LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 février 2020
Cassation partielle
M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président
Arrêt n° 169 F-D
Pourvoi n° H 18-23.055
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 5 FÉVRIER 2020
1°/ la société Schneider Electric France, société par actions simplifiée,
2°/ la société Schneider Electric industries, société par actions simplifiée,
ayant toutes deux leur siège [...] ,
ont formé le pourvoi n° H 18-23.055 contre l'arrêt rendu le 19 juillet 2018 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige les opposant au comité d'établissement Schneider Electric, dont le siège est [...] , défendeur à la cassation.
Le comité d'établissement Schneider Electric a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat des sociétés Schneider Electric France et Schneider Electric industries, de la SCP Didier et Pinet, avocat du comité d'établissement Schneider Electric, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 juillet 2018), les sociétés Schneider Electric France et Schneider Electric industries forment une unité économique et sociale (l'UES) dotée d'un comité d'entreprise central et de onze comités d'établissement. Un accord collectif, signé entre l'UES et les organisations syndicales en 1995, et renouvelé en 2006 puis en 2009, a prévu, s'agissant de la subvention de fonctionnement due aux comités d'établissement, que « les parties signataires sont d'accord pour considérer que les comités d'établissement bénéficient déjà de la part de la société des sommes et moyens matériels nécessaires à leurs fonctionnements, quelle que soit leur nature et origine. Ceux-ci dépassant en effet largement le montant fixé par les dispositions légales et réglementaires ».
2. En 2014, saisi par le comité d'établissement de la région parisienne (le comité d'établissement), le juge des référés du tribunal de grande instance a ordonné à l'UES de produire les éléments relatifs à la masse salariale brute et les montants des sommes et moyens mis à disposition du comité d'établissement pour son fonctionnement. En 2016, le comité d'établissement a saisi le tribunal de grande instance pour qu'il soit constaté qu'aucun document comptable n'avait été fourni et condamner l'UES a verser une somme de 2 003 369 euros au titre des subventions de fonctionnement dues pour les années 2006 à 2014, outre des dommages-intérêts.
Examen des moyens
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche, et le troisième moyen du pourvoi principal, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche
Énoncé du moyen
4. L'UES fait grief à l'arrêt d' « ordonn[er] une expertise, (je ne mets pas tout, voir avec un modèle d'expertise ordonnée antérieurement par la cour) » (sic), et de désign[er] un expert avec mission de fournir les éléments permettant de calculer la subvention de fonctionnement du comité d'établissement de la région parisienne de l'UES Schneider Electric France et Schneider Electric industries, selon les prescriptions de l'article L. 2325-43 du code du travail pour l'année 2008, dans sa partie postérieure au 30 octobre 2008 et pour les années suivantes jusqu'à 2014, la masse salariale brute au sens de ce texte s'entendant du total des sommes figurant sur les DADS, calculer les moyens et sommes en personnel et prestations fournis par l'employeur au titre du fonctionnement de ce comité pour cette période et de manière générale, fournir tous éléments techniques, d'information ou de fait permettant au tribunal d'apporter une solution au litige alors « que dès lors qu'elles sont plus favorables que les dispositions légales, les dispositions d'un accord collectif portant sur les moyens alloués au comité d'entreprise sont opposables à ce comité même si celui-ci n'est pas partie à l'accord en cause ; qu'en l'espèce, l'article 4.6.2. de l'avenant n° 5 à la convention collective d'entreprise du 15 juin 1995 puis l'article 6.4 de l'accord collectif du 11 janvier 2006 et l'article 1.4 du titre IV, chapitre 2, de l'accord collectif 1er décembre 2009 prévoient que les comités d'établissement bénéficient de sommes et moyens matériels de la part de l'employeur dépassant largement le montant fixé par les dispositions légales et excluent, en conséquence, le versement d'une subvention de fonctionnement à ces comités comme le suivi des moyens qui leur sont alloués à ce titre ; qu'en retenant néanmoins que le comité d'établissement Schneider Electric de la région parisienne qui n'était pas partie à ces accords collectifs n'avait pas reconnu pour sa part avoir été rempli de ses droit à travers le financement direct par la société de son fonctionnement et en ordonnant, en conséquence, une expertise afin de rechercher si tel avait été le cas, en confiant notamment pour mission à l'expert de fournir les éléments de calcul de la subvention de fonctionnement due au comité d'établissement selon les prescriptions légales et les moyens et sommes en personnel et prestations fournies par l'employeur au titre du fonctionnement du comité sur la période non atteinte par la prescription, la cour d'appel a violé les dispositions conventionnelles susvisées, ensemble celles des articles L. 2325-4 et L. 2325-43 du code du travail dans leur version applicable au litige. »
Réponse de la Cour
5. Les dispositions d'un accord collectif portant sur les moyens alloués au comité d'entreprise sont opposables à ce dernier, même si celui-ci n'est pas partie à l'accord, dès lors qu'elles sont plus favorables que les dispositions légales, ce qu'il appartient à l'employeur de démontrer.
