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22/01/2020 | FRANCE | N°18-11491

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 janvier 2020, 18-11491


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 janvier 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 67 F-D

Pourvoi n° N 18-11.491

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme P..., veuve W....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 6 novembre 2018.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS>_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 22 JANVIER 2020

Mme N... P..., veuve...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 janvier 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 67 F-D

Pourvoi n° N 18-11.491

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme P..., veuve W....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 6 novembre 2018.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 22 JANVIER 2020

Mme N... P..., veuve W..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° N 18-11.491 contre l'arrêt rendu le 21 décembre 2017 par la cour d'appel d'Amiens (chambre économique), dans le litige l'opposant à la société [...] , société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société La Nièvre, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme P..., veuve W..., de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société [...] , ès qualités, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 26 novembre 2019 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 21 décembre 2017), la société civile immobilière La Nièvre (la société) a été mise en liquidation judiciaire le 6 novembre 2014, la société [...] étant désignée liquidateur.

2. Par une ordonnance du 12 mai 2016, le juge-commissaire a autorisé la vente de l'immeuble à usage d'habitation appartenant à la société au profit de M. et Mme I... au prix de 200 000 euros.

3. Le 15 juin 2016, le liquidateur et M. et Mme I... ont signé une promesse synallagmatique de vente.

4. Invoquant le fait qu'elle avait réglé au liquidateur, le 5 décembre 2016, la somme de 14 999,60 euros représentant, selon celui-ci, le passif de la société à acquitter pour parvenir à la clôture de la procédure, Mme P..., associée unique et gérante de la société, a fait appel de l'ordonnance.

Examen du moyen unique

Enoncé du moyen

5. Mme P... fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance du juge-commissaire alors « que seules les créances certaines et échues composent le passif exigible pouvant faire obstacle à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire et justifier la cession des biens du débiteur ; que, pour juger que le passif n'était pas éteint malgré le règlement du montant du passif déclaré et des frais de procédure par le débiteur et autoriser la vente de l'immeuble appartenant à la SCI La Nièvre, la cour d'appel a considéré que " le montant résultant de l'application de la clause pénale est susceptible de créer un passif à la charge de la liquidation judiciaire" ; qu'en statuant ainsi, alors que la créance issue de la clause pénale était éventuelle pour être affectée d'une condition suspensive qui ne s'était pas réalisée et, en toute occurrence, incertaine pour être susceptible de réduction judiciaire, et qu'il ne subsistait, par conséquent, plus aucun passif exigible à la charge de la liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé les articles L. 642-18 et L. 643-9 du code de commerce ».

Réponse de la Cour

6. Tandis que dans ses conclusions devant la cour d'appel, le liquidateur soutenait que M. et Mme I... estimaient être en droit, faute de vente à leur profit, de recouvrer, aux termes de la promesse de vente signée après l'ordonnance du juge-commissaire et avant que Mme P... ne paie les causes de la liquidation judiciaire, la somme de 20 000 euros au titre de la clause pénale stipulée dans la promesse, que cette somme était due par la liquidation judiciaire et, qu'en l'état des sommes versées entre ses mains, la vente était toujours justifiée, Mme P... n'a pas soutenu que la créance issue de la clause pénale était éventuelle, pour être affectée d'une condition suspensive qui ne s'était pas réalisée, et incertaine, pour être susceptible de réduction judiciaire, et qu'il ne subsistait plus aucun passif exigible à la charge de la liquidation judiciaire.

