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25/06/2020 | FRANCE | N°19-13553

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 25 juin 2020, 19-13553


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 juin 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 370 F-D

Pourvoi n° Z 19-13.553

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 JUIN 2020

1°/ M. Q... O...,

2°/ Mme H... V..., épouse O...,

domicili

és tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° Z 19-13.553 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2019 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 juin 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 370 F-D

Pourvoi n° Z 19-13.553

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 JUIN 2020

1°/ M. Q... O...,

2°/ Mme H... V..., épouse O...,

domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° Z 19-13.553 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2019 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Maisons Côte Atlantique, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ à la société Crédit foncier de France, société anonyme, dont le siège est [...] ,

3°/ à la société CAMCA assurances, société anonyme, dont le siège est [...] ),

4°/ à la société Compagnie européenne de garanties et cautions, société anonyme, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation.

La société Crédit foncier de France a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les sept moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SCP Richard, avocat de M. et Mme O..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Maisons Côte Atlantique, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Crédit foncier de France, de Me Le Prado, avocat de la société CAMCA assurances, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Compagnie européenne de garanties et cautions, après débats en l'audience publique du 12 mai 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Crédit foncier de France (le CFF) du désistement de son pourvoi incident.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 10 janvier 2019), M. et Mme O... ont procédé à plusieurs investissements locatifs par l'intermédiaire de M. A..., gérant des sociétés PGL et PLS.

3. M. et Mme O... ont conclu un contrat de construction de maison individuelle (CCMI) avec la société Maison Côte Atlantique (la société MCA), assurée auprès de la société CAMCA, prévoyant des travaux restant à la charge du maître d'ouvrage pour 40 000 euros.

4. L'opération immobilière a été financée par un prêt souscrit auprès du CFF et la garantie légale de livraison a été accordée par la société Compagnie européenne de garanties et cautions (la CEGC).

5. La réception est intervenue sans réserve au nom des maîtres d'ouvrage par M. A... le 23 juillet 2009.

6. M. et Mme O... ont confié certains des travaux réservés à la société Sicaud, qui a été payée.

7. La maison a été donnée à bail par la société PLS pour le compte de M. et Mme O... à compter du 2 novembre 2009.

8. Invoquant divers désordres affectant leur immeuble, M. et Mme O... ont, après expertise, assigné les sociétés MCA, CAMCA, Sicaud, CEGC et CFF en indemnisation de leurs préjudices.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième, troisième et sixième moyens, ci-après annexés

9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

10. M. et Mme O... font grief à l'arrêt de juger prescrite leur demande tendant à voir condamner le CFF à leur payer la somme de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde, alors « que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que le point de départ de l'action en responsabilité contractuelle dirigée contre un établissement bancaire à raison d'un manquement à son devoir de mise en garde court à compter du jour où s'est manifesté le dommage qui en est résulté pour le client ; que la conclusion du prêt ne saurait, à elle seule, révéler le dommage à la victime ; qu'en se bornant à énoncer, pour juger que l'action en responsabilité du CFF pour manquement à son devoir de conseil était prescrite, pour avoir été introduite plus de cinq ans après la conclusion du prêt, que M. et Mme O... connaissaient à cette date leurs revenus et les charges de remboursement qu'allait entraîner l'emprunt et qu'ils se trouvaient à même d'apprécier la manière dont le prêteur avait exercé son
obligation de conseil, dès lors qu'ils indiquaient n'avoir été reçus par aucun
représentant de la banque, sans rechercher à quelle date le dommage, consistant en la perte d'une chance de ne pas contracter, s'était effectivement révélé à M. et Mme O..., emprunteurs non avertis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

11. La cour d'appel a retenu, procédant à la recherche prétendument omise, que, lors de la signature de l'acte authentique de prêt, M. et Mme O... connaissaient leurs revenus et les charges de remboursement qu'allait entraîner l'emprunt et se trouvaient ainsi à même d'apprécier la manière dont le prêteur avait exercé son obligation de conseil puisqu'ils indiquaient n'avoir jamais été reçus par aucun représentant de la banque qui n'avait même jamais pris contact avec eux.

12. La cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision.

Sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

13. M. et Mme O... font grief à l'arrêt de juger prescrite leur demande tendant à voir condamner le CFF à leur payer la somme de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement aux dispositions de l'article L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation, alors « que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que le point de départ de l'action en responsabilité contractuelle dirigée à l'encontre d'un établissement bancaire à raison d'un manquement à son devoir de contrôle, préalablement à l'émission d'une offre de prêt, de ce que le contrat de construction de maison individuelle avec fourniture du plan comporte les énonciations mentionnées à l'article L 231-2 du Code de la construction et de l'habitation, court à compter du jour où s'est manifesté le dommage qui en est résulté pour le maître de l'ouvrage ; que la conclusion du contrat de construction de maison individuelle ne saurait, à elle seule, révéler le dommage à la victime ; qu'en se bornant à énoncer, pour juger que l'action en responsabilité du CFF était prescrite, pour avoir été introduite plus de cinq ans après la conclusion du contrat de construction de maison individuelle, que cette action en responsabilité, fondée sur l'absence de contrôle de la régularité dudit contrat, se manifestait à la date de sa signature, sans rechercher à quelle date le dommage s'était effectivement révélé à M. et Mme O..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation, ensemble les articles 1147, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

14. La cour d'appel a retenu, procédant à la recherche prétendument omise, que le défaut de contrôle de la régularité du contrat de construction de maison individuelle imputé au CFF sur le fondement des dispositions de l'article L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation se manifestait par définition à la signature du contrat et que les maîtres de l'ouvrage étaient donc en mesure de le constater à cette date.

