°/ M. E... I..., domicilié [...] ,

11°/ M. B... C..., domicilié [...] ,

12°/ Mme A... T..., domiciliée [...] ,

13°/ Mme L... Q..., épouse X..., domiciliée [...] ,

14°/ Mme D... H..., domiciliée [...] ,

15°/ Mme JR... SI..., épouse BA..., domiciliée [...] ,

16°/ Mme D... TV..., domiciliée [...] ,

17°/ Mme N... KL..., domiciliée [...] ,

18°/ Mme FC... TJ..., domiciliée [...] ,

19°/ M. NI... BY..., domicilié [...] ,

20°/ M. AB... AK..., domicilié [...] ,

21°/ M. VK... GE..., domicilié [...] ,

22°/ M. VY... TG..., domicilié [...] ,

23°/ M. QU... WP..., domicilié [...] ,

24°/ Mme TM... QA..., domiciliée [...] ,

25°/ Mme JF... GD..., domiciliée [...] ,

26°/ M. PM... BH..., domicilié [...] ,

27°/ M. CV... LI..., domicilié [...] ,

ont formé le pourvoi n° Y 19-11.367 contre l'arrêt rendu le 29 novembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (21e chambre), dans le litige les opposant à la société B Braun Medical, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Mariette, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de MM. SW... , K..., W..., O..., U..., I..., C..., BY..., AK..., GE..., TG..., WP..., BH..., LI..., de Mmes M..., R..., J..., XE... , T..., Q..., épouse X..., H..., SI..., épouse BA..., TV..., KL..., TJ..., QA..., et GD..., de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société B Braun médical, et l'avis de Mme Rémery, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 juin 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Mariette, conseiller rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, M. Sornay, M. Rouchayrole, conseillers, M. David, Mmes Ala, Prieur, Thomas-Davost, conseillers référendaires, Mme Rémery, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 29 novembre 2018), M. SW... et vingt-six autres salariés sont, ou ont été employés par la société B Braun Medical (la société) en qualité de spécialiste de gamme, directeur régional des ventes ou de responsable national des ventes, moyennant une rémunération composée d'une partie fixe et d'une partie variable dont le montant est calculé en fonction d'objectifs.

2. A compter de l'année 2000, la société a modifié les modalités de calcul des indemnités de congés payés des salariés de l'entreprise. Alors que jusqu'à cette date, l'absence des salariés était valorisée sur le seul salaire de base sans prendre en compte la prime d'objectifs, la société a décidé par la suite de calculer la valorisation de l'absence sur la même assiette que l'indemnité de congés payés, c'est-à-dire en incluant la prime d'objectifs.

3. Le 19 avril 2007 un accord d'entreprise relatif aux modalités de calcul des congés payés a été conclu.

4. Soutenant ne pas avoir été remplis de leurs droits au titre des indemnités de congés payés, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement d'un rappel d'indemnités et de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Les salariés font grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il dit que l'accord signé le 19 avril 2007 respecte les dispositions légales et jurisprudentielles concernant le calcul des indemnités de congés payés, dit que la société a correctement appliqué les dispositions de cet accord et qu'ils ont été remplis de l'intégralité de leurs droits en matière d'indemnité compensatrice de congés et les déboute de leurs demandes, alors :

« 1°/ que les salariés doivent se voir appliquer la méthode de calcul de l'indemnité de congés payés qui leur est la plus favorable ; qu'un accord d'entreprise ne pouvant déroger au mode de calcul légal de l'indemnité de congés payés qu'à la condition d'être plus favorable pour le salarié, doit être écarté, au profit de l'application des dispositions légales, l'accord d'entreprise qui prévoit des modalités de calcul de l'indemnité de congé payés moins favorables que les dispositions légales ; qu'en déboutant les salariés de leur demande de rappel d'indemnité de congés payés sans rechercher si la méthode de calcul retenue par l'accord du 19 avril 2007 et appliquée par l'employeur n'était pas moins favorable que l'application des dispositions légales, ce dont il résultait que l'application de cet accord devait être écartée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3141-22 du code du travail ;

