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28/05/2020 | FRANCE | N°18-26024

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 28 mai 2020, 18-26024


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 mai 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 325 F-D

Pourvoi n° J 18-26.024

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2020

1°/ M. I... C...,

2°/ Mme P... Y..., épouse C...,

domicili

és tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° J 18-26.024 contre l'arrêt rendu le 16 octobre 2018 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans l...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 mai 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 325 F-D

Pourvoi n° J 18-26.024

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2020

1°/ M. I... C...,

2°/ Mme P... Y..., épouse C...,

domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° J 18-26.024 contre l'arrêt rendu le 16 octobre 2018 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à M. L... E..., domicilié [...] ,

2°/ à M. S... K..., domicilié [...] ,

3°/ à Mme W... K..., domiciliée [...] ,

4°/ G... B..., ayant été domiciliée [...] , représentée par la collectivité des héritiers de G... B... pris collectivement en cette qualité,

5°/ à M. R... D...,

6°/ à Mme N... D...,

domiciliés tous deux [...],

7°/ à M. H... O...,

8°/ à M. F... O...,

domiciliés tous deux [...],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. et Mme C..., de Me Balat, avocat de M. E..., après débats en l'audience publique du 10 mars 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 16 octobre 2018), M. E..., propriétaire d'une parcelle, a, après expertise ordonnée en référé, assigné M. et Mme C..., propriétaires de la parcelle contigüe, en reconnaissance d'une servitude de passage pour cause d'enclave, puis mis en cause les consorts K..., D... et O..., propriétaires d'autres parcelles voisines.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. M. et Mme C... font grief à l'arrêt de constater l'état d'enclave de la parcelle cadastrée [...] appartenant à M. E... et de déterminer l'assiette de la servitude légale de passage suivant la solution A1A2 préconisée par l'expert judiciaire selon l'itinéraire empruntant la parcelle leur appartenant, alors :

« 1°/ que, si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes ; qu'en l'espèce, il résulte de l'acte de donation du 10 janvier 2009, titre de propriété de M. E..., que la parcelle enclavée objet de la donation provient du partage de diverses parcelles de terrain sises à [...] dépendant de la succession de l'oncle des donateurs ; qu'en énonçant que comme l'a vérifié l'expert judiciaire, les titres de propriété ne révèlent pas d'origine commune, ni de servitudes relatives aux biens des parties, la cour d'appel a statué par un motif qui n'est pas de nature à caractériser le fait que l'état d'enclave de la parcelle de M. E... n'était pas la conséquence directe de ce partage, en violation de l'article 684 du code civil ;

2°/ que, si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'un partage, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de cet acte ; qu'il en va ainsi même si les fonds contigus qui ont fait l'objet du partage sont des parcelles distinctes, dès lors que le fonds enclavé disposait avant le partage, d'un accès à la voie publique par l'un des fonds contigus objets du partage appartenant au même propriétaire ; qu'en énonçant que la parcelle considérée résulte d'un partage de parcelles contiguës, séparées les unes des autres, la cour d'appel a statué par un motif impropre à caractériser le fait que l'état d'enclave du fonds de M. E... n'était pas la conséquence directe de ce partage, en violation de l'article 684 du code civil. »

Réponse de la Cour

3. Ayant constaté que la parcelle de M. E... était enclavée, mais que cet état d'enclave ne résultait pas de la division d'un fonds unique, dès lors que les titres versés aux débats n'établissaient pas l'origine commune de cette parcelle avec d'autres, la cour d'appel en a exactement déduit que l'article 684 du code civil n'était pas applicable au litige.

4. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

5. M. et Mme C... font grief à l'arrêt de déterminer l'assiette de la servitude de passage suivant la solution A1B1 préconisée par l'expert judiciaire selon l'itinéraire empruntant la parcelle leur appartenant, alors :

« 1°/ que le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique, néanmoins il est fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé ; qu'en se contentant d'entériner les conclusions du géomètre-expert judiciaire, selon lesquelles une superposition du projet de construction et du plan topographique des lieux permettrait de dire que l'assiette du tracé A1A2 n'empêche pas la construction d'une deuxième maison, sans s'expliquer ainsi qu'elle y était invitée, sur l'impossibilité de réaliser la construction objet du permis de construire obtenu par les époux C..., en raison de la nature du sol très mauvaise nécessitant des talutages à faible pente de nature à compromettre la stabilité du bâtiment en raison de la proximité entre ses fondations et le talus, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 683 du code civil ;

2°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, les époux C... versaient aux débats une étude de sol et une attestation établie par l'architecte assurant la mission de maîtrise d'oeuvre du projet de construction de leur maison le 25 février 2016, soit postérieurement au jugement déféré et au rapport du géomètre-expert M. U..., par laquelle cet architecte attestait que l'assiette de la servitude préconisée rendait impossible l'implantation de la nouvelle construction, que l'immeuble tel qu'implanté sur la demande de permis de construire accordée le 8 septembre 2014 ne peut être réalisé en raison de sa proximité immédiate avec l'emprise de la servitude, et que la nature du sol très mauvaise selon le rapport d'étude de sol joint à son attestation nécessite des talutages à faibles pentes qui risquent d'empiéter sur l'implantation du chalet projeté et mettre à mal la stabilité du bâtiment(proximité talus/fondations aval au sud-est) ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans examiner au moins sommairement ces éléments de preuve déterminants, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. La cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a souverainement retenu que le passage proposé par l'expert judiciaire, selon le tracé A1A2, était le plus court et le moins dommageable, en l'absence d'obstacle démontré à la réalisation d'un projet de construction nouvelle sur le terrain de M. et Mme C....

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

8. M. et Mme C... font grief à l'arrêt de fixer à 9 110 euros l'indemnité due par M. E..., alors :

« 1°/ que le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner ; que la privation de jouissance d'une partie de la parcelle et la perte de droits à construire en raison des contraintes du POS ou encore une moins-value résultant de la servitude constituent des dommages indemnisables ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans s'expliquer comme elle y était invitée sur le préjudice résultant de la perte de jouissance de la partie triangulaire de la parcelle des époux C... située à gauche de l'assiette du chemin, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 682 du code civil ;

2°/ que les juges du fond ont l'obligation de ne pas dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; que comme le faisaient valoir les époux C... dans leurs conclusions d'appel, il ne résulte pas du rapport d'expertise que l'expert judiciaire aurait pris en considération le dommage résultant de la perte de jouissance de la partie triangulaire de leur parcelle située à gauche de l'assiette du chemin, dans l'évaluation de l'indemnité (rapport p. 17) ; qu'à supposer qu'elle ait entendu adopter les motifs du jugement, en énonçant que les inconvénients avancés par les défendeurs auraient été pris en compte dans le calcul de l'indemnité par l'expert, la cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise en violation du principe susvisé. »

Réponse de la Cour

9. C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation et sans dénaturer le rapport d'expertise judiciaire dont elle a entériné les conclusions que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a fixé l'indemnité due par le propriétaire du fonds dominant en réparation du dommage occasionné par le passage.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme C... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme C... et les condamne à payer à M. E... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, signé par M. Echappé, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. et Mme C....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir constaté l'état d'enclave de la parcelle cadastrée section [...] lieudit [...] appartenant à M. L... E..., ordonné le désenclavement de cette parcelle suivant la solution A1A2 préconisée par le rapport de M. U... expert judiciaire en date du 21 mars 2014 par l'itinéraire empruntant la parcelle cadastrée [...] sur la commune d'[...] appartenant à M. et Mme C... et d'avoir dit que l'assiette de la servitude pourra être utilisée pour le passage de toutes conduites, canalisations utiles aux constructions modernes ;

AUX MOTIFS QU'il est constant que la parcelle [...] donnée par acte du 10 janvier 2009 à L... E... est enclavée, ce dont les parties conviennent. Les époux C... soutiennent, page 14 de leurs écritures, qu'à la lecture de l'acte de donation, l'hypothèse selon laquelle cette parcelle provient de la division d'un fonds est « fort probable ». Or, ainsi que l'a vérifié l'expert judiciaire, les titres de propriété ne révèlent pas d'origine commune, ni de servitudes relatives aux biens des parties. Par conséquent les époux C... ne sont pas fondés à solliciter l'application des dispositions de l'article 684 du code civil, selon lesquelles le passage ne peut être demandé que sur les terrains objet de la division ;

