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20/05/2020 | FRANCE | N°18-24834

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 20 mai 2020, 18-24834


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 mai 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 432 F-D

Pourvoi n° R 18-24.834

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MAI 2020

Mme F... R..., domiciliée [...] en qualité de tutrice de son fi

ls, majeur protégé, S... R..., a formé le pourvoi n° R 18-24.834 contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (3e...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 mai 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 432 F-D

Pourvoi n° R 18-24.834

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MAI 2020

Mme F... R..., domiciliée [...] en qualité de tutrice de son fils, majeur protégé, S... R..., a formé le pourvoi n° R 18-24.834 contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (3e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MACSF assurances, dont le siège est [...] ,

2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Touati, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme R..., de Me Le Prado, avocat de la société MACSF assurances, et après débats en l'audience publique du 26 février 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Touati, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller, et Mme Cos, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. S... R..., alors âgé de cinq ans, a été victime le 26 août 1999 d'un accident de la circulation ayant entraîné des lésions du tronc cérébral, dans lequel était impliqué un véhicule assuré auprès de la société MACSF assurances (l'assureur) ; qu'après expertise, M. M... R... et Mme F... R..., agissant tant en son personnel qu'en sa qualité de tutrice M. S... R..., ont assigné l'assureur en indemnisation des préjudices subis par leur fils, devenu majeur, ainsi que de leurs préjudices personnels ; que la soeur de la victime est intervenue volontairement à l'instance ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche, sur le quatrième moyen et sur le cinquième moyen, pris en sa cinquième branche, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches :

Attendu que Mme F... R..., ès qualités, fait grief à l'arrêt de fixer l'indemnité due à M. S... R... au titre de la tierce personne avant consolidation à la somme de 1 207 080,91 euros, dont à déduire la somme de 991 547,02 euros, en sorte que le solde revenant à S... R... est de 215 533,89 euros, sauf imputation de versements de l'assureur au titre de la rente tierce personne « familiale » jusqu'au 29 septembre 2009 et de condamner l'assureur payer, en derniers ou quittance, lesdites sommes à Mme F... R..., ès qualités, après déduction des provisions versées, indépendamment de la créance des tiers payeurs, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge évaluant le chef de préjudice relatif à l'assistance par tierce personne avant consolidation doit d'abord déterminer le besoin horaire total de la victime, puis déduire, le cas échéant, le nombre d'heures d'ores et déjà prises en charge par l'assureur à titre provisionnel, et enfin allouer à la victime une indemnité correspondant aux heures non prises en charge par l'assureur, sur la base d'un coût horaire qu'il détermine souverainement ; qu'en allouant à M. R..., au titre de l'assistance par tierce personne avant consolidation, la somme de 215 533,89 euros, après avoir déterminé un coût global fixé à 1 207 080,91 euros, et soustrait les sommes versées par la MACSF à différents prestataires pour un total de 991 547,02 euros, sans calculer, pour les indemniser, le nombre d'heures d'assistance qui n'avaient pas été fournies par l'assureur sur la période considérée, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;

2°/ que le juge saisi d'un litige doit le trancher en vidant sa saisine ; qu'en allouant à M. R... une somme de « 215 533,89 euros sauf à imputer sur ce poste les règlements opérés par la MACSF au titre de la rente servie aux parents au titre de la tierce personne « familiale » jusqu'au 29 septembre 2009 » (arrêt, p. 12), sans calculer elle-même le montant desdits règlements, au besoin en ordonnant une mesure d'instruction ou en rouvrant les débats sur ce point, la cour d'appel a violé les articles 4 du code civil et 12 du code de procédure civile ;

Mais attendu d'abord que sous couvert d'un grief non fondé de violation de l'article 1382, devenu 1240 du code civil, et du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, le moyen, en sa première branche, ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'évaluation souveraine du préjudice lié à l'assistance par une tierce personne avant consolidation par la cour d'appel qui après avoir distingué entre les périodes de prise en charge en hôpital de jour et celles de présence complète à domicile et différencié les besoins d'assistance par une aide ménagère, une aide soignante et une infirmière évalués sur la base de taux horaires distincts, a fixé le besoin total en aide humaine de la victime à une certaine somme dont elle a déduit le montant des prestations financées par l'assureur ;