15. Elle a pu en déduire que l'action fondée sur ce défaut de contrôle de la régularité du contrat était prescrite pour avoir été formée plus de cinq ans après la conclusion de l'acte de prêt,

16. La cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision.

Sur le septième moyen

Enoncé du moyen

17. M. et Mme O... font grief à l'arrêt de condamner le CFF à leur payer la seule somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur perte de chance de ne pas investir dans le projet immobilier, alors :

« 1°/ que le préjudice résultant de la violation d'une obligation de conseil ou d'information est constitué par une perte de chance d'éviter le dommage par une décision mieux éclairée et ne saurait présenter un caractère forfaitaire ; qu'il incombe seulement à la victime de préciser à quel montant elle évalue ses différents préjudices, l'office du juge consistant alors à en apprécier le bien-fondé et à déterminer la fraction de ces préjudices correspondant à la perte de chance de les éviter ; qu'en fixant le montant de l'indemnisation de M. et Mme O... à la somme de 5 000 euros, sans avoir préalablement déterminé l'étendue de leur préjudice global et la fraction de ce préjudice qui correspondait à leur perte de chance, consécutive à la violation par le CFF de son obligation de contrôle et d'enregistrement de la société ECI, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°/ qu'en se bornant à énoncer, pour décider que la perte d'une chance de M. et Mme O... de ne pas souscrire à l'opération de [...] était très faible, qu'ils avaient accepté cinq autres projets similaires, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il était peu probable, au regard notamment de leur endettement, qu'ils obtiennent un financement bancaire sans l'intermédiation de la Société ECI, qui ne disposait pas des agréments nécessaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

18. La cour d'appel a rappelé qu'il appartenait au juge d'apprécier l'importance de la perte de chance subie.

19. La cour d'appel a souverainement retenu qu'à l'époque des faits M. et Mme O... accordaient une telle confiance à M. A..., initiateur du projet, qu'ils avaient simultanément accepté cinq autres projets similaires financés avec cinq autres banques et que, dès lors, il pouvait être considéré que, s'ils avaient bénéficié d'une meilleure information et d'un délai de rétractation de quatorze jours, la probabilité d'une renonciation à l'opération immobilière aurait été néanmoins très faible.

20. La cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, en a souverainement déduit que la perte de chance, quoique certaine, apparaissait très limitée et qu'elle disposait des éléments suffisants pour l'évaluer à la somme de 5 000 euros.

21. La cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. et Mme O... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. et Mme O... (demandeurs au pourvoi principal).

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame O... de leur demande tendant à voir condamner la Société MAISONS COTE ATLANTIQUE (MCA) à leur payer la somme complémentaire de 17.462,30 euros HT au titre des travaux réparatoires nécessaires au respect des normes intérieures pour personnes handicapées, outre la somme complémentaire de 12 % sur le montant retenu au titre de la maîtrise d'oeuvre ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE c'est par des motifs pertinents que les débats d'appel ne permettent pas de remettre en cause que le Tribunal a estimé que le défaut de respect des normes relatives à l'accessibilité de l'immeuble à des personnes handicapées, qui n'est pas contesté par le constructeur, constituait une malfaçon rendant l'ouvrage impropre à sa destination, puisque le bien ne pouvait être loué à des personnes présentant un handicap, que ce défaut n'était pas couvert par la réception sans réserves, car il n'était pas apparent pour un maître de l'ouvrage profane, et qu'il engageait la responsabilité décennale de la Société MCA, qui devrait assumer le coût des travaux de remise aux normes ; que c'est également par d'exacts motifs adoptés par la cour que le premier juge, après une juste analyse des conclusions de l'expert judiciaire, a fixé le montant de l'indemnité, au titre de la mise en conformité intérieure de l'immeuble aux normes relatives aux handicapés, à la somme totale de 7.414€ TTC indexée sur l'indice BT 01 à compter de mars 2013, date du devis BATISOFT ayant servi aux évaluations de l'expert judiciaire, en rejetant les demandes au titre de la réparation de la porte de salle de bain, incluse dans le devis général, ainsi que celles formées au titre des travaux complémentaires d'installation et nettoyage de chantier, jugés non nécessaires, comme la demande au titre des frais de maîtrise d'oeuvre ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le Tribunal, faisant sien l'avis de l'expert judiciaire, ne retiendra pas la nécessité des travaux complémentaires sollicités par les demandeurs, ni les installations et nettoyages pour un total de 3435 € sollicités en sus de ces évaluations et dont le coût n'est pas démontré ; qu'il y a donc lieu de faire droit aux demandes formées à l'encontre de la SAS MAISONS CÔTE ATLANTIQUE à hauteur de 7.414 euros, indexés sur l'indice BT 01 du coût de la construction depuis mars 2013 au titre des désordres de nature décennale ;

