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18/03/2020 | FRANCE | N°19-12493;19-12494;19-12495;19-12496;19-12497;19-12498

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2020, 19-12493 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mars 2020

Rejet

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 356 F-D

Pourvois n°
à
X 19-12.493
C 19-12.498 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MARS 2020

La société Presstali

s, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé les pourvois n° X 19-12.493, Y 19-12.494, Z 19-12.495, A 19-12.496, B 19-12.497 et C 1...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mars 2020

Rejet

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 356 F-D

Pourvois n°
à
X 19-12.493
C 19-12.498 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MARS 2020

La société Presstalis, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé les pourvois n° X 19-12.493, Y 19-12.494, Z 19-12.495, A 19-12.496, B 19-12.497 et C 19-12.498 contre six arrêts rendus le 18 décembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 11), dans les litiges l'opposant respectivement :

1°/ à M. L... V..., domicilié [...] ,

2°/ à M. X... U..., domicilié [...] ,

3°/ à M. J... T..., domicilié [...] ,

4°/ à M. K... R..., domicilié [...] ,

5°/ à M. I... N..., domicilié [...] ,

6°/ à M. Q... B..., domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse aux pourvois invoque, à l'appui de ses recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Presstalis, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de MM. V..., U..., T..., R..., N... et B..., après débats en l'audience publique du 12 février 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° X 19-12.493 à C 19-12.498 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués ( Paris, 18 décembre 2018), M. V... et cinq autres salariés de la société Nouvelles messageries de la presse parisienne (ci-après la NMPP) ont été affectés au sein de l'établissement Paris diffusion presse (ci-après l'établissement PDP).

3. Au cours de l'année 2003, la société NMPP a créée une filiale, la société presse Paris service ( ci-après la société SPPS), à laquelle a été transférée, à compter du 1er juillet 2004, l'activité de l'établissement PDP.

4. Le 2 décembre 2003, la société NMPP et les organisations syndicales, ont signé un protocole d'accord prévoyant le statut du personnel de la filiale mentionnant qu'entre le 1er janvier 2004 et le 30 juin 2006 les salariés de la société NMPP seraient détachés, conserveraient le bénéfice de leur statut NMPP et percevraient une prime différentielle destinée à garantir leur niveau de rémunération.

5. Cet accord, qui prévoyait la possibilité pour les salariés d'anticiper la date de leur transfert, a été suivi d'un plan de modernisation daté du 8 avril 2004 prévoyant, au bénéfice des salariés qui feraient ce choix, le versement d'une indemnité forfaitaire à condition de renoncer à certaines garanties au moment de leur transfert.

6. M. V... et cinq autres salariés ont opté pour un transfert immédiat au 1er juillet 2004 au sein de la société SPPS moyennant le versement de l'indemnité forfaitaire.

7. Le 21 avril 2006, un protocole concernant les salariés transférés le 30 juin 2006 a été conclu. Les salariés transférés à cette date ont intégré la société SPPS au sein d'un « groupe fermé ».

8. Dans le courant de l'année 2009 la société Presstalis est venue aux droits de la société NMPP.

9. A la suite d'une opération de restructuration, il a été décidé, à compter du 1er octobre 2013, de la fermeture de la filiale SPPS et du transfert des contrats de travail à la société Presstalis.

10. Se plaignant d'une différence de traitement injustifiée avec les salariés appartenant au « groupe fermé », M. V... et cinq autres salariés ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen, ci-après annexé

11. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

12. L'employeur fait grief aux arrêts de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes et de le condamner au paiement de sommes, alors « qu''il résulte de la combinaison des articles L 1471-1, L. 3245-1 du code du travail et 2224 du code civil que la prescription de l'action en paiement du salaire et de l'action en paiement de dommages-intérêts court à compter du jour où le salarié a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l'exercer ; qu'il était constant en l'espèce que les salariés défendeurs au pourvoi, transférés de la société NMPP dès le 1er juillet 2004 au sein de la société SPPS moyennant le versement d'une indemnité forfaitaire nette de 72 000 euros, fondent leurs demandes de rappels de salaires et indemnitaires sur une prétendue inégalité de traitement par rapport aux salariés de la société NMPP dont le transfert au sein de la société SPPS avait été retardé au 30 juin 2006 à l'issue d'une période transitoire, lesquels avaient perçu à compter de cette date une « prime différentielle » destinée à compenser la perte du statut NMPP, que les salariés défendeurs au pourvoi ne percevaient pas ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que selon les termes de l'accord du 2 décembre 2003, les salariés ayant opté pour un transfert retardé devaient être au plus tard transférés le 30 juin 2006 au sein de la société SPPS et percevoir à compter de cette date la « prime différentielle » si bien que les défendeurs au pourvoi avaient au moins dès cette date été en mesure de constater la différence de rémunération avec leurs collègues ; qu'en affirmant que les défendeurs au pourvoi n'avaient pu disposer des éléments de comparaison mettant en évidence la différence de traitement qu'au moment de leur réintégration au sein de la société NMPP, soit en octobre 2013, sans expliquer ce qui les avait empêchés de connaître le montant de la rémunération perçue par leurs collègues depuis que ces derniers avaient fait leur entrée au sein de la société SPPS au plus tard le 30 juin 2006 soit sept ans plus tôt, ni préciser comment la différence de traitement leur avait été révélée le 1er octobre 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1471-1, L. 3245-1 du code du travail et 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

13. La cour d'appel, qui a retenu que ni le protocole d'accord du 2 décembre 2003, ni le plan de modernisation du 8 avril 2004 ne permettaient aux salariés transférés le 1er juillet 2004 d'être éclairés sur la nature de leurs droits, que la preuve n'était pas rapportée qu'ils aient eu connaissance des termes du protocole du 21 avril 2006 concernant les salariés transférés après eux emportant maintien des droits auxquels le premier accord emportait renonciation, et qu'ils n'avaient pu disposer des éléments de comparaison mettant en évidence la différence de traitement qu'au moment de la réintégration le 1er octobre 2013 a, sans avoir à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, et précisant l'événement par lequel les salariés avaient eu connaissance des faits leur permettant d'exercer leur action, légalement justifié sa décision.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

14. L'employeur fait grief aux arrêts de le condamner au paiement de rappels de salaires, congés payés afférents et dommages-intérêts pour inexécution de bonne foi des contrats de travail alors :

« 1°/ que les salariés qui bénéficient tous, en vertu d'un accord collectif portant sur une opération de transfert d'activité, d'une option entre deux modalités de transfert, ne peuvent imputer à l'employeur la différence de traitement qui résulte de l'exercice de cette option ; que le protocole d'accord sur la modernisation de Paris diffusion presse (PDP) conclu le 2 décembre 2003 par la société NMPP avec les organisations syndicales prévoyait dans le cadre du transfert de l'activité de la société NMPP au profit de la société SPPS de différer le transfert des contrats de travail à l'issue d'une période transitoire, pendant laquelle les salariés seraient détachés au sein de la société SPPS, tout en laissant la possibilité aux salariés concernés d'opter pour leur transfert immédiat dès le 1er juillet 2004 ; que dans le prolongement de cet accord, le plan de modernisation de PDP du 8 avril 2004 élaboré dans le cadre du Livre III prévoyait que les salariés pourraient opter entre leur transfert dès le 1er juillet 2004 au sein de la société SPSS moyennant le versement d'une indemnité nette de 72 000 euros en contrepartie de leur renonciation à bénéficier de certaines garanties de transfert, et le bénéfice d'une période transitoire de détachement prenant fin au plus tard le 30 juin 2006 à l'issue de laquelle ils seraient transférés au sein de la société SPPS et bénéficieraient d'une prime différentielle à titre d'avantage acquis destinée à compenser la perte du statut NMPP, dont le montant serait évalué lors de leur transfert ; qu'en retenant que l'allocation d'une indemnité forfaitaire aux salariés optant pour un transfert immédiat les privait du bénéfice de la prime différentielle réservée aux salariés ayant opté pour le transfert différé, pour en déduire l'existence d'une différence de traitement injustifiée imputable à la société NMPP et devant être réparée, lorsque la différence de traitement trouvait sa source non pas dans l'accord collectif et le plan élaboré en concertation avec les organisations syndicales qui offraient à tous les salariés la même faculté de choix entre les deux options, mais dans l'exercice de ce choix effectué par chaque salarié, la cour d'appel a violé le principe d'égalité ;

2°/ que le principe d'égalité n'a lieu de s'appliquer qu'aux salariés placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause ; que sont dans des situations différentes les salariés dont le transfert est intervenu de manière anticipée auprès de l'entreprise d'accueil moyennant le bénéfice d'une indemnité forfaitaire globale nette en contrepartie de la soumission au statut de cette dernière, et ceux qui, détachés dans un premier temps auprès de l'entreprise d'accueil, sont demeurés salariés de l'entreprise d'origine jusqu'à leur transfert intervenu plusieurs années après; qu'il était constant en l'espèce que selon le protocole d'accord sur la modernisation PDP du 2 décembre 2003 et le plan de modernisation PDP devenu SPPS du 8 avril 2004, les salariés ayant été immédiatement transférés dès le 1er juillet 2004 au sein de la société SPPS avaient perçu en contrepartie de leur renonciation au statut NMPP le versement d'une indemnité forfaitaire nette de 72 000 euros, tandis que ceux dont le transfert avait été différé à l'issue de leur période de détachement au sein de la société SPPS au 30 juin 2006, devaient bénéficier d'une prime différentielle mensuelle qui serait calculée au moment de leur transfert destinée à compenser la perte du statut NMPP ; qu'en retenant que l'allocation d'une indemnité forfaitaire aux salariés optant pour un transfert immédiat les privait du bénéfice de la prime différentielle réservée aux salariés ayant opté pour le transfert différé, pour en déduire l'existence d'une différence de traitement injustifiée et imputable à la société NMPP devant être réparée, lorsque les salariés n'étaient pas dans une situation identique au regard de la compensation de la perte du statut NMPP, la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement par fausse application ;

3°/ que le principe d'égalité n'a lieu de s'appliquer qu'aux salariés placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause ; que sont dans des situations différentes au regard de la structure de leur rémunération, les salariés ayant fait le choix d'anticiper de deux ans leur transfert auprès de l'entreprise d'accueil moyennant le bénéfice d'une indemnité forfaitaire globale nette et la soumission au statut de cette dernière, et ceux qui, détachés dans un premier temps auprès de l'entreprise d'accueil, sont demeurés salariés de l'entreprise d'origine conservant ainsi leur structure de rémunération d'origine jusqu'à leur transfert ; qu'il était constant en l'espèce que les salariés ayant fait le choix, en contrepartie du versement d'une indemnité forfaitaire nette de 72 000 euros, d'être transférés dès le 1er juillet 2004 au sein de la société SPPS, avaient renoncé à la structure de leur rémunération NMPP, tandis que ceux dont le transfert avait été différé à l'issue de leur période de détachement au sein de la société SPPS au 30 juin 2006, qui étaient demeurés salariés de la société NMPP, l'avaient conservée ; qu'en jugeant que le fait pour l'accord du 21 avril 2006 d'exclure les salariés ayant opté pour un transfert dès le 1er juillet 2004, de la mesure conservant la structure de la rémunération NMPP aux salariés dont le transfert allait intervenir à l'issue de leur période de détachement, ne se justifiait par aucun élément objectif et pertinent qui ne pouvait résulter de la seule antériorité de leur transfert, lorsque les salariés n'étaient pas dans une situation identique au regard de la structure de leur rémunération à la date de conclusion de l'accord, la cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement par fausse application. »