ET AUX MOTIFS adoptés du jugement que M. I... C... et Mme P... C... née Y... soutiennent faussement que le fonds enclavé provient d'une division puisque la parcelle considérée ne résulte pas d'une division mais d'un partage de parcelles contiguës, séparées les unes des autres ; que par suite M. E... n'était pas limité à solliciter un droit de passage que sur les terrains prétendument issus d'une division mais au contraire était loisible à soutenir en justice l'obtention d'un droit de passage sur l'itinéraire de son choix proposé par l'expert ;

1°- ALORS QUE si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes ; qu'en l'espèce, il résulte de l'acte de donation du 10 janvier 2009, titre de propriété de M. E..., que la parcelle enclavée objet de la donation provient du partage de diverses parcelles de terrain sises à [...] dépendant de la succession de l'oncle des donateurs ; qu'en énonçant que comme l'a vérifié l'expert judiciaire, les titres de propriété ne révèlent pas d'origine commune, ni de servitudes relatives aux biens des parties, la Cour d'appel a statué par un motif qui n'est pas de nature à caractériser le fait que l'état d'enclave de la parcelle de M. E... n'était pas la conséquence directe de ce partage, en violation de l'article 684 du code civil ;

2°- ALORS QUE si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'un partage, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de cet acte ; qu'il en va ainsi même si les fonds contigus qui ont fait l'objet du partage sont des parcelles distinctes, dès lors que le fonds enclavé disposait avant le partage, d'un accès à la voie publique par l'un des fonds contigus objets du partage appartenant au même propriétaire ; qu'en énonçant que la parcelle considérée résulte d'un partage de parcelles contiguës, séparées les unes des autres, la Cour d'appel a statué par un motif impropre à caractériser le fait que l'état d'enclave du fonds de M. E... n'était pas la conséquence directe de ce partage, en violation de l'article 684 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir constaté l'état d'enclave de la parcelle cadastrée section [...] lieudit [...] appartenant à M. L... E..., ordonné le désenclavement de cette parcelle suivant la solution A1A2 préconisée par le rapport de M. U... expert judiciaire en date du 21 mars 2014 par l'itinéraire empruntant la parcelle cadastrée [...] sur la commune d'[...] appartenant à M. et Mme C..., et d'avoir dit que l'assiette de la servitude pourra être utilisée pour le passage de toutes conduites, canalisations utiles aux constructions modernes ;

AUX MOTIFS QUE l'article 682 du code civil accorde au propriétaire d'un fonds enclavé le droit de réclamer un passage sur les fonds qui le séparent de la voie publique, à charge d'en indemniser les propriétaires. En application de l'article 683 du code civil, le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique. Néanmoins il doit être fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé. L'expert judiciaire a examiné, en présence des différents propriétaires riverains mis en cause, six itinéraires de désenclavement dont il a comparé, page 16 de son rapport, les avantages et les inconvénients. Il a exclu les trois itinéraires les plus longs et indiqué, s'agissant des trois autres, que :

- le tracé B1 B2 grèverait deux propriétés (K... et D...), devrait être aménagé sur 55 mètres avec une pente de 24 %, nécessiterait des travaux de canalisation d'un ruisseau et se trouverait à proximité des habitations,

- le tracé B1 B3 sur la propriété A... serait le plus long (81 mètres), déboucherait directement sur la route départementale ce qui nécessiterait une autorisation, impliquerait l'abattage d'une haie et le busage d'un ruisseau, et passerait à 2,50 mètres des pièces de vie et de la terrasse de l'habitation,

- le tracé A1 A2 passant sur le fonds des époux C... serait le plus court : 35 mètres, dont 20 mètres sont déjà aménagés et débouchent sur un accès existant, les 15 mètres restant à aménager nécessitant le décaissement d'un talus dont la pente devra être ramenée à 15 %.

