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26/02/2020 | FRANCE | N°19-10118

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 février 2020, 19-10118


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 160 F-D

Pourvoi n° R 19-10.118

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 FÉVRIER 2020

Mme M... J..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° R 19-10.1

18 contre l'arrêt rendu le 22 mars 2018 par la cour d'appel de Metz (3e chambre, TI), dans le litige l'opposant à la société BNP Paribas Personal F...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 160 F-D

Pourvoi n° R 19-10.118

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 FÉVRIER 2020

Mme M... J..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° R 19-10.118 contre l'arrêt rendu le 22 mars 2018 par la cour d'appel de Metz (3e chambre, TI), dans le litige l'opposant à la société BNP Paribas Personal Finance, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Solfea, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ghestin, avocat de Mme J..., de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de la société BNP Paribas Personal Finance, et l'avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 janvier 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Metz, 22 mars 2018), le 13 novembre 2012, à la suite d'un démarchage à domicile, Mme J... a souscrit un crédit affecté d'un montant de 22 500 euros auprès de la société banque Solfea, aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas Personal Finance (le prêteur), pour financer la fourniture et l'installation de panneaux photovoltaïques à réaliser par la société Planet solaire (le vendeur).

2. Invoquant des irrégularités du bon de commande et des fautes du prêteur, elle a assigné ce dernier et le liquidateur judiciaire du vendeur en nullité des contrats de vente et de prêt, ainsi qu'en restitution des sommes payées. Le prêteur a sollicité le remboursement du capital emprunté.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Mme J... fait grief à l'arrêt de la condamner à restituer au prêteur le capital emprunté, alors :

« 1°/ que la banque qui a consenti un crédit affecté à la livraison d'un bien et/ou d'une prestation de service à un consommateur est déchue du droit à la restitution du montant du prêt qu'elle a libéré entre les mains du vendeur prestataire lorsque le contrat principal pour lequel le crédit a été consenti est affecté de causes de nullité dont cette banque aurait dû se convaincre ; qu'il résulte du jugement entrepris non remis en cause de ce chef par la cour d'appel que le contrat principal était affecté de nombreuses causes de nullité particulièrement flagrantes pour un professionnel dont la banque aurait dû se convaincre ; qu'en énonçant, néanmoins, que le grief de Mme J... sur les manquements de la banque qui a consenti le prêt et débloqué les fonds entre les mains du vendeur prestataire en dépit des causes de nullité dont le contrat principal était entaché ne sauraient justifier de priver la banque de son droit à obtenir la restitution du capital prêté ou de la condamner à payer des dommages-intérêts d'un montant équivalent à sa créance, la cour d'appel a violé l'article 1147 ancien du code civil, L. 311-9 ancien du code de la consommation (actuellement L. 311-1-11°) et L. 311-31 ancien du même code (actuellement L. 312-48) ;

2°/ que la banque ne peut obtenir de l'emprunteur la restitution du capital prêté sans s'être assurée que l'attestation de fin de travaux/demande de versement des fonds permettait de vérifier sans ambiguïté l'exécution complète de la prestation convenue ; que l'attestation dont s'agit se bornait à attester que « les travaux objets du financement ci-dessus (
) sont terminés et conformes au devis » ; qu'en estimant que cette attestation préimprimée, vague et imprécise, ne visant même pas le bon de commande, ne rendant pas compte de l'achèvement et de la mise en route de l'installation ni de l'exécution par le vendeur des démarches auxquelles il s'était engagé pour permettre le raccordement de l'installation au réseau, avait permis à la banque, sans faute de sa part, de débloquer les fonds entre les mains du vendeur, la cour d'appel a violé l'article L. 311-31 ancien du code de la consommation, devenu l'article L. 312-48 du même code. »

Réponse de la Cour

4. En premier lieu, Mme J... n'a pas, dans ses conclusions d'appel, soutenu que la banque aurait commis une faute en ne vérifiant pas la validité du contrat principal au regard des textes régissant le démarchage à domicile.

5. En second lieu, l'arrêt retient que l'attestation de livraison signée par Mme J... le 13 décembre 2012 certifie que les travaux, objet du financement, qui ne couvrent pas le raccordement au réseau et les autorisations administratives éventuelles, sont terminés et conformes au devis, et que celle-ci a demandé au prêteur de débloquer les fonds au profit du vendeur.

6. Ayant relevé que Mme J... ne pouvait opposer au prêteur une exception d'inexécution du fournisseur pour refuser de rembourser le capital prêté en contrepartie des marchandises qui lui ont été vendues et livrées, la cour d'appel a ainsi fait ressortir l'absence de préjudice subi par celle-ci en relation avec les fautes invoquées à l'encontre de la banque. Elle a pu en déduire que Mme J... était tenue de rembourser le capital emprunté.

