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24/06/2020 | FRANCE | N°18-23510

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 juin 2020, 18-23510


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 juin 2020

Rejet

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 493 F-P+B
sur second moyen du
pourvoi incident

Pourvoi n° B 18-23.510

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 JUIN 2020

La sociét

é Europ Taurion Ambazac, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° B 18-23.510 contre l'arrêt rendu le 17 septem...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 juin 2020

Rejet

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 493 F-P+B
sur second moyen du
pourvoi incident

Pourvoi n° B 18-23.510

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 JUIN 2020

La société Europ Taurion Ambazac, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° B 18-23.510 contre l'arrêt rendu le 17 septembre 2018 par la cour d'appel de Limoges (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. T... V..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

M. V... a formé, un pourvoi incident contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Mariette, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Europ Taurion Ambazac, de la SCP Didier et Pinet, avocat de M. V..., après débats en l'audience publique du 13 mai 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Mariette, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 17 septembre 2018) M. V... a été engagé, le 18 août 1997, par la société Sani Assistance en qualité d'ambulancier, coefficient 141 de la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, son contrat de travail ayant été successivement transféré à la société STS Sani Assistance à compter du 1er octobre 2000, puis à la société Europ Ambulance à compter du 17 juillet 2006 et, enfin, à la société Europ Taurion Ambazac à compter du 18 mars 2008. Il occupait en dernier lieu, les fonctions d'ambulancier, catégorie B, 2ème degré.

2. Par lettre du 18 janvier 2013, il a pris acte de la rupture du contrat de travail et a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de diverses sommes au titre des indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour non-respect des durées maximales du travail, des temps de pause et des repos.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et troisième moyens du pourvoi principal de l'employeur et sur le premier moyen du pourvoi incident du salarié, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen du pourvoi incident du salarié

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de limiter le montant des dommages-intérêts alloués pour non-respect des durées maximales de travail et des temps de pause à la somme de 1 700 euros, alors « qu'il ne peut être tenu compte d'un système d'équivalence pour vérifier, en matière de temps de travail effectif, le respect des seuils et plafonds fixés par la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt du 1er décembre 2005, Dellas, C-14/04, points 51 et 52) ; qu'en décidant au contraire, pour limiter le montant des dommages et intérêts alloués pour non-respect des durées maximales de travail et des temps de pause, qu'il convenait de tenir compte du régime de pondération prévu par l'accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire en sa rédaction issue de l'avenant du 16 janvier 2008, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-33, L. 3121-35 et L. 3131-1 du code du travail en leur rédaction applicable litige, interprétés à la lumière de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail. »

Réponse de la Cour

5. La directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt du 1er décembre 2005, C-14/04, points 51 et 52) ne fait pas obstacle à l'application des rapports d'équivalence aux durées maximales de travail fixées par le droit national dès lors que sont respectés les seuils et plafonds communautaires, pour l'appréciation desquels les périodes de travail effectif doivent être comptabilisées dans leur intégralité, sans possibilité de pondération.

6. Il résulte de l'article 3.1 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire dans sa rédaction issue de l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008, repris par le décret n° 2009-32 du 9 janvier 2009 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport sanitaire en son article 3, qu'afin de tenir compte des périodes d'inaction, ainsi que des repos, repas et coupures, le temps de travail effectif des personnels ambulanciers roulants à temps plein est compté sur la base du cumul hebdomadaire de leurs amplitudes journalières d'activité prises en compte pour 75 % de leur durée pendant les services de permanence. En dehors des services de permanence, ce taux est fixé à 80 % à la date d'extension de l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008, 83 % un an après la date d'extension de l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008, 86 % deux ans après la date d'extension de l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008, 90 % trois ans après la date d'extension de l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008.

7. Aux termes l'article 2 de l'accord-cadre du 4 mai 2000, dans sa rédaction issue de l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008 la durée de travail effectif ne peut excéder 48 heures hebdomadaires au cours d'une semaine isolée. La durée maximale hebdomadaire de travail des personnels ambulanciers roulants ne peut excéder 48 heures en moyenne sur un trimestre ou toute autre période plus courte qui pourrait être mise en place dans l'entreprise par accord d'entreprise, au sens de la définition du temps de travail fixée par la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003. Pour vérifier le respect de la limite maximale fixée au paragraphe ci-dessus, le temps de travail s'apprécie conformément aux définitions données par les dispositions communautaires en vigueur. En conséquence, cette limite maximale s'apprécie sans application du régime de pondération prévu au point a) d 3.1 de l'article 3.

8. Enfin, selon l'article 4 du décret n° 2009-32 du 9 janvier 2009, le recours au régime d'équivalence prévu à l'article 3 ne peut avoir pour effet de porter à plus de quarante-huit heures la durée hebdomadaire moyenne de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire, comptée heure pour heure, sur une période quelconque de quatre mois consécutifs.

9. Ayant relevé que la contestation du salarié portait, non pas sur le dépassement du plafond de quarante-huit heures de durée moyenne du travail hebdomadaire calculée sur une période de quatre mois fixé par le droit de l'Union, mais sur le dépassement de la durée de travail de quarante-huit heures sur une semaine fixée par le droit national, la cour d'appel en a exactement déduit que les coefficients de pondération du régime d'équivalence prévu par l'article 3 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 devaient s'appliquer pour apprécier le respect de la durée maximale hebdomadaire de travail de 48 heures sur une semaine fixée tant par l'article 2 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 que par l'article L. 3121-35 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, de sorte qu'au regard de l'évolution des coefficients de pondération sur la période considérée, la durée hebdomadaire maximale de travail effectif avait été respectée sur la période non prescrite avant le 11 janvier 2009, et n'avait été dépassée pour la période postérieure et jusqu'en 2012, qu'à sept reprises.

10. La cour d'appel n'ayant ensuite pas tenu compte de la pondération résultant du régime d'équivalence, pour l'appréciation du respect des temps de pause, le moyen en ce qui les concerne, manque en fait.

11. Le moyen ne peut donc être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Europ Taurion Ambazac aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Europ Taurion Ambazac, demanderesse au pourvoi principal.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR écarté la péremption d'instance invoquée par la société Europ Taurion Ambazac ; dit et jugé recevable la réinscription après retrait du rôle de l'instance de M. T... V... ; dit que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par M. V... produirait les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; annulé la mise à pied du 5 décembre 2012 ; condamné la société Europ Taurion Ambazac à verser à M. V... les sommes de 1 700 € à titre de dommages et intérêts pour non respect des durées maxima du temps de travail et des durées de pause, 250 € à titre d'indemnité pour les frais d'entretien des tenues de travail, 562,24 € brut au titre des salaires de la mise à pied conservatoire, outre les congés payés y afférents, 3 617,92 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, 5 024,68 € à titre d'indemnité de licenciement, 7 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE "l'article R. 1452-8 du code du travail, dans sa version abrogée le 1er août 2016, prévoit qu'en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ;

QU'il se déduit de l'article 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 que l'article R. 1452-8 demeure applicable aux instances introduites devant les conseils de prud'hommes avant le 1er août 2016 ;

QU'en l'espèce, le conseil de prud'hommes a ordonné le retrait de l'affaire du rôle des affaires en cours le 10 février 2014 mais il n'a mis aucune diligence à la charge de l'une ou l'autre des parties ; qu'il s'ensuit que la société Europ Taurion Ambazac n'est pas fondée à invoquer la péremption de l'instance à l'égard de son adversaire dès lors que la juridiction n'avait mis à la charge de ce dernier aucune diligence à effectuer" ;

ALORS QUE le défaut de diligence à l'initiative de l'une des parties dans le délai de deux ans à compter du retrait du rôle emporte péremption de l'instance ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que par décision du 10 février 2014, le conseil de prud'hommes de Guéret a ordonné le retrait de l'affaire du rôle des affaires en cours et que celle-ci a été réinscrite le 25 juillet 2016 ; qu'en écartant cependant l'exception de péremption soulevée par la société Europ Taurion Ambazac au motif inopérant que cette décision, opérant un retrait du rôle sur demande conjointe des parties, n'avait mis aucune diligence à leur charge, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé par fausse interprétation l'article R. 1452-8 du code du travail et par refus d'application l'article 386 du code de procédure civile..

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Europ Taurion Ambazac à verser à M. V... une somme de 1 700 € à titre de dommages et intérêts pour méconnaissance des temps de pause légaux ;

AUX MOTIFS sur la prescription QUE " M. V... invoque des manquements de son employeur remontant jusqu'à l'année 2007 et celui-ci lui oppose la prescription d'une partie des faits allégués ;

QUE le délai de prescription applicable est celui relatif aux actions portant sur l'exécution du contrat de travail ;

QUE le délai de prescription qui était initialement de 30 ans a été modifié successivement par les lois n° 2008-561 du 17 juin 2008 (date d'entrée en vigueur le 19 juin) et n° 2013-504 du 14 juin 2013 (date d'entrée en vigueur le 16 juin), passant de 5 ans (article 2224 du code civil) à deux ans (article L. 1471-1 du code du travail) ;

QUE le droit transitoire prévu par ces deux lois prévoit que les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ;

QU'en l'espèce, M. V... a introduit son action le 24 octobre 2013 et il invoque des manquements de son employeur remontant jusqu'à l'année 2007 ; qu'il apparaît dès lors que les manquements invoqués antérieurement au 24 octobre 2008 se trouvent prescrits" ;

ET AUX MOTIFS sur le temps de pause légal QUE "l'article L. 3121-33 du code du travail prévoit que, dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes et que des dispositions conventionnelles plus favorables peuvent fixer un temps de pause supérieur ;

QU'en l'espèce, M. V... prétend avoir travaillé sans bénéficier de la pause légale de 20 minutes du 1er octobre 2007 au 2 mars 2009, du 12 au 15 octobre 2009 ; qu'il prétend également avoir été placé à compter du mois de mai 2011 dans une situation où il ne pouvait pas systématiquement exercer ce droit ; qu'enfin, il soutient ne pas avoir bénéficié de cette pause du 17 avril 2012 au 27 janvier 2013 ;

QUE ceci est confirmé par les feuilles de route du salarié et que l'employeur ne conteste pas ce manquement (
) ;

QUE sur le préjudice, hormis le non respect de la pause légale, qui est intervenu de manière récurrente, les autres manquements sont extrêmement ponctuels ; qu'il n'en demeure pas moins que le non respect de ces règles mises en oeuvre pour préserver la santé et la sécurité des travailleurs a généré un trouble dans la vie du salarié qui a été confronté à une charge de travail importante à l'occasion de ces manquements ;

QUE le préjudice subi a été justement évalué par les premiers juges à la somme de 1 700 € ; que leur décision sera confirmée de ce chef" ;