Réponse de la Cour

15. La cour d'appel a retenu que le dispositif initial prévu par le protocole du 2 décembre 2003 ne créait pas, en lui même, une inégalité de traitement. Elle a, en revanche, estimé qu'il apparaissait, d'une part, que la différence de salaire entre les salariés et ceux appartenant au « groupe fermé » n'était couverte, par l'indemnité forfaitaire, que jusqu'au 5 février 2013 et, d'autre part, que l'adoption du protocole d'accord du 21 avril 2006 avait créé une différence de traitement tant à l'égard de la structure de la rémunération que des garanties statuaires accordées aux salariés ce dont elle a déduit que les salariés avaient, au moins à partir de 2006, été victimes d'une inégalité de traitement qui s'était aggravée au mois de février 2013. Il en ressort qu'elle n'a pas retenu que le versement d'une indemnité forfaitaire en lieu et place de l'indemnité différentielle prévu par le dispositif initial était constitutif d'une inégalité de traitement injustifiée. Le moyen, pris en ses deux premières branches, manque par le fait qui lui sert de base.

16. La cour d'appel a retenu que l'adoption du protocole d'accord du 21 février 2006 avait créé une différence de traitement tant au regard de la structure de la rémunération que des garanties statutaires accordées aux salariés et estimé que l'exclusion, par cet accord, des salariés ayant opté pour un transfert immédiat ne reposait sur aucune justification objective et pertinente. Le moyen, pris en sa troisième branche, qui critique uniquement les motifs se rapportant à la structure de la rémunération sans porter sur les motifs par lesquels la cour d'appel a retenu que la différence de traitement concernant les garanties statutaires à laquelle aboutissait l'accord du 21 février 2006 n'était pas justifiée, est inopérant.

17. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Presstalis aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Presstalis et la condamne à payer à MM. V..., U..., T..., R..., N... et B... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits aux pourvois par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Presstalis.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF aux arrêts attaqués d'AVOIR rejeté la fin de non-recevoir issue d'une prescription des demandes, et d'AVOIR en conséquence condamné la société Presstalis à payer aux salariés diverses sommes à titre de rappels de salaires, congés payés afférents, dommages et intérêts en réparation de leur préjudice pour inexécution de bonne foi du contrat de travail, et au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel

AUX MOTIFS QUE « En 2003, la société NMPP a créé une filiale, la société Presse Paris Services (SPPS), à laquelle a été transférée l'activité de l'établissement PDP à compter du 1er juillet 2004.
Ce transfert a fait l'objet de négociations préalables avec les organisations syndicales représentatives qui ont abouti le 2 décembre 2003 à la signature d'un protocole d'accord d'entreprise prévoyant notamment le statut du personnel de la filiale créée et, pour les ouvriers:
- le montant de la rémunération (salaire brut annuel fixé à 36.658 € pour un travail de nuit et à 31.877 € pour un travail de jour) (article 2.1) ;
- une période transitoire où les salariés «seront détachés et pourront à ce titre conserver leur statut NMPP» entre le 1er janvier 2004 et le 30 juin 2006, date à laquelle les contrats de travail seront transférés «dans le respect des dispositions légales» ;
- la précision que «les salariés pourront demander la cessation de leur détachement et anticiper leur transfert dans la nouvelle filiale au plus tard jusqu'au 31 décembre 2005» ;
- l'article 3.2.1 prévoyait qu'en complément de la rémunération définie à l'article 2.1, les ouvriers transférés bénéficieraient «d'une prime différentielle», leur garantissant un niveau de rémunération équivalent à celui du coefficient 133 du barème NMPP, ancienneté comprise à hauteur de 20%, plus la prime de fonction de commis ; cette prime serait évaluée à la date du transfert, indexée sur les augmentations générales du barème, les parties convenant que cette prime différentielle, attribuée à titre individuel en tant qu'avantage acquis fera partie intégrante du contrat de travail et en tant que telle octroyée à durée indéterminée.
Dans le plan de modernisation du 8 avril 2004 présenté aux institutions représentatives du personnel, il a été prévu une modalité particulière pour les salariés faisant le choix, moyennant le versement d'une indemnité de 72.000 € nets de CSG et de CRDS, de renoncer, dès leur transfert (mis en oeuvre le 1er juillet 2004) aux garanties suivantes :
- période de détachement,
- garanties de reclassement,
- garanties de rémunération,
- garanties du droit à réintégration (pour candidater sur un emploi au sein de la société NMPP ou bénéficier des mesures d'âge y étant mises en oeuvre),
- indemnité de filialisation de 4.000 €.
Le salarié a opté pour un transfert immédiat au 1er juillet 2004 au sein de la société Presse Paris Services et a perçu l'indemnité de 72.000 €.
Il a signé un nouveau contrat de travail avec la société PPS le 19 juillet 2014 mentionnant qu'il « a accepté ce transfert en toute connaissance de cause et en particulier, après avoir pris connaissance des dispositions du protocole d'accord et du plan de sauvegarde de l'emploi. En signant ce contrat, Monsieur A. adhère au nouveau statut individuel et collectif de la société SPPS».
A l'issue de la période transitoire, un nouveau protocole a été conclu avec les organisations syndicales concernant le transfert des salariés qui étaient restés «détachés», prévoyant notamment pour ces salariés et à l'exclusion de ceux ayant, tel l'appelant, opté pour un transfert immédiat :
- le maintien des rubriques de paie de la société NMPP,
- un maintien «d'un lien contractuel suspendu» avec la société NMPP,
- le droit à réintégration pour bénéficier des mesures d'âge prises au sein de la société NMPP,
-le droit à réintégration au cas où SPPS connaîtrait des difficultés économiques la contraignant à se restructurer ou à réduire ses effectifs »

