LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 25 mars 2020
Cassation
Mme BATUT, président
Arrêt n° 242 F-D
Pourvoi n° D 19-10.728
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 MARS 2020
1°/ M. N... V...,
2°/ Mme D... V...,
domiciliés tous deux [...],
ont formé le pourvoi n° D 19-10.728 contre l'arrêt rendu le 18 septembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1), dans le litige les opposant :
1°/ à M. B... I..., domicilié [...] ,
2°/ à la société [...], société civile professionnelle, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
M. I... et la SCP [...] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. et Mme V..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. I... et de la SCP [...], après débats en l'audience publique du 25 février 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 septembre 2018), M... O..., de nationalité suédoise, est décédée le 18 septembre 2004 en France où elle était domiciliée, laissant pour lui succéder M. et Mme V... (les légataires), également suédois, en qualité de légataires universels, à charge pour eux de créer deux fondations de bourse d'études O... I et O... II.
2. La déclaration de succession établie le 5 novembre 2006 par M. I... (le notaire) a tenu compte du fait que la somme de 208 449 euros était destinée à un organisme à but non lucratif et pouvait bénéficier de l'exonération prévue par l'article 795 du code général des impôts.
3. Le 15 décembre 2009, les légataires ont reçu de l'administration fiscale une proposition de rectification qui a été maintenue malgré leur réclamation, et ils ont acquitté une certaine somme.
4. Alléguant que le notaire avait manqué à son obligation d'information et de conseil, les légataires ont assigné le notaire et la société civile professionnelle [...] (la SCP notariale) en responsabilité et indemnisation.
Examen des moyens
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches, et sur le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexés
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur la première branche du moyen unique du pourvoi principal
Énoncé du moyen
6. Les légataires font grief à l'arrêt de limiter à la somme de 25 500 euros le montant des dommages-intérêts que le notaire et la SCP notariale ont été solidairement condamnés à leur payer, alors « que le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que les légataires faisaient valoir que le préjudice résultant du manquement du notaire à son obligation d'information constituait un préjudice entièrement consommé qui s'élevait à la somme de 170 031 euros, correspondant aux sommes qu'ils avaient dû acquitter auprès de l'administration fiscale du fait du redressement, tandis que le notaire s'était abstenu de conclure sur la question du préjudice subi par les légataires ; que la cour d'appel a retenu que le préjudice de ces derniers s'analysait en une perte de chance ; qu'en relevant d'office, pour limiter le montant des dommages- intérêts à la somme de 25 500 euros, le moyen tiré de ce que le préjudice subi par les légataires au titre du manquement par le notaire à son devoir de conseil s'analysait en une perte de chance, sans inviter au préalable les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
7. Selon ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, observer lui-même le principe de la contradiction ; il ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
8. L'arrêt retient que, sans la faute commise par le notaire qui n'a pas précisé aux légataires les conditions imposées par la loi française pour qu'un legs destiné à un organisme à but désintéressé puisse bénéficier de l'exonération des droits de mutation à titre gratuit, ceux-ci auraient pu déposer une déclaration d'utilité publique dans le délai d'un an suivant l'ouverture de la succession, et qu'ils ont ainsi subi une perte de chance dont l'indemnisation doit être chiffrée à la somme de 25 500 euros.
