LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 12 mars 2020
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 196 F-D
Pourvoi n° E 19-11.649
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 MARS 2020
1°/ M. R... Q...,
2°/ Mme J... K..., épouse Q...,
tous deux domiciliés [...] ,
ont formé le pourvoi n° E 19-11.649 contre l'arrêt rendu le 21 novembre 2018 par la cour d'appel de Reims (Chambre sociale), dans le litige les opposant à M. H... U..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dagneaux, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. et Mme Q..., de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. U..., après débats en l'audience publique du 4 février 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dagneaux, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 21 novembre 2018), que M. et Mme Q..., propriétaires de parcelles de terre données à bail à long terme à M. U..., lui ont délivré congé pour reprise au profit de leurs fils ; que M. U... a sollicité l'annulation de ce congé ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que M. et Mme Q... font grief à l'arrêt d'accueillir la demande ;
Mais attendu qu'ayant relevé que M. et Mme Q... avaient été convoqués en vue d'une tentative de conciliation, qu'ils avaient écrit au tribunal pour dire qu'ils ne se rendraient pas à l'audience, que le procès-verbal signé par le président du tribunal, le greffier et M. U... démontrait que la tentative de conciliation avait eu lieu le 30 septembre 2016 et retenu que l'absence de M. et Mme Q... n'ôtait rien à la réalité de la tentative de conciliation, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ou que ses constatations rendaient inopérante, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que M. et Mme Q... font le même grief à l'arrêt ;
Mais attendu qu'ayant retenu exactement que les conditions de la reprise s'appréciaient à la date d'effet du congé, relevé qu'à cette date M. U... exploitait plus de cent trente-neuf hectares, correspondant à la surface cultivée par l'exploitation agricole à responsabilité limitée [...], dont M. U... était le gérant, et, par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, que M. U... justifiait ne plus avoir d'activité personnelle depuis 2001 et que la fraude alléguée n'était pas caractérisée, la cour d'appel a pu en déduire que, la reprise de plus de quarante-trois hectares ramenant la superficie de l'exploitation de M. U... en dessous du seuil prévu à l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime, M. et Mme Q... devaient justifier que les bénéficiaires de la reprise avaient obtenu l'autorisation d'exploiter ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Q... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme Q... et les condamne à payer à M. U... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Q....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme J... K... et M. R... Q... de leur demande d‘annulation du jugement déféré et de forclusion de la contestation du congé délivré et d'AVOIR annulé le congé délivré le 5 février 2016 à M. H... U... par les époux R... Q... et J... K... pour défaut d'autorisation d'exploiter ;
AUX MOTIFS QUE 1- l'annulation du jugement ; (
) que les époux Q... soutiennent que le jugement serait nul car il n'aurait pas été procédé à la tentative de conciliation prévue à l'article 887 du code de procédure civile dans la mesure où : - ils n'étaient pas comparants, - ils n'avaient pas mandaté l'avocat qui y était présent pour la défense de leurs intérêts, - qu'une autre tentative de conciliation a eu lieu le 27 janvier 2017, preuve que celle du 30 septembre 2017 était inefficace ; qu'or, outre le fait que cette formalité n'est pas exigée par la loi à peine de nullité du jugement, la tentative de conciliation a bien eu lieu le 30 septembre 2016 comme en témoigne le procès-verbal signé du président du tribunal, du greffier, de M. U..., ainsi que de l'avocat représentant les époux Q... K..., non comparants ; que le fait que les époux Q... K... n'étaient pas comparants n'ôte rien à la réalité de la tentative de conciliation. Le dossier du tribunal