ALORS QUE le juge n'est pas lié par les conclusions de l'expert ; qu'en se bornant à énoncer, pour débouter Monsieur et Madame O... de leur demande tendant à obtenir le paiement d'une indemnité complémentaire au titre des travaux intérieurs de mise en conformité aux normes handicapées, qu'elle faisait sien l'avis de l'expert judiciaire, qui avait retenu le chiffrage de 6.740 euros HT, correspondant aux évaluations du devis de la Société BATISOFT du 10 décembre 2012, et l'absence de nécessité des travaux complémentaires sollicités par les demandeurs, sans indiquer en quoi Monsieur et Madame O... ne pouvaient prétendre aux paiements des travaux de mise en conformité aux normes handicapées qui étaient visés dans le devis établi par la Société SDC, lesquels n'étaient pas tous inclus dans celui de la Société BATISOFT, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame O... de leur demande tendant à voir condamner la Société MAISONS COTE ATLANTIQUE (MCA) à leur payer la somme de 8.438 euros HT au titre des travaux réparatoires nécessaires au respect des normes extérieures pour personnes handicapées, outre la somme complémentaire de 12 % sur le montant retenu au titre de la maîtrise d'oeuvre ;

AUX MOTIFS QUE pour les motifs exposés plus haut, la demande formée par les travaux réparatoires au titre des normes handicapées extérieures doit être rejetée, la Société MCA n'ayant pas à répondre de ces travaux réservés ;

ALORS QU'en se bornant à énoncer, pour débouter Monsieur et Madame O... de leur demande tendant à obtenir le paiement d'une indemnité complémentaire au titre des travaux extérieurs de mise en conformité aux normes handicapées, que ces aménagements faisaient partie des travaux réservés par le maître de l'ouvrage, de sorte qu'ils n'étaient pas fondés à réclamer à la Société MAISONS COTE ATLANTIQUE une indemnité pour la réalisation de prestations qui n'entraient pas dans le champ des obligations de ce constructeur, sans répondre aux conclusions de Monsieur et Madame O..., qui faisaient valoir que leur demande d'indemnité était fondée au regard de la mission de concepteur et de coordinateur des travaux de la Société MAISONS COTE ATLANTIQUE, qui n'avait pas veillé à ce titre à la conformité de la construction aux normes handicapées, peu important que la réalisation des travaux d'accessibilité aux personnes handicapées ait été réservée par le maître de l'ouvrage, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame O... de leurs demandes tendant à voir ordonner la réintégration du coût des travaux réservés dans le prix forfaitaire du contrat de construction de maison individuelle (CCMI) et à voir, en conséquence, condamner la Société MAISONS COTE ATLANTIQUE (MCA) à leur payer la somme de 22.694,10 euros TTC ;

AUX MOTIFS QUE les époux O... demandent par ailleurs de voir réintégrer le coût des travaux réservés dans le forfait du contrat de construction et de condamner la Société MCA à leur rembourser la somme de 22.694,10 € TTC qu'ils ont versée à tort à la société Sicaud au titre des travaux réservés réalisés au motif que la mention manuscrite, par laquelle le maître de l'ouvrage précise et accepte le coût et la charge des travaux dont il se réserve l'exécution, avait été portée par un tiers dans la notice descriptive, eux-mêmes ayant seulement inscrit la mention "Lu et approuvé", suivie de leur signature, ce qui constitue une violation des dispositions d'ordre public des articles L. 231-2 et R. 231-4 du code de la construction et de l'habitation et de celles de l'arrêté du 27 novembre 1991 ; que la Société MCA conclut au rejet de cette demande, au motif principal que les maîtres de l'ouvrage ont accepté le principe et le coût des travaux réservés, en signant des devis et en réglant les entrepreneurs ; que l'article L. 231-2 alinéa 1- d) du code de la construction et de l'habitation énonce que le contrat de construction d'une maison individuelle avec fourniture du plan comporte une clause manuscrite spécifique et paraphée, par laquelle le maître de l'ouvrage accepte le coût et la charge des travaux dont il se réserve l'exécution ; que cette règle est d'ordre public, ainsi qu'il est dit à l'article L. 230-1 du même code ; qu'elle est rappelée au dernier alinéa de l'article R. 231-4 et à l'article 2 de l'arrêté du 27 novembre 1991 fixant la notice descriptive ; qu'en l'espèce, il résulte de l'audition, lors de l'enquête de police précitée, de M... P..., ancienne salariée de la Société MCA, qu'elle a expressément reconnu avoir inscrit de sa main la mention litigieuse, ainsi que le lieu et la date, à la place des époux O... de sorte que la notice descriptive n'est pas conforme aux textes visés ; que cependant, les époux O... ne sollicitent pas la nullité du contrat, qui, s'agissant de la violation d'une règle d'ordre public, est la seule sanction applicable à cette irrégularité et ils réclament seulement l'indemnisation du préjudice en résultant ; que sur ce point, il y a lieu de noter qu'ils ont paraphé toutes les pages de la notice descriptive dans laquelle se trouvaient clairement mentionnés les travaux réservés, qu'ils ont signé, lu et approuvé le récapitulatif de la nature et du coût de ces travaux et qu'ils n'ont élevé aucune protestation à la réception de la notice descriptive, du contrat et des plans par lettre recommandée avec AR reçue le 14 octobre 2007 ; que le Tribunal a aussi exactement relevé qu'ils ont confié l'exécution de partie des travaux réservés à la Société SICAUD en souscrivant un prêt auprès du CCF pour un montant de 263.469€ couvrant le prix d'achat du terrain, de la construction, des travaux réservés et des travaux d'aménagements extérieurs, ce qui implique qu'ils ont nécessairement connu et accepté le prix des travaux réservés ; qu'ils ne justifient ainsi d'aucun préjudice qui leur aurait été causé par l'irrégularité invoquée et c'est donc à juste titre qu'ils ont été déboutés de leur demande de réintégration du montant des travaux réservés dans le forfait et de remboursement de la somme versée à la Société SICAUD ;