9.En statuant ainsi, alors qu'il n'était pas soutenu que le préjudice allégué consistait en une perte de chance, la cour d'appel, qui a relevé d'office le moyen tiré de l'existence d'un tel préjudice, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne M. I... et la société civile professionnelle [...] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. et Mme V....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité à la somme de 25 500 euros le montant des dommages et intérêts que maître I... et la SCP [...] ont été solidairement condamnés à payer aux époux V... ;
Aux motifs que « le préjudice qui résulte d'un manquement à l'obligation d'information et de conseil est nécessairement une perte de chance dans la mesure où celui qui est le destinataire de l'information et du conseil reste libre de s'y conformer ou non ; en l'espèce, il y a lieu de constater qu'alors qu'M... O... est décédée en 2004, les époux V... n'ont pu justifier en 2009 ni du statut exact des fondations au regard du droit suédois ni d'une quelconque activité invoquant à ce sujet un déblocage récent des fonds sans produire aucune pièce justificative ; il résulte de ces circonstances un manque de diligence dans la mise en oeuvre des dernières volontés d'M... O... qui conduit la cour à considérer que la perte de chance qu'ils réalisent les formalités nécessaires pour bénéficier de l'exonération fiscale en temps utile est de l'ordre de 15 % ; il y a donc lieu de condamner solidairement maître I... et la SCP de notaires à leur payer la somme de 25 500€ et le jugement du 18 mai 2016 sera infirmé en ce sens » (arrêt, pp. 4 et 5) ;
1°) Alors que le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que les époux V... faisaient valoir (conclusions, pp. 10 et 11) que le préjudice résultant du manquement du notaire à son obligation d'information constituait un préjudice entièrement consommé qui s'élevait à la somme de 170 031 euros, correspondant aux sommes qu'ils avaient dû acquitter auprès de l'administration fiscale du fait du redressement, tandis que le notaire s'était abstenu de conclure sur la question du préjudice subi par les époux V... ; que la cour d'appel a retenu que le préjudice de ces derniers s'analysait en une perte de chance ; qu'en relevant d'office, pour limiter le montant des dommages et intérêts à la somme de 25 500 euros, le moyen tiré de ce que le préjudice subi par les époux V... au titre du manquement par le notaire à son devoir de conseil s'analysait en une perte de chance, sans inviter au préalable les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°) Alors que, subsidiairement, le préjudice résultant d'un manquement du notaire à son obligation d'information et de conseil peut constituer un préjudice entièrement consommé, et ne s'analyse pas nécessairement en une perte de chance ; qu'en retenant au contraire, pour limiter le montant des dommages et intérêts à la somme de 25 500 euros, qu'un tel préjudice était « nécessairement » une perte de chance dans la mesure où celui qui était le destinataire de l'information et du conseil restait libre de s'y conformer ou non, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code ;
3°) Alors que, subsidiairement encore, le préjudice résultant d'un défaut d'information du notaire quant aux conditions d'exonération des droits de mutation d'un legs destiné à un établissement d'utilité publique à créer, qui a fait perdre à son client le bénéfice d'une telle exonération et exposé ce dernier à un redressement et au paiement d'intérêts de retard, constitue un préjudice entièrement consommé égal au montant acquitté au titre du redressement et des intérêts de retard, et non une perte de chance ; que la cour d'appel a énoncé, d'une part, que le notaire avait manqué à son obligation d'information, en s'abstenant de préciser aux époux V... les conditions imposées par la loi française pour qu'un legs destiné à un organisme à but désintéressé puisse bénéficier de l'exonération des droits de mutation à titre gratuit, d'attirer l'attention des époux V... sur la possibilité que la reconnaissance d'utilité publique française n'avait peut-être pas d'équivalent en Suède et de rechercher des informations auprès de l'administration fiscale sur ses exigences et l'application qu'elle faisait des textes dans des circonstances telles que celles du cas particulier ; que la cour d'appel a énoncé, d'autre part, que ce manquement était la cause du redressement notifié par l'administration fiscale aux époux V... ; qu'en retenant néanmoins, pour limiter le montant des dommages et intérêts à la somme de 25 500 euros, que le préjudice subi par les époux V... du fait du redressement était une perte de chance, quand il s'agissait, en l'état des propres constatations de l'arrêt, d'un préjudice entièrement consommé, la cour d'appel a derechef violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code ;
4°) Alors que, encore plus subsidiairement, le fait pour le client d'un notaire de n'avoir pas effectué certaines démarches après l'expiration du délai légal requis pour les réaliser est sans lien de causalité avec son préjudice lorsque cette abstention est la conséquence directe du manquement du notaire à son obligation d'information quant aux démarches à effectuer et à leur délai de réalisation ; que la cour d'appel a retenu qu'il existait un lien de causalité entre le manquement du notaire à son obligation d'information sur la nécessité d'une reconnaissance d'utilité publique dans le délai d'un an et la rectification fiscale qui reposait sur cette absence de déclaration publique en temps utile, d'où il résultait qu'il importait peu que les époux V... aient, postérieurement à l'expiration de ce délai d'un an, effectué ou non les démarches utiles ; qu'en retenant néanmoins, pour limiter le montant des dommages et intérêts à la somme de 25 500 euros, que les époux V... avaient manqué de diligence dans la mise en oeuvre des dernières volontés d'M... O..., par la considération qu'ils n'avaient pu justifier en 2009 ni du statut exact des fondations au regard du droit suédois ni d'une quelconque activité, invoquant à ce sujet un déblocage récent des fonds sans produire aucune pièce justificative, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser un lien de causalité entre la prétendue faute des époux V... et leur préjudice, a de plus fort violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. I... et la SCP [...] .
