LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 mai 2020
Sursis a statuer
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 338 FS-D
Pourvoi n° F 19-13.191
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2020
La Ville de Paris, représentée par son maire en exercice, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° F 19-13.191 contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. K... L...,
2°/ à Mme Y... I...,
tous deux domiciliés [...] ),
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Parneix, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de La Ville de Paris, de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de M. L... et de Mme I..., et l'avis de Mme Valdès Boulouque, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 10 mars 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Parneix, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mmes Dagneaux, Provost-Lopin, MM. Barbieri, Jessel, conseillers, Mmes Corbel, Collomp, M. Beghin, Mme Schmitt, conseillers référendaires, Mme Valdès Boulouque, premier avocat général, Mme Besse, greffier de chambre,
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 décembre 2018), M. L... et Mme I... sont propriétaires à Paris d'un appartement de deux pièces à usage d'habitation.
2. Soutenant qu'en 2016 cet appartement avait fait l'objet de deux locations meublées de courte durée au profit d'une clientèle de passage n'y élisant pas domicile, sans autorisation préalable de changement d'usage, la Ville de Paris les a assignés, sur le fondement des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation, en paiement d'une amende et remise des locaux en état d'habitation.
Sursis à statuer
3. Par deux arrêts (3e Civ., 15 novembre 2018, pourvoi n° 17-26.156 ; 3e Civ., 15 novembre 2018, pourvoi n° 17-26.158), la Cour de cassation a renvoyé à la Cour de justice de l'Union européenne les questions préjudicielles suivantes :
1°/ La directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006, eu égard à la définition de son objet et de son champ d'application par ses articles 1 et 2, s'applique-t-elle à la location à titre onéreux, même à titre non professionnel, de manière répétée et pour de courtes durées, d'un local meublé à usage d'habitation ne constituant pas la résidence principale du loueur, à une clientèle de passage n'y élisant pas domicile, notamment au regard des notions de prestataires et de services ?
2°/ En cas de réponse positive à la question précédente, une réglementation nationale, telle que celle prévue par l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, constitue-t-elle un régime d'autorisation de l'activité susvisée au sens des articles 9 à 13 de la directive 2006/123 du 12 décembre 2006 ou seulement une exigence soumise aux dispositions des articles 14 et 15 ?
Dans l'hypothèse où les articles 9 à 13 de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 sont applicables :
3°/ L'article 9 sous b) de cette directive doit-il être interprété en ce sens que l'objectif tenant à la lutte contre la pénurie de logements destinés à la location constitue une raison impérieuse d'intérêt général permettant de justifier une mesure nationale soumettant à autorisation, dans certaines zones géographiques, la location d'un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile ?
4°/ Dans l'affirmative, une telle mesure est-elle proportionnée à l'objectif poursuivi ?
5°/ L'article 10, paragraphe 2, sous d) et e) de la directive s'oppose-t-il à une mesure nationale qui subordonne à autorisation le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation "de manière répétée", pour de "courtes durées", à une "clientèle de passage qui n'y élit pas domicile" ?
6°/ L'article 10, paragraphe 2, sous d) à g) de la directive s'oppose-t-il à un régime d'autorisation prévoyant que les conditions de délivrance de l'autorisation sont fixées, par une délibération du conseil municipal, au regard des objectifs de mixité sociale, en fonction notamment des caractéristiques des marchés de locaux d'habitation et de la nécessité de ne pas aggraver la pénurie de logements ?
4. Au regard des questions préjudicielles posées, la décision de la Cour de justice de l'Union européenne à intervenir est de nature à influer sur la solution du présent pourvoi, qui porte sur l'application de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation.
5. Il y a donc lieu de surseoir à statuer jusqu'au prononcé de celle-ci.
PAR CES MOTIFS :
SURSOIT à statuer sur le pourvoi jusqu'au prononcé de la décision de la Cour de justice de l'Union européenne dans les affaires C-724/18 et C-727/18 ;
Renvoie la cause et les parties à l'audience du 8 septembre 2020 ;
Réserve les dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, signé par M. Echappé, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille vingt.