2°/ que, subsidiairement les juges doivent motiver leurs décisions ; qu'en se fondant sur l'accord d'entreprise du 19 avril 2007 pour rejeter la demande de rappel d'indemnité de congés payés présentée par les salariés sans indiquer les motifs pour lesquels la méthode de calcul de l'indemnité de congés payés retenue par cet accord était plus favorable que celle revendiquée par les salariés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en tout état de cause lorsqu'un accord est dénoncé il cesse de produire ses effets à l'expiration du délai de préavis ; qu'en se fondant sur l'accord d'entreprise du 19 avril 2007 pour rejeter les demandes des salariés pour la totalité de la période allant de 2007 à 2018 quand il résultait de ses constatations que l'accord, dénoncé le 25 juin 2014, avait cessé de produire ses effets le 25 septembre 2015, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-10 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. Selon l'article L. 3141-22 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 le congé annuel prévu par l'article L. 3141-3 du code du travail ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence. L'indemnité ne peut toutefois être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler.

7. Il en résulte que lorsque le salarié prend des congés payés et que l'employeur procède au maintien du salaire, la rémunération du mois concerné est constituée, d'une part, du salaire correspondant aux jours de travail effectif, et d'autre part, d'une indemnité de congés payés correspondant aux jours de repos du salarié. Pour déterminer la part de salaire, l'employeur peut déduire du salaire mensuel, le salaire qui aurait dû être versé si le salarié n'avait pas pris de congés et, dans le même temps, payer une indemnité de congés payés égale au salaire qu'il aurait perçu s'il n'avait pas pris de congés payés.

8. Après avoir retenu que le litige portait non pas sur la valorisation de l'indemnité de congés payés mais sur la retenue du salaire effectuée sur le bulletin de paie lors de l'absence du salarié en congés, la cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, relevé que l'accord de 2007 relatif au mode de calcul des congés payés qui prévoyait le maintien de la rémunération pendant la période de congé en appliquant un taux strictement identique pour l'indemnisation du congé et la retenue pour congé puis une régularisation annuelle en comparant le salaire maintenu au 10e de la rémunération totale perçue, avait mis un terme aux pratiques antérieures.

9. Elle en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche inopérante, dès lors que les modalités de calcul de l'indemnité de congés étaient conformes aux dispositions légales, que les salariés ne pouvaient plus se prévaloir d'un quelconque usage ou d'une quelconque pratique, qui n'étaient prévus ni par la loi ni par un accord collectif, relatif à la valorisation de la retenue sur salaire au titre de l'absence pour congés payés sur la base du seul salaire fixe, inférieure à celle permettant le calcul de l'indemnité de congés payés servie pour la même période au titre du maintien de salaire, laquelle inclut la prime d'objectifs, en sorte que la demande en paiement d'un rappel d'indemnité de congés payés qui reposait ainsi sur des bases de calcul et de comparaison erronées devait être rejetée de même que la demande en paiement de dommages-intérêts qui en découlait.

10. Le moyen, inopérant en sa troisième branche, n'est pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. SW... , K..., W..., O..., U..., I..., C..., BY..., AK..., GE..., TG..., WP..., BH..., LI..., et Mmes M..., R..., J..., XE... , T..., Q... épouse X..., H..., SI... épouse BA..., TV..., KL..., TJ..., QA..., GD... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour MM. SW... , K..., W..., O..., U..., I..., C..., BY..., AK..., GE..., TG..., WP..., BH..., LI..., et Mmes M..., R..., J..., XE... , T..., Q... épouse X..., H..., SI... épouse BA..., TV..., KL..., TJ..., QA..., GD....

