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21/01/2020 | FRANCE | N°18-86961

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 janvier 2020, 18-86961


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° V 18-86.961 F-D

N° 2942

EB2
21 JANVIER 2020

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 JANVIER 2020

La société Veolia Propreté Ile-de-France, La société Généris ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en dat

e du 9 novembre 2018, qui, pour infractions à la réglementation sur l'hygiène et la sécurité des travailleurs et contravention de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° V 18-86.961 F-D

N° 2942

EB2
21 JANVIER 2020

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 JANVIER 2020

La société Veolia Propreté Ile-de-France, La société Généris ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 9 novembre 2018, qui, pour infractions à la réglementation sur l'hygiène et la sécurité des travailleurs et contravention de blessures involontaires, les a condamnées, chacune à deux amendes de 3 000 et 1 500 euros.

Les pourvois on été joints en raison de la connexité.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Barbier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de La société Veolia Propreté Ile-de-France, La société Généris, et les conclusions de Mme Caby, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 10 décembre 2019 où étaient présents M. Soulard, président, M. Barbier, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme, du rapport de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi en date du 2 février 2015, base des poursuites, et des pièces de procédure, que M. L... W... O... , agent de nettoiement salarié de la société Généris, filiale de la société Veolia Propreté Ile de France, s'est trouvé coincé par la porte refermant la remorque d'un camion à l'issue du déchargement de bouteilles en plastique, alors que la victime avait entrepris de nettoyer des déchets à l'arrière dudit camion, ce qui lui a occasionné des blessures et une incapacité totale de travail de 30 jours ;

Attendu que les deux sociétés ayant été poursuivies du chef de contravention de blessures involontaires et d'infractions à la réglementation sur l'hygiène et la sécurité des travailleurs, le tribunal correctionnel a déclaré les faits prescrits ; que le procureur de la République a interjeté appel de cette décision ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, en ce qu'il concerne la société Généris, pris de la violation des articles 121-1 et 121-2 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

“en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les sociétés Veolia Propreté Ile-de-France et Generis coupables des faits visés à la prévention et prononcé à leur encontre des peines d'amende ;

“alors que les personnes morales, à l'exception de l'Etat, sont responsables pénalement des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ; qu'il résulte de ce texte que le juge ne peut déclarer une personne morale coupable d'une infraction sans rechercher si les manquements reprochés sont imputables à l'un de ses organes ou représentants et s'ils ont été commis pour son compte ; qu'en déclarant les sociétés prévenues coupables des faits de la prévention, sans rechercher si les faits reprochés avaient été commis, pour le compte de chacune des personnes morales poursuivies, par l'un de ses organes ou représentants, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés”.

Attendu que pour imputer à la société Généris la responsabilité pénale des faits qui lui sont reprochés, l'arrêt précise que M. P... K..., responsable du site, avait délégation de pouvoirs ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, par des motifs dont il se déduit qu'il incombait à M. K... de veiller personnellement à la stricte et constante application des dispositions légales et réglementaires en matière d'hygiène et de sécurité, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 4321-2, R. 4321-1, R. 4323-7 et L. 4741-1 du code du travail, R. 625-2 et R. 625-5 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;

“en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Generis coupable de mise à disposition de travailleurs d'un équipement de travail ne permettant pas de préserver leur sécurité et de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à trois mois et prononcé des peines d'amende correctionnelle et contraventionnelle ;

“1°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que la prévenue faisait valoir que M. W..., en sa qualité d'agent de nettoyage, devait débarrasser les déchets tombés des camions de livraison de déchet ce qui l'autorisait à intervenir partout sous réserve de respecter les consignes de sécurité ; qu'en reprochant à la prévenue de ne pas avoir matérialisé de voies de circulation pour piétons et de ne pas avoir évalué correctement les risques encourus par les piétons en ne prenant pas de dispositions pour que les personnes seules autorisées puissent accéder aux zones de danger, sans répondre à ces chefs péremptoires de conclusions, la cour d'appel n'a pas motivé sa décision ;

“2°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que la prévenue faisait valoir qu'elle avait édicté des consignes de sécurité aux termes desquelles il était clairement indiqué que « je ne dois jamais évoluer à pied dans une zone de circulation d'un engin/véhicule sans mission précise » et que « dans le cas où j'ai besoin d'entrer dans cette zone, je signale ma présence au(x) conducteur(s), j'attends qu'ils m'aient donné leur accord et je dois rester en contact visuel permanent avec eux » ; qu'elle faisait valoir que M. W... avait participé à plusieurs dialogues de sécurité afin d'évaluer son attitude et bénéficié plusieurs fois par an d'une évaluation de ses conditions de travail ; qu'en reprochant à la prévenue de ne pas avoir prévenu suffisamment le risque posé par les manoeuvres des camions remorques, sans répondre à ces chefs péremptoires de conclusions, la cour d'appel n'a pas motivé sa décision”.

Attendu que pour retenir la société Généris dans les liens de la prévention, l'arrêt énonce notamment que, d'une part, si la victime devait pouvoir circuler dans la cour qu'elle devait nettoyer, l'accès à ces zones près des camions devait être interdit lors des déchargements jusqu'à leur départ de ces zones à risques, d'autre part, la société n'a pas évalué correctement les risques encourus par les piétons en ne prenant pas de dispositions pour que les personnes seules autorisées puissent accéder aux zones de danger et qu'elle aurait pu mettre en place, par exemple, un miroir sur le bâtiment permettant aux conducteurs de s'assurer de l'absence de personnel lors de la fermeture de la porte ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel, qui a caractérisé à la charge de la société poursuivie, des manquements à des obligations de prudence ou de sécurité imposées par la loi ou le règlement, en lien causal avec le dommage subi par la victime, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Mais sur le premier moyen de cassation, en ce qu'il concerne la société Veolia, pris de la violation des articles 121-1 et 121-2 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

Vu les articles 121-2 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que, d'une part, les personnes morales, à l'exception de l'Etat, sont responsables pénalement des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ;

Attendu que, d'autre part, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, pour déclarer la prévenue coupable de contravention de blessures involontaires et de manquements à des obligations de sécurité ou de prudence, l'arrêt énonce notamment que la société Veolia Propreté Ile de France a mis à la disposition du conducteur du camion une remorque présentant un poste de commande situé en façade avant depuis lequel l'opérateur n'avait pas de visibilité sur la zone de mouvement de la porte, et qu'elle a ainsi causé involontairement des blessures à la victime ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans rechercher si les manquements relevés résultaient de l'abstention de l'un de ses organes ou représentants et s'ils avaient été commis pour le compte de cette société, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 121-2 du code pénal ;

D'où il suit que la cassation est encourue.

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen, proposé dans le seul intérêt de la société Veolia Propreté Ile de France :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 9 novembre 2018, mais en ses seules dispositions ayant déclaré la société Veolia Propreté Ile de France coupable et ayant prononcé une peine, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un janvier deux mille vingt.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 18-86961
Date de la décision : 21/01/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 09 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 jan. 2020, pourvoi n°18-86961


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.86961
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