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05/03/2020 | FRANCE | N°19-10514

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 mars 2020, 19-10514


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 mars 2020

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 291 F-D

Pourvoi n° W 19-10.514

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 MARS 2020

La société Lex Contractus, société d'exercice libéral par actions si

mplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° W 19-10.514 contre l'ordonnance de taxe rendue le 27 novembre 2018 par le premier préside...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 mars 2020

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 291 F-D

Pourvoi n° W 19-10.514

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 MARS 2020

La société Lex Contractus, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° W 19-10.514 contre l'ordonnance de taxe rendue le 27 novembre 2018 par le premier président de la cour d'appel de Bordeaux, dans le litige l'opposant à M. R... A..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Lex Contractus, de la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat de M. A..., après débats en l'audience publique du 29 janvier 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et Mme Cos, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Bordeaux, 27 novembre 2018), M. A... a chargé la société Lex Contractus (l'avocat) de contester le taux d'intérêt appliqué à un prêt par sa banque. Deux conventions d'honoraires ont été signées entre les parties.

2. M. A... a dessaisi l'avocat avant la fin de sa mission et celui-ci a saisi le bâtonnier de l'ordre d'une demande de fixation de ses honoraires.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'avocat fait grief à l'ordonnance de décider que les diligences effectuées par l'avocat avaient été suffisamment rémunérées par une somme de 3 024,65 euros déjà versée à son conseil par M. A..., puis de le débouter de ses plus amples demandes, alors « que les juges du fond ne sauraient dénaturer les documents de la cause ; qu'en retenant, pour débouter la SELARL Lex Contractus de sa demande en paiement de deux factures correspondant à des diligences accomplies entre novembre 2016 et juillet 2017, que « l'on trouve trace des diligences effectuées par le conseil au travers de la pièce nº 2 » et que ces diligences « ont été suffisamment rémunérées », quand la pièce nº 2 est datée du 19 juin 2016 et ne décrit que les diligences accomplies avant cette date, les juges du fond ont dénaturé la pièce nº 2 en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

4. Pour infirmer la décision du bâtonnier et dire que les diligences de l'avocat avaient été suffisamment rémunérées par la somme de 3 024,65 euros déjà versée par M. A..., l'ordonnance retient que dans le dossier du client on trouve trace des diligences effectuées par le conseil au travers de la pièce n° 2, qui est la réponse au questionnaire du bâtonnier pour l'arbitrage des honoraires, que le client convient d'une heure de rendez-vous, avoir reçu dix-sept courriers de son avocat, dont les lettres de missions, les factures et relances et deux missives concernant le fond de l'affaire et qu'au vu de ces éléments ainsi que des pièces versées par l'avocat, les factures querellées ne sont pas justifiées.

5. En statuant ainsi alors qu'il résulte des productions que la pièce n° 2, versée aux débats par M. A..., établie le 19 juin 2016, ne faisait pas état des diligences litigieuses effectuées de novembre 2016 à juillet 2017, visées par les factures des 15 mars 2017 et 21 août 2017 dont l'avocat demandait le règlement, le premier président, qui a dénaturé les termes clairs et précis de ce document, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance de taxe rendue le 27 novembre 2018, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance de taxe et les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne M. A... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance de taxe cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Lex Contractus.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'ordonnance infirmative attaquée encourt la censure ;

EN CE QU'elle a décidé que les diligences effectuées par la SELARL LEX CONTRACTUS avaient été suffisamment rémunérées par une somme de 3.024,65 euros déjà versée à son conseiller par Monsieur R... A..., puis débouté la SELARL LEX CONTRACTUS de ses plus amples demandes ;

AUX MOTIFS QU' « au cas d'espèce, si deux conventions ont été conclues, le client ayant retiré son mandat au conseil avant la fin des missions confiées, l'honoraire sera arbitré en application des dispositions de l'article 10 sus-visé ; qu'il appartient au conseil, conformément au droit commun de la preuve de justifier des diligences mises en cause ; que le conseil produit en tout et pour tout, quatre pièces : - le mèl du client du 11 septembre 2017 portant contestation des deux factures 202770 de 3.200 € et 202925 de 565,45 € ; - la justification de l'envoi à la banque d'un courrier de mise en demeure le 9 août 2017 et le texte de la mise en demeure, - les fiches de calculs relatives aux teg des deux prêts litigieux ; - réunis sous une pièce n° 4, deux courriers, l'un du 19 février 2017 à la protection juridique du client pour lui indiquer l'ouverture d'un dossier pénal et un courrier du 19 juillet 2017 au client qui est une explication critique du classement sans suite par le parquet de Bordeaux de la plainte pénale ; que dans le dossier du client on trouve trace des diligences effectuées par le conseil au travers de la pièce n° 2, qui est la réponse au questionnaire du bâtonnier pour l'arbitrage des honoraires ; que le client convient d'une heure de rendez-vous, avoir reçu 17 courriers de son avocat, dont les lettres de missions, les factures et relances et deux missives concernant le fond de l'affaire. Il a adressé à son conseil 14 mèls qui, pour l'essentiel, ont un caractère purement administratif ; qu'enfin, il apparaît du dossier du client qu'il a réglé à son conseil pour ses prestations 3.024,65 €, ce qui correspond, au taux de 240 € ttc entre 13 et 14 heures de travail ; qu'au vu des éléments ci-dessus rapportés les factures querellées ne sont pas justifiées ; qu'en effet, la plainte pénale n'est qu'un décalque du courrier de mise en demeure adressé à la banque pour l'établissement duquel, s'agissant pour l'essentiel du commentaire de calculs effectués par un tableur, le conseil ne peut mettre en compte plus de sept heures de travail » ;