7. Le moyen, irrecevable en sa première branche, nouvelle et mélangée de fait, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme J... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour Mme J....

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif de ce chef attaqué d'AVOIR débouté Mme J... de ses demandes tendant à être déchargée de son obligation de restitution du capital prêté, de ses demandes en dommages-intérêts et de toutes ses demandes en paiement à l'encontre de la banque et de l'AVOIR condamnée à payer à cette banque la somme de 22 500 €, outre intérêts légaux à compter de la remise des fonds et sous déduction des échéances versées ;

AUX MOTIFS QUE la nullité du contrat principal de vente est acquise ;

qu'en application de l'article L. 311-32 du code de la consommation devenu l'article L. 312-35 du même code, le contrat accessoire de crédit affecté à la vente est annulé de plein droit par l'effet de l'annulation du contrat de vente pour lequel il a été conclu ;

que l'annulation du contrat de crédit emporte, en principe, la restitution des prestations réciproques et notamment la restitution du capital prêté par l'emprunteur ; que, pour échapper à cette obligation, Mme J... invoque le paiement direct fait à la société Planet Solaire et diverses fautes de la banque Solfea dans l'octroi du crédit et le déblocage des fonds ;

que le contrat de prêt affecté a été conclu entre le banque Solfea et Mme J... ; que la société Planet Solaire est tiers à ce contrat ; qu'elle est seulement le bénéficiaire du paiement du prix financé par le prêt contracté par Mme J... qui en est seule débitrice ; que le fait que les fonds prêtés n'aient pas transité par le patrimoine de l'emprunteuse aient été versés directement au vendeur des biens financés à crédit ne la dispense pas de son obligation à restitution s'agissant d'un crédit affecté à une vente assorti d'une obligation de paiement direct du prix par le prêteur au vendeur conformément à la convention des parties ;

qu'il ne peut pas non plus être reproché à la Banque Solfea d'avoir libéré les fonds entre les mains de la société Planet Solaire en exécution de la convention des parties et conformément à l'ordre de paiement qui lui a été donné par l'attestation de fin de travaux signée par Mme M... J... le 13 décembre 2012 ;

que l'emprunteur qui détermine la banque à verser les fonds au vendeur au vu de la signature d'une attestation certifiant l'exécution du contrat principal ne peut pas lui opposer une exception d'inexécution du fournisseur pour refuser de rembourser le capital prêté en contrepartie des marchandises qui lui ont été vendues et livrées ;

qu'aux termes de l'attestation de fin de travaux litigieuse, Mme M... J... a attesté que « les travaux, objet du financement susvisé ci-dessus (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et sont conformes au devis » et a demandé à la Banque Solfea de payer la somme de 22.500 euros représentant le montant du crédit directement à la société Planet Solaire ;

que la banque, qui est seulement un professionnel du crédit, n'est pas le prestataire chargé 'exécuter la vente et n'a pas à vérifier que les travaux financés ont bien été réalisés ou qu'ils l'ont été conformément aux règles de l'art ou encore que l'installation fonctionne ou bien qu'elle est performante ou rentable; qu'aucune clause du contrat de prêt ne met une telle obligation à sa charge ; qu'elle est en droit de se fonder sur la déclaration de l'emprunteur que les travaux financés ont été exécutés conformément au devis ; qu'il lui appartient d'exécuter cet ordre de paiement, sauf à engager sa responsabilité dans le cas contraire ;

que l'attestation de fin de travaux constitue un acte volontaire de l'emprunteur qui ordonne au prêteur de payer le prix au vendeur à la livraison du bien selon des modalités clairement définies par le document qu'il signe et en toute connaissance de cause des travaux exécutés par le fournisseur ; qu'elle produit un effet juridique en ce qu'elle a pour effet d'autoriser la banque à débloquer les fonds entre les mains du vendeur, ce qui est conforme à l'économie du contrat qui veut qu'une fois la prestation principale, comprenant la livraison et l'installation des panneaux photovoltaïques exécutée par le vendeur, soit payé sans attendre le raccordement effectif au réseau ERDF qui a un monopole, ni l'obtention des autorisations administratives nécessaires, lesquels dépendent de tiers au contrat, voire des diligences de l'emprunteur lui-même et ne peut suspendre le paiement de manière indéterminée ;