met en lumière que les époux Q... K... avaient été convoqués, qu'ils ont écrit au tribunal le 26 juillet 2016 pour dire qu'ils ne se rendraient pas à l'audience prévue pour la conciliation, qu'un avocat s'est présenté pour la défense de leurs intérêts sans que le tribunal n'ait à vérifier la réalité de son mandat de sorte que les époux Q... K... ne peuvent soutenir que leur absence fait obstacle à l'existence d'une tentative de conciliation ; que par ailleurs, le fait qu'ultérieurement, lors d'une audience de jugement, une autre tentative de conciliation ait été tentée ne contredit pas le procès-verbal de non-conciliation pris à l'audience de conciliation, dès lors qu'en toute étape de la procédure, le juge peut tenter de concilier les parties ; que le moyen ne peut donc aboutir et sera rejeté ; 2 - forclusion de la contestation du congé ; qu'en conséquence du rejet du moyen sur l'annulation du jugement, le moyen de forclusion développé par les appelants dans le corps de leurs écritures, et qui en découle, ne peut être admis ;
1) ALORS QUE l'absence de tentative de conciliation devant le tribunal paritaire des baux ruraux est sanctionnée par la nullité du jugement ; qu'en affirmant, pour débouter M. et Mme Q... de leur demande d'annulation du jugement entrepris, que la tentative de conciliation n'est pas exigée par la loi à peine de nullité du jugement, la cour d'appel a violé l'article 887 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE la non-comparution personnelle de l'une des parties à l'audience de tentative de conciliation du tribunal paritaire des baux ruraux, empêche toute conciliation, sauf motif légitime de se faire représenter ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les époux Q..., convoqués devant le tribunal paritaire des baux ruraux, avaient écrit le 26 juillet 2016 pour dire qu'ils ne se rendraient pas à l'audience prévue pour la conciliation ; qu'en affirmant, pour débouter M. et Mme Q... de leur demande en annulation du jugement entrepris pour absence de tentative préalable de conciliation, que le fait qu'ils n'étaient pas comparants n'ôtait rien à la réalité de la tentative de conciliation, un avocat s'étant présenté pour la défense de leurs intérêts, sans vérifier s'il existait un motif légitime pour les époux Q... de se faire représenter, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 883, 887 et 888 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE la non-comparution personnelle de l'une des parties à l'audience de tentative de conciliation du tribunal paritaire des baux ruraux empêche toute conciliation, sauf motif légitime de se faire représenter ; qu'en l'espèce, M. et Mme Q... faisaient valoir que la mention au procès-verbal « Me Devarenne pr les défendeurs » était inopérante puisqu'ils n'avaient jamais mandaté Me Devarenne pour les représenter à l'audience de conciliation et que ce dernier n'avait d'ailleurs pas signé le procès-verbal de non-conciliation ; qu'en se bornant à relever, pour débouter M. et Mme Q... de leur demande en annulation du jugement pour absence de tentative préalable de conciliation, qu'un avocat s'était présenté pour la défense de leurs intérêts, sans vérifier la réalité du mandat de celui-ci, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 117, 883, 887 et 888 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé le congé délivré le 5 février 2016 à M. H... U... par les époux R... Q... et J... K... pour défaut d'autorisation d'exploiter ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE 3 - la validité du congé ; que les époux Q... K... soutiennent l'infirmation du jugement au fond en arguant de ce que - les repreneurs du bail n'ont pas besoin de justifier d'une autorisation d'exploiter dans la mesure où : il faut apprécier le seuil d'agrandissement à la date du congé, - il faut apprécier le seuil d'agrandissement en la personne de Monsieur U... et non de l'Earl [...] dont il est le gérant, - qu'à la date du congé, le preneur exploitait déjà une superficie en dessous du seuil d'agrandissement, - que la reprise ne fait donc pas passer l'exploitation du preneur en dessous du seuil d'agrandissement prévu par la loi, - qu'il faut tenir compte de la fraude du preneur qui a agrandi fictivement et malicieusement son exploitation entre le congé et la prise d'effet du congé ; que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal paritaire des baux ruraux, faisant une exacte application des dispositions des articles L. 411-59, L. 331-2, L. 331-1-1 du code rural et de la pêche maritime a pu décider que les repreneurs étaient tenus à autorisation dès lors que, à la date d'effet du congé, la reprise faisait passer la superficie de l'exploitation du preneur sortant en dessous du seuil de l'article L. 331-2 du Code rural et de la pêche maritime ; qu'en effet, les conditions de la reprise, sauf contrôle a posteriori, s'apprécie à la date d'effet du congé ; qu'à cette date, le preneur exploitait une superficie de plus de 139hectares soit, selon l'attestation de la MSA 139 ha 4 a 94 ca au 1er janvier 2017. La reprise de plus de 43 hectares fait passer l'exploitation sous le seuil des 138 hectares requis par la loi et fixé par arrêté préfectoral du 22 décembre 2015 portant schéma directeur. Le seuil de 138 hectares n'est en tout état de cause pas contesté ; que c'est à tort que les époux Q... K... viennent soutenir que les surfaces exploitées par l'Earl [...], dont la gérance est assurée par Monsieur U..., ne doivent pas être prises en considération au motif que les parcelles sont louées à Monsieur U... en personne qui développe une activité parallèle en son nom personnel. En effet, Monsieur U... justifie, par la production de l'extrait du répertoire Sirene et par un courrier de son agent comptable, qu'il n'a plus d'activités personnelles depuis sa radiation en 2001, le motif étant la mise en société de l'exploitation individuelle. Ainsi, la déclaration de superficie à la Msa concerne bien l'Earl [...]. Elle porte en mars 2017 sur 139 ha 4 a 94 ca y compris les terres louées aux époux Q... K... ; que de même, la fraude alléguée par les bailleurs ne peut être retenue dans la mesure où la fraude ne se présume pas et doit être prouvée. Or, le fait que Monsieur U... ait eu l'opportunité de prendre à bail verbal avec sa belle-mère qui en atteste, des parcelles après la délivrance du congé ne suffit pas à caractériser la fraude dans la mesure où la belle-mère de Monsieur U... louait déjà des terres avant la délivrance du congé, qu'elle affirme dans une attestation non combattue efficacement que les dernières locations ont suivi le départ en retraite de son fermier, et que Monsieur U... est le seul exploitant agricole de sa famille ; qu'il en ressort donc que la réduction de l'exploitation de Monsieur U... en dessous du seuil des 138 hectares par l'effet de la reprise, entraîne la soumission de la reprise à autorisation d'exploiter des repreneurs, d'autant que les bailleurs ont été informés dès le 16 mars 2017 de la situation du preneur sortant par la communication du relevé d'exploitation de Monsieur U... accompagné de l'étude prévisionnelle concluant que la reprise va mettre en difficulté l'exploitation de Monsieur U.... Or, les bailleurs, sur qui reposent la charge de la preuve de l'autorisation d'exploiter accordée aux repreneurs au plus tard le 30 septembre 2017, ne le justifient pas. D'ailleurs leur moyen tend à faire reconnaître que cette autorisation n'était pas exigée ; que c'est donc par une exacte application du droit et une juste analyse des éléments de la cause que le tribunal paritaire des baux ruraux a annulé le congé et rejeté la demande d'expulsion ; que le jugement sera confirmé sur ces points ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE 1- Sur la contestation du congé ; - Sur la recevabilité de la contestation ; qu'en vertu de l'article L. 411-54 du code rural, le congé peut être déféré au tribunal par le preneur dans un délai fixé par décret, à dater de sa réception, sous peine de forclusion et la forclusion ne sera pas encourue si le congé est donné hors délai ou s'il ne comporte pas les mentions exigées à peine de nullité par l'article L. 411-47 du code rural ; qu'en l'espèce, le congé a été signifié le 5 février 2016 à Monsieur H... U... de sorte que sa