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné in solidum M. I... et la SCP de notaires à payer aux époux V... la somme de 25 500 euros à titre de dommages et intérêt ;
AUX MOTIFS QUE les époux V... reprochent au notaire de s'être trompé sur les textes applicables en visant la convention franco-suédoise de 1936 et d'avoir manqué à son obligation de conseil en ne les informant ni des formalités ni des délais à respecter pour pouvoir bénéficier de l'exonération fiscale alors que l'article 18-2 de la loi du 23 juillet 1987 sur le mécénat impose un délai d'un an après l'ouverture de la succession pour le dépôt de la demande de reconnaissance d'utilité publique de la fondation ; qu'ils font valoir que le notaire ne les a pas avertis qu'il fallait que les fondations soient reconnues d'utilité publique et que la demande soit déposée dans le délai susvisé ; que s'agissant du préjudice, ils considèrent qu'il ne s'agit pas d'une simple perte de chance et que le fait qu'ils n'aient pas déposé les statuts des fondations est indifférent dès lors que leur préjudice naît du défaut de respect du délai d'un an suivant la déclaration de la succession ; que les intimés répondent qu'ils ont informé les époux V... de la possibilité d'exonération des fonds destinés aux fondations, résultant de la convention franco-suédoise du 8 juin 1994 et de l'article 795 du code général des impôts dans une lettre du 17 janvier 2005, et que l'erreur de texte relevé par l'administration fiscale n'a pas entraîné d'erreur de droit ; qu'ils considèrent donc qu'ils ont rempli leur obligation d'information et de conseil ; qu'ils font valoir qu'il appartenait aux époux V... munis de cette information, de constituer des fondations en Suède et que l'administration fiscale a rejeté l'exonération parce que ceux-ci n'ont pas justifié de la bonne constitution en Suède des fondations et spécialement de leur enregistrement de sorte que le redressement fiscal n'est pas dû à la faute du notaire mais à l'absence des diligences qu'il incombait aux appelants de réaliser ; que, s'agissant de la reconnaissance d'utilité publique prévue par l'article 795 du code général des impôts, les intimés déclarent qu'il s'agit d'une institution de droit français et qu'elle ne pouvait être requise en Suède ; que, s'agissant d'un manquement à l'obligation d'informer du délai d'un an de l'article 18-2 de la loi du 23 juillet 1987, ils soutiennent que ce délai s'applique aux fondations constituées en France et que la loi française sur le mécénat n'a pas vocation à s'appliquer en Suède ; qu'ils relèvent que les époux V... ne justifient d'aucune diligence auprès de l'administration suédoise et qu'ils ont eux-mêmes déclaré à l'administration fiscale française que les fondations n'avaient pas encore bénéficié des fonds et qu'elles n'avaient aucune activité ; que le notaire est tenu d'informer et d'éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets des actes auxquels il prête son concours, notamment quant aux incidences fiscales ; qu'il lui appartient de démontrer qu'il a effectivement rempli son obligation de conseil à l'égard de ses clients ; qu'en l'espèce, trois textes régissaient la situation fiscale du legs consenti par M... O... en vue de la création de fondations: - la convention franco-suédoise du 8 juin 1994 qui prévoit que : « les organismes à but désintéressé créés ou organisés dans un Etat contractant et exerçant leur activité dans le domaine ...éducatif...bénéficient dans l'autre Etat contractant dans les conditions prévues par la législation de celui-ci des exonérations ou réductions d'impôt ou autres avantages fiscaux accordés aux entités de nature identique ou analogue créées ou organisées dans cet autre Etat » ; - l'article 795 du code général des impôts qui dispose que sont exonérés des droits de mutation à titre gratuit les dons et legs faits aux associations reconnues d'utilité publique ; - l'article 18-2 de la loi du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat qui énonce que la demande de reconnaissance d'utilité publique doit à peine de nullité du legs être déposée auprès de l'autorité administrative compétente dans l'année suivant l'ouverture de la succession ; que, par une lettre du 17 janvier 2005, le notaire a informé les époux V... des dispositions de la convention franco-suédoise du 8 juin 1994 citées ci-dessus sans mentionner l'article 795 du code général des impôts ni l'article 18-2 de la loi du 23 juillet 1987 ; qu'il s'agit de textes français dont le champ d'application se limite à la France, néanmoins la convention franco-suedoise énonce que « les organismes à but désintéressé créés ou organisés dans un Etat contractant bénéficient des avantages fiscaux dans l'autre Etat contractant dans les conditions prévues par la législation de celui-ci » ; que le notaire ne pouvait donc limiter l'information qu'il