que s'agissant du devoir de mise en garde, il résulte des pièces produites que la banque a demandé des renseignements avec justificatifs sur les revenus et charges de l'emprunteuse; qu'aux termes de la fiche de solvabilité qu'elle a signée, Mme M... J... a déclaré percevoir un revenu de 1937,83 euros par mois, être propriétaire de son logement, n'avoir aucun charge au titre d'un crédit et aucun enfant à charge ; qu'il est justifié que la banque a interrogé le FICP et qu'il n'y avait aucune déclaration d'incident de paiement concernant Mme J... ; que la banque est en droit de se fonder sur les informations communiquées par l'emprunteur qui doit être loyal dans ce qu'il déclare ; qu'au regard des revenus et charges déclarés, le crédit souscrit par Mme J... générant des mensualités de 215,00 euros ne constituait pas un endettement excessif ; que la banque n'était tenue, en conséquence, à aucun devoir de mise en garde ; qu'elle n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ;

que Mme J... est mal fondée à exciper d'une faute de la banque dans le déblocage des fonds prêtés ou dans l'octroi du crédit pour s'exonérer de sa propre obligation de restitution consécutive à la nullité du contrat de prêt ;

que les autres griefs de Mme J... sur les manquements de la banque au regard de ses obligations résultant du code de la consommation sur la régularité du bon de commande et de l'offre de prêt sont surabondants puisque les conventions ont été annulées et sont réputées n'avoir pas existé ; qu'en outre ces griefs ne sauraient justifier, à eux seuls, de priver la banque de son droit à obtenir la restitution du capital prêté ou de la condamner à payer des dommages-intérêts d'un montant équivalent à sa créance dans la mesure où les sanctions du code de la consommation ont produits leurs effets ; que la restitution du capital prêté est la contrepartie du déblocage des fonds en paiement des marchandises achetées par l'emprunteur qui en a reçu livraison ;

que Mme J... est ainsi mal fondée en sa contestation de son obligation de restitution et en sa demande en dommages-intérêts ainsi qu'en toutes ses demandes en paiement contre la banque ;

qu'il y a lieu de condamner Mme J... à payer à la BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Banque Solfea, la somme de 22 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds jusqu'à parfait paiement, sous déduction des échéances éventuellement réglées ;

que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a dit que la Banque Solfea ne pourra solliciter le remboursement du capital prêté et l'a condamnée à rembourser à Mme J... la somme de 239,75 euros au titre de l'échéance de décembre 2013, débouté la Banque Solfea de l'ensemble de ses prétentions, condamné la Banque Solfea avec la société Planet Solaire et la Banque SYGMA à payer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile à Mme J... et aux dépens ; que le jugement sera confirmé pour le surplus en ses autres dispositions non contraires à la présente décision ;

1°) ALORS QUE la banque qui a consenti un crédit affecté à la livraison d'un bien et/ou d'une prestation de service à un consommateur est déchue du droit à la restitution du montant du prêt qu'elle a libéré entre les mains du vendeur prestataire lorsque le contrat principal pour lequel le crédit a été consenti est affecté de causes de nullité dont cette banque aurait dû se convaincre ; qu'il résulte du jugement entrepris non remis en cause de ce chef par la cour d'appel (arrêt attaqué p. 9 al. 6) que le contrat principal était affecté de nombreuses causes de nullité particulièrement flagrantes pour un professionnel dont la banque aurait dû se convaincre (jugement p. 11 al. 2 à 4) ; qu'en énonçant néanmoins que le grief de Mme J... sur les manquements de la banque qui a consenti le prêt et débloqué les fonds entre les mains du vendeur prestataire en dépit des causes de nullité dont le contrat principal était entaché ne sauraient justifier de priver la banque de son droit à obtenir la restitution du capital prêté ou de la condamner à payer des dommages-intérêts d'un montant équivalent à sa créance, la cour d'appel a violé l'article 1147 ancien du code civil, L. 311-9 ancien du code de la consommation (actuellement L. 311-1-11°) et L. 311-31 ancien du même code (actuellement L. 312-48) ;

2°) ALORS QUE la banque ne peut obtenir de l'emprunteur la restitution du capital prêté sans s'être assurée que l'attestation de fin de travaux/demande de versement des fonds permettait de vérifier sans ambiguïté l'exécution complète de la prestation convenue ; que l'attestation dont s'agit se bornait à attester que « les travaux objets du financement ci-dessus (
) sont terminés et conformes au devis » ; qu'en estimant que cette attestation préimprimée, vague et imprécise, ne visant même pas le bon de commande, ne rendant pas compte de l'achèvement et de la mise en route de l'installation ni de l'exécution par le vendeur des démarches auxquelles il s'était engagé pour permettre le raccordement de l'installation au réseau, avait permis à la banque, sans faute de sa part, de débloquer les fonds entre les mains du vendeur, la cour d'appel a violé l'article L. 311-31 ancien du code de la consommation, devenu l'article L. 312-48 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-10118
Date de la décision : 26/02/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 22 mars 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 26 fév. 2020, pourvoi n°19-10118


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet, SCP Ghestin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.10118
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