1°) ALORS QUE le délai de prescription des actions en exécution du contrat de travail a successivement été réduit de trente à cinq ans puis de cinq à deux ans, par les lois n° 2008-561 du 17 juin 2008 et 2013-504 du 14 juin 2013 ; que selon les articles 26-II de la loi du 17 juin 2008 et 21-V de la loi du 14 juin 2013, en cas de réduction de la durée du délai de prescription, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. V... a introduit le 24 octobre 2013 une action en dommages et intérêts consécutive à des manquements de son employeur à ses obligations issues du contrat de travail concernant notamment les temps de pause légaux de sorte que cette action était prescrite pour tous les manquements antérieurs au 24 octobre 2008 ; qu'en accueillant cependant l'action du salarié en indemnisation de manquements commis à compter du 1er octobre 2007 la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1471-1 du code du travail ;

2°) ALORS subsidiairement QUE dans ses conclusions oralement reprises, la société Europ Taurion Ambazac avait expressément soutenu que "
M. V... bénéficiait, comme le démontre la société concluante, de temps de pause qui pouvaient être pris hors lieu de travail à l'intérieur de la période d'amplitude rémunérée" ; que "les feuilles de route produites par le salarié mentionnent expressément les temps de repas", et que "
M. V... était libre de vaquer à ses occupations personnelles durant les périodes de pause-déjeuner qu'il prenait en dehors de son lieu de travail et qui étaient d'une durée minimale de une heure" ; que l'employeur avait produit les feuilles de route correspondantes pour les années 2009 à 2012 ; qu'en retenant pour indemniser M. V... au titre d'une méconnaissance des temps de pause "
que l'employeur ne conteste pas ce manquement", la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, et méconnu les articles 4 et 5 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Europ Taurion Ambazac à verser à M. V... une somme de 250 € à titre de dommages et intérêts pour la prise en charge de l'entretien de sa tenue professionnelle ;

AUX MOTIFS QUE " L'article 22 bis de l'annexe 1 de Convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 prévoit pour le personnel à bord de véhicules sanitaires que les blouses (3 au minimum par salarié) sont fournies et entretenues par l'entreprise qui renouvellera une blouse chaque année ;

QU'en l'espèce, il se déduit de la note de service du 4 janvier 2008 que la société Europ Taurion Ambazac a confié l'entretien des tenues de son personnel au pressing du Roussillon jusqu'à ce que cette entreprise fasse l'objet d'une procédure collective et qu'elle a ensuite demandé à ses salariés de continuer à déposer les « tenues sales dans un sac plastique prévu à cet effet dans la salle de bains pour qu'[elles] soient nettoyées avec les couvertures des ambulances » ;

QUE la société Europ Taurion Ambazac ne produit aucune facture de nettoyage des tenues de ses salariés à compter de cette date ; qu'elle justifie néanmoins, au moyen de témoignages de salariés, de la mise à disposition d'une machine à laver et d'un sèche-linge ; que la mise à disposition de ces appareils ménagers aboutit en réalité à transférer la charge de l'entretien des tenues qui lui incombe aux salariés avec les moyens fournis par l'entreprise ;

QU'il s'ensuit qu'en organisant ainsi l'entretien des tenues de son personnel, la société Europ Taurion Ambazac n'a pas respecté les dispositions de l'article 22 bis précité ;

QUE ce manquement de l'employeur qui a perduré pendant cinq ans a nécessairement causé un préjudice à M. V... qui a été justement évalué à 250 euros par les premiers juges dont la décision sera confirmée" ;

1°) ALORS QUE si l'employeur doit assurer l'entretien des vêtements de travail dont le port est obligatoire, il lui appartient d'en définir les modalités dans l'exercice de son pouvoir de direction ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que la société Europ Taurion Ambazac avait mis, à ses frais, à la disposition des salariés les moyens matériels d'entretenir leurs tenues professionnelles sur le lieu de travail ; qu'en la condamnant cependant à indemniser M. V..., motif pris "
que la mise à disposition de ces appareils ménagers aboutit en réalité à transférer la charge de l'entretien des tenues qui lui incombe aux salariés avec les moyens fournis par l'entreprise", la cour d'appel a violé le principe fondamental de la liberté d'entreprendre, ensemble les articles 1135 devenu 1194 du code civil et L. 1221-1 du code du travail, 22 bis de l'accord du 16 juin 1961 annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 ;

2°) ALORS QUE l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond ; qu'en condamnant la société Europ Taurion Ambazac à verser à M. V... une somme de 250 € à titre de dommages et intérêts au motif que le "manquement" de l'employeur à son obligation d'entretenir les blouses de son salarié lui avait "nécessairement causé un préjudice" la cour d'appel, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail, 22 bis de l'accord du 16 juin 1961 annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, ensemble l'article 1231-2 du code civil.
Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. V..., demandeur au pourvoi incident.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré prescrits les manquements imputés à la société Europ Taurion Ambazac par M. V... pour la période antérieure au 24 octobre 2008 et d'AVOIR, en conséquence, limité le montant des dommages et intérêts alloués au salarié pour non-respect des durées maximales de travail et des temps de pause à 1.700 € ;