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit et jugé que l'accord signé le 19 avril 2007 respecte les dispositions légales et jurisprudentielles concernant le calcul des indemnités de congés payés, constaté que la cour d'appel de Versailles a déclaré cet accord inopposable aux salariés sur la période antérieure à 2007, dit et jugé que la société a correctement appliqué les dispositions de l'accord signé le 19 avril 2007 et que les salariés ont été remplis de l'intégralité de leurs droits en matière d'indemnité compensatrice de congés et en conséquence débouté les salariés de leurs demandes.

AUX MOTIFS propres QU'aux termes de l'article 1351, devenu 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'entre ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité ; que M. WP... QU..., M. GE... VK..., M. TG... VY..., M. AK... AB..., M. BY... NI..., Mme TJ... FC..., Mme KL... TE..., Mme TV... D..., Mme KC... N..., M. W... NV..., Mme HF... R... Y..., Mme J... N..., M. O... G..., Mme V... XE... épouse FH..., M. U... F..., M. I... E..., M. C... B..., Mme T... A..., Mme X... L..., Mme H... D..., Mme BA... JR..., M. K... P..., Mme QA... TM..., Mme GD... JF..., M. BH... PM..., M. LI... CV..., qui n'étaient pas partie dans les instances ayant donné lieu aux deux arrêts du 25 janvier 2011, ne peuvent donc se prévaloir de ces décisions qui ne sont pas revêtues de l'autorité de la chose jugée pour ce qui les concerne ; que de surcroît, ces deux arrêts, qui statuaient sur une demande formée par Mme TN... et M. SW... au titre de l'indemnité de congé payé pour la période de 2000 à 2007, antérieure à l'accord collectif du 19 avril 2007, portaient donc sur des demandes différentes de celles soumises aujourd'hui à la cour et qui sont relatives à la période 2007/2018, postérieure à l'accord collectif du 19 avril 2007. Faute d'identité d'objet ces arrêts ne sont pas revêtus d'autorité de chose jugée, y compris pour les demandes de M. SW... ; qu'aucune des parties ne peut donc se prévaloir des deux précédents arrêts rendus le 25 juillet 2011 par la cour d'appel de Versailles : que lorsqu'un accord collectif ayant le même objet qu'un usage d'entreprise est conclu entre l'employeur et une ou plusieurs organisations représentatives de l'entreprise qui ont vocation à négocier pour l'ensemble des salariés et anciens salariés, cet accord a pour effet de mettre fin à cet usage ; que conformément à l'article L. 3141-22 du code du travail, le congé annuel prévu par l'article L. 3143-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence. Toutefois, cette indemnité ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler ; que pour assurer le maintien du salaire pendant la période de prise de congés payés, l'indemnité de congé payé d'un salarié mensualisé est déterminée en fonction du salaire perçu le mois précédent ; que la détermination des droits du salarié implique donc, au terme de la période de prise des congés payés, de procéder à une comparaison entre les deux systèmes de calcul de l'indemnité de congé payé et de régler un solde au salarié si celui appliqué par l'employeur se révèle moins favorable ; que lorsque le salarié prend des congés payés et que l'employeur procède au maintien du salaire, la rémunération du mois concerné va être constituée, d'une part, du salaire correspondant aux jours de travail effectif et, d'autre part, d'une indemnité de congé payé correspondant au jour de repos du salarié. Pour déterminer la part de salaire, l'employeur peut déduire du salaire mensuel, le salaire qui aurait dû être versé si le salarié n'avait pas pris de congé et, dans le même temps, payer une indemnité de congé payé égale au salaire qu'il aurait perçu s'il n'avait pas pris de congés payés ; que les parties s'accordent pour considérer que, jusqu'en 2000, alors que l'indemnité de congé payé était calculée sur l'ensemble de la rémunération du