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25/03/2020 | FRANCE | N°18-21239

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 mars 2020, 18-21239


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 mars 2020

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 238 F-D

Pourvoi n° G 18-21.239

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 MARS 2020

M. F... T..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° G 18-21

.239 contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2018 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la caisse ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 mars 2020

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 238 F-D

Pourvoi n° G 18-21.239

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 MARS 2020

M. F... T..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° G 18-21.239 contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2018 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Loire Haute-Loire, dont le siège est [...] ,

2°/ à la société Volta Tech, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Girardet, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. T..., de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Loire Haute-Loire, après débats en l'audience publique du 25 février 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Girardet, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 18 janvier 2018), le 8 avril 2011, M. T..., exploitant agricole, a commandé à la société Volta Tech (le vendeur) la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques aux fins de produire de l'électricité destinée à être vendue à la société EDF. Le 9 septembre 2011, il a souscrit trois prêts auprès de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Loire Haute-Loire (la banque) en vue de financer l'opération.

2. A la suite d'impayés, la banque a prononcé la déchéance du terme, puis a assigné M. T... en paiement. Celui-ci, ayant mis en cause le vendeur, a sollicité la résolution des contrats de vente et de prêts, ainsi que l'indemnisation du préjudice causé par le retard apporté à la réalisation de l'installation.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. M. T... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en résolution des contrats de vente et de prêts, de le condamner à payer diverses sommes à la banque et de rejeter ses demandes de dommages-intérêts formées contre le vendeur et la banque, alors :

« 1°/ qu'il résulte des constatations des juges du fond que pour obtenir les subventions et bénéficier du prix de 0,60 euro par kwh, le chantier devait être achevé le 10 septembre 2011, les demandes de passages de l'APAVE et du consuel devaient être programmées avant cette date ; que, selon les juges du fond, la commande du matériel ayant été passée le 31 août 2011, l'intervention de l'entreprise de charpente a été prévue le 29 septembre 2011 et le passage de l'électricien en octobre 2011, cependant que l'APAVE et le consuel ont été missionnés en novembre 2011 ; que les juges du fond ont encore constaté qu'eu égard à ces circonstances, le vendeur ne justifiait pas avoir conseillé à M. T... de renoncer à son opération ; qu'en s'abstenant de rechercher si le manquement par le vendeur à son obligation de conseil, dans le contexte qui vient d'être décrit, ne révélait pas un manquement grave par l'entreprise à ses obligations, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1184 ancien [1217 et 1224 à 1230 nouveaux] du code civil ;

2°/ que, si les juges du fond ont imputé les retards à une décision tardive de M. T..., ou encore au paiement tardif d'un acompte ou à l'acceptation tardive du financement, de toute façon, quel qu'ait été le comportement de M. T..., le manquement du vendeur à son obligation de conseil pouvait justifier la résolution et qu'en se fondant sur l'attitude de M. T..., sans opérer la recherche visée à la première branche, les juges du fond ont en tout état de cause violé l'article 1184 ancien (1217 et 1224 à 1230 nouveaux) du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Après avoir retenu que le vendeur n'avait pas satisfait à son devoir de conseil en ne recommandant pas à M. T... de renoncer à l'opération qui ne pouvait lui rapporter les avantages escomptés, l'arrêt constate que celui-ci a manqué à son obligation de respecter le calendrier prévisionnel convenu pour la conclusion et l'exécution du contrat de vente, tandis que le vendeur a fait preuve de diligence.

5. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que le manquement du vendeur à son obligation de conseil ne commandait pas la résolution des contrats.

6. Le moyen ne peut donc être accueilli.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

7. M. T... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts dirigée contre le vendeur, alors « que, lorsqu'un juge constate qu'une partie a une obligation de conseil et que cette obligation n'a pas été satisfaite, il a l'obligation de se prononcer, sur le terrain du préjudice, sur le point de savoir s'il y a eu perte de chance de ne pas contracter ; que, pour se prononcer sur cette perte de chance, il doit reconstituer la situation qui aurait été celle du créancier de l'obligation de conseil, s'il avait été conseillé, et déterminer si, face à cette obligation de conseil, le créancier eut ou non maintenu sa volonté initiale ; qu'en s'abstenant de dire, au cas d'espèce, si dûment informé de ce qu'il ne pourrait obtenir ni les subventions ni le prix convenu avec EDF, M. T... eut persisté dans son projet, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1147 ancien (1231-1 nouveau) du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil :

8. Aux termes de ce texte, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

9. Pour rejeter la demande de réparation formée par M. T... contre le vendeur, l'arrêt retient que le préjudice dont celui-ci demande réparation, résulte directement de son propre retard à prendre les décisions attendues.