Et attendu, ensuite, qu'ayant relevé qu'il n'était pas contesté qu'une rente avait été servie par l'assureur aux parents au titre de la tierce personne, la cour d'appel a tranché le litige dont elle était saisie en jugeant qu'elle s'imputerait sur ce poste de préjudice ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que Mme F... R..., ès qualités, fait grief à l'arrêt de fixer l'indemnité due à M. S... R... au titre des pertes de gains professionnels après consolidation, avant le 1er octobre 2018, à la somme de 15 000,00 euros et après le 1er octobre 2018, à une rente annuelle viagère payable mensuellement à terme échu de 18 000,00 euros et de condamner la société MACSF à payer, en derniers ou quittance, lesdites sommes à Mme F... R... en qualité de tutrice de M. S... R..., après déduction des provisions versées, indépendamment de la créance des tiers payeurs, alors, selon le moyen, que le juge est tenu de motiver sa décision ; qu'en allouant à M. R..., au titre de ses pertes de gains professionnels futurs, une somme calculée sur une base de 1 500 euros par mois, sans expliquer pourquoi elle présumait que la profession à laquelle M. R... aurait pu prétendre en l'absence de survenance de l'accident lui aurait procuré des revenus inférieurs au salaire moyen en France de 25 507 euros annuels selon l'INSEE, sur la base duquel avait été formulée sa demande d'indemnisation de ce chef de préjudice (conclusions, p. 34, § 10), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que sous couvert d'un grief non fondé de violation de l'article 455 du code de procédure civile, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'évaluation souveraine de la perte de gains professionnels futurs de M. S... R... par la cour d'appel qui, par une décision motivée, a estimé que si la proposition de l'assureur était insuffisante, il ne pouvait néanmoins être retenu un revenu net moyen de 25 507 euros qui apparaissait hypothétique et a fixé le revenu perdu de façon certaine à la somme de 18 000 euros par an ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

Attendu que pour fixer l'indemnité due à M. S... R... au titre des frais de véhicule adapté à la somme de 370 212,23 euros et de condamner l'assureur à lui payer cette somme, en derniers ou quittance, après déduction des provisions versées, indépendamment de la créance des tiers payeurs, l'arrêt retient un « surcoût initial et aménagement (tel qu'évalué par M. U...) en juillet 2002 » de 30 456 euros, relève que les parties s'accordent sur une durée d'amortissement de 6 ans et fixe le coût du renouvellement compter du 1er octobre 2018 selon le calcul suivant : « 30 456/6 x 47,230 (euro de rente pour un jeune homme de 24 ans au 1er octobre 2018) = 239 739,48 euros » ;

Qu'en se déterminant ainsi, en fixant pour l'avenir les frais de véhicule adapté sur la base d'un coût d'aménagement évalué en 2002, sans examiner la facture récente dont se prévalait Mme F... R..., ès qualités, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le cinquième moyen, pris en sa deuxième branche ;

Vu les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances, le premier dans sa rédaction alors applicable ;

Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter dans un délai maximal de huit mois à compter de l'accident une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice à la victime qui a subi une atteinte à sa personne, cette offre pouvant revêtir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime, l'offre définitive devant alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation ; qu'il résulte du second que si l'offre n'a pas été faite dans ces délais, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêts de plein droit au double du taux légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif ;