délivrait aux dispositions de la convention franco-suédoise mais il devait aussi préciser aux époux V... les conditions imposées par la loi française pour qu'un legs destiné à sui organisme à but désintéressé, puisse bénéficier de l'exonération des droits de mutation à titre gratuit ; que si la reconnaissance d'utilité publique est une institution qui n'a pas nécessairement de correspondance en Suède, il devait attirer l'attention des époux V... sur ce sujet et obtenir des informations auprès de l'administration fiscale sur ses exigences et l'application qu'elle faisait du texte dans ces circonstances ; qu'ainsi la lettre du 17 janvier 2005 a fourni aux époux V... une information incomplète et il sera donc retenu que le notaire a manqué à leur égard à son obligation d'information et de conseil ; que le 15 décembre 2009, l'administration fiscale après avoir rappelé les textes applicables visés ci-dessus, a fait valoir à l'appui d'une proposition de rectification, que les époux V... ne justifiaient ni de la réalité de l'existence des fondations O... I et O... II ni de leur reconnaissance d'utilité publique de sorte qu'ils ne justifiaient pas respecter les dispositions de l'article 795 du code général des impôts ni celles de l'article 11 de la convention fiscale franco-suédoise ; qu'elle relevait ainsi que les époux V... « n'avaient fourni aucun document officiel suédois attestant de la date de création, de la nature des statuts des deux fonds de bourses d'études dénommés fondations O... I et O... II ainsi que du caractère désintéressé du but de ces deux organismes et de leur reconnaissance d'utilité publique » ; que les époux V... n'ont pas communiqué leur réponse à cette proposition de rectification mais le 14 septembre 2012, l'administration fiscale a confirmé sa position et a ajouté en invoquant l'article 18-2 de la loi du 23 juillet 1987 qu'ils ne justifiaient pas avoir déposé une demande de reconnaissance d'utilité publique dans le délai d'un an suivant l'ouverture de la succession ; qu'il y a lieu de retenir qu'il existe un lien de causalité entre le manquement du notaire à l'obligation d'information sur la nécessité d'une reconnaissance d'utilité publique dans le délai d'un an et la rectification fiscale qui repose sur cette absence de déclaration publique dans le temps utile ; que, néanmoins le préjudice qui résulte d'un manquement à l'obligation d'information et de conseil est nécessairement une perte de chance dans la mesure où celui qui est le destinataire de l'information et du conseil reste libre de s'y conformer ou non ; qu'en l'espèce, il y a lieu de constater qu'alors qu'M... O... est décédée en 2004, les époux V... n'ont pu justifier en 2009 ni du statut exact des fondations au regard du droit suédois ni d'une quelconque activité invoquant à ce sujet un déblocage récent des fonds sans produire aucune pièce justificative ; qu'il résulte de ces circonstances un manque de diligence dans la mise en oeuvre des dernières volontés d'M... O... qui conduit la cour à considérer que la perte de chance qu'ils réalisent les formalités nécessaires pour bénéficier de l'exonération fiscale en temps utile est de l'ordre de 15 % ; qu'il y a donc lieu de condamner solidairement maître I... et la SCP de notaires à leur payer la somme de 25 500 € et le jugement du 18 mai 2016 sera infirmé en ce sens ;
1°) ALORS QU'est seul sujet à réparation le préjudice personnellement subi par le demandeur à l'action ; qu'en condamnant in solidum le notaire et la SCP notariale à indemniser les époux V... d'une perte de chance de bénéficier d'une exonération fiscale qui aurait dû s'appliquer aux sommes qui devaient être versées aux deux fondations qu'ils devaient créer conformément aux dernières volontés de la de cujus dont ils étaient les légataires universels, quand les sommes qu'ils ont ainsi dû verser à l'administration fiscale auraient dû revenir aux fondations de sorte que la chance perdue n'aurait pu bénéficier qu'à ces fondations, la cour d'appel, qui a indemnisé les époux V... d'un préjudice qui ne leur était pas personnel, a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le propre de la responsabilité civile est de replacer la victime dans la situation qui aurait été la sienne sans la faute imputée au défendeur ; qu'en condamnant in solidum le notaire et la SCP notariale à indemniser les époux V... d'une perte de chance de bénéficier d'une exonération fiscale qui aurait dû s'appliquer s'ils avaient créé deux fondations selon les dernières volontés de la de cujus dont ils étaient les légataires universels, quand, si cette éventualité favorable s'était réalisée, ils n'auraient pas perçu les sommes sur lesquelles ils ont été assujettis puisqu'elles seraient revenues aux fondations de sorte que leur situation personnelle n'eut pas été meilleure, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil.