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29/01/2020 | FRANCE | N°18-20301

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 29 janvier 2020, 18-20301


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 janvier 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 83 F-D

Pourvoi n° P 18-20.301

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 29 JANVIER 2020

1°/ la société HDI Global SE, dont le siège est [...], agissant en q

ualité d'assureur de la société TÜV Rheinland LGA products GmbH,

2°/ la société TÜV Rheinland LGA Products GmbH, dont le siège est [...],

ont fo...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 janvier 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 83 F-D

Pourvoi n° P 18-20.301

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 29 JANVIER 2020

1°/ la société HDI Global SE, dont le siège est [...], agissant en qualité d'assureur de la société TÜV Rheinland LGA products GmbH,

2°/ la société TÜV Rheinland LGA Products GmbH, dont le siège est [...],

ont formé le pourvoi n° P 18-20.301 contre l'arrêt rendu le 22 juin 2017 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à M. X... E..., domicilié [...], pris en qualité de liquidateur à la faillite de la société Scheuten Solar Holding BV et de ses filiales,

2°/ à la société Kostal Industrie Elektrik GmbH, dont le siège est [...],

3°/ à la société Cerise technique, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

4°/ à la société SMABTP, dont le siège est [...] ,

5°/ à la société HDI Global SE, dont le siège est [...] [...], anciennement dénommée HDI Gerling industrie versicherunng, prise en qualité d'assureur de la société Kostal Industrie Elektrik GmbH,

6°/ à la société Alrack BV, dont le siège est [...],

7°/ à la société Allianz Nederland corporate NV, dont le siège est [...],

8°/ à la société AIG Europe SA, société de droit luxembourgeois, dont le siège est [...], venant aux droits de la société AIG Europe limited (Pays-Bas),

9°/ à la société AIG Europe SA, société de droit luxembourgeois, dont le siège est [...], venant aux droits de la société AIG Europe limited France (Courbevoie),

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Hascher, conseiller, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société HDI Global SE, de la société TÜV Rheinland LGA Products GmbH, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Cerise technique, de Me Le Prado, avocat de la société SMABTP, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société AIG Europe SA, et après débats en l'audience publique du 17 décembre 2019 où étaient présents Mme Batut, président, M. Hascher, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 22 juin 2017), que la société allemande TÜV Rheinland LGA Products, assurée par la société HDI Global, a certifié des boîtiers de connexion fabriqués par la société allemande Kostal Industrie Elektrik ou par la société néerlandaise Alrack, respectivement assurées par les sociétés HDI Global et Allianz Benelux, et destinés à être installés sur des panneaux photovoltaïques fabriqués par la société néerlandaise Scheuten Solar et ses filiales, assurées auprès de la société AIG Europe et aujourd'hui représentées par leur liquidateur, M. E... ; que, par actes du 2 octobre 2013, la société Cerise Techniques et son assureur, la SMABTP, ont assigné ces sociétés en réparation des désordres constatés chez ses clients sur les panneaux qu'elle avait commandés ;

Attendu que les sociétés HDI Global et TÜV Rheinland LGA Products font grief à l'arrêt de rejeter leur exception d'incompétence territoriale, alors, selon le moyen :

1°/ que le lieu du fait dommageable, qui fonde la compétence internationale des juridictions françaises en matière délictuelle, se situe, lorsqu'un tiers demande l'indemnisation d'un préjudice qui lui a été causé par un manquement contractuel, au lieu de l'exécution dommageable de l'obligation ; qu'en ayant constaté que la société Cerise Techniques invoquait « les préjudices subis et à subir du fait des manquements contractuels imputés à la société TÜV Rheinland », sans en déduire que le lieu du fait dommageable se situait en Allemagne, lieu d'exécution prétendument défaillante de l'obligation contractée par l'exposante (réalisation d'essais type sur des échantillons type de boîtiers de jonction, selon des normes industrielles visées par le fabricant dans sa commande), la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

2°/ que le dommage initial subi par les victimes directes, et non par les victimes médiates d'un dommage induit du dommage initial, fonde seul la compétence internationale des tribunaux français en matière délictuelle ; qu'en ayant jugé que la société Cerise Techniques était la victime directe du manquement reproché à la société TÜV Rheinland, quand elle n'en était que la victime induite, les victimes immédiates et directes de cette faute étant les seules sociétés Kostal et Alrack, la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

3°/ que les victimes directes d'une certification défectueuse sont les sociétés qui ont commandé la certification qui s'est avérée erronée ; qu'en ayant jugé que les sociétés Kostal et Alrack n'étaient pas les victimes directes de la certification prétendument défectueuse reprochée à la société TÜV Rheinland, au motif inopérant que les deux fabricantes n'évoquaient actuellement aucun préjudice et n'avaient entrepris aucune action à l'encontre de l'exposante, quand la société Cerise Techniques et la SMABTP recherchaient leur condamnation in solidum, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

4°/ que le lien de causalité requis pour fonder la compétence du juge du lieu du fait dommageable s'entend de chaque fait générateur et de chaque dommage pris séparément ; qu'en ayant jugé que le dommage invoqué par la société Cerise Techniques résultait des chantiers d'installation de panneaux photovoltaïques qu'elle avait réalisés en France et s'était donc concrétisé en France, quand le défaut d'identification du vice affectant les boîtiers litigieux n'était en lien causal qu'avec le dommage directement subi par les société Kostal et Alrack, la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

5°/ que l'interprétation stricte de l'article 5-3 du Règlement du 22 décembre 2000, qui est une conséquence de la recherche d'équilibre poursuivie par le texte entre l'objectif de prévisibilité, la nécessité de caractériser le lien le plus étroit possible entre le litige et la juridiction compétente et la protection du tiers victime, peut conduire à un morcellement des procédures ; qu'en ayant, à la suite du premier juge, globalisé les faits générateurs et les dommages pour retenir la compétence du juge français, dans l'objectif avoué de permettre aux victimes françaises d'obtenir réparation de leurs préjudices en France et d'éviter ainsi le morcellement des procédures, la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

6°/ que le lieu du fait dommageable ne s'entend pas du lieu du préjudice financier qui en est résulté ; qu'en ayant retenu la compétence internationale des juridictions françaises, au motif que les défaillances reprochées au certificateur TÜV Rheinland entraînaient d'importants frais de réparation ou de remplacement des installations réalisées pour les clients de la société Cerise Techniques, la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 5, point 3, du règlement (CE) n°44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, une personne domiciliée sur le territoire d'un État membre peut être attraite, dans un autre État membre, en matière délictuelle ou quasi délictuelle, devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire ; qu'ayant relevé que la responsabilité délictuelle de la société TÜV Rheinland LGA Products était recherchée pour avoir omis de déceler le risque d'incendie des boîtiers de connexion équipant les panneaux photovoltaïques vendus à la société Cerise Techniques et que le préjudice invoqué par cette dernière tenait aux conséquences des défaillances de ces boîtiers qui entraînaient d'importants frais de réparation ou de remplacement des installations réalisées pour ses clients en France, la cour d'appel en a exactement déduit, par motifs propres et adoptés, que le lieu de survenance du dommage initial, subi par la société Systèmes Solaires et ses assureurs en tant que victimes directes du fait de l'utilisation normale des panneaux, était localisé en France ; que le moyen, qui critique en sa troisième branche des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et attendu qu'en l'absence de doute raisonnable quant à l'interprétation de la disposition susvisée, il n'y a pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés TÜV Rheinland LGA Products et HDI Global aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer aux sociétés Cerise Techniques et SMABTP une somme de 3 000 euros et à la société AIG Europe une somme de même montant ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour les sociétés HDI Global SE et TÜV Rheinland LGA Products GmbH.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé l'ordonnance du juge de la mise en état entreprise, en ce qu'elle avait rejeté l'exception d'incompétence territoriale soulevée par la société Tüv Rheinland et par la société HDI Gerling ;

AUX MOTIFS QUE la question soumise à la cour est celle de la compétence territoriale du tribunal de grande instance de Périgueux au regard des règles de procédure européenne, pour connaître du litige à l'égard de la société allemande de certification des boîtiers de connexion fabriqués par les sociétés Kostal et Alrack, équipant les modules photovoltaïques fabriqués par la société Scheuten, fournisseur de la société Cerise Techniques qui a déploré les défaillances des boîtiers sur plus d'une centaine d'installations qu'elle a été contrainte de remplacer ou de réparer, compte tenu des risques d'incendie des matériels. En l'absence de lien contractuel entre la société Cerise Techniques et la société de certification Tüv Rheinland, il s'agit donc de déterminer ce qu'est le lieu du fait dommageable en matière délictuelle au sens de l'article 5-3 du règlement CEE du 22 décembre 2000 qui déroge à l'article 2 prévoyant que le tribunal compétent est celui du lieu du domicile du défendeur. En effet, selon l'article 5.3 du règlement, une personne domiciliée sur le territoire d'un état membre peut être attraite dans un autre état membre "en matière délictuelle ou quasi délictuelle, devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire". Par ailleurs, il existe aussi une exception concernant les assureurs puisque l'article 10 dispose : "L'assureur peut, en outre, être attrait devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s'est produit s'il s'agit d'assurance de responsabilité ou d'assurances portant sur des immeubles. Il en est de même si l'assurance porte à la fois sur des immeubles et des meubles couverts par une même police et atteints par le même sinistre". Pour la société Tüv Rheinland et son assureur, qui ne contestent pas l'application dans le présent litige de l'article 5.3 du règlement, le lieu de production du fait dommageable n'est pas la France mais l'Allemagne car le lieu de l'événement causal, à savoir l'émission des certificats, se situe en Allemagne et le lieu où le dommage direct a été subi par les victimes immédiates (les sociétés contractantes de la société Tüv Rheinland, soit la société Kostal et la société Alrack) est également l'Allemagne où a été exécutée l'obligation contractuelle dont la violation est alléguée. L'appelante soutient ainsi que les dommages immatériels et financiers dont se plaignent la société Cerise Techniques et la SMABTP ne sont pas directs, mais induits par les dommages subis par les sociétés Alrack et Kostal. La société Cerise Techniques et son assureur la SMABTP considèrent de leur côté que: - il doit être pris en compte le lieu de matérialisation du dommage, soit celui où le fait générateur déploie ses effets dommageables : en l'espèce, échauffement des boîtiers et les coûts de reprise des installations en découlant qui sont bien survenus en France ; - la victime directe est bien la société Cerise Techniques, seule à subir un préjudice, au contraire des sociétés Kostal et Alrack qui n'invoquent aucun préjudice et ont au contraire vendu leurs produits au prix convenu ; - il y a bien un lien de causalité entre le fait dommageable (risque d'échauffement des boîtiers du fait d'absence de révélation du vice dont ils étaient affectés) et le préjudice indemnisable (coût de réparation matérielle des installations, découlant de ce risque d'échauffement non décelé par la société Tüv Rheinland) ; - même si la SMABTP était qualifiée de victime par ricochet, elle serait fondée à saisir aux côtés de son assurée les mêmes juridictions que la victime directe (la société Cerise Techniques), et en particulier la juridiction du lieu de réalisation du dommage. Selon la jurisprudence constante de la cour de justice de l'union européenne, le lieu où le fait dommageable s'est produit s'entend du lieu de survenance du dommage et du lieu de l'événement causal ce qui laisse le choix au demandeur d'attraire le défendeur devant le tribunal de l'un ou l'autre de ces lieux. En l'espèce, la responsabilité délictuelle de la société de certification allemande est recherchée pour avoir omis de déceler le risque d'incendie des boîtiers de connexion équipant les modules vendus à la société Cerise Techniques qui invoque les préjudices subis et à subir du fait des manquements contractuels imputés à la société Tüv Rheinland. S'il n'est pas douteux que l'événement causal des dommages invoqués tient en partie aux opérations de certification réalisées en Allemagne, il ne peut être soutenu que seules les sociétés contractantes du certificateur seraient les victimes directes des manquements contractuels imputés à ce dernier alors qu'en l'état de la procédure, les sociétés Alrack et Kostal n'invoquent aucun préjudice et n'ont entrepris aucune action à l'encontre de la société Tüv Rheinland. En revanche, il est constant que, dans le cadre de l'action en responsabilité délictuelle engagée à l'encontre de l'appelante, le préjudice invoqué par la société Cerise Techniques tient aux conséquences des défaillances des boîtiers de connexion équipant les modules achetés à la société Scheuten et qui entraînent d'importants frais de réparation ou de remplacement des installations réalisés pour les clients de la société Cerise Techniques. Les dommages subis tiennent donc d'une part au défaut de fabrication reproché au fournisseur des boîtiers et d'autre part au défaut d'identification du vice les affectant par la société de certification. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le juge de la mise en état a considéré que le dommage invoqué par la société Cerise Techniques résultait des chantiers d'installation de panneaux photovoltaïques qu'elle avait réalisés en France et qu'elle était ainsi la victime directe et immédiate d'un dommage qui s'était concrétisé en France. La SMABTP peut aussi, par voie de conséquence, agir devant les juridictions françaises puisqu'elle intervient aux côtés de son assurée, la société Cerise Techniques. Enfin, pour les mêmes raisons et en vertu des dispositions de l'article 10 du règlement, l'action directe à l'encontre de l'assureur de la société Tüv Rheinland peut être exercée devant le tribunal de grande instance de Périgueux, lieu de survenance du fait dommageable tel que défini ci-dessus. L'ordonnance entreprise sera en conséquence confirmée ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE ce raisonnement avait pour effet de donner compétence, de façon systématique, à la juridiction dans le ressort de laquelle le contrat a été exécuté par le cocontractant dont la responsabilité est recherchée. S'il devait être admis, il conduirait inévitablement à un morcellement des procédures, éventuellement au travers de plusieurs Etats membres et notamment dans des litiges impliquant un processus de fabrication et de commercialisation réalisé dans ces différents Etats par plusieurs entreprises ressortissantes de chacun de ces Etats, comme en l'espèce. Il en résulterait une absence totale de cohésion et de cohérence dans l'appréhension de l'entier litige et un risque de parvenir à des décisions contraires dont l'exécution pourrait être rendue particulièrement difficile ; qu'en l'espèce, le dommage invoqué par la société Cerise Techniques résulte de chantiers d'installations de panneaux photovoltaïques qu'elle a réalisés en France, en particulier en Dordogne ; que ces panneaux se sont révélés défectueux et ont généré un dommage en France ; que sa responsabilité étant susceptible d'être mise en cause par ses clients français dont elle était l'unique interlocuteur contractuel, elle s'est engagée, aux côtes de son assureur, dans une démarche de remplacement des panneaux défectueux afin d'éviter tout risque d'incendie. Ainsi, il ne saurait être discuté qu'elle est la victime directe et immédiate d'un dommage qui s'est concrétisé en France et non pas en Allemagne ; qu'à ce titre, la société Cerises Techniques est fondée à agir devant les juridictions françaises à l'encontre de la société Tüv Rheinland et de son assureur ;