ET AUX MOTIFS QUE « Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes
Rappelant que le conseil de prud'hommes a été saisi le 23 janvier 2014, la société Presstalis soutient que les demandes découlant du contrat de travail transféré le 1er juillet 2004 sont prescrites pour les demandes indemnitaires relatives à l'exécution du contrat de travail, depuis le 19 juin 2013, et pour les revendications salariales depuis le 1er juillet 2009.
Le salarié soutient qu'il n'a pu avoir connaissance de l'inégalité de traitement qu'à compter du jour où il a eu l'information de la différence de rémunération avec les salariés «du groupe fermé» soit au jour de son retour dans la société Presstalis le 1er janvier 2014, jour où les montants salariaux ont été portés à sa connaissance par l'accord d'entreprise Presstalis, soutenant que son consentement a été vicié par les manoeuvres de la société qui lui a fait croire que l'application des principes légaux de transfert des contrats de travail s'effectuait par la signature d'un nouveau contrat.
Les délais de prescription applicables aux demandes du salarié ont fait l'objet, depuis la date du transfert de modifications successives par l'effet des lois n° 2008-561 du 17 juin 2008 et n° 2013-504 du 14 juin 2013.
L'article L. 3245-1 du code du travail, dans ses dispositions applicables à la date de la saisine, dispose que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou lorsque le contrat est rompu, sur les sommes dues au titre des années précédant la rupture du contrat.
S'agissant des demandes indemnitaires, en vertu de l'article L. 1471-1, le délai de prescription est de deux ans pour toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat, le délai courant à compter du jour où le salarié a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
Enfin, les dispositions réduisant les délais de prescription s'appliquent à celles qui sont en cours à compter de la promulgation de la loi nouvelle sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
Il ne peut être valablement soutenu que le salarié a eu connaissance de la différence de traitement qu'il invoque en signant «en toute connaissance de cause le contrat conclu avec la SPPS».
En effet, d'une part, il ne résulte ni des termes de ce contrat, ni de ceux du protocole d'accord du 2 décembre 2003 ni du plan de modernisation présenté aux institutions représentatives du personnel en avril 2004 que l'ensemble de ces documents emportaient renonciation du salarié aux dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 du code du travail dont les parties reconnaissent qu'il était normalement applicable ; la mention dans le contrat selon laquelle celui-ci «devrait être transféré en l'état en application des dispositions légales» était en effet en parfaite contradiction avec celle portée au protocole d'accord qui mentionnait lui que les transferts avaient lieu «dans le respect des dispositions légales» (page 12 du protocole), cette contradiction étant de nature à créer une confusion sur l'étendue des droits du salarié.
D'autre part, les modalités de calcul de la «prime différentielle» qui seraient appliquées, certes précisées dans l'accord collectif et dans le plan de modernisation, ne permettaient pas au salarié de comparer utilement l'indemnité qui lui était offerte en cas d'option pour un transfert immédiat avec une prime qui serait éventuellement ultérieurement attribuée aux candidats à un transfert postérieur.
Enfin, le salarié ne pouvait évidemment pas avoir connaissance du protocole qui ne serait signé que deux ans plus tard (le 21 avril 2006) qui en réalité a amélioré le sort des salariés transférés en 2006 en leur maintenant des droits auxquels le 1er accord emportait renonciation.
Aucune pièce ne permet par ailleurs de retenir que cet accord a été porté à la connaissance du salarié.
En conséquence, la cour retiendra que le salarié n'a pu disposer des éléments de comparaison mettant en évidence la différence de traitement qu'au moment de la réintégration au sein de la société NMPP, soit en octobre 2013.
Ses demandes sont par conséquent recevables »

ALORS QU' il résulte de la combinaison des articles L 1471-1, L. 3245-1 du Code du travail et 2224 du Code civil que la prescription de l'action en paiement du salaire et de l'action en paiement de dommages et intérêts court à compter du jour où le salarié a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l'exercer ; qu'il était constant en l'espèce que les salariés défendeurs au pourvoi, transférés de la société NMPP dès le 1er juillet 2004 au sein de la société SPPS moyennant le versement d'une indemnité forfaitaire nette de 72 000 euros, fondent leurs demandes de rappels de salaires et indemnitaires sur une prétendue inégalité de traitement par rapport aux salariés de la société NMPP dont le transfert au sein de la société SPPS avait été retardé au 30 juin 2006 à l'issue d'une période transitoire, lesquels avaient perçu à compter de cette date une « prime différentielle » destinée à compenser la perte du statut NMPP, que les salariés défendeurs au pourvoi ne percevaient pas; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que selon les termes de l'accord du 2 décembre 2003, les salariés ayant opté pour un transfert retardé devaient être au plus tard transférés le 30 juin 2006 au sein de la société SPPS et percevoir à compter de cette date la « prime différentielle » si bien que les défendeurs au pourvoi avaient au moins dès cette date été en mesure de constater la différence de rémunération avec leurs collègues ; qu'en affirmant que les défendeurs au pourvoi n'avaient pu disposer des éléments de comparaison mettant en évidence la différence de traitement qu'au moment de leur réintégration au sein de la société NMPP, soit en octobre 2013, sans expliquer ce qui les avait empêché de connaitre le montant de la rémunération perçue par leurs collègues depuis que ces derniers avaient fait leur entrée au sein de la société SPPS au plus tard le 30 juin 2006 soit sept ans plus tôt, ni préciser comment la différence de traitement leur avait été révélée le 1er octobre 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1471-1, L. 3245-1 du Code du travail et 2224 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné la société Presstalis à payer aux salariés diverses sommes à titre de rappels de salaires, congés payés afférents, dommages et intérêts en réparation de leur préjudice pour inexécution de bonne foi du contrat de travail, et au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel

AUX MOTIFS QUE « En 2003, la société NMPP a créé une filiale, la société Presse Paris Services (SPPS), à laquelle a été transférée l'activité de l'établissement PDP à compter du 1er juillet 2004.
Ce transfert a fait l'objet de négociations préalables avec les organisations syndicales représentatives qui ont abouti le 2 décembre 2003 à la signature d'un protocole d'accord d'entreprise prévoyant notamment le statut du personnel de la filiale créée et, pour les ouvriers:
- le montant de la rémunération (salaire brut annuel fixé à 36.658 € pour un travail de nuit et à 31.877 € pour un travail de jour) (article 2.1) ;
- une période transitoire où les salariés «seront détachés et pourront à ce titre conserver leur statut NMPP» entre le 1er janvier 2004 et le 30 juin 2006, date à laquelle les contrats de travail seront transférés «dans le respect des dispositions légales» ;
- la précision que «les salariés pourront demander la cessation de leur détachement et anticiper leur transfert dans la nouvelle filiale au plus tard jusqu'au 31 décembre 2005» ;
- l'article 3.2.1 prévoyait qu'en complément de la rémunération définie à l'article 2.1, les ouvriers transférés bénéficieraient «d'une prime différentielle», leur garantissant un niveau de rémunération équivalent à celui du coefficient 133 du barème NMPP, ancienneté comprise à hauteur de 20%, plus la prime de fonction de commis ; cette prime serait évaluée à la date du transfert, indexée sur les augmentations générales du barème, les parties convenant que cette prime différentielle, attribuée à titre individuel en tant qu'avantage acquis fera partie intégrante du contrat de travail et en tant que telle octroyée à durée indéterminée.
Dans le plan de modernisation du 8 avril 2004 présenté aux institutions représentatives du personnel, il a été prévu une modalité particulière pour les salariés faisant le choix, moyennant le versement d'une indemnité de 72.000 € nets de CSG et de CRDS, de renoncer, dès leur transfert (mis en oeuvre le 1er juillet 2004) aux garanties suivantes :
- période de détachement,
- garanties de reclassement,
- garanties de rémunération,
- garanties du droit à réintégration (pour candidater sur un emploi au sein de la société NMPP ou bénéficier des mesures d'âge y étant mises en oeuvre),
- indemnité de filialisation de 4.000 €.
Le salarié a opté pour un transfert immédiat au 1er juillet 2004 au sein de la société Presse Paris Services et a perçu l'indemnité de 72.000 €.
Il a signé un nouveau contrat de travail avec la société PPS le 19 juillet 2014 mentionnant qu'il « a accepté ce transfert en toute connaissance de cause et en particulier, après avoir pris connaissance des dispositions du protocole d'accord et du plan de sauvegarde de l'emploi. En signant ce contrat, Monsieur A. adhère au nouveau statut individuel et collectif de la société SPPS».
A l'issue de la période transitoire, un nouveau protocole a été conclu avec les organisations syndicales concernant le transfert des salariés qui étaient restés «détachés», prévoyant notamment pour ces salariés et à l'exclusion de ceux ayant, tel l'appelant, opté pour un transfert immédiat :
- le maintien des rubriques de paie de la société NMPP,
- un maintien «d'un lien contractuel suspendu» avec la société NMPP,
- le droit à réintégration pour bénéficier des mesures d'âge prises au sein de la société NMPP,
-le droit à réintégration au cas où SPPS connaîtrait des difficultés économiques la contraignant à se restructurer ou à réduire ses effectifs »

