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08/07/2020 | FRANCE | N°18-18772

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 juillet 2020, 18-18772


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juillet 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 436 F-D

Pourvoi n° B 18-18.772

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 JUILLET 2020

M. V... Y..., domicilié [...] , a formé le pourvoi

n° B 18-18.772 contre l'arrêt rendu le 25 avril 2018 par la cour d'appel de Limoges (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. F... E..., ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juillet 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 436 F-D

Pourvoi n° B 18-18.772

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 JUILLET 2020

M. V... Y..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° B 18-18.772 contre l'arrêt rendu le 25 avril 2018 par la cour d'appel de Limoges (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. F... E..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pomonti, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de M. Y..., de Me Bertrand, avocat de M. E..., et l'avis de Mme Pénichon, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 juin 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme Pomonti, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 25 avril 2018), aux termes d'un acte de reconnaissance de dette du 19 juillet 2013, contresignée par un avocat, M. Y... a reconnu avoir reçu de M. E..., au titre d'un prêt portant intérêts au taux de 3,50 % l'an, la somme de 25 000 euros, qu'il s'est engagé à rembourser, en une ou plusieurs fois, avant le 1er août 2015.

2. Faute pour M. Y... de s'être acquitté de cette dette, M. E... l'a assigné en paiement.

Examen du moyen unique

Enoncé du moyen

3. M. Y... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. E... la somme de 25 000 euros, outre intérêts, alors :

« 1°/ que le juge du fond ne peut méconnaître les termes clairs et précis des documents qui lui sont soumis ; que l'attestation du 1er novembre 2016 de M. A... précisait que lors de la signature pour le fonds de commerce du Times club chez Me K..., M. E... a fait produire une reconnaissance de dette alors que M. Y... et moi-même n'étions pas informés, dans un premier temps, M. Y... a refusé de signer mais M. E... ne nous a pas laissé le choix, prétextant que si nous voulions la discothèque, (nous) devions impérativement signer cette dernière" ; que pour condamner le signataire de la reconnaissance de dette à en payer le montant, l'arrêt retient que la teneur de cette attestation s'avère impropre à établir le caractère fictif ou illicite de l'obligation constatée par les reconnaissances de dettes établies le jour de la signature de l'acte de vente de la discothèque ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel qui a dénaturé l'attestation de M. A... dont il ressortait que la reconnaissance de dette s'analysait en une contre-lettre dissimulant une partie du prix de vente du fonds de commerce, a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause.

2°/ que le juge du fond ne peut méconnaître les termes clairs et précis des documents qui lui sont soumis; que l'attestation de M. J... indique que "le jour de la signature de l'acte de vente, avant d'apposer nos signatures, M. E..., propriétaire du Times club a fait signer, non pas sous la contrainte, mais en leur forçant un peu la main à M. A... et M. Y... une reconnaissance de dette stipulant qu'après l'acte de vente signé, tous deux devraient encore donner à M. E... la somme de 25 000 euros, soit 50 000 euros à eux deux. Le délai, si mes souvenirs sont bons était d'un an et demi. Cette reconnaissance était ou signée ou la vente était annulée" ; que pour condamner le signataire de la reconnaissance de dette à en payer le montant, l'arrêt retient que la teneur de cette attestation s'avère impropre à établir le caractère fictif ou illicite de l'obligation constatée par les reconnaissances de dettes établies le jour de la signature de l'acte de vente de la discothèque ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel qui a dénaturé l'attestation de M. J... dont il ressortait que la reconnaissance de dette constituait une contre-lettre portant dissimulation du prix indiqué dans l'acte de cession du fonds de commerce, a violé le principe susvisé et
l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause.

