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26/02/2020 | FRANCE | N°19-12335

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 février 2020, 19-12335


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Cassation

Mme BATUT, président

Arrêt n° 163 F-D

Pourvoi n° A 19-12.335

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 FÉVRIER 2020

Mme K... H..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° A 19-12

.335 contre l'arrêt rendu le 18 octobre 2018 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Crédit agr...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Cassation

Mme BATUT, président

Arrêt n° 163 F-D

Pourvoi n° A 19-12.335

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 FÉVRIER 2020

Mme K... H..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° A 19-12.335 contre l'arrêt rendu le 18 octobre 2018 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Crédit agricole Aquitaine agence immobilière, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , exerçant sous l'enseigne Square habitat, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Champ, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de Mme H..., de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Crédit agricole Aquitaine agence immobilière, après débats en l'audience publique du 21 janvier 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Champ, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 18 octobre 2018), par acte sous seing privé du 21 janvier 2009, Mme H... a confié un mandat de gérance à la société Crédit agricole Aquitaine agence immobilière (le mandataire). Lui reprochant divers manquements à ses obligations contractuelles, Mme H... l'a assignée en responsabilité et indemnisation.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Énoncé du moyen

2. Mme H... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, selon le contrat de mandat liant les parties, "en cas de difficulté ou à défaut de paiement, le mandant donne mandat exprès au mandataire qui l'accepte, de diligenter tant en demande qu'en défense, toutes actions judiciaires, tous commandements, sommations, assignations et citations à comparaître devant tous tribunaux et toute commissions administratives, de concilier ou requérir jugements, les faire signifier et exécuter, se faire remettre tous titres ou pièces, le tout dans le respect du nouveau code de procédure civile et notamment de son article 828 et, sous réserve d'obtenir au préalable un mandat spécial, faire toute déclaration de créance" ; qu'il ressort de ces stipulations claires et précises que seules les déclarations de créances étaient soumises à l'exigence d'un mandat spécial ; que, dès lors, en considérant que l'engagement d'une procédure judiciaire était subordonné à ce que soit préalablement donné au mandataire un mandat spécial, pour en déduire qu'à défaut d'avoir reçu mandat, le mandataire n'avait pas commis de faute en n'engageant pas de procédure judiciaire à l'encontre des locataires défaillants, la cour d'appel a dénaturé le contrat de mandat du 21 janvier 2009 en violation du principe susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

3. Pour rejeter les demandes, l'arrêt retient que le mandat souscrit prévoyait qu'en cas de difficultés ou à défaut de paiement, le mandant donnait mandat exprès au mandataire de diligenter toutes actions judiciaires le tout dans le respect du nouveau code de procédure civile et notamment de son article 828 et sous réserve d'obtenir un mandat spécial.

4. En statuant ainsi, alors que le contrat stipule qu'en cas de difficulté ou à défaut de paiement, le mandant donne mandat exprès au mandataire qui l'accepte, de diligenter toutes actions judiciaires, tous commandements, sommations, assignations et citations à comparaître devant tous tribunaux et toutes commissions administratives, de concilier ou requérir jugements, les faire signifier et exécuter, se faire remettre tous titres ou pièces, le tout dans le respect du nouveau code de procédure civile et notamment de son article 828 et, sous réserve d'obtenir au préalable un mandat spécial, faire toute déclaration de créance, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis du mandat, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;

Condamne la société Crédit agricole Aquitaine agence immobilière aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Crédit agricole Aquitaine agence immobilière et la condamne à payer à Mme H... la somme de 3 000 euros.

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme H....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme H... de toutes les demandes formées contre la société Crédit agricole Aquitaine agence immobilière ;

