LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° N 19-81.277 F-D
N° 1004
EB2
17 JUIN 2020
REJET
M. MOREAU conseiller le plus ancien faisant fonction de président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 17 JUIN 2020
M. K... J... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle, en date du 16 janvier 2019, qui, pour dégradations volontaires et tentatives, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement, dont dix-huit mois avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Barbé, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de M. K... J..., les observations de Me Balat, avocat de M. R... W... et Mme Q... W..., et les conclusions de Mme Zientara-Logeay, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 mai 2020 où étaient présents M. Moreau, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Barbé, conseiller rapporteur, Mme Drai, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. X... Y..., fils de Mme T... S..., cette dernière, ainsi que ses voisins, Mme Q... et M. R... W..., ont porté plainte et se sont constitués partie civile pour dégradations volontaires de leurs biens et tentatives par incendie.
3. M. J... a été poursuivi pour avoir à [...], dans la nuit du 11 au 12 novembre 2016, volontairement détruit un bien appartenant à Mme T... S... en provoquant un départ de feu dans la chambre de l'habitation de la victime, incendie qui s'est propagé à la maison voisine appartenant à Mme et M. W..., et, dans la nuit du 21 au 22 novembre 2016, tenté de détruire volontairement le véhicule appartenant à Mme S..., par une substance explosive, en l'espèce une bouteille de white spirit enflammée.
4. Par jugement contradictoire du 5 décembre 2017, le tribunal correctionnel a déclaré M. J... coupable des faits reprochés et l'a condamné à une peine d'emprisonnement de trois ans d'emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis et mise à l'épreuve pendant deux ans et a prononcé sur les intérêts civils.
5. M. J... et le ministère public ont interjeté appel de la décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
6. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
7. Le moyen est pris de la violation des articles 132-19 du code pénal, 591, 593 du code de procédure pénale.
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. J... à un emprisonnement délictuel de trois ans, dit qu'il sera sursis partiellement pour une durée de dix-huit mois à l'exécution de cette peine, avec mise à l'épreuve dans les conditions prévues par les articles 132-43 et 132-44 du code pénal, fixé le délai d'épreuve à deux ans et dit n'y avoir lieu à un aménagement ab initio, alors « que si la peine d'emprisonnement prononcée sans sursis n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, qui décide de ne pas l'aménager, doit soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l'espèce, de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu ; qu'en jugeant qu'en l'absence d'éléments suffisants et probants sur la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu, il n'y a pas lieu à aménagement de la peine d'emprisonnement ferme de dix-huit mois, sans prendre l'initiative d'interroger le prévenu, présent aux débats, sur sa situation, la cour d'appel a méconnu le texte visé au moyen.».
Réponse de la Cour
9. Pour condamner M. J... à un emprisonnement délictuel de trois ans d'emprisonnement dont dix-huit mois assorti d'un sursis avec mise à l'épreuve, et dire n'y avoir lieu à un aménagement ab initio de la partie de peine ferme, l'arrêt relève que le prévenu est âgé de 52 ans, qu'il est en situation d'invalidité depuis l'âge de 47 ans, que l'expertise psychiatrique démontre qu'il est dépressif depuis le décès de son épouse, que le déni des faits reprochés peut s'expliquer par un risque d'effondrement narcissique.
10. L'arrêt retient ainsi qu'au regard de la particulière gravité des faits, de la personnalité de M. J... et de sa situation personnelle, la peine prononcée en première instance est parfaitement adaptée et qu'il est nécessaire qu'une partie d'emprisonnement ferme lui soit infligée pour qu'il prenne pleinement conscience de la gravité de ses agissements.
11. Les juges ajoutent qu'une partie d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve est opportune pour s'assurer de la mise en oeuvre notamment de l'obligation de soins, qui n'a pas été respectée dans le cadre de son contrôle judiciaire, et pour prévenir le renouvellement des agissements.
12. Ils relèvent ensuite qu'en l'absence d'éléments suffisants et probants sur la situation matérielle, familiale, sociale de M.J..., il n'y a pas lieu à un aménagement ab initio de la peine d'emprisonnement ferme prononcée.
13. En se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié, au vu des éléments recueillis, la possibilité de cet aménagement, au regard des exigences de l'article 132-19 du code pénal, dans sa rédaction alors en vigueur, et conclu à l'impossibilité matérielle d'aménager la peine, a justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme que M. J... devra payer à Mme et M. W... en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept juin deux mille vingt.