AUX MOTIFS QUE, sur la prescription : M. V... invoque des manquements de son employeur remontant jusqu'à l'année 2007 et celui-ci lui oppose la prescription d'une partie des faits allégués ; que le délai de prescription applicable est celui relatif aux actions portant sur l'exécution du contrat de travail ; que le délai de prescription qui était initialement de 30 ans a été modifié successivement par les lois n° 2008-561 du 17 juin 2008 (date d'entrée en vigueur le 19 juin) et n° 2013-504 du 14 juin 2013 (date d'entrée en vigueur le 16 juin) passant de 5 ans (article 2224 du code civil) à 2 ans (article L. 1471-1 du code du travail) ; que le droit transitoire prévu par ces deux lois prévoit que les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'en l'espèce, M. V... a introduit son action le 24 octobre 2013 et il invoque des manquements de son employeur remontant jusqu'à l'année 2007 ; qu'il apparaît dès lors que les manquements invoqués antérieurement au 24 octobre 2008 se trouvent prescrits ; que, sur la durée hebdomadaire maximale de travail : l'article 2 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire prévoyait dans le 1er alinéa du paragraphe consacré aux limites maximales de travail : « la durée de travail effectif ne peut excéder 48 heures hebdomadaires au cours d'une semaine isolée. La durée hebdomadaire moyenne de temps de travail effectif calculée par trimestre civil ne peut excéder 44 heures, ni en tout état de cause 572 heures au total par trimestre (soit 13 semaines) » ; que l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008 a complété ce paragraphe en y ajoutant trois nouveaux alinéas, applicables à compter du 11 janvier 2009, date de publication de l'extension du 21 novembre 2008 ; qu'ainsi, le texte a été complété par les trois alinéas suivants : « dans le transport sanitaire, les règles concernant la durée du travail sont fixées par la directive européenne 2003 / 88 / CE du 4 novembre 2003, le code du travail français et les dispositions du présent accord-cadre ; que la durée maximale hebdomadaire de travail des personnels ambulanciers roulants ne peut excéder 48 heures en moyenne sur un trimestre ou toute autre période plus courte qui pourrait être mise en place dans l'entreprise par accord d'entreprise, au sens de la définition du temps de travail fixée par la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 ; que pour vérifier le respect de la limite maximale fixée au paragraphe ci-dessus, le temps de travail s'apprécie conformément aux définitions données par les dispositions communautaires en vigueur ; qu'en conséquence, cette limite maximale s'apprécie sans application du régime de pondération prévu au point a) d 3.1 de l'article 3 : « décompte et rémunération du temps de travail des personnels ambulanciers roulants ci-dessous » ; que l'article 3.1 de cet accord, dans sa rédaction issue de l'avenant du 16 janvier 2008 prévoit en son a), relatif au décompte du temps de travail des personnels ambulanciers roulants à temps plein : « afin de tenir compte des périodes d'inaction (notamment au cours des services de permanence), de repos, repas, coupures et de la variation de l'intensité de leur activité, le temps de travail effectif des personnels ambulanciers roulants est décompté, dans les conditions visées ci-dessous, sur la base du cumul hebdomadaire de leurs amplitudes journalières d'activité, prises en compte : 1. Services de permanence : pour 75 % de leurs durées ; 2. En dehors des services de permanence : pour 90 % de leurs durées ; que le coefficient de décompte à 90 % est atteint dans les 3 ans qui suivent l'entrée en application de la première étape prévue par l'accord.

À la date d'entrée en application de l'avenant
n° 3
À la date du
1er anniversaire de l'entrée
en
application de l'avenant
n°3
À la date du 2ème anniversaire de l'entrée
en
application de l'avenant
n° 3
À la date du 3ème anniversair
e de
l'entrée en
application
de l'avenant
n° 3