7. Le moyen nouveau, et mélangé de fait et de droit, est donc irrecevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme P... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme P..., veuve W... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme P..., veuve W...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance entreprise ayant autorisé la vente de l'immeuble à usage d'habitation dépendant de l'actif de la liquidation judiciaire de la SCI La Nièvre au profit de Monsieur et Madame I..., moyennant le prix de 200.000 euros net vendeur payable comptant entre les mains du liquidateur judiciaire ;

AUX MOTIFS QUE « par courrier du 3 juillet 2015, la SELARL [...] informait Madame N... P... veuve W... que dans le cadre des opérations de la liquidation judiciaire de la SCI La Nièvre, elle devait procéder à la vente de l'immeuble sis à [...], que le passif s'élevait à la somme de 7.969,60 euros, qu'à cette somme s'ajouteront les frais d'inventaire d'un montant de 110,40 euros ainsi que les frais de procédure non encore comptabilisés mais pouvant être estimés à hauteur de 5.000 euros ; qu'elle l'invitait à lui faire part de ses propositions amiables afin d'éviter la vente dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce courrier, et qu'à défaut la procédure de vente judiciaire serait entamée ;

Que le 7 octobre 2015, la SELARL [...] lui faisait savoir que n'ayant reçu aucune proposition, elle se voyait contrainte d'engager une procédure de vente judiciaire ;

Que le 4 janvier 2016, les époux I... émettaient une offre d'achat du bien immobilier à hauteur de 200.000 euros net vendeur et paiement comptant qui était retransmise par le cabinet Albert 1er, agence immobilière chargée par la SELARL [...] de proposer ce bien à la vente ;

Que sur requête de la SELARL [...] déposée le 5 mars 2016, le juge commissaire rendait l'ordonnance dont appel ;

Que le 15 juin 2006 [lire 2016] était régularisé entre la SELARL [...]
[...] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI La Nièvre et les époux I... un compromis de vente au prix de 200.000 euros, outre la commission à verser au cabinet Albert 1er à leur charge d'un montant de 12.000 euros ; qu'il était stipulé à cet acte une clause pénale d'un montant de 20.000 euros mise à la charge de la partie qui refuserait de régulariser par acte authentique la vente ;

Que la SELARL [...], par courrier du 23 novembre 2016 adressé à Mme N... P... veuve W..., lui indiquait que pour parvenir à la clôture de la procédure, il conviendrait de verser la somme de 14.999,60 euros décomposée entre le passif d'un montant de 7.999,60 euros et la provision pour frais de procédure d'un montant de 7.000 euros ;

Que cette somme était payée le 5 décembre 2016 par un chèque adressé à la SELARL [...] par courrier recommandé avec accusé de réception ;

Qu'au vu de la chronologie ci-dessus relatée, se pose la question de l'opportunité de la vente du fait du règlement du montant du passif et des frais de procédure ;

Qu'il est procédé à la clôture de la liquidation judiciaire selon les termes du deuxième alinéa de l'article L.643-9 du code de commerce "lorsqu'il n'existe plus de passif exigible ou que le liquidateur dispose de sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers" ;

Qu'il résulte de ce texte que la procédure de liquidation judiciaire ne peut être clôturée que s'il n'existe plus de passif, qu'il s'agisse d'un passif privilégié ou chirographaire ou d'un passif antérieur ou postérieur à l'ouverture de la procédure de sorte que le montant résultant de l'application de la clause pénale constitue un passif de nature à faire obstacle à la clôture des opérations de liquidation judiciaire ;

Que si Mme N... P... veuve W... a pu être induite en erreur par le courrier du liquidateur du 23 novembre 2016 qui ne faisait pas mention de l'existence de la clause pénale stipulée à l'acte du 15 juin 2016 et croire de bonne foi que le versement de la somme de 14.999,60 euros mettra fin à la procédure de liquidation judiciaire de la SCI La Nièvre par extinction de son passif, le montant résultant de l'application de la clause pénale est susceptible de créer un passif à la charge de la liquidation judiciaire faisant obstacle à la clôture des opérations de liquidation judiciaire et justifiant qu'il soit procédé conformément à la destination de la procédure de liquidation judiciaire prévue à l'article L.640-1 du code de commerce à la cession des biens de la SCI La Nièvre ;

Qu'aux termes de l'article L.642-18 du code de commerce, au lieu de la vente par adjudication judiciaire, "le juge commissaire peut, si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans de meilleures conditions, ordonner la vente par adjudication amiable sur la mise à prix qu'il fixe ou autoriser la vente de gré à gré aux prix et conditions qu'il détermine" ;

Que Mme L... expert en estimations immobilières a été chargé dans le cadre de la procédure en liquidation judiciaire de Mme N... P... veuve W... d'estimer la valeur vénale du bien immobilier propriété de la SCI La Nièvre sis à [...] ; qu'au terme de son rapport en date du 14 août 2012, à partir de la moyenne des résultats obtenus par la méthode dite par comparaison des références issues du marché immobilier dans un rayon de 10 km, de la méthode dite par capitalisation en fonction des revenus locatifs pouvant être tirés de ce bien, et de la méthode dite par sol et construction en fonction de la valeur du terrain et du coût de la construction, elle évalue ce bien à hauteur de 350.000 euros ;

Que cet expert relevait que la maison présentait alors un très bon état général et qu'elle offrait de grands volumes et un beau terrain tout en relevant son éloignement des grandes agglomérations et sa situation dans un petit village isolé de 99 habitants considérés comme des handicaps ;

Que le cabinet Albert 1er relate dans un écrit en date du 29 novembre 2016 sous forme d'attestation l'existence d'une fuite sur le toit rendant le cellier et la lingerie insalubre, que le toit des dépendances n'est plus étanche provoquant ainsi un gonflement des parpaings du mur qui présente un danger d'effondrement ; qu'il déclare avoir reçu suite à la campagne de publicité mise en oeuvre par ses soins, 21 appels téléphoniques et effectué six visites ; qu'il relève le décalage entre d'une part la taille de la maison et sa configuration adaptée à une famille nombreuse et d'autre part l'absence de commodités offerte par le village de [...] et l'effet dissuasif lié aux frais d'entretien d'un parc de 6.700 m2 ; que le cabinet Albert mentionne l'existence d'une seule autre offre pour un montant de 150.000 euros ;

Qu'il ressort en conséquence de ce document que la maison ne présente plus le bon état général qui prévalait lors des opérations effectuées par Mme L..., la liquidation judiciaire de la SCI La Nièvre comme celle de Mme N... P... veuve W... ne disposant pas des moyens de maintenir cette maison d'une superficie de 428,45 m2 en bon état ; qu'il est relevé qu'une partie seulement de la maison est habitée et chauffée ; que dans ce contexte, cette maison ne peut voir que son état rapidement se dégrader ;

Qu'en l'absence d'autres offres pour un montant supérieur, il ne ressort d'aucun élément que la vente du bien immobilier qu'il s'agisse d'une vente de gré à gré ou par adjudication puisse se faire dans de meilleures conditions que celles fixées par l'ordonnance du juge commissaire moyennant un prix de 200.000 euros, laquelle sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions » ;

ALORS QUE seules les créances certaines et échues composent le passif exigible pouvant faire obstacle à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire et justifier la cession des biens du débiteur ; qu'en l'espèce, pour juger que le passif n'était pas éteint malgré le règlement du montant du passif déclaré et des frais de procédure par le débiteur et autoriser la vente de l'immeuble appartenant à la SCI La Nièvre, la cour d'appel a considéré que « le montant résultant de l'application de la clause pénale est susceptible de créer un passif à la charge de la liquidation judiciaire » ; qu'en statuant ainsi, alors que la créance issue de la clause pénale était éventuelle pour être affectée d'une condition suspensive qui ne s'était pas réalisée et, en toute occurrence, incertaine pour être susceptible de réduction judiciaire, et qu'il ne subsistait, par conséquent, plus aucun passif exigible à la charge de la liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé les articles L. 642-18 et L. 643-9 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-11491
Date de la décision : 22/01/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 21 décembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 jan. 2020, pourvoi n°18-11491


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent , SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.11491
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