ALORS QUE, premièrement, les juges du fond ne sauraient dénaturer les documents de la cause ; qu'en retenant, pour débouter la SELARL LEX CONTRACTUS de sa demande en paiement de deux factures correspondant à des diligences accomplies entre novembre 2016 et juillet 2017, que « l'on trouve trace des diligences effectuées par le conseil au travers de la pièce nº 2 » et que ces diligences « ont été suffisamment rémunérées », quand la pièce nº 2 est datée du 19 juin 2016 et ne décrit que les diligences accomplies avant cette date, les juges du fond ont dénaturé la pièce nº 2 en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;

ALORS QUE, deuxièmement, les paiements mis en avant par le client, à hauteur de 3.309,65 euros, étaient afférents à des factures portant les numéros suivants : 202698, 201638, 201812 et 202612 (conclusions récapitulatives, p. 6) ; que les demandes de l'avocat étaient fondées sur deux factures portant les n° 202770 et 202925 ; qu'en s'abstenant de rechercher, indépendamment des paiements qui auraient pu être effectués sur la base de précédentes factures, si les prestations accomplies par l'avocat sous l'égide des conventions visées par les factures qu'il invoquait, justifiaient les sommes mentionnées sur les factures invoquées, le juge du second degré a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1103 nouveau du Code civil et de l'article 10 de la loi n° 71-1130du 31 décembre 1971.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'ordonnance infirmative attaquée encourt la censure ;

EN CE QU'elle a décidé que les diligences effectuées par la SELARL LEX CONTRACTUS avaient été suffisamment rémunérées par une somme de 3.024,65 euros déjà versée à son conseiller par Monsieur R... A..., puis débouté la SELARL LEX CONTRACTUS de ses plus amples demandes ;

AUX MOTIFS QU' « au cas d'espèce, si deux conventions ont été conclues, le client ayant retiré son mandat au conseil avant la fin des missions confiées, l'honoraire sera arbitré en application des dispositions de l'article 10 sus-visé ; qu'il appartient au conseil, conformément au droit commun de la preuve de justifier des diligences mises en cause ; que le conseil produit en tout et pour tout, quatre pièces : - le mèl du client du 11 septembre 2017 portant contestation des deux factures 202770 de 3.200 € et 202925 de 565,45 € ; - la justification de l'envoi à la banque d'un courrier de mise en demeure le 9 août 2017 et le texte de la mise en demeure, - les fiches de calculs relatives aux teg des deux prêts litigieux ; - réunis sous une pièce n° 4, deux courriers, l'un du 19 février 2017 à la protection juridique du client pour lui indiquer l'ouverture d'un dossier pénal et un courrier du 19 juillet 2017 au client qui est une explication critique du classement sans suite par le parquet de Bordeaux de la plainte pénale ; que dans le dossier du client on trouve trace des diligences effectuées par le conseil au travers de la pièce n° 2, qui est la réponse au questionnaire du bâtonnier pour l'arbitrage des honoraires ; que le client convient d'une heure de rendez-vous, avoir reçu 17 courriers de son avocat, dont les lettres de missions, les factures et relances et deux missives concernant le fond de l'affaire. Il a adressé à son conseil 14 mèls qui, pour l'essentiel, ont un caractère purement administratif ; qu'enfin, il apparaît du dossier du client qu'il a réglé à son conseil pour ses prestations 3.024,65 €, ce qui correspond, au taux de 240 € ttc entre 13 et 14 heures de travail ; qu'au vu des éléments ci-dessus rapportés les factures querellées ne sont pas justifiées ; qu'en effet, la plainte pénale n'est qu'un décalque du courrier de mise en demeure adressé à la banque pour l'établissement duquel, s'agissant pour l'essentiel du commentaire de calculs effectués par un tableur, le conseil ne peut mettre en compte plus de sept heures de travail » ;

ALORS QUE, en tout état de cause, et s'agissant de la facture n° 202925 intervenue dans le cadre de la convention du 9 janvier 2017, l'avocat faisait état, non seulement de la rédaction de courriers, mais également de l'assistance du client lors de son audition par la brigade financière au commissariat central de BORDEAUX (conclusions p. 8) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur cette diligence, le juge du second degré a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1103 nouveau du Code civil et de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-10514
Date de la décision : 05/03/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 27 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 mar. 2020, pourvoi n°19-10514


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.10514
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