3°/ que dans ses conclusions notifiées le 20 novembre 2017, M. Y... faisait valoir que, dès qu'il avait eu connaissance de l'attestation établie par M. N..., il avait déposé plainte contre X pour fausse attestation et versait aux débats le procès-verbal du 12 octobre 2016 dans lequel il affirmait ne pas connaître cette personne ; que pour reprocher au signataire de la reconnaissance de dette de ne pas rapporter la preuve de l'absence de versement des 25 000 euros, l'arrêt se fonde sur l'attestation de M. N..., selon laquelle celui-ci aurait personnellement assisté à la remise de cette somme en espèces par M. E... le 17 juin 2011 ; qu'en se déterminant ainsi, sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile, qu'elle a violé. »

Réponse de la Cour

4. L'arrêt retient d'abord que l'acte de reconnaissance de dette est régulier en la forme, qu'il fait présumer la remise des fonds, qu'il se suffit à lui-même pour justifier la demande en paiement du créancier et qu'il incombe donc au débiteur, qui l'invoque à titre de moyen de défense, d'établir l'absence de remise des fonds et le défaut ou l'illicéité de la cause du contrat résultant, selon lui, de la contre-lettre dissimulant une partie du prix de vente du fonds de commerce.

5. Il retient ensuite que M. Y... échoue à rapporter cette preuve, laquelle ne saurait se déduire, ni de la simple concomitance de la signature le même jour, de l'acte de cession du fonds de commerce et de la reconnaissance de dette, ni des attestations rédigées par MM. A... et J..., tous deux associés, avec M. Y..., de la société Times, qui a fait l'acquisition du fonds de commerce, et dont le premier est pareillement en litige avec M. E... pour une autre reconnaissance de dette, identique, également non honorée.

6. Il retient enfin que M. Y... ne démontre pas l'absence de remise de la somme de 25 000 euros, laquelle, selon les indications de M. E... et l'attestation de M. N..., a en réalité eu lieu, en espèces, au [...] , le 17 juin 2011, soit deux ans avant la signature de l'acte de cession du fonds de commerce.

7. En cet état, c'est sans dénaturer les termes des attestations de MM. A... et J... mais par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée de l'ensemble des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions qui, pour critiquer le témoignage de M. N..., invoquaient un dépôt de plainte contre X pour « établissement d'une attestation ou d'un certificat inexact », sans en tirer une conséquence juridique explicite, et n'articulaient pas un véritable moyen, a retenu que M. Y... n'établissait ni le défaut ou l'illicéité de la cause du contrat ni l'absence de remise des fonds qu'il alléguait.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. Y... et le condamne à payer à M. E... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué :

D'AVOIR condamné M. Y... à payer à M. E... la somme de 25 000 euros, outre intérêts au taux de 3,50 % à compter du 19 juillet 2013.

AUX MOTIFS, QU'« aux termes d'un acte de "reconnaissance de dette" du 19 juillet 2013 (pièce de M. E... n° 1) obéissant, de manière non critiquée, à l'ensemble des exigences de forme prévues par la loi, et en outre contresigné par un avocat conformément aux dispositions de l'article 66-3-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, M. Y... a reconnu avoir reçu de M. E..., au titre d'un prêt portant intérêts au taux de 3,50 % l'an, la somme de 25 000 euros qu'il s'est engagé à rembourser en une ou plusieurs fois avant la date du 1er août 2015 ; que cette reconnaissance de dette signée par M. Y..., qui fait présumer la remise des fonds correspondants à M. E..., se suffit à elle-même pour justifier de la demande en paiement du créancier muni de cet acte régulier en la forme; qu'il incombe donc au débiteur, qui l'invoque à titre de moyen de défense, d'établir l'absence de remise de fonds et le défaut ou l'illicéité de la cause du contrat qui résulterait, selon lui, de l'existence d'une contre-lettre dissimulant une partie du prix de vente d'un fonds de commerce ; que, toutefois, M. Y... échoue à rapporter cette preuve, laquelle ne saurait en particulier se déduire, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, de la simple concomitance de la signature "simultanée", le même jour, de l'acte de cession du fonds de commerce aux termes duquel M. E..., gérant de la société à responsabilité limitée FD, a vendu la discothèque bar de nuit Times Club aux quatre associés de la société par actions simplifiée TIMES (v. pièce de M. Y... n° 2), pas plus que des attestations (pièces de M. Y... n° 5 et 6) rédigées par deux d'entre eux, MM. G... A... et M... J..., dont le premier est pareillement en litige avec M. E... pour une autre reconnaissance dette, identique, également non honorée (cf. dossier n° RG 17/00385), la teneur de ces attestations s'avérant impropre à établir le caractère fictif ou illicite de l'obligation constatée par ces reconnaissances de dettes établies le jour de la signature de l'acte de vente de la discothèque; que, de plus, M. Y... ne démontre pas l'absence de remise de la somme de 25 000 euros, laquelle, selon les indications de M. E... (cf. ses conclusions d'appel, p 6) et l'attestation de M. X... N... qu'il verse aux débats (cf pièce de M E... n°3), a en réalité eu lieu, en espèces, au [...] le 17 juin 2011, soit deux ans avant la signature de l'acte de cession du fonds de commerce».