Attendu que pour rejeter la demande de Mme R..., ès qualités, tendant à voir condamner l'assureur à payer les intérêts au double du taux légal sur le fondement des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances, l'arrêt retient par motifs propres et adoptés que l'offre présenté par l'assureur le 9 septembre 2011, avant l'expiration du délai de cinq mois à compter du rapport définitif de l'expert judiciaire, n'apparaît pas manifestement insuffisante, ni incomplète compte tenu des éléments dont disposait l'assureur lorsqu'il a formulé cette offre et que le seul fait que les montants offerts aient été moindres que les sommes allouées ne suffit pas à rendre cette offre manifestement insuffisante ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si l'assureur avait formulé une offre d'indemnisation, au moins provisionnelle, dans le délai de huit mois suivant l'accident dont elle constatait qu'il était survenu le 26 août 1999, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé l'indemnité due à M. S... R... au titre de l'adaptation du véhicule à 370 212,23 euros et condamné la société MACSF assurances à payer cette somme, en deniers ou quittances, à Mme F... R... en sa qualité de tutrice de M. S... R..., après déduction des provisions versées, indépendamment de la créance des tiers payeurs et en ce qu'il a rejeté la demande de Mme F... R..., ès qualités, tendant à la condamnation de la société MACSF assurances à lui payer des intérêts au double du taux légal sur le fondement des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances, l'arrêt rendu le 27 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la société MACSF assurances aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société MACSF assurances ; La condamne à payer à Mme F... R..., prise en sa qualité de tutrice de M. S... R..., la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme R...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR fixé l'indemnité due à M. S... R... au titre de la tierce personne avant consolidation à la somme de 1 207 080,91 euros, dont à déduire la somme de 991 547,02 euros, en sorte que le solde revenant à S... R... est de 215 533,89 euros, sauf imputation de versements de la MACSF au titre de la rente tierce personne "familiale" jusqu'au 29 septembre 2009 et d'AVOIR condamné la société MACSF à payer, en derniers ou quittance, lesdites sommes à Mme F... R... ès qualités de tutrice de M. S... R..., après déduction des provisions versées, indépendamment de la créance des tiers payeurs ;

AUX MOTIFS QUE l'indemnisation au titre de la tierce personne ne pouvant être minorée lorsque l'aide est fournie par un membre de l'entourage, rien ne justifie de distinguer entre l'aide apportée par les parents de S... R..., et celle de professionnels ; que par ailleurs, la réparation de ce préjudice n'est pas subordonnée à l'engagement effectif des dépenses y afférentes, et à leur justification ; que, sur l'aide humaine avant le retour à domicile soit de décembre 2000 à début septembre 2002, il résulte de la lettre de la Macif du 5 janvier 2004 détaillant les fonds remis à M. et Mme R... en paiement d'un état de frais établi pour leur compte le 16 décembre 2003 que cette somme de 33 737,79 euros a été payée ; que le jugement sera donc infirmé en ce que cette somme a fait l'objet d'une condamnation ; que, sur l'aide humaine entre le retour à domicile, le 9 septembre 2002, et la date de la consolidation, soit le 29 septembre 2009 ; que pendant toute cette période, S... a été pris en charge en hôpital de jour pendant la semaine et hors vacances scolaires et jours fériés ; que le calcul du nombre de jours de présence complète au domicile et de présence en hôpital de jour proposé par les consorts R... ne fait l'objet d'aucune observation et sera donc retenu pour 1 071 jours pour le nombre de jours en hôpital de jour et 1 512 jours pour le nombre de jours de présence complète au domicile ; que sur la période considérée, et au vu du devis ADMR accepté par MACSF au titre de l'année 2002/2003, sera retenu un taux horaire lissé de 25 euros de l'heure pour les prestations infirmières ; qu'au vu des relevés CESU relatifs à l'aide-ménagère, sera retenu le taux horaire lissé de 10 euros. Le tarif horaire lissé de la tierce personne spécialisée aide-soignante sera évalué à 16 euros de l'heure au regard de la formation particulière que nécessite l'assistance respiratoire de l'enfant ; que le coût journalier de l'aide humaine pour les jours avec hôpital de jour peut être évalué ainsi : 16 h x 16 euros = 256 euros ; 2 h x 25 euros = 50 euros ; 2 h 15 x 16 euros = 36 euros ; 1 h à 10 9 euros, soit 352 euros ; le coût jusqu'à consolidation est de : 1 071 jours x 352 euros = 376 992 euros ; que le coût journalier de l'aide humaine pour les jours de présence complète à domicile s'établit à : 21 h + 2 h 15 + 2 h = 25 h 15 x 16 euros = 404 euros ; 3 h x 25 euros = 75 euros ; 1 h à 10 euros ; soit au total 489 euros ; que le coût jusqu'à consolidation pour les jours de présence complète sera donc évalué à : 489 euros x 1 512 jours = 739 368 euros ; que le besoin total en aide humaine avant consolidation pourrait donc être évalué à 376 992 + 739 368 + 33 737,79 = 1 150 097,79 euros ; que la MACSF proposant cependant, dans le dispositif de ses écritures (p. 59) la somme de 1 207 080,91 euros ; que c'est cette dernière somme qui sera retenue ; que les demandes formées par les consorts R... au titre de sommes exposées à la suite de prétendues défaillances des sociétés prestataires ont été justement rejetées, en l'absence de toute preuve que ces dépenses s'inscrivent dans les besoins évalués par les experts, et qui n'ont jamais été contestés ; qu'il est établi que la MACSF a réglé directement en premier lieu à l'ADMR la somme totale de 808 533,34 euros, puis à la société Seredomia celle de 149 275,89 euros (décompte [...] 14-14), ainsi que la somme de 33 737,79 euros ; qu'en ce qui concerne la tierce personne assurée par les parents, il résulte des pièces de MACSF, et il n'est pas contesté par Mme R..., qu'une rente a été servie à ce titre, sans que le moindre justificatif permettant le chiffrage exact de ce qui a été versé ne soit possible pour la cour ; qu'aucune pièce ne démontre ainsi le paiement effectif au titre de la tierce personne assurée par les parents de S... de la somme alléguée par MACSF de 166 206 euros ; qu'en effet, son raisonnement, selon lequel la preuve de ce paiement résulterait d'une assignation des consorts R... du 24 novembre 2011, qu'ils ne produisent pas, ou encore de procès-verbaux de transaction signés en novembre 2007 ne saurait être admis, en l'état de la prudente réserve de Mme R..., et en l'absence de toute quittance signée, ou de toute autre preuve du versement effectif de la rente alléguée ; que seront, dès lors, seules retenues les sommes de 808 533,34 euros, 149 275,89 euros (pièce 14-14 R...) et 33 737,79 euros, soit la somme totale de 991 547,02 euros, en sorte que le solde revenant à S... R... est de 215 533,89 euros sauf à imputer sur ce poste les règlements opérés par la MACSF au titre de la rente servie aux parents au titre de la tierce personne "familiale" jusqu'au 29 septembre 2009 ;