salarié, incluant tant le salaire de base que la prime d'objectifs, l'absence du salarié était valorisée sur le seul salaire de base sans prendre en compte la prime d'objectif, de sorte que la rémunération de l'absence, déduite du salaire mensuel, était inférieure au montant de l'indemnité de congés payés servie pour la période de repos pris par le salarié ; que ce système a pris fin lorsque l'employeur a calculé la valorisation de l'absence sur la même assiette que l'indemnité de congé payé, c'est-à-dire en incluant la prime d'objectif, sans procéder à une quelconque dénonciation d'un usage, alors même que la pratique antérieure apparaissait constante, générale et fixe ; que c'est à compter de 2003 que la société a exclu la prime d'objectif de l'assiette de congés payés ce qui a conduit à des litiges et à la saisine de la juridiction prud'homale par un certain nombre de salariés ; que l'accord collectif du 19 avril 2007 "sur le mode de calcul des congés payés" conclu au sein de l'entreprise B-Braun médical SAS, avec les organisations syndicales CFDT, CFTC, CFE/CGC, CGT et FO a mis un terme aux pratiques antérieures ; qu'ainsi que le prévoient les développements liminaires de l'accord collectif, celui-ci avait pour objet de résoudre les problèmes principaux relatifs à la valorisation de l'absence du salarié en congés payés et la comparaison pour l'indemnité de congé payé selon la méthode du maintien ou du dixième, ainsi que la détermination de l'assiette de calcul de l'indemnités de congé payé, avec, notamment, la prise en compte de la prime d'objectif et de la prime de performance ; que les partenaires sociaux ont intégré, conformément à la loi, l'ensemble des éléments de salaire affectés par la prise de congé dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congé payé et organisé la comparaison entre les méthodes dites "du maintien de salaire" et "du dixième" ; qu'il en découle que cet accord collectif a eu pour objet de déterminer les modalités de calcul de l'indemnité de congés payés, et, par suite a, en toute hypothèse, mis fin à l'usage relatif à la valorisation de l'absence du salarié en congé pour le calcul de l'indemnité de congé payé appliqué jusqu'en 2000 au sein de l'entreprise ; que cet usage ayant disparu par le seul effet de l'entrée en vigueur de l'accord collectif du 19 avril 2007, les salariés ne peuvent soutenir qu'il est toujours en vigueur faute d'avoir été régulièrement dénoncé ; que c'est ainsi que les partenaires sociaux ont fixé les modalités de calcul de l'indemnité de congé payé, sans réinstaurer dans le cadre du système dit "du maintien de salaire", une valorisation de l'absence du salarié ne prenant en compte que le salaire de base et pas la prime d'objectif ; que certes, cet accord collectif du 19 avril 2007 a pris fin à la suite de sa dénonciation par certains de ses signataires ; que toutefois, cette dénonciation n'a d'effet que pour l'avenir et ne remet pas en cause les effets acquis de l'accord collectif pendant la période où il était en vigueur, sous réserve de l'application des dispositions d'ordre public relatives à la détermination de l'indemnité de congés payés auxquelles les partenaires sociaux ne pouvaient déroger ; qu'en conséquence, les salariés ne peuvent plus se prévaloir d'un quelconque usage, ou d'une quelconque pratique, qui n'était prévue ni par la loi ni par une convention collective ou un accord collectif, relatif à la valorisation de la retenue sur salaire au titre de l'absence de congés payés sur une base, le seul salaire fixe, inférieure à celle permettant le calcul de l'indemnité de congé payé servie pour la même période au titre du maintien de salaire, laquelle inclut les primes ; que dès lors, la demande en paiement d'un rappel d'indemnité de congé payé qui repose sur cette base de calcul est infondée et doit être rejetée de même que la demande de dommages intérêts qui en découle ;