ET AUX MOTIFS QUE « Sur les demandes au fond
Le salarié soutient que la société Presstalis a délibérément éludé l'application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail sur le transfert des contrats de travail :
- l'ensemble des activités de la branche PDP a en effet été transféré dans la nouvelle filiale créée, la Société Presse Paris Service, au terme d'un protocole d'accord du 26 novembre 2003 (pièce n°PC2) qui prévoit le transfert des salariés entre le 1er janvier 2004 et le 1er juillet 2006 (pièces n° PC 2 à PC4)';
- le transfert des contrats de travail était une obligation légale dont la société Presstalis s'est, par des manoeuvres frauduleuses, soustraite en créant deux modalités de rémunération, la première par une prime différentielle évaluée à la date du transfert, la seconde par une indemnité nette de 72.000 € ;
- or, la perception de la prime de 72.000 € entraînait renonciation aux garanties d'un reclassement interne, à la rémunération, à la réintégration dans la société «mère», à l'indemnité de filialisation ;
- la société Presstalis a réitéré ses manoeuvres frauduleuses en établissant un nouveau contrat de travail mentionnant «En application des dispositions légales, son contrat de travail devrait donc être transféré au sein de SPPS»';
- le véritable motif du refus d'un statut collectif pour tous les salariés était une fraude aux organismes sociaux, la prime de 72.000 € n'étant pas soumise à cotisations alors que les avantages substantiels contenus dans le statut collectif sont des salaires et éléments de salaires. Le salarié ajoute qu'au regard d'une jurisprudence constante, un accord d'entreprise ne peut déroger au principe «à travail égal, salaire égal» alors que la société Presstalis a instauré une différence illicite d'une part de rémunération entre le «groupe fermé» bénéficiant du maintien de la structure de sa rémunération par une prime différentielle, d'autre part, de garanties statutaires pour les salariés transférés en 2006 et ceux transférés en 2004.
Par ailleurs, la différence de rémunération a été réitérée lors du transfert, en 2013 des salariés de la SPPS chez Presstalis.
La société Presstalis conclut au rejet des prétentions du salarié aux motifs suivants :
- les conditions de transfert du contrat ont fait l'objet de négociations collectives et ont mené à la conclusion du protocole d'accord d'entreprise sur la modernisation de PDP ;
- le salarié a expressément choisi l'indemnité de 72.000 € et ne peut arguer d'une modification unilatérale de sa rémunération ;
- la société n'a fait l'objet d'aucun redressement relatif au versement des indemnités aux salariés transférés ;
- le transfert du contrat s'est effectué dans le strict cadre des demandes formulées par les partenaires sociaux, dans le respect des accords collectifs d'entreprise conclus à cet effet, avec l'accord des salariés qui ont sollicité leur transfert effectif et le bénéfice de l'indemnité spécifique et au travers d'une procédure d'information collective (comité central d'entreprise et comité d'établissement) et individuelle exhaustive (signature de l'avenant au contrat et explications explicites sur le principe et le montant de la prime différentielle ou l'indemnité forfaitaire).
Par ailleurs, la société Presstalis soutient qu'il n'existe aucune inégalité de traitement entre les deux groupes de salariés, la différence reposant sur des motifs objectifs, pertinents et matériellement vérifiables ou violation du principe d'égalité de traitement, les deux groupes de salariés se trouvant dans des conditions différentes de rémunération, soit la prime forfaitaire de 72.000 €, soit la prime différentielle.
Il résulte du principe «à travail égal, salaire égal», dont s'inspirent les articles L.1242-14, L.1242-15, L. 2261-22.9°, L.2271-1.8° et L.3221-2 du code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale.
En application de l'article 1315 du code civil devenu l'article 1353, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe «à travail égal, salaire égal» de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.
Il ressort des pièces et explications produites que si le dispositif initial prévu par le protocole du 2 décembre 2003 ne créait pas en lui-même une inégalité de traitement, d'une part, l'allocation d'une indemnité forfaitaire aux salariés optant pour un transfert immédiat, les privait du bénéfice de l'article 3.2.1 de l'accord qui prévoyait «que la prime différentielle, attribuée à titre individuel en avantage acquis, fera partie intégrante du contrat et en tant que telle sera octroyée à durée indéterminée».
Les parties conviennent en effet que l'indemnité forfaitaire de 72.000 € couvrait la différence de salaire entre le groupe fermé et le salarié pendant 8,6 années représentant huit ans, sept mois et cinq jours soit jusqu'au 5 février 2013.
D'autre part, à la suite de l'adoption du protocole d'accord du 21 avril 2006, a été créée une différence de traitement tant à l'égard de la structure de la rémunération que des garanties statutaires accordées aux salariés.
Or, l'exclusion par cet accord des salariés ayant opté pour un transfert immédiat ne se justifie par aucun élément objectif et pertinent qui ne peut résulter de la seule antériorité de leur transfert.
Il sera donc considéré que le salarié a, au moins à partir de 2006, été victime d'une inégalité de traitement, qui s'est aggravée à partir de février 2013 et qui a perduré, lors de sa réintégration au sein de la société Presstalis et jusqu'à la rupture du contrat.
La décision déférée sera en conséquence infirmée.
Sur les demandes financières
Sur les demandes liées au transfert de son contrat de travail
Le salarié soutient que le transfert de son contrat de travail le conduit à solliciter un rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté (20%), de la prime de fonction, d'un complément semestriel été, d'un complément semestriel hiver et d'un 14ème mois.
Il chiffre ses moyennes de salaires sans et avec primes dues pour des périodes d'un an de juillet 2012 à juin 2013 et d'octobre 2012 à septembre 2013 et forme les demandes suivantes (
) :
La société Presstalis soutient que les demandes du salarié sont exorbitantes, injustifiées et demandées pour une période de dix ans alors que le salarié reconnaît, lui-même, que l'indemnité forfaitaire correspond à 8,6 années de ses demandes salariales. La société Presstalis conclut à titre subsidiaire que les demandes indemnitaires devront être calculées, déduction faite des 72.000 € de l'indemnité forfaitaire.
En l'espèce, comme il l'a déjà été indiqué, les parties conviennent que l'indemnité de 72.000 € couvre la différence de salaire entre le «groupe fermé» et le salarié pendant 8,6 années représentant huit ans et sept mois et cinq jours soit jusqu'au 5 février 2013.
La différence de rémunération alléguée n'est donc établie qu'à partir de cette date.
Par ailleurs, le salarié a perçu à nouveau la prime d'ancienneté à compter du 1er décembre 2013.
La société Presstalis ne critiquant pas le détail des sommes dues mais seulement le quantum final, la cour fixe les sommes au titre des salaires dus au salarié pour la période du 5 février 2013 au 30 novembre 2013 pour la prime d'ancienneté et jusqu'au départ du salarié le 30 mars 2016 pour les autres demandes, aux sommes de (
)
La cour infirme en conséquence le jugement déféré en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes au titre de rappel de salaires.
Sur les demandes de dommages et intérêts
Le salarié soutient que la société Presstalis n'a pas exécuté de bonne foi son contrat de travail.
La société Presstalis conclut à titre subsidiaire à l'absence de démonstration du préjudice allégué et donc au rejet de cette demande.
Il résulte des éléments retenus précédemment qu'au moins à partir de 2006, la société ne pouvait ignorer qu'il existait une différence de traitement non justifiée entre les salariés.
Par ailleurs, si les conséquences sur la rémunération sont réparées par la présente décision depuis le 5 février 2013, le salarié a subi néanmoins un préjudice financier reposant sur l'impossibilité de profiter immédiatement d'une partie de la rémunération due et il lui sera alloué en réparation de l'inexécution de bonne foi du contrat de travail, la somme de 2.000 €.
Sur les autres demandes
Il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1153 et 1153-1 du code civil, recodifiés sous les articles 1231-6 et 1231-7 du même code par l'ordonnance° 2016-131 du 10 février 2016, en application desquelles les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, la capitalisation des intérêts étant ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, devenu l'article 1343-2.
La société Presstalis devra délivrer au salarié un bulletin de paie récapitulatif des sommes allouées à titre de salaires, dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente, sans que la mesure d'astreinte sollicitée soit en l'état justifiée.
La société Presstalis, qui succombe à l'instance, sera condamnée aux dépens ainsi qu'à payer au salarié la somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel »

1/ ALORS QUE les salariés qui bénéficient tous, en vertu d'un accord collectif portant sur une opération de transfert d'activité, d'une option entre deux modalités de transfert, ne peuvent imputer à l'employeur la différence de traitement qui résulte de l'exercice de cette option ; que le protocole d'accord sur la modernisation de Paris Diffusion Presse (PDP) conclu le 2 décembre 2003 par la société NMPP avec les organisations syndicales prévoyait dans le cadre du transfert de l'activité de la société NMPP au profit de la société SPPS de différer le transfert des contrats de travail à l'issue d'une période transitoire, pendant laquelle les salariés seraient détachés au sein de la société SPPS, tout en laissant la possibilité aux salariés concernés d'opter pour leur transfert immédiat dès le 1er juillet 2004 ; que dans le prolongement de cet accord, le plan de modernisation de PDP du 8 avril 2004 élaboré dans le cadre du Livre III prévoyait que les salariés pourraient opter entre leur transfert dès le 1er juillet 2004 au sein de la société SPSS moyennant le versement d'une indemnité nette de 72 000 euros en contrepartie de leur renonciation à bénéficier de certaines garanties de transfert, et le bénéfice d'une période transitoire de détachement prenant fin au plus tard le 30 juin 2006 à l'issue de laquelle ils seraient transférés au sein de la société SPPS et bénéficieraient d'une prime différentielle à titre d'avantage acquis destinée à compenser la perte du statut NMPP, dont le montant serait évalué lors de leur transfert; qu'en retenant que l'allocation d'une indemnité forfaitaire aux salariés optant pour un transfert immédiat les privait du bénéfice de la prime différentielle réservée aux salariés ayant opté pour le transfert différé, pour en déduire l'existence d'une différence de traitement injustifiée imputable à la société NMPP et devant être réparée, lorsque la différence de traitement trouvait sa source non pas dans l'accord collectif et le plan élaboré en concertation avec les organisations syndicales qui offraient à tous les salariés la même faculté de choix entre les deux options, mais dans l'exercice de ce choix effectué par chaque salarié, la cour d'appel a violé le principe d'égalité ;

2/ ALORS QUE le principe d'égalité n'a lieu de s'appliquer qu'aux salariés placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause ; que sont dans des situations différentes les salariés dont le transfert est intervenu de manière anticipée auprès de l'entreprise d'accueil moyennant le bénéfice d'une indemnité forfaitaire globale nette en contrepartie de la soumission au statut de cette dernière, et ceux qui, détachés dans un premier temps auprès de l'entreprise d'accueil, sont demeurés salariés de l'entreprise d'origine jusqu'à leur transfert intervenu plusieurs années après; qu'il était constant en l'espèce que selon le protocole d'accord sur la modernisation PDP du 2 décembre 2003 et le plan de modernisation PDP devenu SPPS du 8 avril 2004, les salariés ayant été immédiatement transférés dès le 1er juillet 2004 au sein de la société SPPS avaient perçu en contrepartie de leur renonciation au statut NMPP le versement d'une indemnité forfaitaire nette de 72 000 euros, tandis que ceux dont le transfert avait été différé à l'issue de leur période de détachement au sein de la société SPPS au 30 juin 2006, devaient bénéficier d'une prime différentielle mensuelle qui serait calculée au moment de leur transfert destinée à compenser la perte du statut NMPP ; qu'en retenant que l'allocation d'une indemnité forfaitaire aux salariés optant pour un transfert immédiat les privait du bénéfice de la prime différentielle réservée aux salariés ayant opté pour le transfert différé, pour en déduire l'existence d'une différence de traitement injustifiée et imputable à la société NMPP devant être réparée, lorsque les salariés n'étaient pas dans une situation identique au regard de la compensation de la perte du statut NMPP, la Cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement par fausse application ;