Coefficient
de décompte
80 %
83 %
86 %
90 %

» ; que les dispositions de l'article 2 de l'accord-cadre instaurent donc une double limite concernant la durée maximale de travail, à savoir une durée maximale moyenne calculée sans faire application des dispositions de l'article 3-1 et une durée maximale hebdomadaire calculée en faisant application des coefficients de décompte prévus par l'article 3-1, l'exclusion du régime de pondération de cet article étant limitée au calcul de la durée maximale moyenne ; que par ailleurs, compte tenu des dispositions transitoires concernant la mise en oeuvre de la modification du coefficient de décompte, le taux de celui-ci était de 75 % jusqu'au 11 janvier 2009 avant d'être porté de 80 % à 90 % comme indiqué ci-dessus ; que la limite maximale du temps de travail effectif de 48 heures correspondait à un cumul hebdomadaire des amplitudes journalières de 64 heures jusqu'au 11 janvier 2009, ce cumul étant ensuite porté en fonction de l'évolution du coefficient de pondération à 60 heures, 57,83 heures, 55,81 heures et enfin 53,33 heures ; qu'en l'espèce, M. V... limite sa contestation au non-respect de la durée maximale hebdomadaire en visant les semaines au cours desquelles il prétend avoir travaillé plus de 48 heures ; qu'il se fonde toutefois sur un décompte hebdomadaire établi sur la base de l'amplitude journalière de son activité sans tenir compte du régime de pondération ; qu'ainsi, contrairement à ses affirmations, le cumul hebdomadaire des amplitudes journalières n'a pas excédé 64 heures sur la période non prescrite avant le 11 janvier 2009 ; qu'au cours de l'année suivante, ce cumul a excédé 60 heures au cours de la semaine 53 de l'année 2009 (72 heures) ; que l'année suivante, il a excédé 57,83 heures à deux reprises (semaine 15 et 41 de l'année 2010 pour respectivement 63,5 heures et 61 heures) ; qu'en 2011, ce cumul a excédé 55, 81 heures à trois reprises (semaine 18, 23 et 50, respectivement pour 59 heures s'agissant des deux premières et 56 heures pour la dernière) ; qu'en 2012, le cumul hebdomadaire des amplitudes journalières a excédé 53,3 heures seulement lors de la semaine 6 (64 heures) ; qu'il apparaît ainsi que la durée hebdomadaire maximale de travail effectif n'a pas été respectée à 7 reprises ; que, sur le temps de pause légal : l'article L. 3121-33 du code du travail prévoit que dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes et que des dispositions conventionnelles plus favorables peuvent fixer un temps de pause supérieur ; qu'en l'espèce, M. V... prétend avoir travaillé sans bénéficier de la pause légale de 20 minutes du 1er octobre 2007 au 2 mars 2009, du 12 au 15 octobre 2009 ; qu'il prétend également avoir été placé à compter du mois de mai 2011 dans une situation où il ne pouvait pas systématiquement exercer ce droit ; qu'enfin, il soutient ne pas avoir bénéficié de cette pause du 17 avril 2012 au 27 janvier 2013 ; que ceci est confirmé par les feuilles de route du salarié et l'employeur ne conteste pas ce manquement ; que, sur le repos quotidien de 11 heures consécutives : selon l'article L. 3131-1 du code du travail, dans sa version en vigueur au cours de la période litigieuse, tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives ; qu'en l'espèce, M. V... n'a pas bénéficié de ce repos quotidien à 9 reprises, soit du 14 au 15 juillet 2009, du 7 au 8 avril 2010, du 27 au 28 mai 2010, du 7 au 8 juin 2010, du 13 au 14 novembre 2010, du 5 au 6 décembre 2010, du 24 au 25 juin 2011, du 26 au 27 octobre 2011 et du 3 au 4 avril 2012 ; que la société Europ Taurion Ambazac ne conteste pas l'inobservation de ce texte ; que, sur l'indemnisation du préjudice : hormis le non-respect de la pause légale qui est intervenue de manière récurrente, les autres manquements sont extrêmement ponctuels ; qu'il n'en demeure pas moins que le non-respect de ces règles mises en oeuvre pour préserver la santé et la sécurité des travailleurs, a généré un trouble dans la vie du salarié qui a été confronté à une charge de travail importante à l'occasion de ces manquements ; que le préjudice subi a été justement évalué par les premiers juges à la somme de 1.700 € ; que leur décision sera confirmée de ce chef ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, sur les dommages et intérêts pour préjudice subi pour non-application des articles L. 3121-35 (amplitude maximum de travail) et L. 3121-33 du code du travail (temps de pause) : M. V... a saisi le conseil le 24 octobre 2013 ; que l'article L. 3245-1 stipule : « l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois dernières années précédant la rupture du contrat de travail ; qu'il y a lieu de constater que la prescription s'applique à toutes les demandes avant le 24 octobre 2010 ; que l'article L. 3121-35 du code du travail stipule que : « au cours d'une même semaine la durée du travail ne peut pas dépasser 48 heures » ; que l'article 6 de la directive 93/104 CE du conseil de l'union européenne, prévoit dans son paragraphe régissant la durée maximum hebdomadaire de travail que : « les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que, en fonction des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs : 1) la durée hebdomadaire du travail soit limitée au moyen de dispositions législatives, réglementaires ou administratives ou de conventions ou d'accords conclus entre partenaires sociaux. 2) la durée moyenne de travail pour chaque période de sept jours n'excède pas 48 heures, y compris les heures supplémentaires
» ; qu'en l'espèce, la SARL Europe Taurion Ambazac n'a pas respecté ces dispositions au préjudice de M. V..., la preuve en est administrée par les feuilles de route hebdomadaires que le salarié remplissait et émargeait, lesquelles sont censées servir à comptabiliser le temps de travail du salarié et font apparaître de manière régulière un dépassement de la durée maximum de travail de 48 heures ; que pour l'année 2011, l'amplitude maximum a été dépassée au cours de 9 semaines, et pour 5 semaines pour l'année 2012 ; qu'en conséquence, la SARL Europe Taurion Ambazac a contrevenu à l'article L. 3121-35 du code du travail ; que l'article L. 3121-33 du code du travail stipule : « dès que le temps de travail atteint 6 heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause minimale de 20 minutes » ; qu'en l'espèce, M. V..., au vu des pièces fournies, n'a pu bénéficier de ce temps de pause réglementaire (une à quatre fois par semaine pour l'année 2011) ; qu'en conséquence, la société Europe Taurion Ambazac n'a pas respecté l'article L. 3121-33 du code du travail ; que le préjudice subi pour les non-respects de la durée hebdomadaire et du temps de pause légal consiste en un trouble dans la vie personnelle qui doit être réparé par l'allocation d'une somme de 1.700 € à titre de dommages et intérêts ;