1°) ALORS QUE les travaux nécessaires à l'habitation de l'immeuble, non prévus ou non chiffrés dans la notice descriptive et n'ayant pas fait l'objet d'une mention manuscrite, par laquelle le maître de l'ouvrage accepte d'en supporter la charge, incombent au constructeur ; qu'en affirmant, pour débouter Monsieur et Madame O... de leur demande de réintégration du coût des travaux réservés dans le prix forfaitaire et global de la construction, fondée sur le fait que la mention de la notice descriptive n'a pas été écrite de leur main, que seule la nullité du contrat pouvait sanctionner une telle irrégularité, de sorte que Monsieur et Madame O... ne pouvaient prétendre voir réintégrer le coût de ces travaux dans le prix forfaitaire de la construction, la Cour d'appel a violé les articles L. 231-2, c) et d) et R. 231-4 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble l'annexe de l'arrêté du 27 novembre 1991 fixant la notice descriptive prévue par les articles R. 231-4 et R. 232-4 du Code de la construction et de l'habitation relatifs au contrat de construction d'une maison individuelle ;

2°) ALORS QUE les travaux nécessaires à l'habitation de l'immeuble, non prévus ou non chiffrés dans la notice descriptive et n'ayant pas fait l'objet d'une mention manuscrite, par laquelle le maître de l'ouvrage accepte d'en supporter la charge, incombent au constructeur ; qu'en énonçant, pour débouter Monsieur et Madame O... de leur demande de réintégration du coût des travaux réservés dans le prix forfaitaire et global de la construction, fondée sur le fait que la mention de la notice descriptive n'a pas été écrite de leur main, qu'ils avaient paraphé toutes les pages de cette notice dans laquelle se trouvaient clairement mentionnés les travaux réservés par eux et qu'ils avaient souscrit un prêt pour un montant supérieur aux prix d'achat du terrain, de la construction, des travaux réservés et des travaux extérieurs, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs inopérants, a violé les articles L. 231-2, c) et d) et R. 231-4 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble l'annexe de l'arrêté du 27 novembre 1991 fixant la notice descriptive prévue par les articles R. 231-4 et R. 232-4 du Code de la construction et de l'habitation relatifs au contrat de construction d'une maison individuelle ;

3°) ALORS QUE les travaux nécessaires à l'habitation de l'immeuble, non prévus ou non chiffrés dans la notice descriptive et n'ayant pas fait l'objet d'une mention manuscrite, par laquelle le maître de l'ouvrage accepte d'en supporter la charge, incombent au constructeur ; qu'en déboutant Monsieur et Madame O... de leur demande de réintégration du coût des travaux réservés dans le prix forfaitaire et global de la construction, fondée sur le fait que la mention de la notice descriptive n'a pas été écrite de leur main, au motif inopérant qu'ils ne justifiaient d'aucun préjudice qui leur aurait été causé par l'irrégularité invoquée, même s'agissant d'une irrégularité d'ordre publique, la Cour d'appel a violé les articles L. 231-2, c) et d) et R. 231-4 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble l'annexe de l'arrêté du 27 novembre 1991 fixant la notice descriptive prévue par les articles R. 231-4 R. 232-4 du Code de la construction et de l'habitation relatifs au contrat de construction d'une maison individuelle.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé prescrite la demande de Monsieur et Madame O..., tendant à voir condamner la Société CREDIT FONCIER DE FRANCE à leur payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde ;