3/ ALORS QUE le principe d'égalité n'a lieu de s'appliquer qu'aux salariés placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause ; que sont dans des situations différentes au regard de la structure de leur rémunération, les salariés ayant fait le choix d'anticiper de deux ans leur transfert auprès de l'entreprise d'accueil moyennant le bénéfice d'une indemnité forfaitaire globale nette et la soumission au statut de cette dernière, et ceux qui, détachés dans un premier temps auprès de l'entreprise d'accueil, sont demeurés salariés de l'entreprise d'origine conservant ainsi leur structure de rémunération d'origine jusqu'à leur transfert; qu'il était constant en l'espèce que les salariés ayant fait le choix, en contrepartie du versement d'une indemnité forfaitaire nette de 72 000 euros, d'être transférés dès le 1er juillet 2004 au sein de la société SPPS, avaient renoncé à la structure de leur rémunération NMPP, tandis que ceux dont le transfert avait été différé à l'issue de leur période de détachement au sein de la société SPPS au 30 juin 2006, qui étaient demeurés salariés de la société NMPP, l'avaient conservée; qu'en jugeant que le fait pour l'accord du 21 avril 2006 d'exclure les salariés ayant opté pour un transfert dès le 1er juillet 2004, de la mesure conservant la structure de la rémunération NMPP aux salariés dont le transfert allait intervenir à l'issue de leur période de détachement, ne se justifiait par aucun élément objectif et pertinent qui ne pouvait résulter de la seule antériorité de leur transfert, lorsque les salariés n'étaient pas dans une situation identique au regard de la structure de leur rémunération à la date de conclusion de l'accord, la Cour d'appel a violé le principe d'égalité de traitement par fausse application.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné la société Presstalis à payer aux salariés des dommages et intérêts en réparation de leur préjudice pour inexécution de bonne foi du contrat de travail, et au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel

AUX MOTIFS QUE « Il sera donc considéré que le salarié a, au moins à partir de 2006, été victime d'une inégalité de traitement, qui s'est aggravée à partir de février 2013 et qui a perduré, lors de sa réintégration au sein de la société Presstalis et jusqu'à la rupture du contrat.
La décision déférée sera en conséquence infirmée.
Sur les demandes financières
Sur les demandes liées au transfert de son contrat de travail
Le salarié soutient que le transfert de son contrat de travail le conduit à solliciter un rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté (20%), de la prime de fonction, d'un complément semestriel été, d'un complément semestriel hiver et d'un 14ème mois.
Il chiffre ses moyennes de salaires sans et avec primes dues pour des périodes d'un an de juillet 2012 à juin 2013 et d'octobre 2012 à septembre 2013 et forme les demandes suivantes (
) :
La société Presstalis soutient que les demandes du salarié sont exorbitantes, injustifiées et demandées pour une période de dix ans alors que le salarié reconnaît, lui-même, que l'indemnité forfaitaire correspond à 8,6 années de ses demandes salariales. La société Presstalis conclut à titre subsidiaire que les demandes indemnitaires devront être calculées, déduction faite des 72.000 € de l'indemnité forfaitaire.
En l'espèce, comme il l'a déjà été indiqué, les parties conviennent que l'indemnité de 72.000 € couvre la différence de salaire entre le «groupe fermé» et le salarié pendant 8,6 années représentant huit ans et sept mois et cinq jours soit jusqu'au 5 février 2013.
La différence de rémunération alléguée n'est donc établie qu'à partir de cette date.
Par ailleurs, le salarié a perçu à nouveau la prime d'ancienneté à compter du 1er décembre 2013.
La société Presstalis ne critiquant pas le détail des sommes dues mais seulement le quantum final, la cour fixe les sommes au titre des salaires dus au salarié pour la période du 5 février 2013 au 30 novembre 2013 pour la prime d'ancienneté et jusqu'au départ du salarié pour les autres demandes, aux sommes de (
)
La cour infirme en conséquence le jugement déféré en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes au titre de rappel de salaires.
Sur les demandes de dommages et intérêts
Le salarié soutient que la société Presstalis n'a pas exécuté de bonne foi son contrat de travail.
La société Presstalis conclut à titre subsidiaire à l'absence de démonstration du préjudice allégué et donc au rejet de cette demande.
Il résulte des éléments retenus précédemment qu'au moins à partir de 2006, la société ne pouvait ignorer qu'il existait une différence de traitement non justifiée entre les salariés.
Par ailleurs, si les conséquences sur la rémunération sont réparées par la présente décision depuis le 5 février 2013, le salarié a subi néanmoins un préjudice financier reposant sur l'impossibilité de profiter immédiatement d'une partie de la rémunération due et il lui sera alloué en réparation de l'inexécution de bonne foi du contrat de travail, la somme de 2.000 €. »

ALORS QUE les dommages et intérêts résultant du retard dans l'exécution d'une obligation au paiement d'une somme d'argent ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, lesquels ne courent que du jour de la sommation de payer ; que le juge ne peut allouer au créancier des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires qu'à la condition de caractériser un préjudice indépendant du retard de paiement, dû à la mauvaise foi de l'employeur ; qu'en retenant, pour allouer aux salariés des dommages et intérêts pour inexécution de bonne foi du contrat de travail, que le non-versement par l'employeur des rappels de salaires alloués par la cour d'appel avait empêché les salariés de profiter immédiatement d'une partie de la rémunération due, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé l'existence d'un préjudice distinct de celui résultant du retard de paiement dû à la mauvaise foi de l'employeur, a violé l'article 1153 devenu 1231-6 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-12493;19-12494;19-12495;19-12496;19-12497;19-12498
Date de la décision : 18/03/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mar. 2020, pourvoi n°19-12493;19-12494;19-12495;19-12496;19-12497;19-12498


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12493
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