6. En l'espèce, la cour d'appel a retenu que si l'accord affirmait que la participation de l'employeur au fonctionnement du comité d'établissement était, grâce à la mise à disposition de divers moyens, plus importante que les dispositions légales, il n'était prévu aucun mode de vérification de ce postulat et il n'était produit aucun élément permettant d'effectuer cette vérification.
7. Elle a pu dès lors en déduire que cette vérification, permettant de s'assurer que les moyens mis à disposition par l'employeur étaient au moins égaux au montant de la subvention prévue par l'article L. 2325-43 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, se justifiait et ordonner en conséquence une mesure d'expertise.
8. Il en résulte que le moyen n'est pas fondé.
Mais sur le pourvoi incident
Énoncé du moyen
9. Le comité d'établissement fait grief à l'arrêt de dire que les demandes en paiement de subventions de fonctionnement du comité d'entreprise étaient irrecevables pour la période antérieure au 30 octobre 2008, alors « que la prescription quinquennale ne court qu'à compter du jour où le titulaire d'un droit a eu ou aurait dû avoir connaissance des faits lui permettant de l'exercer ; que lorsqu'une créance dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier et résultent de déclarations que le débiteur est tenu de faire, la connaissance des faits est fixée au jour où le créancier a reçu communication des éléments nécessaires à l'appréciation de ses droits ; que s'agissant du budget de fonctionnement alloué au comité d'entreprise, l'employeur a l'obligation de fournir le montant de la masse salariale brute servant de base de calcul à ladite subvention ; qu'en relevant que le comité d'établissement avait eu connaissance des faits lui permettant d'exercer son action à compter de l'application des accords collectifs de 2006 et 2009, par lesquels les sociétés employeurs s'estimaient libérées de toute justification de leur participation directe aux frais de fonctionnement du comité, de sorte que la prescription avait commencé à courir depuis l'application de ces accords, quand elle constatait que par ordonnance du 8 janvier 2014, le juge des référés avait ordonné aux sociétés employeurs de produire la masse salariale brute pour les années 2006 à 2012 et le montant des moyens déjà alloués au comité, ce dont il résultait que le comité d'établissement ne pouvait être considéré comme ayant eu connaissance des faits lui permettant d'exercer son action à compter des accords litigieux, et que la prescription n'avait pas couru, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-43 du code du travail et 2224 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 2325-43 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, et l'article 2224 du code civil :
10. Pour dire irrecevables les demandes en paiement de la subvention de fonctionnement du comité d'entreprise pour la période antérieure au 30 octobre 2008, la cour d'appel retient que le comité d'établissement connaît depuis qu'il applique les accords de 2006 et 2009 l'absence de chiffrage et de justification de la participation de l'employeur et donc les faits permettant de l'exercer et que par conséquent, dès lors que la saisine du juge des référés remonte à l'assignation du 30 octobre 2013, seuls les faits antérieurs au 30 octobre 2008 sont prescrits.
11. La prescription prévue par l'article 2224 du code civil n'est cependant pas applicable lorsque la créance, même périodique, dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier.
