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06/02/2020 | FRANCE | N°18-24761

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 06 février 2020, 18-24761


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 février 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 167 F-D

Pourvoi n° M 18-24.761

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 FÉVRIER 2020

1°/ La communauté de communes du Vinobre, dont le sièg

e est [...] ,

2°/ la société Groupama Méditerranée, dont le siège est [...] ,

ont formé le pourvoi n° M 18-24.761 contre l'arrêt rendu le 20 sept...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 février 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 167 F-D

Pourvoi n° M 18-24.761

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 FÉVRIER 2020

1°/ La communauté de communes du Vinobre, dont le siège est [...] ,

2°/ la société Groupama Méditerranée, dont le siège est [...] ,

ont formé le pourvoi n° M 18-24.761 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile, 1re chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à M. H... B..., domicilié [...] ,

2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de Privas, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat de la communauté de communes du Vinobre et de la société Groupama Méditerranée, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. B..., après débats en l'audience publique du 8 janvier 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et Mme Cos, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il y a lieu de donner acte à la communauté de communes du Vinobre et à la société anonyme (SA) Groupama Méditerranée du désistement de leur demande en paiement de frais irrépétibles en ce qu'elle est dirigée contre la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche (la caisse).

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 20 septembre 2019) et les productions, M. B..., victime d'un accident de la circulation survenu le 11 août 2008, alors qu'il travaillait en qualité de ripeur au ramassage des ordures ménagères pour le compte de la communauté de communes du Vinobre (l'employeur), assurée auprès de la société Groupama Méditerranée (l'assureur), a, par actes des 3 et 10 avril 2015, assigné son employeur et son assureur ainsi que la caisse devant le tribunal de grande instance de Privas en indemnisation de ses préjudices.

Examen des moyen

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La communauté de communes du Vinobre et la société Groupama Méditerranée font grief à l'arrêt de fixer l'indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels actuels de M. B... à 29 613,89 euros euros et le montant total de l'indemnisation des préjudices de M. B..., due in solidum par la communauté de communes du Vinobre et son assureur, à 223 287 euros, déduction faite des provisions déjà versées, alors :

« 1°/ que le jugement a fixé à 182 111 euros le montant du préjudice corporel subi par M. B..., somme ne comprenant pas d'indemnisation au titre d'une perte de gains professionnels actuels, le tribunal ayant retenu que M. B... n'avait subi aucun préjudice à ce titre ; qu'en appel, M. B... demandait que son préjudice des suites de l'accident soit fixé à la somme de 687 856,31 euros, comprenant une somme de 29 613,89 euros au titre d'une perte de gains professionnels actuels, tandis qu'elles demandaient la confirmation du jugement ; qu'en retenant que les parties sollicitaient la confirmation de la première décision, pour en déduire qu'un préjudice de perte de gains professionnels actuels devait être fixé à 29 613,89 euros, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile.

2°/ qu'en déduisant l'existence d'un préjudice de perte de gains professionnels actuels du versement par la caisse d'une rente au titre de l'accident du travail et en fixant le montant de ce poste de préjudice au montant des sommes versées par la caisse, quand il lui appartenait de déterminer l'existence et le quantum de ce préjudice indépendamment des sommes pouvant être versées par l'organisme de sécurité sociale, la cour d'appel a violé l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.»

Réponse de la Cour

4. C'est sans méconnaître l'objet du litige qu'après avoir relevé que les parties sollicitaient la confirmation du jugement, la cour d'appel a retenu, en analysant souverainement la portée de leurs écritures au regard de l'ambiguïté de cette décision, que les pertes de gains professionnels actuels de la victime s'élevaient à la somme de 29 613,89 euros.