1°) ALORS QUE le juge évaluant le chef de préjudice relatif à l'assistance par tierce personne avant consolidation doit d'abord déterminer le besoin horaire total de la victime, puis déduire, le cas échéant, le nombre d'heures d'ores et déjà prises en charge par l'assureur à titre provisionnel, et enfin allouer à la victime une indemnité correspondant aux heures non prises en charge par l'assureur, sur la base d'un coût horaire qu'il détermine souverainement ; qu'en allouant à M. R..., au titre de l'assistance par tierce personne après consolidation, la somme de 215 533,89 euros, après avoir déterminé un coût global fixé à 1 207 080,91 euros, et soustrait les sommes versées par la MACSF à différents prestataires pour un total de 991 547,02 euros, sans calculer, pour les indemniser, le nombre d'heures d'assistance qui n'avaient pas été fournies par l'assureur sur la période considérée, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;

2°) ALORS QUE la victime a droit à la réparation intégrale de son préjudice, sans qu'il en résulte pour elle une perte ou un profit ; qu'en déduisant de l'indemnité allouée à M. R..., au titre de l'aide humaine entre le retour à domicile, le 9 septembre 2002, et la date de la consolidation, soit le 29 septembre 2009, une somme de 33 737,79 euros, dont l'assureur lui-même soutenait qu'elle ne couvrait que les frais de tierce personne spécialisée avant octobre 2002 (conclusions adverses, p. 19), et qu'elle avait d'ailleurs d'ores et déjà été imputée sur cette période (arrêt, p. 11, § 3), la cour d'appel, qui a imputé deux fois la même somme sur le montant de l'indemnité due à la victime, a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;

3°) ALORS QUE le juge saisi d'un litige doit le trancher en vidant sa saisine ; qu'en allouant à M. R... une somme de « 215 533,89 euros sauf à imputer sur ce poste les règlements opérés par la MACSF au titre de la rente servie aux parents au titre de la tierce personne "familiale" jusqu'au 29 septembre 2009 » (arrêt, p. 12), sans calculer elle-même le montant desdits règlements, au besoin en ordonnant une mesure d'instruction ou en rouvrant les débats sur ce point, la cour d'appel a violé les articles 4 du code civil et 12 du code de procédure civile.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR fixé l'indemnité due à M. S... R... au titre des pertes de gains professionnels après consolidation, avant le 1er octobre 2018, à la somme de 15 000,00 euros et après le 1er octobre 2018, à une rente annuelle viagère payable mensuellement à terme échu de 18 000,00 euros et d'AVOIR condamné la société MACSF à payer, en derniers ou quittance, lesdites sommes à Mme F... R... ès qualités de tutrice de M. S... R..., après déduction des provisions versées, indépendamment de la créance des tiers payeurs ;