AUX MOTIFS adoptés QU'il n'est pas contesté que la société B.BRAUN MEDICAL a procédé unilatéralement à la modification du mode de calcul des congés payés en 2000 ; qu'il n'est pas contesté, non plus, qu'à partir de 2003, la société B.BRAUN MEDICAL a décidé d'exclure les primes d'objectifs de l'assiette de calcul des indemnités de congés payés ; que ces décisions unilatérales de la société B.BRAUN MEDICAL n'ont pas manqué de créer de vives contestations de la part des institutions représentatives du personnel et qu'elles ont poussé plusieurs salariés à engager des procédures prud'homales ; que pour mettre un terme au conflit les partenaires sociaux ont signé, en date du 19 avril 2007, un accord sur le mode de calcul des congés payés ; que cet accord a été signé par les organisations syndicales CFDT, CGT, CFE-CGC et FO qui sont les quatre organisations, aujourd'hui, représentatives dans l'entreprise ; qu'il est bien précisé dans le préambule de l'accord que : «
Après plusieurs réunions, les partenaires sociaux ont trouvé un accord à la fois sur le règlement du passé, mais aussi sur le mode de calcul des congés payés pour l'avenir. Cet accord consiste à éclairer des points non précisés par la réglementation sur certains aspects du calcul des congés payés, pour une application claire et connue de tous dans l'entreprise. » ; que, suite à la signature de cet accord, quatre salariés ont refusé de se voir appliquer les règles destinées à apurer le passé et ont poursuivi leurs instances judiciaires ; que dans deux arrêts, en date du 9 septembre 2008, la Cour d'appel de Versailles a dit d'une part que l'accord d'entreprise du 19 avril 2007 n'était pas opposable aux parties pour la période courant jusqu'en juin 2007, date de sa prise d'effet, et d'autre part que la prime sur objectif entrait dans l'assiette des congés payés ; que dans deux arrêts, en date du 25 janvier 2011, la Cour d'appel de Versailles a confirmé ces deux points et a condamné, en s'appuyant sur les résultats de l'étude faite par l'expert, Madame RC..., qu'elle avait désignée pour les besoins de la cause, la société B.BRAUN MEDICAL à verser aux demandeurs, un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés pour la période 2000-2007 qui correspond exactement aux demandes formulées ; que, si ces arrêts de la Cour d'appel de Versailles s'imposent en ce qu'ils disent que la prime sur objectifs entre dans l'assiette des congés payés ils ne s'imposent pas automatiquement pour le calcul des indemnités de congés payés ; qu'en effet, avant l'accord d'avril 2007, il n'existait aucun accord d'entreprise concernant le mode de calcul de l'indemnisation des congés payés ; qu'avant 2000 le mode de calcul de l'indemnisation des congés payés appliqué par la société B.BRAUN MEDICAL donnait entière satisfaction aux salariés ; que la contestation des salariés est née de la décision unilatérale de la société B.BRAUN MEDICAL de changer, en 2000, son mode de calcul de l'indemnisation des congés payés ; qu'en l'absence de règles de calcul légales précises il était logique que l'expert mandaté par la Cour d'appel de Versailles recherche le calcul le plus favorable aux salariés ; qu'à compter de juin 2007 c'est le mode de calcul défini dans l'accord d'avril 2007 qui s'impose pourvu qu'il respecte les règles légales et jurisprudentielles ; qu'à l'analyse de l'accord du 19 avril 2007 il apparaît clairement qu'aucune des dispositions dudit accord relatives au "mode de calcul pour l'avenir" ne déroge aux dispositions légales et jurisprudentielles, et en particulier à celles de l'article L. 3141-22 du Code du travail ; que l'application de l'accord par la société B.BRAUN MEDICAL, à savoir : - maintien de salaire sur l'exercice en appliquant un taux strictement identique pour l'indemnisation et la retenue pour congés, - comparaison avec la règle du dixième en fin d'exercice, ne semble pas avoir posé de problème pendant les deux ou trois premières années ; que les organisations syndicales signataires n'ont contesté l'application de l'accord par la société B.BRAUN MEDICAL qu'à partir du moment où elles ont eu connaissance des arrêts du 25 janvier 2011 de la Cour d'Appel de Versailles et qu'elles n'ont dénoncé l'accord que le 24 juin 2014 ; que, dans le rapport des conseillers rapporteurs désignés par le Conseil de céans, le Conseil des salariés de la société B.BRAUN MEDICAL « admet ne pouvoir appuyer les demandes des salariés sur d'autres textes ou jurisprudences explicites que les arrêts rendus par la Cour d'appel de Versailles du 25 janvier 2011 sur la base du rapport d'expertise de Madame RC... » ; que les calculs de l'expert, Madame RC..., ayant été établis à une période où il n'existait aucun accord collectif mais simplement un usage qui avait été rompu unilatéralement par la société B.BRAUN MEDICAL, ne peuvent pas s'imposer dans la période postérieure à juin 2007 du fait de l'existence d'un accord entre les partenaires sociaux sur le mode de calcul des congés payés pour l'avenir, accord respectant toutes les règles légales et jurisprudentielles ; qu'il n'est pas inutile de rappeler que le versement de la prime d'objectifs se fait indistinctement des périodes de travail et des périodes de congés ; que les calculs produits par les salariés de la société B.BRAUN MEDICAL, à l'appui de leur demande, prennent en compte le seul salaire de base pour le calcul de la retenue pour absence congés payés alors même qu'ils prennent en compte la somme du salaire de base et de la prime d'objectifs pour le calcul de l'indemnisation des congés payés ; que si l'article L. 3141-22 du Code du travail ne précise pas les éléments de rémunération à prendre en compte pour la retenue pour absence il n'en demeure pas moins fondé d'en déduire que la retenue doit se faire sur les mêmes éléments de salaire pour la période courante ; qu'il ressort du rapport des conseillers rapporteurs que l'exclusion de la prime d'objectifs dans le calcul de la retenue pour absence concomitamment à sa prise en compte dans le calcul de l'indemnisation pour une même période de congés revient à la faire payer, une seconde fois par l'employeur, au moins pour partie ; que, dans ces conditions, le Conseil constate que les salariés de la société B.BRAUN MEDICAL ont été remplis de leurs droits en matière d'indemnisation de leurs congés payés à compter de juin 2007; que les salariés de la société B.BRAUN MEDICAL seront donc déboutés de leurs demandes d'indemnité compensatrice de congés payés 2007 à 2015 ; que la société B.BRAUN MEDICAL ayant correctement appliqué les dispositions de l'accord signé le 19 avril 2007, les demandeurs ne pourront qu'être déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts pour exécution déloyale de leur contrat de travail.