contestation devant le tribunal paritaire des baux ruraux reçue le 27 mai 2016 apparaît recevable comme ayant été formée dans le délai de quatre mois prévu à l'article R. 411-11 du code rural. ; que sur la contestation relative au défaut de communication de pièces ; selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ; que si le défaut de communication de pièces pourra., au fur et mesure de la motivation du présent jugement, amener le tribunal à tirer toutes conséquences en termes de preuve, il n'en demeure pas moins que le défaut de réponse à une demande de communication ne suffit pas à elle seule à justifier d'annuler le congé ; qu'il convient de rejeter la contestation de ce chef. - Sur les contestations relatives au contrôle des structures ; que l'article L. 411-59 du code rural stipule que le bénéficiaire de la reprise doit, à partir de celle-ci : - se consacrer à l'exploitation du bien repris pendant au moins neuf ans soit à titre individuel, soit au sein d'une société dotée de la personnalité morale, soit au sein d'une société en participation dont les statuts sont établis par un écrit ayant acquis date certaine, -ne pas se limiter à la direction et à la surveillance de l'exploitation et doit participer sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de l'exploitation, -posséder le cheptel et le matériel nécessaires ou, à défaut, les moyens de les acquérir ; qu'il doit occuper lui-même les bâtiments d'habitation du bien repris ou une habitation située à proximité du fonds et en permettant l'exploitation directe, - justifier par tous moyens qu'il satisfait aux obligations qui lui incombent en application des deux alinéas précédents et qu'il répond aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnées aux articles L. 331-2 à L. 331-5 ou qu'il a bénéficié d'une autorisation d'exploiter en application de ces dispositions ; que l'article L. 331-2 du même code prévoit sont soumises à autorisation préalable les opérations suivantes 1° Les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole mise en valeur par une ou plusieurs personnes physiques ou morales, lorsque la surface totale qu'il est envisagé de mettre en valeur excède le seuil fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles ; 2° Quelle que soit la superficie en cause, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles ayant pour conséquence : a) De supprimer une exploitation agricole dont la superficie excède le seuil mentionné au 10 ou de ramener la superficie d'une exploitation en deçà de ce seuil ; qu'au sens de l'article L. 331-1-1 du même code : 1° Est qualifié d'exploitation agricole l'ensemble des unités de production mises en valeur, directement ou indirectement, par la même personne, quels qu'en soient le statut, la forme ou le mode d'organisation juridique, dont les activités sont mentionnées à l'article L. 311-1; 2° Est qualifié d'agrandissement d'exploitation ou de réunion d'exploitations au bénéfice d'une personne le fait, pour celle-ci, mettant en valeur une exploitation agricole à titre individuel ou dans le cadre d'une personne morale, d'accroître la superficie de cette exploitation ; la mise à disposition de biens d'un associé exploitant lors de son entrée dans une personne morale est également considérée comme un agrandissement ou une réunion d'exploitations au bénéfice de cette personne morale ; 3° Pour déterminer la superficie totale mise en valeur, il est tenu compte de l'ensemble des superficies exploitées par le demandeur, sous quelque forme que ce soit et toutes productions confondues, en appliquant les équivalences fixées par le schéma directeur régional des exploitations agricoles pour les différents types de production. En sont exclus les bois, taillis et friches, à l'exception des terres situées en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion et mentionnées à l'article L. 181-4 ainsi que de celles situées à Mayotte et mentionnées à l'article L. 182-12. En sont également exclus les étangs autres que ceux servant à l'élevage piscicole ; que selon l'article L. 411-58 alinéa 7 du même code, lorsque les terres sont destinées à être exploitées dès leur reprise