AUX MOTIFS QU'il est incontestable que S... R... est définitivement privé de toute possibilité d'exercer une activité professionnelle ; que l'analyse de Mme R... tendant à fixer le revenu perdu à une moyenne entre les revenus de son époux et ceux de sa fille a été justement écartée, en raison des facteurs individuels qui jouent un rôle aussi important que le niveau socio-économique de la famille ; que si la proposition de la MACSF est en effet insuffisante, il ne peut néanmoins être retenu un revenu net moyen de 25 507 euros, qui apparaît hypothétique ; que le revenu perdu de façon certaine par S... R... sera fixé à 18 000 euros par an, à compter de l'âge de 23 ans, comme demandé par la victime ; que S... ayant eu 23 ans le 2 décembre 2016, les pertes de gains après consolidation échues au 30 septembre 2018 seront fixés à 18 000 + (18 000 / 12 x 10) = 15 000 euros ; que pour les motifs précédemment exposés, ce préjudice sera réparé, à compter du 1er octobre 2018 par une rente annuelle viagère de 18 000,00 euros sans qu'il y ait lieu à fixation d'un capital représentatif en l'absence de toute imputation à opérer au titre d'une créance de tiers payeur ; qu'elle sera payable mensuellement et revalorisée le 1er janvier de chaque année conformément à l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985 ;

ALORS QUE le juge est tenu de motiver sa décision ; qu'en allouant à M. R..., au titre de ses pertes de gains professionnels futurs, une somme calculée sur une base de 1 500 euros par mois, sans expliquer pourquoi elle présumait que la profession à laquelle M. R... aurait pu prétendre en l'absence de survenance de l'accident lui aurait procuré des revenus inférieurs au salaire moyen en France de 25 507 euros annuels selon l'INSEE, sur la base duquel avait été formulée sa demande d'indemnisation de ce chef de préjudice (conclusions, p. 34, § 10), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR fixé l'indemnité due à M. S... R... au titre de l'adaptation du véhicule à 370 212,23 euros et d'AVOIR condamné la société MACSF à payer, en derniers ou quittance, cette somme à Mme F... R... ès qualités de tutrice de M. S... R..., après déduction des provisions versées, indépendamment de la créance des tiers payeurs ;

AUX MOTIFS QUE le tribunal a justement retenu que seul devait être indemnisé le surcoût lié à l'acquisition d'un véhicule adapté, et le coût de son aménagement ; qu'en effet, il résulte des écritures de Mme R... que chacun des parents disposait lors de l'accident de son propre véhicule, et la circonstance que M. R... ait bénéficié d'un véhicule de société est indifférent. La MACSF souligne par ailleurs à juste titre que le véhicule dédié au transport de S... est utilisable pour les besoins de la famille, en sorte qu'il doit être tenu pour établi qu'en l'absence d'accident la famille R... aurait acquis au moins un véhicule, alors surtout que leurs habitations successives se trouvent dans de petites agglomérations peu desservies par les transports en commun ; que les parties s'accordent sur une durée d'amortissement de 6 ans, et le surcoût d'utilisation a été justement évalué par le tribunal à 1 025 euros par an, Mme R... ne justifiant pas du surcoût de 1 400 euros qu'elle réclame devant la cour ; que le préjudice sera évalué comme suit : surcoût initial et aménagement (tel qu'évalué par M. U...) en juillet 2002 : 30 456 euros ; renouvellement annuel jusqu'au 1er octobre 2018 : 30456 / 6 x 10 ans et 2 mois = 50760 + 846 = 51 606 euros ; renouvellement à compter du 1er octobre 2018 : 30 456/ 6 x 47,230 (euro de rente pour un jeune homme de 24 ans au 1er octobre 2018) = 239 739,48 euros ; surcoût d'utilisation à compter du 1er octobre 2018 (aucune demande à ce titre n'étant faite pour la période antérieure) : 1 025 x 47,230 = 48 410,75 euros ; que ce poste de préjudice sera donc fixé à 370 212,23 euros ;

1°) ALORS QUE le juge doit se placer au jour de sa décision pour apprécier le préjudice subi par la victime ; qu'en liquidant, pour l'avenir, les frais de véhicule adapté, sur la base d'un surcoût évalué en 2002, soit 16 ans avant la date de sa décision intervenue en 2018 (arrêt, p. 18, § 7), la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

2°) ALORS QUE le juge doit se placer au jour de sa décision pour apprécier le préjudice subi par la victime ; qu'en liquidant, pour la période postérieure à sa propre décision, les frais de véhicule adapté, sur la base d'un surcoût évalué en 2002, sans rechercher, comme il le lui était demandé (conclusions, p. 40 à 42), si le surcoût pour l'avenir ne devait pas être évalué sur la base d'une facture effectivement acquittée en 2018 par les consorts R... au titre de l'acquisition et de l'aménagement d'un nouveau véhicule de type Peugeot Traveller, adapté au handicap de S... R..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240 du code civil.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR fixé ainsi les postes de préjudice subis par S... R... : dépenses de santé restées à charge avant consolidation : solde restant dû après prise en charge par la MACSF de 158 613,41 euros : 22 671,91 euros ; tierce personne avant consolidation 1 207 080,91 euros, dont à déduire la somme de 991 547,02 euros, en sorte que le solde revenant à S... R... est de 215 533,89 euros, sauf imputation de versements de la MACSF au titre de la rente tierce personne "familiale" jusqu'au 29 septembre 2009 ; résidence principale : - agrandissement et domotique : solde restant dû après prise en charge par MACSF de 190 859,20 euros : 7 997,22 euros et d'AVOIR condamné la société MACSF à payer, en derniers ou quittance, lesdites sommes à Mme F... R... ès qualités de tutrice de M. S... R..., après déduction des provisions versées, indépendamment de la créance des tiers payeurs ;

ALORS QUE la cour d'appel qui a déduit les provisions déjà versées par l'assureur du responsable de l'indemnité à revenir à la victime au titre de certains chefs de préjudice ne peut prononcer, au titre de ces mêmes chefs, une condamnation en deniers ou quittances ; qu'en condamnant la MACSF à payer à Mme R..., ès qualités, diverses sommes « en deniers ou quittances », quand elle avait d'ores et déjà elle-même déduit du montant de certaines condamnations (dépenses de santé actuelles, tierce personne temporaire, frais de logement adapté) les provisions versées par l'assureur, la cour d'appel, qui a autorisé l'assureur à déduire deux fois les mêmes provisions de l'indemnité à revenir à la victime, a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale.

CINQUIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR rejeté les demandes tendant à la condamnation de l'assureur à payer les intérêts au double du taux légal, sur le fondement des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'il n'est pas contesté que l'offre du 9 septembre 2011 a été formulée dans les délais utiles ; que son examen révèle qu'elle aborde poste par poste les différents préjudices subis en récapitulant tant les sommes offertes que celles déjà réglées, pour un montant non négligeable de 2 480 407,62 euros, sans omettre de rappeler les transactions opérées au profit des victimes indirectes ; que la circonstance que les débours définitifs de la CPAM de la Sarthe, qui a été depuis lors intégralement réglée, n'aient pas été indiqués, est indifférente ; que l'incidence professionnelle a été jointe à la proposition au titre des pertes de gains professionnels, et le préjudice esthétique temporaire joint au préjudice esthétique définitif, et ne peuvent être ainsi considérés comme omis ; que par ailleurs l'omission du préjudice scolaire ne peut être considérée comme substantielle au regard de la gravité du préjudice en son ensemble, non plus que celle du préjudice exceptionnel résultant du trouble dans les conditions d'existence des membres de la famille, ou celle du préjudice matériel des parents, postes pour lesquels il n'est pas démontré que la MACSF disposait dès cette date de tous les éléments utiles ; que le seul fait que les montants offerts aient été moindres que les sommes allouées par le tribunal de grande instance puis la présente cour ne suffit par ailleurs pas à rendre cette offre manifestement insuffisante ; que le jugement sera dès lors confirmé sur le rejet de la demande de doublement des intérêts, ainsi que sur celui de la demande tendant à ce qu'il soit fait application de l'article L. 211-14 du code des assurances au profit du Fonds de Garantie Automobile ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'aux termes de l'article L. 211-9 du code des assurances, une offre d'indemnité, comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice, doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximal de 8 mois à compter de l'accident ; que cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime.L'offre définitive doit alors être faite dans un délai de 5 mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation ; qu'en tout état de cause, le délai le plus favorable à la victime s'applique ; qu'à défaut d'offre dans les délais impartis par l'article L. 211-9 du code des assurances, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit, en vertu de l'article L. 211-13 du même code, des intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif ; qu'en l'espèce, l'offre présentée par la MACSF le 9 septembre 2011, soit avant l'expiration du délai de 5 mois à compter du rapport définitif de l'expert judiciaire, n'apparait pas manifestement insuffisante, ni incomplète compte-tenu des éléments dont l'assureur disposait lorsqu'il a présenté cette offre ; que par conséquent, les demandes de doublement des intérêts avec anatocisme et de versement d'une indemnité au FGAO seront rejetées ;

