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25/03/2020 | FRANCE | N°19-83035

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 mars 2020, 19-83035


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° Y 19-83.035 F-D

N° 388

SM12
25 MARS 2020

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 25 MARS 2020

M. U... V... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles,18e chambre, en date du 11 juin 2018, qui, pour abandon de famille, l'a condamné

à soixante jours-amende à 15 euros, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M....

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° Y 19-83.035 F-D

N° 388

SM12
25 MARS 2020

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 25 MARS 2020

M. U... V... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles,18e chambre, en date du 11 juin 2018, qui, pour abandon de famille, l'a condamné à soixante jours-amende à 15 euros, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat de M. U... V..., et les conclusions de M. Valleix, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 février 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre, et M. Bétron, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. V... a épousé Mme F... D... le 1er février 2007 ; de leur union sont nés deux enfants, en 2008 et 2009.

3. Par ordonnance de non conciliation du 25 juin 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nanterre a notamment fixé à 300 euros par mois et par enfant la contribution due par M. V... à Mme D... pour leur entretien et leur éducation. Cette décision a été signifiée à M. V... le 24 juillet 2013.

4. Dans le cadre de la procédure de divorce, le juge de la mise en état, par ordonnance du 12 janvier 2017, a porté le montant de la contribution à 400 euros par mois et par enfant, décision dont M. V... a fait appel.

5. Le 2 mai 2017, Mme D... a fait citer ce dernier devant le tribunal correctionnel, du chef d'abandon de famille.

6. Par jugement du 4 décembre 2017, il a été déclaré coupable des faits, condamné à une peine d'emprisonnement avec sursis et, au titre de l'action civile au paiement d'une somme de 1 000 euros.

7. M. V... et le ministère public ont relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

8. Le moyen est pris de la violation des articles 227-3 du code pénal, et des articles 495, 591 et 593 du code de procédure pénale.

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce « qu'il a déclaré M. V... coupable des faits d'abandon de famille ; aux motifs qu'il ressort des déclarations claires et constantes de la victime que M. V... est bien resté plus de deux mois sans s'acquitter de la contribution due pour ses deux enfants ; que devant le tribunal correctionnel le prévenu a reconnu être resté deux mois sans s'acquitter de la contribution due pour ses deux enfants entre novembre 2016 et mai 2017 ; que le jugement sera donc confirmé sur la décision de culpabilité du prévenu ; et aux motifs réputés adoptés qu'il ressort de la procédure que M. V... U... n'a pas versé spontanément les sommes qu'il devait à D... F..., même s'il a régularisé la majeure partie des sommes dues ; qu'il produit en effet les attestations de D... F... indiquant qu'il s'est acquitté de la contribution due sur la période de prévention, sauf pour les mois de novembre et décembre 2016 ; que l'infraction étant caractérisée, il convient de l'en déclarer coupable ; alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que le délit d'abandon de famille est un délit intentionnel ; qu'en déclarant M. V... coupable d'abandon de famille aux seuls motifs qu'il ne s'était pas acquitté de la contribution due pour ses deux enfants pendant plus de deux mois, sans caractériser la volonté délibérée de ce dernier de se soustraire au paiement, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. »

Réponse de la Cour

10. Pour déclarer le prévenu coupable d'abandon de famille, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres et adoptés, que celui-ci n'a pas versé spontanément les sommes qu'il devait à Mme D..., même s'il a régularisé la majeure partie des sommes dues, en produisant des attestations de cette dernière selon lesquelles il s'est acquitté de la contribution due sur la période de prévention, à l'exception de celle due pour les mois de novembre et décembre 2016.

11. Les juges en concluent que l'infraction est caractérisée, notant par ailleurs que M. V... est responsable de chantier et déclare percevoir 2 000 euros par mois.

12. En l'état de ces énonciations, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.

13. Ayant souverainement apprécié les faits, elle a caractérisé en effet, sans insuffisance ni contradiction, en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable.

14. Dès lors, le moyen n'est pas fondé.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

15. Le moyen est pris de la violation des articles 227-3, 131-5, 132-1 et 132-20 du code pénal, et des articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale.

16. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce « qu'il a condamné M. U... V... à la peine de soixante jours-amende d'un montant unitaire de 15 euros, soit la somme totale de 900 euros à payer au terme de ce délai ; aux motifs que M. V... a exposé devant les premiers juges percevoir un revenu mensuel de plus de 2 000 euros comme chef de chantier ; qu'il y a donc lieu pour la cour de réformer le jugement entrepris sur la peine et statuant à nouveau de condamner le prévenu à la peine de soixante jour-amendes à 15 euros tel qu'il sera précisé au dispositif ci-dessous ; alors qu'en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle et notamment, lorsque le juge prononce une peine de jour-amende, des ressources et des charges du prévenu ; qu'en se bornant à relever, pour condamner M. V... au paiement de soixante jours-amende de 15 euros, qu'il avait un revenu mensuel de 2 000 euros, sans s'expliquer sur la gravité des faits ni sur les charges du prévenu qu'elle devait prendre en considération pour fonder sa décision, la cour d'appel ne l'a pas justifiée. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 132-1, 131-5, 132-19 et 132-20 du code pénal :

17. Il résulte de ces textes qu'en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle et que le juge qui prononce une peine de jours-amende doit motiver sa décision en tenant compte des ressources et des charges du prévenu.

18. Pour condamner M. V... à une peine de jours-amende, l'arrêt retient, après avoir constaté que le casier judiciaire du prévenu indique que ce dernier a été condamné le 13 janvier 2016 par la cour d'appel de Paris à deux ans d'emprisonnement dont un an assorti d'un sursis avec mise l'épreuve pendant deux ans pour des faits d'escroquerie en bande organisée, qu'il ne peut, dès lors, bénéficier du sursis simple.

19. Pour prononcer une peine de soixante jours-amende à 15 euros, les juges relèvent que le prévenu n'est ni comparant ni représenté devant la cour et qu'il a indiqué devant les premiers juges percevoir un revenu mensuel de plus de 2 000 euros en qualité de chef de chantier.

20. En prononçant ainsi, si les juges, en l'absence de comparution du prévenu, n'avaient pas à rechercher d'autres éléments que ceux dont ils disposaient au jour de l'audience, la cour d'appel, en ne s'expliquant pas sur la gravité des faits, a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé.

20. La cassation est en conséquence encourue de ce chef.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 11 juin 2018, mais en ses seules dispositions relatives à la peine, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq mars deux mille vingt.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 19-83035
Date de la décision : 25/03/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 11 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 mar. 2020, pourvoi n°19-83035


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.83035
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