1° ALORS QUE le lieu du fait dommageable, qui fonde la compétence internationale des juridictions françaises en matière délictuelle, se situe, lorsqu'un tiers demande l'indemnisation d'un préjudice qui lui a été causé par un manquement contractuel, au lieu de l'exécution dommageable de l'obligation ; qu'en ayant constaté que la société Cerise Techniques invoquait « les préjudices subis et à subir du fait des manquements contractuels imputés à la société Tüv Rheinland », sans en déduire que le lieu du fait dommageable se situait en Allemagne, lieu d'exécution prétendument défaillante de l'obligation contractée par l'exposante (réalisation d'essais type sur des échantillons type de boîtiers de jonction, selon des normes industrielles visées par le fabricant dans sa commande), la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

2° ALORS QUE le dommage initial subi par les victimes directes, et non par les victimes médiates d'un dommage induit du dommage initial, fonde seul la compétence internationale des tribunaux français en matière délictuelle ; qu'en ayant jugé que la société Cerise Techniques était la victime directe du manquement reproché à la société Tüv Rheinland, quand elle n'en était que la victime induite, les victimes immédiates et directes de cette faute étant les seules sociétés Kostal et Alrack, la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

3° ALORS QUE les victimes directes d'une certification défectueuse sont les sociétés qui ont commandé la certification qui s'est avérée erronée ; qu'en ayant jugé que les sociétés Kostal et Alrack n'étaient pas les victimes directes de la certification prétendument défectueuse reprochée à la société Tüv Rheinland, au motif inopérant que les deux fabricantes n'évoquaient actuellement aucun préjudice et n'avaient entrepris aucune action à l'encontre de l'exposante, quand la société Cerise Techniques et la SMABTP recherchaient leur condamnation in solidum, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

4° ALORS QUE le lien de causalité requis pour fonder la compétence du juge du lieu du fait dommageable s'entend de chaque fait générateur et de chaque dommage pris séparément ; qu'en ayant jugé que le dommage invoqué par la société Cerise Techniques résultait des chantiers d'installation de panneaux photovoltaïques qu'elle avait réalisés en France et s'était donc concrétisé en France, quand le défaut d'identification du vice affectant les boîtiers litigieux n'était en lien causal qu'avec le dommage directement subi par les société Kostal et Alrack, la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

5° ALORS QUE l'interprétation stricte de l'article 5-3 du Règlement du 22 décembre 2000, qui est une conséquence de la recherche d'équilibre poursuivie par le texte entre l'objectif de prévisibilité, la nécessité de caractériser le lien le plus étroit possible entre le litige et la juridiction compétente et la protection du tiers victime, peut conduire à un morcellement des procédures ; qu'en ayant, à la suite du premier juge, globalisé les faits générateurs et les dommages pour retenir la compétence du juge français, dans l'objectif avoué de permettre aux victimes françaises d'obtenir réparation de leurs préjudices en France et d'éviter ainsi le morcellement des procédures, la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000 ;

6° ALORS QUE le lieu du fait dommageable ne s'entend pas du lieu du préjudice financier qui en est résulté ; qu'en ayant retenu la compétence internationale des juridictions françaises, au motif que les défaillances reprochées au certificateur Tüv Rheinland entraînaient d'importants frais de réparation ou de remplacement des installations réalisées pour les clients de la société Cerise Techniques, la cour d'appel a violé l'article 5-3 du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-20301
Date de la décision : 29/01/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 22 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 29 jan. 2020, pourvoi n°18-20301


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP L. Poulet-Odent

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.20301
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