dans le cadre d'une société et si l'opération est soumise à autorisation, celle-ci doit être obtenue par la société ; qu'en l'espèce il convient déjà de déterminer la superficie exploitée par le preneur en place afin d'apprécier si, au visa de l'article L. 331-2 I 2° a) du code rural la reprise a pour effet de ramener la surface en dessous du seuil fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricole ; que l'arrêté préfectoral portant schéma directeur régional des exploitations agricoles de Champagne-Ardenne du 22 décembre 2015 fixe à 138 hectares le seuil de surface en Champagne Crayeuse, région agricole dont fait partie la commune de Moussey ; qu'il résulte du relevé d'exploitation MSA de l'Earl [...] au 1er janvier 2017, dont Monsieur H... U... est l'unique associé exploitant, comme l'indique la décision préfectorale n° 10 17 0055, que le preneur actuel exploite 139 hectares 4 ares 94 centiares, c'est à dire une surface supérieure au seuil de 138 hectares ; que si cette Earl n'exploitait au 1er janvier 2016 que 135 hectares 80 ares 86 centiares au regard du précédent relevé MSA, il s'évince de l'arrêté préfectoral du 24 mai 2017 et de l'attestation de Madame G... A... épouse V..., belle-mère du demandeur, que la reprise des 3 hectares 24 ares 8 centiares est intervenue suite au départ à la retraite du précédent preneur, Monsieur P.... Cette reprise n'a donc pas pour seul but de faire passer la surface exploitée par Monsieur H... U... au-dessus du seuil et ne constitue pas une fraude ; qu'or de droit constant, les conditions de fond de validité d'un congé doivent s'apprécier seulement à la date où il produit effet (en ce sens notamment et récemment CA Rennes Chambre des baux ruraux 5 janvier 20017 n°16/00677, CA Reims 27 septembre 2017 n°16/02564) ; que c'est par une appréciation erronée que les défendeurs soutiennent qu'il faut se placer au jour de la délivrance du congé pour apprécier la superficie de l'exploitation du preneur en place dans le cadre de l'article L. 331-2 I 2° a) du code rural, alors que la jurisprudence récente se place à la date d'effet du congé pour déterminer la superficie de l'exploitation du preneur en place (en ce sens notamment CA Bourges 29 janvier 2008 n°08/01632 ou CA de Riom le chambre civile du 14 avril 2011 n°10/01852) et la décision de justice ancienne visée ne s'est pas véritablement prononcée sur la question puisqu'elle a cassé l'arrêt de cour d'appel qui s'est placé à la date de délivrance du congé pour apprécier la superficie (civ 3° 23 mars 1988, n°87-10572) ; qu'il y a donc lieu de prendre en compte la surface exploitée par Monsieur H... U... au jour d'effet du congé le 30 septembre 2017 et non au jour de délivrance du congé ; qu'à cette date, le demandeur exploitant réellement 139 hectares 4 ares 94 centiares, ainsi qu'il ressort de son relevé MSA, la reprise de 45 hectares 21 ares 96 centiares aura pour effet de ramener la superficie qu'il exploite en dessous du seuil départemental de 138 hectares ; que la reprise est alors soumise à autorisation préalable ; que cette seule situation nécessitant une autorisation préalable d'exploiter, il n'y a pas lieu d'apprécier si les conditions de l'article L. 331-2 I- 1° sont réunies ; que les consorts Q... n'ayant pas obtenu une autorisation préalable d'exploiter à la date d'effet du congé le 30 septembre 2017, il convient d'annuler le congé pour défaut d'une condition prévue par l'article L. 411-59 du code rural ;
1) ALORS QUE seuls sont soumis à autorisation d'exploiter les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles ayant pour conséquence de ramener la superficie d'une exploitation en deçà du seuil de contrôle des structures ; que la superficie de l'exploitation du preneur devant être prise en considération est celle existant à la date de délivrance du congé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a observé qu'à la date de délivrance du congé, soit le 5 février 2016, M. U..., preneur, exploitait 135 ha 80 a 86, soit une superficie inférieure au seuil de contrôle des structures de 138 ha fixé par le schéma directeur applicable ; qu'en décidant, pour annuler le congé