AUX MOTIFS QUE le CFF invoque en appel l'article 2224 du Code civil et les dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008 dont il est issu, pour soutenir que si l'action en responsabilité se prescrivait par 30 ans avant le 19 juin 2008, date d'entrée en vigueur de la nouvelle loi, les prescriptions dont le délai a été réduit à 5 ans ont toutes expiré le 20 juin 2013 ; que la banque en conclut que l'action des emprunteurs aurait dû être introduite cinq ans au plus tard après la date de la signature du prêt, soit avant le 7 mai 2013, de sorte que lors de l'assignation introductive d'instance du 17 avril 2014, cette action était prescrite ; que les époux O... contestent ce raisonnement au motif que c'est seulement en cours d'exécution du prêt qu'ils ont pu réaliser qu'ils avaient subi un dommage par le défaut de devoir de mise en garde de la banque et qu'ils n'ont eu connaissance du caractère illicite du démarchage effectué par la Société ECI qu'au mois de novembre 2014, lorsqu'ils ont reçu communication du dossier pénal de sorte que leur action n'est pas prescrite ; que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il s'est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; que le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde, consistant en une perte de chance de ne pas contracter, se manifeste dès l'octroi du crédit (Com 26 janvier 2010, pourvoi n° 08-18354 et 16 mars 2010, pourvoi n° 09-11263) ; qu'en l'espèce, lors de la signature de l'acte authentique de prêt, les époux O... connaissaient leurs revenus et les charges de remboursement qu'allait entraîner 1'emprunt ; qu'ils se trouvaient ainsi à même d'apprécier la manière dont le prêteur avait exercé son obligation de conseil puisqu'ils indiquent n'avoir jamais été reçus par aucun représentant de la banque qui n'a même jamais pris contact avec eux ; qu'il s'ensuit que leur action en responsabilité, fondée sur d'éventuels manquements de la Société CFF à son devoir de mise en garde et d'information est prescrite pour avoir été introduite plus de cinq ans après la conclusion de l'acte de prêt ;

ALORS QUE les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que le point de départ de l'action en responsabilité contractuelle dirigée contre un établissement bancaire à raison d'un manquement à son devoir de mise en garde court à compter du jour où s'est manifesté le dommage qui en est résulté pour le client ; que la conclusion du prêt ne saurait, à elle seule, révéler le dommage à la victime ; qu'en se bornant à énoncer, pour juger que l'action en responsabilité de la Société CREDIT FONCIER DE FRANCE pour manquement à son devoir de conseil était prescrite, pour avoir été introduite plus de cinq ans après la conclusion du prêt, que Monsieur et Madame O... connaissaient à cette date leurs revenus et les charges de remboursement qu'allait entraîner l'emprunt et qu'ils se trouvaient à même d'apprécier la manière dont le prêteur avait exercé son obligation de conseil, dès lors qu'ils indiquaient n'avoir été reçus par aucun représentant de la banque, sans rechercher à quelle date le dommage, consistant en la perte d'une chance de ne pas contracter, s'était effectivement révélé à Monsieur et Madame O..., emprunteurs non avertis, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 2224 du Code civil.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé prescrite la demande de Monsieur et Madame O..., tendant à voir condamner la Société CREDIT FONCIER DE FRANCE à leur payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement aux dispositions de l'article L 231-10 du Code de la construction et de l'habitation ;

AUX MOTIFS QUE la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il s'est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; que le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde, consistant en une perte de chance de ne pas contracter, se manifeste dès l'octroi du crédit (Com 26 janvier 2010, pourvoi n° 08-18354 et 16 mars 2010, pourvoi n° 09-11263) ; qu'en l'espèce, lors de la signature de l'acte authentique de prêt, les époux O... connaissaient leurs revenus et les charges de remboursement qu'allait entraîner l'emprunt ; qu'ils se trouvaient ainsi à même d'apprécier la manière dont le prêteur avait exercé son obligation de conseil puisqu'ils indiquent n'avoir jamais été reçus par aucun représentant de la banque qui n'a même jamais pris contact avec eux ; qu'il s'ensuit que leur action en responsabilité, fondée sur d'éventuels manquements de la Société CFF à son devoir de mise en garde et d'information est prescrite pour avoir été introduite plus de cinq ans après la conclusion de l'acte de prêt ; qu'il en est de même pour l'action fondée sur le défaut de contrôle de la régularité du CCMI imputé au CFF sur le fondement de l'article L 231-10 du code de la construction et de l'habitation, défaut qui se manifeste par définition à la signature du contrat et que les maîtres d'ouvrage étaient donc en mesure de constater à cette date ;