5. Dès lors, le moyen n'est pas fondé.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. La communauté de communes du Vinobre et la société Groupama Méditerranée font grief à l'arrêt de fixer l'indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels futurs de M. B... à 313 717,54 euros et de fixer le montant total de l'indemnisation des préjudices de M. B..., due in solidum par elles, à 223 287 euros, déduction faite des provisions déjà versées alors qu' « en déduisant l'existence d'un préjudice de perte de gains professionnels futurs du versement par la caisse d'une rente au titre de de l'accident du travail et en fixant le montant de ce poste de préjudice au montant des sommes versées par la caisse, quand il lui appartenait de déterminer l'existence et le quantum de ce préjudice indépendamment des sommes pouvant être versées par l'organisme de sécurité sociale, la cour d'appel a violé l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

7. Pour fixer l'indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels futurs de M. B... à la somme de 313 717,54 euros et le montant total de l'indemnisation de ses préjudices, due in solidum par l'employeur et son assureur à celle de 223 287 euros, déduction faite des provisions déjà versées, l'arrêt retient que M. B... réclame en appel une indemnité complémentaire de 40 815,77 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs (arrérages échus) et une indemnité complémentaire de 272 901,77 euros (arrérages à échoir) qui avaient été et allaient être pris en charge par la caisse au titre de la rente, que ce poste de préjudice vise à l'indemnisation de la perte ou de la diminution des revenus consécutive à l'incapacité permanente à compter de la date de consolidation, que l'indemnisation de ce poste de préjudice a été rejetée en première instance au motif que M.B... percevait une rente mensuelle de 1 138,97 euros, que cependant il convient de fixer le montant de la perte de gains professionnels futurs à la somme de 313 717,54 euros correspondant à la rente versée par l'organisme social, la victime ne réclamant aucune somme complémentaire.

8. En statuant ainsi, sans évaluer préalablement ce poste de préjudice qui ne pouvait être confondu avec les rentes et pensions servies par la caisse des dépôts et consignations en vue de l'indemniser, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

9. La cassation sur le chef de décision fixant à la somme de 313 717,54 euros le montant de l'indemnisation du poste de préjudice de perte de gains professionnels futurs entraîne par voie de conséquence la cassation du chef de décision fixant, déduction faite des provisions versées par la caisse, le montant de la somme totale due par l'employeur et son assureur.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement ce en qu'il fixe l'indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels futurs de M. B... à la somme de 313 717,54 euros et le montant total de l'indemnisation de ses préjudices, due in solidum par la communauté de communes du Vinobre et la société Groupama Méditerranée, à celle de 223 287 euros, déduction faite des provisions déjà versées, l'arrêt rendu le 20 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la communauté de communes du Vinobre et la société Groupama Méditerranée.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé l'indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels actuels de M. H... B... à 29 613,89 € et d'avoir fixé le montant total de l'indemnisation des préjudices de M. B..., due in solidum par la communauté de communes du Vinobre et la compagnie Groupama Méditerranée, à 223 287 euros, déduction faite des provisions déjà versées ;

AUX MOTIFS QUE, sur la perte de gains professionnels actuels, là encore, les parties sollicitent la confirmation de la première décision, eu égard au fait que M. H... B... a été intégralement indemnisé par la caisse primaire d'assurance maladie au titre de l'accident du travail pour la somme totale de 29 613,89 euros ;
(
)
Qu'en définitive, la réparation du dommage causé par l'accident de la circulation du 11 août 2008 peut être évaluée de la façon suivante :
Préjudices patrimoniaux :
Dépenses de santé : 73 705,28 € (CPAM)
Perte de gains professionnels actuels : 29 613,89 € (CPAM)
Frais divers : 1000 €
Dépenses de santé futures : Rejet
Perte de gains professionnels futurs : 313 717,54 € (CPAM)
Incidence professionnelle : 30 000 €
Frais de véhicule adapté : 18 000 €
Tierce personne : 9700 €
Préjudices extra-patrimoniaux :
Déficit fonctionnel temporaire : 10 087 €
Souffrances endurées : 25 000 €
Déficit fonctionnel permanent : 112 500 €
Préjudice esthétique permanent : 8 000 €
Préjudice d'agrément : 6 000 €
Préjudice sexuel : 3 000 €
Total : 639 323,63 € ;
Que la communauté de communes du Vinobre et la compagnie d'assurances Groupama Méditerranée seront par conséquent condamnées in solidum à payer la somme de 639 323,63 euros en réparation du préjudice causé par l'accident de la circulation survenu le 11 août 2008, déduction faite des provisions déjà versées ;