10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui incombait, si, mieux informé, M. T... n'aurait pas renoncé à l'opération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.

Et sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

11. M. T... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de paiement de la banque, alors :

« 1°/ que, dès lors qu'ils se fondaient, pour juger que la banque n'avait pas débloqué de manière prématurée les fonds objet des prêts, sur le fait que la condition suspensive devait être réputée accomplie par suite de l'abstention fautive de l'emprunteur, moyen non invoqué par les parties, les juges du fond se devaient d'interpeller les parties sur ce point ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, ils ont violé le principe du contradictoire et l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en tout état de cause, une condition ne peut être considérée comme accomplie du fait du débiteur en ayant empêché l'accomplissement sans qu'il soit constaté que le délai de réalisation de la condition a expiré ou que, faute de la stipulation d'un délai, la réalisation en est devenue impossible du fait du débiteur, ou, à tout le moins, que le délai raisonnable pour la réalisation de la condition a expiré ; qu'en considérant la condition suspensive comme accomplie du fait de l'abstention fautive de M. T... sans préciser si les parties avaient fixé pour la réalisation de la condition un terme antérieur à la libération des fonds, ou s'il était devenu certain à la date à laquelle les fonds ont été libérés que la réalisation de la condition était devenue impossible, ou, à tout le moins, si à cette date le délai raisonnable pour la réception des documents avait expiré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1176 et 1178 du code civil [1304-3 nouveau]. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

12. Selon ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.

13. Pour retenir que la banque n'a pas débloqué de manière prématurée les fonds objet des prêts et rejeter la demande de M. T... tendant à sa condamnation au paiement de dommages-intérêts, l'arrêt retient que la condition suspensive doit être réputée accomplie en raison de l'abstention fautive de celui-ci.

14. En statuant ainsi, alors qu'aucune des parties n'avait invoqué ce moyen et sans inviter celles-ci à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de dommages-intérêts formées par M. T... contre la société Volta Tech et la caisse régionale de Crédit agricole Loire Haute-Loire, l'arrêt rendu le 18 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes autrement composée ;