1°) ALORS QUE le cours de la prescription est interrompu par la saisine de la formation de référé du conseil de prud'hommes, même si certaines demandes sont ensuite présentées au cours de l'instance au fond ; qu'en l'espèce, M. V... rappelait (cf. conclusions d'appel pages 18 § 9 à page 19 § 4) qu'il avait saisi la formation des référés du conseil de prud'hommes en versement d'une provision au titre du défaut d'entretien des tenues de travail ; qu'il versait aux débats l'arrêt rendu par la cour d'appel de Limoges le 28 janvier 2013, confirmant l'ordonnance de référé rendue le 23 août 2012 par la formation des référés du conseil de prud'hommes de Limoges ayant alloué au salarié la somme de 150 € à titre d'indemnité provisionnelle à valoir sur le remboursement des frais d'entretien de sa tenue pour la période de juin 2007 à septembre 2010 (cf. productions) ; qu'en retenant que, « M. V... a[yant] introduit son action le 24 octobre 2013 », « les manquements invoqués antérieurement au 24 octobre 2008 se trouvent prescrits », quand le cours de la prescription avait été interrompu par la saisine de la formation des référés du conseil de prud'hommes de Limoges, soit à une date antérieure au 23 août 2012, en sorte que ses demandes étaient recevables en vertu de la prescription trentenaire initialement applicable aux demandes de dommages-intérêts pour non-respect des durées maximales du travail et des temps de pause, puis de la prescription quinquennale s'y substituant à l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, pour la période courant, à tout le moins, à compter du 23 août 1982, la cour d'appel a violé l'article 2241 du code civil, ensemble les articles 2222 et 2224 du code civil en leur rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, l'article 2262 du code civil en sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 et l'article 26 II de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;

2°) ET ALORS, subsidiairement, QU'en cas de renvoi de l'affaire à un conseil de prud'hommes autre que celui territorialement compétent pour cause de suspicion légitime de partialité, l'acte de saisine interrompant le cours de la prescription est celui adressé à la juridiction prud'homale primitivement saisie ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que « le conseil de prud'hommes de Guéret avait été saisi le 29 [lire « 24 »] octobre 2013 de l'action mise en oeuvre par M. V... sur renvoi du conseil de prud'hommes de Limoges pour cause de suspicion légitime » ; que l'employeur versait lui-même aux débats la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Limoges, primitivement saisi, mentionnant la saisine de la juridiction en date du 21 mai 2013 (cf. productions) ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand le cours de la prescription des demandes du salarié avait, à tout le moins, été interrompu par la saisine du conseil de prud'hommes de Limoges ayant renvoyé l'affaire au conseil de prud'hommes de Guéret pour cause de suspicion légitime de partialité de la première juridiction, en sorte que ses demandes étaient recevables en vertu de la prescription trentenaire initialement applicable aux demandes de dommages-intérêts pour non-respect des durées maximales du travail et des temps de pause, puis de la prescription quinquennale s'y substituant à l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, pour la période courant à compter du 21 mai 1983, la cour d'appel a violé les articles 2222 et 2224 du code civil en leur rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, l'article 2262 du code civil en sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 et l'article 26 II de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR limité le montant des dommages et intérêts alloués au salarié pour non-respect des durées maximales de travail et des temps de pause à 1.700 € ;

AUX MOTIFS PORPRES QUE, sur la prescription : M. V... invoque des manquements de son employeur remontant jusqu'à l'année 2007 et celui-ci lui oppose la prescription d'une partie des faits allégués ; que le délai de prescription applicable est celui relatif aux actions portant sur l'exécution du contrat de travail ; que le délai de prescription qui était initialement de 30 ans a été modifié successivement par les lois n° 2008-561 du 17 juin 2008 (date d'entrée en vigueur le 19 juin) et n° 2013-504 du 14 juin 2013 (date d'entrée en vigueur le 16 juin) passant de 5 ans (article 2224 du code civil) à 2 ans (article L. 1471-1 du code du travail) ; que le droit transitoire prévu par ces deux lois prévoit que les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'en l'espèce, M. V... a introduit son action le 24 octobre 2013 et il invoque des manquements de son employeur remontant jusqu'à l'année 2007 ; qu'il apparaît dès lors que les manquements invoqués antérieurement au 24 octobre 2008 se trouvent prescrits ; que, sur la durée hebdomadaire maximale de travail : l'article 2 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire prévoyait dans le 1er alinéa du paragraphe consacré aux limites maximales de travail : « la durée de travail effectif ne peut excéder 48 heures hebdomadaires au cours d'une semaine isolée. La durée hebdomadaire moyenne de temps de travail effectif calculée par trimestre civil ne peut excéder 44 heures, ni en tout état de cause 572 heures au total par trimestre (soit 13 semaines) » ; que l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008 a complété ce paragraphe en y ajoutant trois nouveaux alinéas, applicables à compter du 11 janvier 2009, date de publication de l'extension du 21 novembre 2008 ; qu'ainsi, le texte a été complété par les trois alinéas suivants : « dans le transport sanitaire, les règles concernant la durée du travail sont fixées par la directive européenne 2003 / 88 / CE du 4 novembre 2003, le code du travail français et les dispositions du présent accord-cadre ; que la durée maximale hebdomadaire de travail des personnels ambulanciers roulants ne peut excéder 48 heures en moyenne sur un trimestre ou toute autre période plus courte qui pourrait être mise en place dans l'entreprise par accord d'entreprise, au sens de la définition du temps de travail fixée par la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 ; que pour vérifier le respect de la limite maximale fixée au paragraphe ci-dessus, le temps de travail s'apprécie conformément aux définitions données par les dispositions communautaires en vigueur ; qu'en conséquence, cette limite maximale s'apprécie sans application du régime de pondération prévu au point a) d 3.1 de l'article 3 : « décompte et rémunération du temps de travail des personnels ambulanciers roulants ci-dessous » ; que l'article 3.1 de cet accord, dans sa rédaction issue de l'avenant du 16 janvier 2008 prévoit en son a), relatif au décompte du temps de travail des personnels ambulanciers roulants à temps plein : « afin de tenir compte des périodes d'inaction (notamment au cours des services de permanence), de repos, repas, coupures et de la variation de l'intensité de leur activité, le temps de travail effectif des personnels ambulanciers roulants est décompté, dans les conditions visées ci-dessous, sur la base du cumul hebdomadaire de leurs amplitudes journalières d'activité, prises en compte : 1. Services de permanence : pour 75 % de leurs durées ; 2. En dehors des services de permanence : pour 90 % de leurs durées ; que le coefficient de décompte à 90 % est atteint dans les 3 ans qui suivent l'entrée en application de la première étape prévue par l'accord.

À la date d'entrée en application de l'avenant
n° 3
À la date du
1er anniversaire de l'entrée
en
application de l'avenant n°3
À la date du 2ème anniversaire de l'entrée
en
application
de l'avenant
n° 3
À la date du 3ème anniversair
e de
l'entrée en application
de
l'avenant
n° 3

Coefficient de décompte
80 %
83 %
86 %
90 %

» ; que les dispositions de l'article 2 de l'accord-cadre instaurent donc une double limite concernant la durée maximale de travail, à savoir une durée maximale moyenne calculée sans faire application des dispositions de l'article 3-1 et une durée maximale hebdomadaire calculée en faisant application des coefficients de décompte prévus par l'article 3-1, l'exclusion du régime de pondération de cet article étant limitée au calcul de la durée maximale moyenne ; que par ailleurs, compte tenu des dispositions transitoires concernant la mise en oeuvre de la modification du coefficient de décompte, le taux de celui-ci était de 75 % jusqu'au 11 janvier 2009 avant d'être porté de 80 % à 90 % comme indiqué ci-dessus ; que la limite maximale du temps de travail effectif de 48 heures correspondait à un cumul hebdomadaire des amplitudes journalières de 64 heures jusqu'au 11 janvier 2009, ce cumul étant ensuite porté en fonction de l'évolution du coefficient de pondération à 60 heures, 57,83 heures, 55,81 heures et enfin 53,33 heures ; qu'en l'espèce, M. V... limite sa contestation au non-respect de la durée maximale hebdomadaire en visant les semaines au cours desquelles il prétend avoir travaillé plus de 48 heures ; qu'il se fonde toutefois sur un décompte hebdomadaire établi sur la base de l'amplitude journalière de son activité sans tenir compte du régime de pondération ; qu'ainsi, contrairement à ses affirmations, le cumul hebdomadaire des amplitudes journalières n'a pas excédé 64 heures sur la période non prescrite avant le 11 janvier 2009 ; qu'au cours de l'année suivante, ce cumul a excédé 60 heures au cours de la semaine 53 de l'année 2009 (72 heures) ; que l'année suivante, il a excédé 57,83 heures à deux reprises (semaine 15 et 41 de l'année 2010 pour respectivement 63,5 heures et 61 heures) ; qu'en 2011, ce cumul a excédé 55, 81 heures à trois reprises (semaine 18, 23 et 50, respectivement pour 59 heures s'agissant des deux premières et 56 heures pour la dernière) ; qu'en 2012, le cumul hebdomadaire des amplitudes journalières a excédé 53,3 heures seulement lors de la semaine 6 (64 heures) ; qu'il apparaît ainsi que la durée hebdomadaire maximale de travail effectif n'a pas été respectée à 7 reprises ; que, sur le temps de pause légal : l'article L. 3121-33 du code du travail prévoit que dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes et que des dispositions conventionnelles plus favorables peuvent fixer un temps de pause supérieur ; qu'en l'espèce, M. V... prétend avoir travaillé sans bénéficier de la pause légale de 20 minutes du 1er octobre 2007 au 2 mars 2009, du 12 au 15 octobre 2009 ; qu'il prétend également avoir été placé à compter du mois de mai 2011 dans une situation où il ne pouvait pas systématiquement exercer ce droit ; qu'enfin, il soutient ne pas avoir bénéficié de cette pause du 17 avril 2012 au 27 janvier 2013 ; que ceci est confirmé par les feuilles de route du salarié et l'employeur ne conteste pas ce manquement ; que, sur le repos quotidien de 11 heures consécutives : selon l'article L. 3131-1 du code du travail, dans sa version en vigueur au cours de la période litigieuse, tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives ; qu'en l'espèce, M. V... n'a pas bénéficié de ce repos quotidien à 9 reprises, soit du 14 au 15 juillet 2009, du 7 au 8 avril 2010, du 27 au 28 mai 2010, du 7 au 8 juin 2010, du 13 au 14 novembre 2010, du 5 au 6 décembre 2010, du 24 au 25 juin 2011, du 26 au 27 octobre 2011 et du 3 au 4 avril 2012 ; que la société Europ Taurion Ambazac ne conteste pas l'inobservation de ce texte ; que, sur l'indemnisation du préjudice : hormis le non-respect de la pause légale qui est intervenue de manière récurrente, les autres manquements sont extrêmement ponctuels ; qu'il n'en demeure pas moins que le non-respect de ces règles mises en oeuvre pour préserver la santé et la sécurité des travailleurs, a généré un trouble dans la vie du salarié qui a été confronté à une charge de travail importante à l'occasion de ces manquements ; que le préjudice subi a été justement évalué par les premiers juges à la somme de 1.700 € ; que leur décision sera confirmée de ce chef ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, sur les dommages et intérêts pour préjudice subi pour non-application des articles L. 3121-35 (amplitude maximum de travail) et L. 3121-33 du code du travail (temps de pause) : M. V... a saisi le conseil le 24 octobre 2013 ; que l'article L. 3245-1 stipule : « l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois dernières années précédant la rupture du contrat de travail ; qu'il y a lieu de constater que la prescription s'applique à toutes les demandes avant le 24 octobre 2010 ; que l'article L. 3121-35 du code du travail stipule que : « au cours d'une même semaine la durée du travail ne peut pas dépasser 48 heures » ; que l'article 6 de la directive 93/104 CE du conseil de l'union européenne, prévoit dans son paragraphe régissant la durée maximum hebdomadaire de travail que : « les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que, en fonction des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs : 1) la durée hebdomadaire du travail soit limitée au moyen de dispositions législatives, réglementaires ou administratives ou de conventions ou d'accords conclus entre partenaires sociaux. 2) la durée moyenne de travail pour chaque période de sept jours n'excède pas 48 heures, y compris les heures supplémentaires
» ; qu'en l'espèce, la SARL Europe Taurion Ambazac n'a pas respecté ces dispositions au préjudice de M. V..., la preuve en est administrée par les feuilles de route hebdomadaires que le salarié remplissait et émargeait, lesquelles sont censées servir à comptabiliser le temps de travail du salarié et font apparaître de manière régulière un dépassement de la durée maximum de travail de 48 heures ; que pour l'année 2011, l'amplitude maximum a été dépassée au cours de 9 semaines, et pour 5 semaines pour l'année 2012 ; qu'en conséquence, la SARL Europe Taurion Ambazac a contrevenu à l'article L. 3121-35 du code du travail ; que l'article L. 3121-33 du code du travail stipule : « dès que le temps de travail atteint 6 heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause minimale de 20 minutes » ; qu'en l'espèce, M. V..., au vu des pièces fournies, n'a pu bénéficier de ce temps de pause réglementaire (une à quatre fois par semaine pour l'année 2011) ; qu'en conséquence, la société Europe Taurion Ambazac n'a pas respecté l'article L. 3121-33 du code du travail ; que le préjudice subi pour les non-respects de la durée hebdomadaire et du temps de pause légal consiste en un trouble dans la vie personnelle qui doit être réparé par l'allocation d'une somme de 1.700 € à titre de dommages et intérêts ;

ALORS QU'il ne peut être tenu compte d'un système d'équivalence pour vérifier, en matière de temps de travail effectif, le respect des seuils et plafonds fixés par la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt du 1er décembre 2005, Dellas, C-14/04, points 51 et 52) ; qu'en décidant au contraire, pour limiter le montant des dommages et intérêts alloués à M. V... pour non-respect des durées maximales de travail et des temps de pause à 1.700 €, qu'il convenait de tenir compte du régime de pondération prévu par l'accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire en sa rédaction issue de l'avenant du 16 janvier 2008, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-33, L. 3121-35 et L. 3131-1 du code du travail en leur rédaction applicable litige, interprétés à la lumière de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-23510
Date de la décision : 24/06/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Travail effectif - Heures d'équivalence - Application - Cas - Appréciation du respect de la durée maximale hebdomadaire de travail de 48 heures fixée par l'article 2 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 et par l'article L. 3121-35 du code du travail

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Durée maximale - Dépassement - Calcul - Système d'équivalence - Application - Cas - Appréciation du respect de la durée maximale hebdomadaire de travail de 48 heures fixée par l'article 2 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 et par l'article L. 3121-35 du code du travail STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Accords collectifs - Accords particuliers - Entreprises de transport sanitaire - Accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail - Temps de travail effectif - Régime d'équivalence - Coefficient d'équivalence - Application - Domaine d'application - Heures accomplies en dépassement de la limite maximale hebdomadaire de travail - Applications diverses

La directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt du 1er décembre 2005, C-14/04, points 51 et 52) ne fait pas obstacle à l'application des rapports d'équivalence aux durées maximales de travail fixées par le droit national dès lors que sont respectés les seuils et plafonds communautaires, pour l'appréciation desquels les périodes de travail effectif doivent être comptabilisées dans leur intégralité, sans possibilité de pondération. Doit en conséquence être approuvé, l'arrêt qui après avoir relevé que la contestation du salarié portait, non pas sur le dépassement du plafond de quarante-huit heures de durée moyenne du travail hebdomadaire calculée sur une période de quatre mois fixé par le droit de l'Union, mais sur le dépassement de la durée maximale de travail de quarante-huit heures sur une semaine fixée par le droit national, a fait application des coefficients de pondération du régime d'équivalence prévu par l'article 3.1 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire dans sa rédaction issue de l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008 et repris, en son article 3, par le décret n° 2009-32 du 9 janvier 2009, pour apprécier le respect de la durée maximale hebdomadaire de travail de 48 heures fixée tant par l'article 2 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 que par l'article L. 3121-35 du code du travail dans sa rédaction alors applicable


Références :

article L. 3121-35 du code du travail dans sa rédaction applicable

articles 2 et 3.1 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire dans sa rédaction iss
ue de l'avenant n° 3 du 16 janvier 2008

articles 3 et 4 du décret n° 2009-32 du 9 janvier 2009

directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 17 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jui. 2020, pourvoi n°18-23510, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.23510
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