1° ALORS QUE les salariés doivent se voir appliquer la méthode de calcul de l'indemnité de congés payés qui leur est la plus favorable ; qu'un accord d'entreprise ne pouvant déroger au mode de calcul légal de l'indemnité de congés payés qu'à la condition d'être plus favorable pour le salarié, doit être écarté, au profit de l'application des dispositions légales, l'accord d'entreprise qui prévoit des modalités de calcul de l'indemnité de congé payés moins favorables que les dispositions légales ; qu'en déboutant les salariés de leur demande de rappel d'indemnité de congés payés sans rechercher si la méthode de calcul retenue par l'accord du 19 avril 2007 et appliquée par l'employeur n'était pas moins favorable que l'application des dispositions légales, ce dont il résultait que l'application de cet accord devait être écartée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3141-22 du code du travail

2° ALORS subsidiairement QUE les juges doivent motiver leurs décisions ; qu'en se fondant sur l'accord d'entreprise du 19 avril 2007 pour rejeter la demande de rappel d'indemnité de congés payés présentée par les salariés sans indiquer les motifs pour lesquels la méthode de calcul de l'indemnité de congés payés retenue par cet accord était plus favorable que celle revendiquée par les salariés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile

3° ALORS en tout état de cause QUE lorsqu'un accord est dénoncé il cesse de produire ses effets à l'expiration du délai de préavis ; qu'en se fondant sur l'accord d'entreprise du 19 avril 2007 pour rejeter les demandes des salariés pour la totalité de la période allant de 2007 à 2018 quand il résultait de ses constatations que l'accord, dénoncé le 25 juin 2014, avait cessé de produire ses effets le 25 septembre 2015, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-10 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-11367
Date de la décision : 08/07/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 29 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2020, pourvoi n°19-11367


Composition du Tribunal
Président : M. Cathala (président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.11367
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