ALORS D'UNE PART QUE le juge du fond ne peut méconnaître les termes clairs et précis des documents qui lui sont soumis ; que l'attestation du 1er novembre 2016 de M. A... précisait que « lors de la signature pour le fonds de commerce du Times Club chez Me K..., M. E... a fait produire une reconnaissance de dette alors que M. Y... et moi-même n'étions pas informés, dans un premier temps, M. Y... a refusé de signer mais M. E... ne nous a pas laissé le choix, prétextant que si nous voulions la discothèque, (nous) devions impérativement signer cette dernière » ; que pour condamner le signataire de la reconnaissance de dette à en payer le montant, l'arrêt retient que la teneur de cette attestation s'avère impropre à établir le caractère fictif ou illicite de l'obligation constatée par les reconnaissances de dettes établies le jour de la signature de l'acte de vente de la discothèque ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel qui a dénaturé l'attestation de M. A... dont il ressortait que la reconnaissance de dette s'analysait en une contre-lettre dissimulant une partie du prix de vente du fonds de commerce, a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause.

ALORS D'AUTRE PART QUE le juge du fond ne peut méconnaître les termes clairs et précis des documents qui lui sont soumis ; que l'attestation de M. J... indique que « le jour de la signature de l'acte de vente, avant d'apposer nos signatures, M. E..., propriétaire du Times Club a fait signer, non pas sous la contrainte, mais en leur forçant un peu la main à M. A... et M. Y... une reconnaissance de dette stipulant qu'après l'acte de vente signé, tous deux devraient encore donner à M. E... la somme de 25 000 euros, soit 50 000 euros à eux deux. Le délai, si mes souvenirs sont bons était un an et demi. Cette reconnaissance était ou signée ou la vente était annulée » ; que pour condamner le signataire de la reconnaissance de dette à en payer le montant, l'arrêt retient que la teneur de cette attestation s'avère impropre à établir le caractère fictif ou illicite de l'obligation constatée par les reconnaissances de dettes établies le jour de la signature de l'acte de vente de la discothèque ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel qui a dénaturé l'attestation de M. J... dont il ressortait que la reconnaissance de dette constituait une contre-lettre portant dissimulation du prix indiqué dans l'acte de cession du fonds de commerce, a violé le principe susvisé et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause.

ALORS ENFIN QUE dans ses conclusions notifiées le 20 novembre 2017 (p 4 § 6 et § 7), M. Y... faisait valoir que dès qu'il avait eu connaissance de l'attestation établie par M. N..., il avait déposé plainte contre X pour fausse attestation et versait aux débats le procès-verbal du 12 octobre 2016 dans lequel il affirmait ne pas connaître cette personne ; que pour reprocher au signataire de la reconnaissance de dette de ne pas rapporter la preuve de l'absence de versement des 25 000 euros, l'arrêt se fonde sur l'attestation de M. N..., selon laquelle celui-ci aurait personnellement assisté à la remise de cette somme en espèces par M. E... le 17 juin 2011 ; qu'en se déterminant ainsi, sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile, qu'elle a violé.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-18772
Date de la décision : 08/07/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 25 avril 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 jui. 2020, pourvoi n°18-18772


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.18772
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