Les époux C... s'opposent à cette solution au motif qu'elle compromet la construction qu'ils ont envisagée à l'endroit de son tracé. L'expert judiciaire a fait figurer sur le plan topographique des lieux, le projet de construction que les époux C... lui ont soumis par dire. Or il en résulte, ainsi que l'a relevé l'expert page 25 de son rapport et qu'il l'a détaillé sur sa note technique, que l'assiette du tracé A1 A2 n'empêche pas la construction d'une deuxième maison. Par conséquent, c'est par une exacte application des dispositions précitées du code civil que le tribunal a retenu comme solution de désenclavement de la parcelle [...], le tracé A1 A2 grevant le fonds des époux C..., en ce qu'il est le plus court et le moins dommageable. Contrairement à ce qu'a relevé le tribunal, il ne ressort aucunement des observations de l'expert qu'il est nécessaire de faire sommation aux époux C... de démolir un quelconque ouvrage. Le jugement sera donc infirmé de ce chef ;

1°- ALORS QUE le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique, néanmoins il est fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé ; qu'en se contentant d'entériner les conclusions du géomètre-expert judiciaire, selon lesquelles une superposition du projet de construction et du plan topographique des lieux permettrait de dire que l'assiette du tracé A1 A2 n'empêche pas la construction d'une deuxième maison, sans s'expliquer ainsi qu'elle y était invitée, sur l'impossibilité de réaliser la construction objet du permis de construire obtenu par les époux C..., en raison de la nature du sol très mauvaise nécessitant des talutages à faible pente de nature à compromettre la stabilité du bâtiment en raison de la proximité entre ses fondations et le talus, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 683 du code civil ;

2°- ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, les époux C... versaient aux débats une étude de sol et une attestation établie par l'architecte assurant la mission de maitrise d'oeuvre du projet de construction de leur maison le 25 février 2016, soit postérieurement au jugement déféré et au rapport du géomètre-expert M. U..., par laquelle cet architecte attestait que l'assiette de la servitude préconisée rendait impossible l'implantation de la nouvelle construction, que l'immeuble tel qu'implanté sur la demande de permis de construire accordée le 8 septembre 2014 ne peut être réalisé en raison de sa proximité immédiate avec l'emprise de la servitude, et que la nature du sol très mauvaise selon le rapport d'étude de sol joint à son attestation nécessite des talutages à faibles pentes qui risquent d'empiéter sur l'implantation du chalet projeté et mettre à mal la stabilité du bâtiment(proximité talus/fondations aval au sud-est) ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans examiner au moins sommairement ces éléments de preuve déterminants, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir fixé le montant de l'indemnité due par M. E... à M. C... à la somme de 9.110 euros TTC ;

AUX MOTIFS QU'en fonction des prix du terrain pratiqués dans le secteur et au vu des frais déjà engagés pour la création du chemin existant, l'expert a estimé l'indemnité due aux époux C... à la somme totale de 9.110 euros qui n'est remise en cause par aucun élément probant. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné L... E... à régler cette somme de 9.110 euros ;

ET AUX MOTIFS adoptés du jugement que les inconvénients avancés par les défendeurs ont été pris en compte dans le calcul de l'indemnité par l'expert ;

1°- ALORS QUE le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner ; que la privation de jouissance d'une partie de la parcelle et la perte de droits à construire en raison des contraintes du POS ou encore une moins-value résultant de la servitude constituent des dommages indemnisables ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans s'expliquer comme elle y était invitée sur le préjudice résultant de la perte de jouissance de la partie triangulaire de la parcelle des époux C... située à gauche de l'assiette du chemin, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 682 du code civil ;

2°- ALORS QUE les juges du fond ont l'obligation de ne pas dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; que comme le faisaient valoir les époux C... dans leurs conclusions d'appel, il ne résulte pas du rapport d'expertise que l'expert judiciaire aurait pris en considération le dommage résultant de la perte de jouissance de la partie triangulaire de leur parcelle située à gauche de l'assiette du chemin, dans l'évaluation de l'indemnité (rapport p. 17) ; qu'à supposer qu'elle ait entendu adopter les motifs du jugement, en énonçant que les inconvénients avancés par les défendeurs auraient été pris en compte dans le calcul de l'indemnité par l'expert, la Cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise en violation du principe susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-26024
Date de la décision : 28/05/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 16 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 28 mai. 2020, pourvoi n°18-26024


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.26024
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