Condamne la caisse régionale de Crédit agricole Loire Haute-Loire aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse régionale de Crédit agricole Loire Haute-Loire et la condamne à payer à M. T... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. T....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté la demande de Monsieur T... tendant à la résolution du contrat conclu avec la société VOLTA TECH, condamné Monsieur T... à l'égard de la société VOLTA TECH, rejeté par voie de conséquence la demande de résolution de Monsieur T... visant les prêts consentis par le CREDIT AGRICOLE et condamné Monsieur T... au paiement de diverses sommes à l'égard du CREDIT AGRICOLE, ensemble rejeté les demandes de dommages et intérêts formées tant à l'encontre de la société VOLTA TECH qu'à l'encontre du CREDIT AGRICOLE ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la société « volta tech » en tant que professionnel contractant avec une personne non avertie dans le domaine de l'installation photovoltaïque est tenue d'une obligation contractuelle de conseil à son égard ; que mais elle ne doit réparation que si le créancier justifie d'un préjudice certain et direct résultant de la violation du devoir de conseil ; que son dommage est indemnisé en proportion de la perte de chance de ne pas contracter ; qu'en l'espèce, Monsieur T... qui avait effectué sa demande auprès d'EDF le 30 novembre 2009, était en possession d'une simulation depuis le 16 avril 2010 et d'un devis depuis le 8 avril 2011, n'a passé commande que le 8 août 2011 (date mentionnée dans les factures d'acompte - pièces 13 et 14 de la banque) ; qu'or, Monsieur T... était informé dès février 2011 par EDF de l'existence du moratoire et le 3 août 2011, EDF l'avait relancé en lui précisant que le bénéfice de l'obligation d'achat était dans son cas subordonné au respect des 2 critères suivants : achèvement des travaux de l'installation au plus tard le 10 septembre 2011 et mise en service du raccordement prononcée au plus tard le 10 septembre 2011 ou 2 mois après la fin des travaux de raccordement si la mise en service à cette date n'a pas été possible du fait de délais sur ceux-ci, après production de justificatifs ; qu'en réglant le premier acompte demandé à la commande le 12 septembre 2011, Monsieur T... n'a pas respecté le prévisionnel - déjà très tendu- de la société "volta tech" en vertu duquel l'acompte devait être versé le 17 août ; que le prévisionnel n'a pas davantage été respecté quant à la date d'acceptation du financement qui est intervenue le 9 septembre au lieu du 2-3 août ; qu'ainsi, Monsieur T... savait que les délais postérieurs se finalisant par une intervention programmée de l'Apave au 5 octobre 2011 ne pourraient être respectés ; que certes, la société « volta tech » ne justifie pas avoir conseillé Monsieur T... de renoncer à son opération dans ces conditions de sorte que le manquement à l'obligation de conseil est caractérisé ; que mais le préjudice résulte directement de la tardiveté de la prise de décision de Monsieur T... : - qui a eu lieu après réception du courrier d'EDF, - sans respecter les délais prévisionnels d'exécution communiqués par la société "volta tech", de sorte que la perte de chance de ne pas contracter par suite du manquement à l'obligation de conseil est nul ; que dans ces conditions, la responsabilité de la société « volta tech » ne peut être retenue et Monsieur T... sera débouté de sa demande en paiement de la somme de 200 000 euros à titre de dommages-intérêts à l'encontre de cette société ; que Monsieur T... soutient que la société « volta tech » devait avoir terminé les travaux au plus tard le 11 septembre 2011 et avoir formulé une demande de passage auprès de l'Apave et du consuel avant cette date mais que le maître d'oeuvre n'a pas respecté ses engagements ; qu'il a été vu précédemment que les travaux ne pouvaient être terminés le 11 septembre 2011 eu égard au non-respect par le client du prévisionnel et la société « volta tech » fait valoir à juste titre qu'elle a fait preuve de diligence en passant commande de matériel dès le 30 août 2011 et en faisant intervenir l'entreprise de charpente dès le 29 septembre 2011 ainsi que l'électricien en octobre 2011 ; qu'elle a également missionné l'Apave et le consuel en novembre 2011. D'ailleurs, Monsieur T... ne justifie d'aucune relance ou mise en demeure rappelant au maître d'oeuvre ses obligations ; que la société « volta tech » a donc exécuté ses obligations et Monsieur T... sera débouté de sa demande en résolution du contrat. » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « aux termes de l'article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des deux parties ne satisfait pas à son engagement ; que le prononcé de la résolution suppose toutefois que soient caractérisés des manquements d'une gravité telle que le maintien du contrat ne soit pas possible ; qu'en l'espèce, il résulte des débats et des pièces produites que contrairement à ce qui est soutenu, la SOCIETE VOLTA TECH n'apparaît pas seule responsable du préjudice que Mr T... prétend subir ; qu'effet, force est de constater que ce dernier a fait preuve d'une certaine légèreté dans la gestion de son projet et de sa relation contractuelle avec VOLTA TECH ; qu'à cet égard, il sera observé qu'il n'a formellement sollicité la SOCIETE VOLTA TECH que le 8 avril 2011 alors qu'il avait obtenu d'EDF, depuis le 26 février 2010 selon ses dires, une proposition technique financière ; qu'il n'a requis les financements indispensables à l'opération que les 4 août et 2 septembre 2011 lesquels, compte tenu des délais de rétractation, n'ont pu être contractualisés que les 9 et 11 septembre 2011; que les fonds ne lui ont été versés qu'entre le 15 septembre et le 6 décembre 2011 si l'on considère la facture établie par VOLTA TECH le 25 novembre 2011; que dans ce contexte, le délai imposé par EDF pour la mise en service de l'installation, à partir duquel VOLTA TECH avait établi son devis, ne pouvait être légitimement tenu ; par ailleurs que Mr T... ne démontre pas que VOLTA TECH se serait engagée à lui obtenir de la région Languedoc Roussillon une subvention de 28 800 € ; qu'il est bien en peine d'autre part de justifier d'une lettre de relance ou d'une mise en demeure rappelant à VOLTA TECH ses obligations pour lesquelles, selon lui, elle se serait engagée ; que de son côté, la SOCIETE VOLTA TECH n'est pas exempte, mais dans une moindre mesure, de tout reproche ; qu'en tant que professionnelle avertie, il lui incombait en effet de mettre formellement en garde son cocontractant de l'impossibilité pour elle d'achever le chantier dans le délai fixé par EDF au 10 septembre 2011 et de s'abstenir de le laisser croire, aux termes du témoignage produit, à une issue favorable de son projet ; qu'il résulte de ces constatations que la résolution du contrat ne mérite pas d'être prononcée et qu'il y a lieu d'y substituer des dommages et intérêts d'un montant de 3100 € H.T., soit 3 720 € T.T.C. (18 600 € H.T./12 X 2) qu'il incombe à VOLTA TECH de supporter » ;

ALORS QUE, premièrement, il résulte des constatations des juges du fond (arrêt p. 7, avant dernier § et jugement p. 7, § 6) ; que pour obtenir les subventions et bénéficier du prix de 0,60 euros par Kwh, le chantier devait être achevé le 10 septembre 2011, les demandes de passages de l'APAVE et du Consuel devaient être programmées avant cette date ; que selon les juges du fond, la commande du matériel ayant été passée le 31 août 2011, l'intervention de l'entreprise de charpente a été prévue le 29 septembre 2011 et le passage de l'électricien en octobre 2011, cependant que l'APAVE et le Consuel ont été missionnés en novembre 2011 (arrêt p. 8, antépénultième §) ; que les juges du fond ont encore constaté qu'eu égard à ces circonstances, la société VOLTA TECH ne justifiait pas avoir conseillé à Monsieur T... de renoncer à son opération (arrêt p. 8, § 1er et jugement p. 7, § 6) ; qu'en s'abstenant de rechercher si le manquement par la société VOLTA TECH à son obligation de conseil, dans le contexte qui vient d'être décrit, ne révélait pas un manquement grave par l'entreprise à ses obligations, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1184 ancien [1217 et 1224 à 1230 nouveaux] du Code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, si les juges du fond ont imputé les retards à une décision tardive de Monsieur T..., ou encore au paiement tardif d'un acompte ou à l'acceptation tardive du financement, de toute façon, quel qu'ait été le comportement de Monsieur T..., le manquement de la société VOLTA TECH à son obligation de conseil pouvait justifier la résolution et qu'en se fondant sur l'attitude de Monsieur T..., sans opérer la recherche visée à la première branche, les juges du fond ont en tout état de cause violé l'article 1184 ancien [1217 et 1224 à 1230 nouveaux] du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur T... à l'encontre de la société VOLTA TECH ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la société « volta tech » en tant que professionnel contractant avec une personne non avertie dans le domaine de l'installation photovoltaïque est tenue d'une obligation contractuelle de conseil à son égard ; que mais elle ne doit réparation que si le créancier justifie d'un préjudice certain et directe résultant de la violation du devoir de conseil ; que son dommage est indemnisé en proportion de la perte de chance de ne pas contracter ; qu'en l'espèce, Monsieur T... qui avait effectué sa demande auprès d'EDF le 30 novembre 2009, était en possession d'une simulation depuis le 16 avril 2010 et d'un devis depuis le 8 avril 2011, n'a passé commande que le 8 août 2011 (date mentionnée dans les factures d'acompte - pièces 13 et 14 de la banque) ; qu'or, Monsieur T... était informé dès février 2011 par EDF de l'existence du moratoire et le 3 août 2011, EDF l'avait relancé en lui précisant que le bénéfice de l'obligation d'achat était dans son cas subordonné au respect des 2 critères suivants : achèvement des travaux de l'installation au plus tard le 10 septembre 2011 et mise en service du raccordement prononcée au plus tard le 10 septembre 2011 ou 2 mois après la fin des travaux de raccordement si la mise en service à cette date n'a pas été possible du fait de délais sur ceux-ci, après production de justificatifs ; qu'en réglant le premier acompte demandé à la commande le 12 septembre 2011, Monsieur T... n'a pas respecté le prévisionnel - déjà très tendu- de la société "volta tech" en vertu duquel l'acompte devait être versé le 17 août ; que le prévisionnel n'a pas davantage été respecté quant à la date d'acceptation du financement qui est intervenue le 9 septembre au lieu du 2-3 août ; qu'ainsi, Monsieur T... savait que les délais postérieurs se finalisant par une intervention programmée de l'Apave au S octobre 2011 ne pourraient être respectés ; que certes, la société « volta tech » ne justifie pas avoir conseillé Monsieur T... de renoncer à son opération dans ces conditions de sorte que le manquement à l'obligation de conseil est caractérisé ; que mais le préjudice résulte directement de la tardiveté de la prise de décision de Monsieur T... : - qui a eu lieu après réception du courrier d'EDF, - sans respecter les délais prévisionnels d'exécution communiqués par la société "volta tech", de sorte que la perte de chance de ne pas contracter par suite du manquement à l'obligation de conseil est nul ; que dans ces conditions, la responsabilité de la société « volta tech » ne peut être retenue et Monsieur T... sera débouté de sa demande en paiement de la somme de 200 000 euros à titre de dommages-intérêts à l'encontre de cette société » ;

ALORS QUE, lorsqu'un juge constate qu'une partie a une obligation de conseil et que cette obligation n'a pas été satisfaite, il a l'obligation de se prononcer, sur le terrain du préjudice, sur le point de savoir s'il y a eu perte de chance de ne pas contracter ; que pour se prononcer sur cette perte de chance, il doit reconstituer la situation qui aurait été celle du créancier de l'obligation de conseil, s'il avait été conseillé, et déterminer si, face à cette obligation de conseil, le créancier eut ou non maintenu sa volonté initiale ; qu'en s'abstenant de dire, au cas d'espèce, si dûment informé de ce qu'il ne pourrait obtenir ni les subventions, ni le prix convenu avec EDF, Monsieur T... eut persisté dans son projet, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1147 ancien (1231-1 nouveau) du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a accueilli les demandes en paiement du CREDIT AGRICOLE à l'encontre de Monsieur T... ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « que le prêt n° [...] d'un montant de 70 000 euros a été accordé sous la clause suspensive au déblocage des fonds de la réception par le prêteur de divers documents (attestation de base de calcul tarifaire d'EDF, PTF, autorisation de travaux permis de construire, devis d'une compagnie d'assurances pour le programme d'assurance exploitation etc) ; que la banque ne justifie pas avoir reçu ces documents; que le contrat ne spécifie pas que cette condition suspensive a été stipulée dans l'intérêt exclusif du prêteur (seules les garanties sont visées comme étant contractées dans l'intérêt exclusif de la banque) ; que Monsieur T... soutient, sans être contredit, qu'il a communiqué l'autorisation de travaux, le justificatif de règlement du premier acompte et la PTF; qu'il indique que les autres documents, en particulier l'assurance garantie décennale de l'installateur devaient être sollicités par la banque auprès de la société « volta tech » ; que cependant le contrat de prêt ne stipule rien de tel il mentionne seulement que le prêteur doit recevoir les documents cités; que dès lors, il appartient à l'emprunteur de réunir les documents demandés, ou de réaliser les démarches nécessaires, ce dont Monsieur T... ne justifie pas.; que dès lors, l'appelant ne peut se prévaloir d'une faute de la banque par suite de la non réalisation de la condition suspensive, celle-ci devant être réputée accomplie par suite de l'abstention fautive de l'emprunteur » ;

ALORS QUE, premièrement, dès lors qu'ils se fondaient, pour juger que le CREDIT AGRICOLE n'avait pas débloqué de manière prématurée les fonds objet des prêts, sur le fait que la condition suspensive devait être réputée accomplie par suite de l'abstention fautive de l'emprunteur, moyen non invoqué par les parties, les juges du fond se devaient d'interpeller les parties sur ce point ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, ils ont violé le principe du contradictoire et l'article 16 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, et en tout état de cause, une condition ne peut être considérée comme accomplie du fait du débiteur en ayant empêché l'accomplissement sans qu'il soit constaté que le délai de réalisation de la condition a expiré ou que, faute de la stipulation d'un délai, la réalisation en est devenue impossible du fait du débiteur, ou, à tout le moins, que le délai raisonnable pour la réalisation de la condition a expiré ; qu'en considérant la condition suspensive comme accomplie du fait de l'abstention fautive de M. T... sans préciser si les parties avaient fixé pour la réalisation de la condition un terme antérieur à la libération des fonds, ou s'il était devenu certain à la date à laquelle les fonds ont été libérés que la réalisation de la condition était devenue impossible, ou, à tout le moins, si à cette date le délai raisonnable pour la réception des documents avait expiré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1176 et 1178 du Code civil [1304-3 nouveau].


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-21239
Date de la décision : 25/03/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 18 janvier 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 mar. 2020, pourvoi n°18-21239


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.21239
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