AUX MOTIFS QU'il ressort du mandat de gérance souscrit entre Mme H... et le Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat le 21 janvier 2009 que les obligations du mandataire étaient les suivantes : - encaisser, percevoir tous loyers, charges, dépôt de garantie, indemnité d'occupation et d'assurances
toute somme ou valeur relative au bien géré, - rechercher des locataires, louer et relouer le bien après avoir avisé le mandant de la vacance du bien, - faire tout ce qu'il jugera utile pour parvenir à la location ou la relocation (publicité...), - faire exécuter toutes menues réparations ou celles plus importantes mais urgentes et en aviser rapidement le mandant et prendre toutes mesures conservatoires, - faire exécuter tous travaux importants après accord écrit, sauf urgence, du mandant et en régler les factures, - intervenir auprès des compagnies d'assurances en cas de sinistres ; que, par ailleurs ce mandat prévoyait qu'en cas de difficultés ou à défaut de paiement, le mandant donnait mandat exprès au mandataire de diligenter toutes actions judiciaires le tout dans le respect du nouveau code de procédure civile et notamment de son article 828 et sous réserve d'obtenir au préalable un mandat spécial ; que l'examen de l'état des lieux d'entrée et de l'état des lieux de sortie des locataires de Mme H... montre que ces documents ont été remplis de manière complète et précise et que l'état des lieux de sortie en date du 27 janvier 2014 prend en compte la détérioration notamment des tapisseries ; que le courrier du service communal d'hygiène et de santé en date du 29 avril 2014 ne vient en rien contredire le contenu de l'état des lieux du 27 janvier 2014 puisqu'il indique de la même manière qu'effectivement l'ensemble des tapisseries doit être changé ; que, d'autre part, ce courrier fait état de la présence de moisissures et ajoute que le dispositif de ventilation est de type aérateur asservi au fonctionnement de l'éclairage et qu'un dispositif de type ventilation mécanique contrôlée serait plus efficace car fonctionnant en continu. Il préconise une telle installation ; qu'il convient de relever que le Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat a été informé en cours de bail de l'apparition de ces moisissures et qu'elle a fait intervenir en couvreur qui a pu constater qu'il n'existait aucun problème de fuite en toiture mais qui a préconisé le contrôle de la VMC ; qu'il n'est pas contesté que ce contrôle a été réalisé à la demande du Crédit agricole Aquitaine agence immobilière -Square Habitat et a montré une défaillance qui a été reprise ; qu'en conséquence l'apparition des moisissures ne pouvait être mise à la charge des locataires ; que Mme H... reproche à l'agence de ne pas être intervenue plus rapidement sur la VMC ; que, cependant rien ne démontre dans le dossier que le fait que le Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat soit intervenu après le départ des locataires ait eu pour conséquence d'aggraver les désordres déjà apparents ; qu'en conséquence, Mme H... ne rapporte pas la preuve d'une faute imputable au Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat dans la rédaction de l'état de sortie des lieux ni dans son intervention lors de la signalisation de l'apparition des moisissures ; qu'en ce qui concerne le coût des travaux laissés à la charge des locataires sortants, il convient de relever que c'est à bon droit que le Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat n'a laissé à leur charge que les désordres provenant de leur occupation et a écarté le surplus des désordres préexistants à leur entrée dans les lieux ; que l''évaluation du coût des travaux à leur charge a été justement fixée à la somme de 2 546,96 euros de laquelle la caution de 880 euros a été déduite soit un solde dû de 1 666,96 euros ; qu'en ce qui concerne les travaux à intervenir, les pièces du dossier démontrent que le Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat a bien fait réaliser les menues réparations ; que, de même, elle a fait intervenir en urgence un couvreur lorsqu'il lui a été signalé l'existence de moisissures, respectant en cela le mandat qui lui avait été donné ; qu'en ce qui concerne les travaux de remise en état de l'immeuble, contrairement aux affirmations de Mme H..., le Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat ne pouvait engager ces travaux sans un accord écrit de la part de son mandant, des travaux de tapisserie ne pouvant s'analyser comme des travaux à réaliser en urgence ; qu'aucune faute ne peut donc être retenue à l'encontre du Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat, Mme H... n'ayant jamais donné un tel accord et ayant au surplus sollicité elle-même des entreprises ; que Mme H... reproche également au Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat le fait que la compagnie d'assurances aurait refusé sa garantie au titre des travaux au motif que l'agence n'aurait pas vérifié la solvabilité des preneurs ; que, cependant la lecture du courrier de la compagnie d'assurance en date du 16 avril 2014 mentionne très clairement que si la solvabilité du locataire n'était pas atteinte, il n'en demeurait pas moins que telle avait été le cas, l'assureur n'aurait pas pris en charge le sinistre en raison d'un état d'entrée dans les lieux montrant que les murs de l'entrée était déjà en état moyen avec plusieurs tâches et accrocs ; qu'iI apparaît ainsi que si le Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat a manqué à son obligation de vérifier la solvabilité suffisante des preneurs, cette faute est sans lien direct avec le refus de l'assureur de prendre en charge les travaux ; que Mme H... fait valoir que le Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat a commis une faute en n'engageant pas de procédure judiciaire à l'encontre des locataires qui n'ont pas réglé la somme de 1 666,96 euros au titre des travaux de remise en état ; que, cependant si le Crédit Agricole Aquitaine Agence Immobilière - Square Habitat avait bien un mandat pour ester en justice, encore fait-il qu'elle devait obtenir préalablement un mandat spécial pour ce faire ; qu'or il n'est pas contesté que Mme H... ne lui a jamais donné mandat d'engager une procédure à l'encontre des locataires sortants ; qu'enfin Mme H... reproche à son mandataire de ne pas avoir effectuer des démarches pour relouer le bien ; que, cependant dans la mesure où elle reconnaît que ce bien ne pouvait être reloué tant que les travaux de remise en état n'étaient pas réalisés et qu'elle n'a jamais autorisé le Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat à faire procéder aux travaux comme il lui était demandé, elle ne peut reprocher à cette dernière de ne pas avoir reloué le bien qui n'était pas en état ; qu'aucune faute ne peut donc être reprochée au Crédit agricole Aquitaine agence immobilière - Square Habitat ;

ALORS, 1°), QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, selon le contrat de mandat liant les parties, « en cas de difficulté ou à défaut de paiement, le mandant donne mandat exprès au mandataire qui l'accepte, de diligenter tant en demande qu'en défense, toutes actions judiciaires, tous commandements, sommations, assignations et citations à comparaître devant tous tribunaux et toute commissions administratives, de concilier ou requérir jugements, les faire signifier et exécuter, se faire remettre tous titres ou pièces, le tout dans le respect du nouveau code de procédure civile et notamment de son article 828 et, sous réserve d'obtenir au préalable un mandat spécial, faire toute déclaration de créance » ; qu'il ressort de ces stipulations claires et précises que seules les déclarations de créances étaient soumises à l'exigence d'un mandat spécial ; que, dès lors, en considérant que l'engagement d'une procédure judiciaire était subordonné à ce que soit préalablement donné au mandataire un mandat spécial, pour en déduire qu'à défaut d'avoir reçu mandat, le mandataire n'avait pas commis de faute en n'engageant pas de procédure judiciaire à l'encontre des locataires défaillants, la cour d'appel a dénaturé le contrat de mandat du 21 janvier 2009 en violation du principe susvisé ;

ALORS, 2°), QUE le mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le mandataire n'avait pas commis une faute en ne communiquant à sa mandante qu'avec retard l'état des lieux de sortie, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1992 et 1993 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-12335
Date de la décision : 26/02/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 18 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 26 fév. 2020, pourvoi n°19-12335


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12335
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