ALORS QUE les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que le point de départ de l'action en responsabilité contractuelle dirigée à l'encontre d'un établissement bancaire à raison d'un manquement à son devoir de contrôle, préalablement à l'émission d'une offre de prêt, de ce que le contrat de construction de maison individuelle avec fourniture du plan comporte les énonciations mentionnées à l'article L 231-2 du Code de la construction et de l'habitation, court à compter du jour où s'est manifesté le dommage qui en est résulté pour le maître de l'ouvrage ; que la conclusion du contrat de construction de maison individuelle ne saurait, à elle seule, révéler le dommage à la victime ; qu'en se bornant à énoncer, pour juger que l'action en responsabilité de la Société CREDIT FONCIER DE FRANCE était prescrite, pour avoir été introduite plus de cinq ans après la conclusion du contrat de construction de maison individuelle, que cette action en responsabilité, fondée sur l'absence de contrôle de la régularité dudit contrat, se manifestait à la date de sa signature, sans rechercher à quelle date le dommage s'était effectivement révélé à Monsieur et Madame O..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 231-10 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble les articles 1147, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 2224 du Code civil.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé prescrites les demandes de Monsieur et Madame O..., tendant à voir prononcer la nullité de la clause d'intérêts conventionnels stipulée à l'acte authentique de prêt du 7 mai 2008 et à voir, en conséquence, substituer le taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel, ainsi qu'à voir condamner la Société CREDIT FONCIER DE FRANCE à leur rembourser le montant des intérêts trop perçus et à voir ordonner l'édition d'un nouveau tableau d'amortissement du prêt ;

AUX MOTIFS QUE le CFF invoque la prescription quinquennale de l'action en se fondant sur les dispositions de l'article 1304 alinéa ancien et 2224 du Code civil en soutenant que la rédaction claire et précise de la clause de stipulation d'intérêts permettait aux époux O... de déterminer, dès la signature de l'acte de prêt, ce qui était inclus dans le calcul du taux effectif global et ce qui ne l'était pas ; que la banque estime en conséquence que lors de la délivrance de l'assignation en nullité, le 17 avril 2014, plus de cinq ans après la signature de cet acte, l'action était prescrite, ce que contestent les époux O... en indiquant qu'ils n'ont eu connaissance du caractère erroné du taux effectif global qu'à la réception d'un rapport d'expertise qu'ils ont fait réaliser par E... S..., expert financier près la Cour d'appel de Paris ; que dans leur assignation introductive d'instance, délivrée à la société CFF le 17 avril 2014, les époux O... demandaient au Tribunal de prononcer la nullité de la clause relative aux intérêts, en invoquant notamment "le caractère erroné du TEG lors de l'octroi du prêt" (page 21 de l'acte) ; que l'avis réalisé à leur demande par l'expert S... est daté du 4 juin 2015, soit plus de 14 mois plus tard (leur pièce 44) ; qu'il apparaît ainsi que les époux O... étaient en mesure, au vu des énonciations de l'acte de prêt, de déceler par eux-mêmes le caractère erroné du taux effectif global qui ne leur a pas été révélé par le rapport de M.S... ; que la Cour retiendra donc la date du prêt comme point de départ de la prescription de l'action en nullité d'où il suit que lors de l'introduction de l'instance, plus de cinq après cette date, cette action était prescrite ; que le jugement sera donc réformé de ce chef ;

1°) ALORS QUE, dans leur assignation délivrée à la Société CREDIT FONCIER DE FRANCE, Monsieur et Madame O... demandaient à voir prononcer la nullité de la clause de variation des intérêts conventionnels, ainsi que la substitution du taux conventionnel par le taux légal, au motif que la banque ne leur avait donné aucune information sur le taux effectif global en cours d'exécution du contrat ; qu'en affirmant néanmoins que dans leur assignation, Monsieur et Madame O... demandaient la nullité de la clause relative aux intérêts en invoquant le caractère erroné du taux effectif global lors de l'octroi du prêt, la Cour d'appel a violé l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

2°) ALORS QU'en cas d'octroi d'un crédit à un consommateur ou à un non-professionnel, la prescription de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel, engagée par celui-ci en raison d'une erreur affectant le taux effectif global, court à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur ; que le point de départ de la prescription est la date de la convention, lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, ou lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l'emprunteur ; qu'en se bornant à énoncer, pour déclarer l'action prescrite, qu'il convenait de retenir la date de l'acte de prêt comme point de départ de la prescription, dès lors que Monsieur et Madame O... sollicitaient la nullité de la clause d'intérêts conventionnels dans son assignation, tandis que l'avis de l'expert avait été rendu plus de quatorze mois plus tard, de sorte qu'ils étaient en mesure, au vu des énonciations de l'acte de prêt, de déceler par euxmêmes le caractère erroné du taux effectif global, sans rechercher si Monsieur et Madame O... avaient initialement fondé leur demande en nullité à raison d'un défaut d'information de la banque sur le taux effectif global en cours de contrat, puis avait complété cette demande en raison de l'erreur affectant le taux effectif global qui leur avait été révélée, en cours de procédure, par l'avis de l'expert S... du 4 juin 2015, ce dont il résultait que le point de départ de la prescription devait être fixé à cette date, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1304 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et de l'article 1907 du même code, ensemble les article L 313-1 et L 313-2 du Code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016.

SEPTIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société CREDIT FONCIER DE FRANCE à payer à Monsieur et Madame O... la seule somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur perte de chance de ne pas investir dans le projet immobilier ;

AUX MOTIFS QUE les époux O... exposent qu'ils ont été démarchés à domicile par une Société ECI et par les nommés L... A... et Y... D... et que ce démarchage n'a pas été réalisé conformément aux dispositions d'ordre public des articles L. 519-1, L. 519-5, L. 341-1 à L. 341-17, L. 353-1 et L. 353-2 du Code monétaire et financier, dans leur rédaction applicable à l'époque ; qu'ils font valoir que le CFF, qui était en relations contractuelles avec la Société ECI, n'a pu ignorer ces faits et que s'il avait refusé l'intervention de ces intermédiaires, eux-mêmes n'auraient pas investi dans le projet immobilier en litige ; qu'ils en déduisent que la faute ainsi commise par la banque leur a fait perdre une chance de ne pas contracter le prêt ; que le CFF indique que la Société ECI était en lien avec la Société PLS mandatée par les emprunteurs, que la Société ECI n'a eu qu'un rôle d'apporteur d'affaires à son égard, activité non soumise à l'époque aux règles concernant les intermédiaires en opérations de banque qui n'ont été prévues que postérieurement, par la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 et le décret n° 2012-101 du 26 janvier 2012 ; qu'il précise qu'il n'était ainsi tenu d'aucune obligation légale d'enregistrement ou de contrôle de la Société ECI et qu'il n'a commis aucune faute au titre du prétendu démarchage effectué par cette société, laquelle a agi sous sa propre responsabilité, en l'absence de toute relation contractuelle avec lui et sans rémunération ; que sur ce point, le CFF soutient que la pièce produite pour démontrer qu'il aurait versé une commission de 1% du prêt, extraite du grand livre de la Société ECI constate en réalité un versement de la société sur son compte bancaire et non un règlement reçu du CFF ; que par jugement du 11 juin 2015, devenu définitif, le tribunal correctionnel de Bordeaux a déclaré L... A... coupable du délit d'escroquerie, commis courant 2008 au préjudice notamment du CFF par l'établissement de fausses factures au nom de la société ARCS pour déterminer la banque à débloquer des fonds pour le compte des époux O... ; que la même décision a déclaré Y... D... coupable de complicité des escroqueries commises par M. A..., par le dépôt de dossiers de demandes de prêt comportant des documents falsifiés auprès, notamment, de la société UCB, aux droits de laquelle vient la société CFF ; que le jugement énonce que M. A... a recruté fin 2007 dans une salle de sport parisienne M. D... comme intermédiaire financier, sans aucune compétence financière, pour servir d'écran, à travers la Société ECI ; que Y... D... a déclaré aux enquêteurs qu'il a créé la Société ECI, à la demande de L... A..., et que dans le cadre de cette société, il recueillait des documents auprès de personnes dont les coordonnées lui étaient communiquées par l'intéressé, à qui il les transmettait, en vue du montage d'opérations immobilières aux fins de défiscalisation ; qu'il adressait aussi aux établissements bancaires des dossiers dans lesquels certaines pièces avaient été falsifiées par L... A... ; que sa fille, B... D..., [...] de la société ECI, a attesté que la société n'avait jamais touché de commissions de la part des clients mais seulement de la part des banques avec lesquelles était signée au préalable, une convention ; qu'il est versé aux débats une convention de mandat d'intermédiaire en opération de banque signée entre la Société ECI et le CREDIT IMMOBILIER de FRANCE le 9 septembre 2008 qui est de nature à confirmer les propos de Mme D... mais dans le cas des époux O..., aucun mandat n'est produit, le CFF soutenant que la Société ECI intervenant comme simple apporteur d'affaires, la signature d'un mandat n'était pas exigée ; qu'il est établi, par la production du grand livre général de la Société ECI que, contrairement à ce que soutient le CFF, le compte de la Société ECI a été crédité le 4 juillet 2008 d'un versement de la part de cette banque, d'une commission de 2.634,69 € sous la rubrique "REM C Foncier O...", somme représentant précisément 1% du montant du prêt ; que par ailleurs, il n'est produit aucune pièce établissant le versement d'une commission par les emprunteurs, comme le prétend le CFF ; que ces éléments démontrent en tout état de cause que la société ECI est bien intervenue comme intermédiaire entre les époux O... et la société CFF, pour l'obtention du prêt destiné à financer l'achat du terrain et la construction de l'immeuble en cause ce qu'admet la banque même si elle conteste l'existence d'un démarchage et l'application de ses règles en se prévalant du statut alors non réglementé d'apporteur d'affaires ; que lors de son audition par les services de police, Y... D... a déclaré que la société ECI se rendait chez les particuliers afin de collecter les pièces nécessaires à l'établissement des dossiers de prêt bancaire ; que ce faisant, elle a exercé une activité entrant dans la définition du démarchage bancaire, donnée par l'article L. 341-1 du Code monétaire et financier dans sa rédaction applicable à l'époque, due à l'ordonnance n° 2005-648 du 06 juin 2005 ; qu'elle était donc soumise aux dispositions des différents textes mentionnés à l'article L. 519-5 du code précité, dans sa rédaction alors applicable, due à la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, à savoir aux articles L. 341-4 à L. 341-17 et L. 353-1 à L. 353-5 du même code ; qu'il ressort des dispositions de l'article L. 341-4 du Code monétaire et financier, dans leur rédaction applicable à l'époque, due à la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006, que les établissements de crédit qui entendaient recourir à l'activité de démarchage bancaire devaient donner, à une personne physique ou morale, un mandat nominatif, d'une durée de deux ans renouvelable, mentionnant la nature des produits et services qui en faisaient l'objet, ainsi que les conditions d'exercice de l'activité de démarchage ; que l'article L. 341-6, aujourd'hui abrogé mais en vigueur à l'époque, ajoutait que ces établissements devaient faire enregistrer leurs mandataires en tant que démarcheurs auprès de l'Autorité des marchés financiers et l'article L. 341-12 énonçait le détail des informations qui devaient être fournies à la personne démarchée ; que l'article L. 341-16 prévoyait, au bénéfice de celleci, un droit de rétractation pouvant être exercé pendant un délai de quatorze jours ; que le CFF ayant accepté de consentir un prêt immobilier aux époux O... par l'entremise de la société ECI qu'elle a rémunérée pour ce service, il avait l'obligation de vérifier la situation de cette société au regard de l'activité de démarchage, de lui établir le mandat mentionné à l'article L. 341-4 du code monétaire et financier et de la faire enregistrer comme démarcheur auprès de l'Autorité des marchés financiers, sans se contenter de lui verser des commissions d'apporteur d'affaires ; que le défaut d'exécution de ses obligations de contrôle et d'enregistrement par la Société CFF a eu pour conséquence que les époux O... ont pu être démarchés par un intermédiaire qui ne respectait pas les règles applicables à son activité et qu'ils ont été privés des informations et du droit de rétractation prévus par les articles L. 341-12 et L. 341-16 du code monétaire et financier ; que de ce fait, ils ont perdu une chance de ne pas contracter ; que les époux O... fixent leur préjudice à la somme de 100,000 €, représentant la différence entre le montant du capital emprunté (263.469 €) et la valeur de l'immeuble litigieux qu'ils évaluent à 170.000 € ; que toutefois, la valeur de ce bien est sans rapport avec le manquement reproché à la banque et au surplus, une perte de chance ne peut être égale à l'avantage qui aurait été obtenu si la chance perdue s'était réalisée ; qu'il appartient au juge d'apprécier l'importance de la perte subie ; qu'en l'espèce, il y a lieu de relever qu'à l'époque des faits, les époux O... portaient une telle confiance à L... A... initiateur du projet immobilier de [...], qu'ils ont simultanément accepté cinq autres projets similaires financés avec cinq autres banques ; que dans ces conditions, il peut être considéré que s'ils avaient bénéficié d'une meilleure information et d'un délai de rétractation de quatorze jours, la probabilité d'une renonciation à l'opération de [...] aurait néanmoins été très faible ; que la perte de chance, quoique certaine, apparaît donc très limitée ; que la cour dispose des éléments suffisants pour l'évaluer à la somme de 5.000 € qui sera mise à la charge de la société CFF ;