1°) ALORS QUE la cassation des chefs de dispositif concernant l'indemnisation des préjudices de M. R... entraînera l'annulation par voie de conséquence des dispositions ayant rejeté ses demandes tendant à la condamnation de l'assureur à payer les intérêts au double du taux légal, sur le fondement des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances, après avoir jugé que l'offre d'indemnisation définitive formulée par l'assureur était complète et suffisante, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu, dans un délai maximum de huit mois à compter de l'accident, de présenter une offre d'indemnité, même provisionnelle, à la victime qui subit une atteinte à sa personne ; qu'en se bornant à retenir que l'assureur, après avoir été informé de la date de consolidation, avait formulé une offre d'indemnisation définitive complète et suffisante, sans rechercher, comme il le lui était demandé (conclusions, p. 46, in fine et p. 47, in limine), si la MACSF avait formulé une offre d'indemnisation provisionnelle dans le délai maximum de huit mois à compter de l'accident, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, le préjudice esthétique temporaire constitue un préjudice distinct du préjudice esthétique permanent ; que l'assureur qui garantit la responsabilité du conducteur d'un véhicule impliqué dans un accident de la circulation est tenu de présenter à la victime une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice ; qu'en jugeant complète l'offre de la MACSF quand il résultait de ses propres constatations qu'aucune offre n'avait été formulée au titre du préjudice esthétique temporaire (arrêt, p. 20, § 1er), dont l'assureur soutenait qu'il se confondait avec le préjudice d'agrément (arrêt, p. 20, § 1er ; offre d'indemnisation, cf. productions), la cour d'appel a violé les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances ;

4°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'assureur qui garantit la responsabilité du conducteur d'un véhicule impliqué dans un accident de la circulation est tenu de présenter à la victime une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice ; qu'en jugeant complète l'offre de la MACSF, quand il résultait de ses propres constatations que celle-ci omettait le préjudice scolaire, dont l'assureur ne pouvait ignorer l'existence s'agissant d'un jeune garçon de cinq ans en état pauci-relationnel handicapé à 95 %, la cour d'appel a violé les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances ;

5°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'assureur qui garantit la responsabilité du conducteur d'un véhicule impliqué dans un accident de la circulation est tenu de présenter à la victime une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice ; qu'en retenant, pour juger complète l'offre de la MACSF, nonobstant l'absence de proposition d'indemnisation relative au trouble dans les conditions d'existence des membres de la famille, préjudice retenu par le jugement définitif, qu'« il n'est pas démontré que la MACSF disposait [
] de tous les éléments utiles » (arrêt, p. 20, § 1er), quand ce poste de préjudice extrapatrimonial par ricochet s'évince de la seule gravité des blessures subies par la victime directe, dont l'assureur avait connaissance, la cour d'appel a violé les articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-24834
Date de la décision : 20/05/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 27 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 20 mai. 2020, pourvoi n°18-24834


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.24834
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