pour défaut de justification d'une autorisation d'exploiter par l'Earl [...], qu'il y avait lieu de prendre en compte les parcelles acquises par M. U... postérieurement à la délivrance du congé portant la surface exploitée par le preneur à la date d'effet du congé, soit le 30 septembre 2017, à 139 ha 4 a 94 ca, la cour d'appel a violé les articles L. 331-2, L. 411-58 et L. 411-59 du code rural et de la pêche maritime ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE la fraude corrompt tout ; qu'en l'espèce, M. et Mme Q... faisaient valoir que le preneur avait commis une fraude qui consistait à avoir augmenté artificiellement la superficie des parcelles exploitées entre la date de délivrance du congé et sa date d'effet, de façon à dépasser le seuil de contrôle des structures fixé à 138 ha et pouvoir soutenir que le congé qui lui avait été délivré avait pour conséquence de ramener la superficie d'une exploitation en deçà du seuil de contrôle des structures ; qu'ils en voulaient pour preuve le fait que M. U... avait affirmé, devant le tribunal paritaire des baux ruraux, que les parcelles prises à bail postérieurement à la délivrance du congé étaient libres au moment où elles lui avaient été données à bail alors qu'elles étaient jusqu'alors exploitées dans le cadre d'une société, la Scea [...], en vertu d'un bail auquel son titulaire, M. P..., avait opportunément renoncé ; qu'en se bornant à affirmer, pour annuler le congé, que le fait que M. U... ait eu l'opportunité de prendre à bail verbal avec sa belle-mère des parcelles après la délivrance du congé, ne suffisait pas à caractériser la fraude sans s'interroger sur la déclaration mensongère de M. U... sur l'état locatif des parcelles en cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
3) ALORS QUE la fraude corrompt tout ; qu'en l'espèce, M. et Mme Q... faisaient valoir que M. U... avait commis une fraude qui consistait à avoir augmenté artificiellement la superficie des parcelles exploitées entre la date de délivrance du congé et sa date d'effet, de façon à dépasser le seuil de contrôle des structures fixé à 138 ha et pouvoir soutenir que le congé qui lui avait été délivré avait pour conséquence de ramener la superficie d'une exploitation en deçà du seuil de contrôle des structures ; qu'ils en voulaient pour preuve le fait que malgré leur demande, M. U... s'était abstenu de justifier de ce qu'il bénéficiait, pour la superficie ajoutée après la délivrance du congé, des aides PAC et que compte tenu de la mauvaise qualité de ces pâtures, il était peu probable qu'exerçant exclusivement une activité de production de céréales, il les exploite ; qu'en se bornant à affirmer, pour annuler le congé, que le fait que M. U... ait eu l'opportunité de prendre à bail verbal avec sa belle-mère des parcelles après la délivrance du congé, ne suffisait pas à caractériser la fraude sans s'interroger sur la réalité de l'exploitation des parcelles litigieuses par M. U..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
4) ALORS, en toute hypothèse, QUE la nécessité d'une autorisation administrative doit être déterminée en considération des biens ruraux exploités personnellement par le preneur ainsi que de la superficie mise en valeur par la société dont il est membre ; qu'en l'espèce, M. et Mme Q... faisaient valoir qu'en toute hypothèse, pour apprécier si la superficie de l''exploitation de M. U... était inférieure ou supérieure au seuil de contrôle des structures de 138 ha à la date d'effet du congé, il convenait d'agréger les superficies mises en valeur dans le cadre de l'Earl [...] et de son exploitation individuelle, telle que déclarée au répertoire Sirene ; qu'en se bornant à retenir que M. U... justifie, par la production de l'extrait du répertoire Sirene et par un courrier de son comptable, qu'il n'a plus d'activités personnelles depuis sa radiation en 2001, le motif étant la mise en société de l'exploitation individuelle, sans vérifier s'il ne poursuivait pas cependant une activité personnelle à titre individuel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 331-2, L. 411-58 et L. 411-59 du code rural et de la pêche maritime.