12. Ayant constaté qu'en l'espèce, le comité d'établissement ignorait le montant exact des sommes et moyens en personnel fournis par l'entreprise au titre de la subvention de fonctionnement, la cour d'appel, qui aurait dû en déduire que la prescription n'avait pas commencé à courir, a violé les textes susvisés.
13. La cassation sur le pourvoi incident rend sans objet le premier moyen du pourvoi principal.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit irrecevables les demandes en paiement de subventions de fonctionnement du comité d'établissement pour la période antérieure au 30 octobre 2008, l'arrêt rendu le 19 juillet 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;
Condamne les sociétés Schneider Electric France et Schneider Electric industries aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés Schneider Electric France et Schneider Electric industries et les condamne à payer au comité d'établissement Schneider Electric la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour les sociétés Schneider Electric France et Schneider Electric industries
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les demandes en paiement de subvention de fonctionnement du comité d'entreprise étaient irrecevables uniquement pour la période antérieure au 30 octobre 2008 ;
AUX MOTIFS QUE « Considérant que les sociétés invoquent la prescription quinquennale accomplie pour la période qui précède de plus de cinq ans la saisine du juge du fond c'est-à-dire antérieure au 27 juillet 2011 ; Considérant que le comité d'établissement objecte que le délai de prescription n'a pas commencé à courir, puisque précisément il ne connaît pas l'exactitude de ses droits, faute d'avoir pu calculer la subvention de fonctionnement au moyen d'une information fournie par les employeurs qui avait été demandée au moyen d'une demande de production de pièces en référé ; Considérant qu'aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles mobilières se prescrivent pas cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l'exercer ; Considérant que, depuis l'origine, le comité sait que les sociétés s'estiment libérées de leurs obligations par une participation directe à leur frais, dans une proportion plus importante, selon l'accord de 2006, que ne l'exige la loi ; que le comité d'établissement connaît donc depuis qu'elle applique les accords de 2006 et 2009, l'absence de chiffrage et de justification de cette participation et donc les faits lui permettant de l'exercer ; qu'au demeurant, ses demandes tendent à obtenir paiement de la totalité de la subvention de fonctionnement due, soit 0,2% de la masse salariale, indépendamment de la participation effective qu'ont apporté les sociétés à son fonctionnement ; Considérant que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque les deux actions tendent vers un seul et même but ; qu'il s'ensuit que l'action en référé fondée sur l'article 145 du code de procédure civile, qui avait pour objet de réunir les éléments permettant de déterminer le montant de la contribution litigieuse restant due, a interrompu le délai de prescription de l'action au fond tendant directement au paiement de celle-ci ; que par conséquent, dès lors que la saisine du juge des référés remonte à l'assignation du 30 octobre 2013, seuls les faits antérieurs au 30 octobre 2008 sont prescrits ;» ;
ALORS QUE si la demande en justice interrompt le délai de prescription, l'effet interruptif de prescription attaché à cette demande ne s'étend pas à une seconde demande différente de la première par son objet ; qu'en l'espèce, pour considérer que le délai de prescription relatif à l'action en paiement de la subvention de fonctionnement du comité d'établissement avait été interrompu par l'action en référé engagée par ce comité le 30 octobre 2013, la Cour d'appel a retenu que cette action en référé, fondée sur l'article 145 du code de procédure civile, avait pour objet de réunir les éléments permettant de déterminer le montant de la contribution litigieuse ; qu'en statuant ainsi alors qu'il ressortait de ses constatations que les actions en référé et au fond, successivement engagées par le comité d'établissement, qui tendaient, pour l'une, à obtenir la production de pièces justificatives par les sociétés exposantes et, pour l'autre, au paiement de sommes au titre de la subvention de fonctionnement du comité d'établissement et à titre de dommages et intérêts, avaient des objets distincts, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles 2224 et 2241 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir « ordonn[é] une expertise, (je ne mets pas tout, voir avec un modèle d'expertise ordonnée antérieurement par la cour) » (sic), et désigné un expert avec mission de fournir les éléments permettant de calculer la subvention de fonctionnement du comité d'établissement de la région parisienne de l'UES Schneider Electric France et Schneider Electric Industries, selon les prescriptions de l'article L.2325-43 du code du travail pour l'année 2008, dans sa partie postérieure au 30 octobre 2008 et pour les années suivantes jusqu'à 2014, la masse salariale brute au sens de ce texte s'entendant du total des sommes figurant sur les DADS, calculer les moyens et sommes en personnel et prestations fournis par l'employeur au titre du fonctionnement de ce comité pour cette période et de manière générale, fournir tous éléments techniques, d'information ou de fait permettant au tribunal d'apporter une solution au litige ;
AUX MOTIFS QUE « Considérant qu'en application du second alinéa de l'article L.2325-43 du code du travail, l'employeur n'a pas à verser la contribution au fonctionnement du comité d'établissement pour autant qu'il prouve avoir déjà fait bénéficier le comité d'une somme ou de moyens en personnel équivalents à 0,2 % de la masse salariale brute ; Considérant que, par trois accords collectifs du 11 janvier 2006, du 19 mars 2010 et du 19 décembre 2014 relatifs à TUES, les syndicats représentatifs au sein des sociétés en cause ont admis que la participation de l'employeur au fonctionnement du comité d'établissement était supérieure à la somme légalement due égale à 0,2 % de la masse salariale, sans qu'il ne soit prévu de mode de vérification de ce postulat ; qu'un accord ne saurait fixer une subvention de fonctionnement inférieure à ce taux, s'agissant d'une clause d'ordre public ; que des clauses par lesquelles les parties à un accord collectif reconnaissent que ce taux est respecté, n'interdisent pas au comité d'établissement de s'assurer de son exactitude ; que cette vérification est d'autant plus ouverte au comité d'entreprise, qu'il n'était pas partie aux accords collectifs dont s'agit et n'a donc pas reconnu pour sa part avoir été rempli de ses droits à travers le financement direct par la société de son fonctionnement ; Considérant que dans ces conditions, un expertise est nécessaire pour rechercher si, en ce qui concerne la période non prescrite, tel a été le cas, aux frais avancés de l'employeur auquel incombe la charge de la preuve de ce qu'il s'est acquitté de son obligation légale ; [
] ;Considérant qu'en conséquence, l'expert devra rechercher dans quelle mesure les sociétés ont concouru financièrement au fonctionnement du comité d'établissement, au regard de l'obligation légale d'y contribuer à proportion de 0,2 % de la masse salariale, telle qu'elle résulte de la DADS » ;
ALORS d'une part QU'il appartient aux juges devant lesquels l'affaire a été débattue d'en délibérer ; que la décision est rendue à la majorité des voix ; qu'en l'espèce, l'indication « je ne mets pas tout, voir avec un modèle d'expertise ordonnée antérieurement par la cour », portée à la suite du chef de dispositif par lequel la Cour d'appel a ordonné un expertise, ne permet pas de s'assurer que les modalités de l'expertise ordonnée ont été effectivement décidées à la majorité des voix, dans le cadre du délibéré, par les magistrats devant lesquels l'affaire a été débattue ; qu'ainsi l'arrêt attaqué a été rendu en violation des dispositions des articles 447 et 458 du Code de procédure civile ;
ALORS d'autre part et en toute hypothèse QUE, dès lors qu'elles sont plus favorables que les dispositions légales, les dispositions d'un accord collectif portant sur les moyens alloués au comité d'entreprise sont opposables à ce comité même si celui-ci n'est pas partie à l'accord en cause ; qu'en l'espèce, l'article 4.6.2. de l'avenant n°5 à la convention collective d'entreprise du 15 juin 1995 puis l'article 6.4 de l'accord collectif du 11 janvier 2006 et l'article 1.4 du titre IV, chapitre 2, de l'accord collectif 1er décembre 2009 prévoient que les comités d'établissement bénéficient de sommes et moyens matériels de la part de l'employeur dépassant largement le montant fixé par les dispositions légales et excluent, en conséquence, le versement d'une subvention de fonctionnement à ces comités comme le suivi des moyens qui leur sont alloués à ce titre ; qu'en retenant néanmoins que le comité d'établissement SCHNEIDER ELECTRIC de la région parisienne qui n'était pas partie à ces accords collectifs n'avait pas reconnu pour sa part avoir été rempli de ses droit à travers le financement direct par la société de son fonctionnement et en ordonnant, en conséquence, une expertise afin de rechercher si tel avait été le cas, en confiant notamment pour mission à l'expert de fournir les éléments de calcul de la subvention de fonctionnement due au comité d'établissement selon les prescriptions légales et les moyens et sommes en personnel et prestations fournies par l'employeur au titre du fonctionnement du comité sur la période non atteinte par la prescription, la Cour d'appel a violé les dispositions conventionnelles susvisées, ensemble celles des articles L. 2325-4 et L. 2325-43 du Code du travail dans leur version applicable au litige.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande des sociétés SCHNEIDER ELECTRIC FRANCE et SCHNEIDER ELECTRIC INDUSTRIES tendant à l'annulation des accords collectifs des 11 janvier 2006 et 1er décembre 2009 ;
AUX MOTIFS QUE « Considérant que les sociétés prient la cour d'annuler les accords du 11 janvier 2006 et du 1er décembre 2009, dans l'hypothèse d'un refus de prendre en compte le fait que les employeurs ont rempli leur obligation au regard de la subvention de fonctionnement des comités ; qu'en effet, une telle décision aurait selon elle pour effet de remettre en cause toutes les clauses de ces accords, car elles seraient indissociables les unes des autres ; Considérant que, loin de porter atteinte à l'équilibre de l'accord, la demande du comité d'établissement tend seulement à vérifier que la clause relative à la participation de l'employeur aux frais de son fonctionnement, conformément à la loi, a bien été respectée ; en ce que la participation effective au financement de son fonctionnement est bien supérieure ou égale à la proportion minimale prescrite par l'article L 2325-43 du code du travail ; que dans ces conditions il n'y a pas lieu à annulation » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « A titre subsidiaire, les sociétés de l'UES font valoir que si l'article 1.4 relatif à la détermination de la subvention de fonctionnement des comités d'établissement est écarté, l'accord, constituant un tout indivisible, doit être annulé en son entier. L'offre de mise à disposition de moyens, non illicite en tant que telle, suppose qu'on puisse opérer, après valorisation de ces moyens, la comparaison avec le minimum légal dû pour s'assurer du respect des dispositions légales voulu par l'accord. Cette vérification et, le cas échéant, le réajustement opéré ne modifie pas l'équilibre de la convention. Elle ne constitue pas plus une annulation ou une inopposabilité -les deux termes sont employés- de la clause. De ce fait, les demandes tendant à l'annulation des accords et à la compensation avec la subvention de fonctionnement due et avec celle, majorée, versée au titre des activités sociales et culturelles ne peuvent prospérer » ;
ALORS QUE le juge est tenu de ne pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, si le comité d'établissement ne demandait pas expressément au juge d'annuler les dispositions des accords d'entreprise des 11 janvier 2006 et 1er décembre 2009 indiquant que « les parties signataires sont d'accord pour considérer que les CE bénéficient déjà de la part de la société des sommes et moyens matériels nécessaires à leurs fonctionnements, quelle que soit leur nature et origine, ceux-ci dépassant en effet largement le montant fixé par les dispositions légales et réglementaires », il demandait néanmoins le paiement de l'intégralité de la subvention de fonctionnement sur le seul fondement des dispositions de l'article L. 2325-43 du Code du travail, sans tenir compte de la participation effective qu'ont apporté les sociétés exposantes au fonctionnement du comité en vertu des dispositions conventionnelles susvisées et faisait valoir que le caractère plus favorable de ces dispositions n'était pas établi et qu'elles étaient illégales en ce qu'elles ne prévoyaient pas de budget de fonctionnement pour le comité d'établissement ; qu'il s'en déduit que le comité d'établissement demandait implicitement mais nécessairement à la Cour d'appel d'écarter l'application des disposition conventionnelles en cause, compte tenu de leur illégalité ; qu'en jugeant néanmoins que la demande du comité d'établissement tendait seulement à vérifier que la clause relative à la participation de l'employeur aux frais de son fonctionnement avait bien été respectée et en refusant en conséquence de faire droit à la demande subsidiaire reconventionnelle des sociétés exposantes tendant à obtenir l'annulation des accords collectifs susvisés, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions du comité d'établissement SCHNEIDER ELECTRIC de la région parisienne en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour comité d'établissement Schneider Electric
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR dit que les demandes en paiement de subventions de fonctionnement du comité d'entreprise étaient irrecevables pour la période antérieure au 30 octobre 2008.
AUX MOTIFS QUE les sociétés invoquent la prescription quinquennale accomplie pour la période qui précède de plus de cinq ans la saisine du juge du fond c'est-à-dire antérieure au 27 juillet 2011; considérant que le comité d'établissement objecte que le délai de prescription n'a pas commencé à courir, puisque précisément il ne connaît pas l'exactitude de ses droits, faute d'avoir pu calculer la subvention de fonctionnement au moyen d'une information fournie par les employeurs qui avait été demandée au moyen d'une demande de production de pièces en référé ; considérant qu'aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l'exercer ; considérant que, depuis l'origine, le comité sait que les sociétés s'estiment libérées de leurs obligations par une participation directe à leur frais, dans une proportion plus importante, selon l'accord de 2006, que ne l'exige la loi ; que le comité d'établissement connaît donc depuis qu'elle applique les accords de 2006 et 2009, l'absence de chiffrage et de justification de cette participation et donc les faits lui permettant de l'exercer ; qu'au demeurant, ses demandes tendent à obtenir paiement de la totalité de la subvention de fonctionnement due, soit 0,2% de la masse salariale, indépendamment de la participation effective qu'ont apporté les sociétés à son fonctionnement ;
considérant que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque les deux actions tendent vers un seul et même but ; qu'il s'ensuit que l'action en référé fondée sur l'article 145 du code de procédure civile, qui avait pour objet de réunir les éléments permettant de déterminer le montant de la contribution litigieuse restant due, a interrompu le délai de prescription de l'action au fond tendant directement au paiement de celle-ci ; que par conséquent, dès lors que la saisine du juge des référés remonte à l'assignation du 30 octobre 2013, seuls les faits antérieurs au 30 octobre 2008 sont prescrits.
ALORS QUE la prescription quinquennale ne court qu'à compter du jour ou le titulaire d'un droit a eu ou aurait dû avoir connaissance des faits lui permettant de l'exercer ; que lorsqu'une créance dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier et résultent de déclarations que le débiteur est tenu de faire, la connaissance des faits est fixée au jour où le créancier a reçu communication des éléments nécessaires à l'appréciation de ses droits ; que s'agissant du budget de fonctionnement alloué au comité d'entreprise, l'employeur a l'obligation de fournir le montant de la masse salariale brute servant de base de calcul à ladite subvention ; qu'en relevant que le comité d'établissement avait eu connaissance des faits lui permettant d'exercer son action à compter de l'application des accords collectifs de 2006 et 2009, par lesquels les sociétés employeurs s'estimaient libérées de toute justification de leur participation directe aux frais de fonctionnement du comité, de sorte que la prescription avait commencé à courir depuis l'application de ces accords, quand elle constatait que par ordonnance du 8 janvier 2014, le juge des référés avait ordonné aux sociétés employeurs de produire la masse salariale brute pour les années 2006 à 2012 et le montant des moyens déjà alloués au comité, ce dont il résultait que le comité d'établissement ne pouvait être considéré comme ayant eu connaissance des faits lui permettant d'exercer son action à compter des accords litigieux, et que la prescription n'avait pas couru, la cour d'appel a violé les articles L.2325-43 du code du travail et 2224 du code civil.