1°) ALORS QUE le préjudice résultant de la violation d'une obligation de conseil ou d'information est constitué par une perte de chance d'éviter le dommage par une décision mieux éclairée et ne saurait présenter un caractère forfaitaire ; qu'il incombe seulement à la victime de préciser à quel montant elle évalue ses différents préjudices, l'office du juge consistant alors à en apprécier le bien-fondé et à déterminer la fraction de ces préjudices correspondant à la perte de chance de les éviter ; qu'en fixant le montant de l'indemnisation de Monsieur et Madame O... à la somme de 5.000 euros, sans avoir préalablement déterminé l'étendue de leur préjudice global et la fraction de ce préjudice qui correspondait à leur perte de chance, consécutive à la violation par la Société CREDIT FONCIER DE FRANCE de son obligation de contrôle et d'enregistrement de la Société ECI, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°) ALORS QUE, en tout état de cause, en se bornant à énoncer, pour décider que la perte d'une chance de Monsieur et Madame O... de ne pas souscrire à l'opération de [...] était très faible, qu'ils avaient accepté cinq autres projets similaires, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il était peu probable, au regard notamment de leur endettement, qu'ils obtiennent un financement bancaire sans l'intermédiation de la Société ECI, qui ne disposait pas des agréments nécessaires, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-13553
Date de la décision : 25/06/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 10 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 25 jui. 2020, pourvoi n°19-13553


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.13553
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