1°) ALORS QUE le jugement avait fixé à 182 111 euros le montant du préjudice corporel subi par M. B..., somme ne comprenant pas d'indemnisation au titre d'une perte de gains professionnels actuels, le tribunal ayant retenu que M. B... n'avait subi aucun préjudice à ce titre ; qu'en appel, M. B... demandait que son préjudice des suites de l'accident soit fixé à la somme de 687 856, 31 euros, comprenant une somme de 29 613,89 euros au titre d'une perte de gains professionnels actuels (concl. p. 16 et dispositif), tandis que les exposantes demandaient la confirmation du jugement ; qu'en retenant que les parties sollicitaient la confirmation de la première décision, pour en déduire qu'un préjudice de perte de gains professionnels actuels devait être fixé à 29 613,89 €, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en déduisant l'existence d'un préjudice de perte de gains professionnels actuels du versement par la CPAM d'une rente au titre de de l'accident du travail et en fixant le montant de ce poste de préjudice au montant des sommes versées par la caisse, quand il lui appartenait de déterminer l'existence et le quantum de ce préjudice indépendamment des sommes pouvant être versées par l'organisme de sécurité sociale, la cour d'appel a violé l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé l'indemnisation du préjudice de perte de gains professionnels futurs de M. H... B... à 313 717,54 € et d'avoir fixé le montant total de l'indemnisation des préjudices de M. B..., due in solidum par la communauté de communes du Vinobre et la compagnie Groupama Méditerranée, à 223 287 euros, déduction faite des provisions déjà versées ;

AUX MOTIFS QUE, sur le préjudice professionnel, l'intimé se prévaut de la perte de gains professionnels futurs et d'un "préjudice professionnel" qui s'analyse en une incidence professionnelle ; qu'il sollicite une indemnisation globale au titre de l'incidence professionnelle à hauteur de la somme de 63 609,60 € ; qu'il réclame par ailleurs une indemnité complémentaire de 40 815,77 € au titre de perte de gains professionnels futurs (arrérages échus) et une indemnité complémentaire de 272 901,77 € (arrérages à échoir) qui ont été et vont être pris en charge par la Caisse primaire d'assurance maladie au titre de la rente invalidité ; que les deux postes de préjudice doivent cependant être clairement distingués ; que, sur la perte de gains professionnels futurs, ce poste de préjudice vise à l'indemnisation de la perte ou de la diminution des revenus consécutive à l'incapacité permanente à compter de la date de consolidation ; que l'indemnisation de ce poste de préjudice a été rejetée en première instance au motif que M. H... B... percevait une rente mensuelle de 1 138,97 euros ; que, cependant, il convient de fixer le montant de la perte de gains professionnels futurs à la somme de 313 717,54 euros correspondant à la rente versée par l'organisme social, M. H... B... ne réclamant aucune somme complémentaire ;
(
)
Qu'en définitive, la réparation du dommage causé par l'accident de la circulation du 11 août 2008 peut être évaluée de la façon suivante :
Préjudices patrimoniaux :
Dépenses de santé : 73 705,28 € (CPAM)
Perte de gains professionnels actuels : 29 613,89 € (CPAM)
Frais divers : 1000 €
Dépenses de santé futures : Rejet
Perte de gains professionnels futurs : 313 717,54 € (CPAM)
Incidence professionnelle : 30 000 €
Frais de véhicule adapté : 18 000 €
Tierce personne : 9700 €
Préjudices extra-patrimoniaux :
Déficit fonctionnel temporaire : 10 087 €
Souffrances endurées : 25 000 €
Déficit fonctionnel permanent : 112 500 €
Préjudice esthétique permanent : 8 000 €
Préjudice d'agrément : 6 000 €
Préjudice sexuel : 3 000 €
Total : 639 323,63 € ;
que la communauté de communes du Vinobre et la compagnie d'assurances Groupama Méditerranée seront par conséquent condamnées in solidum à payer la somme de 639 323,63 euros en réparation du préjudice causé par l'accident de la circulation survenu le 11 août 2008, déduction faite des provisions déjà versées ;

ALORS QU'en déduisant l'existence d'un préjudice de perte de gains professionnels futurs du versement par la CPAM d'une rente au titre de de l'accident du travail et en fixant le montant de ce poste de préjudice au montant des sommes versées par la caisse, quand il lui appartenait de déterminer l'existence et le quantum de ce préjudice indépendamment des sommes pouvant être versées par l'organisme de sécurité sociale, la cour d'appel a violé l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-24761
Date de la décision : 06/02/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 20 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 06 fév. 2020, pourvoi n°18-24761


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.24761
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