LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Montpellier, 16 mars 2016 et 30 août 2018), que M. F... J..., de nationalité marocaine, marié à Mme B..., de nationalité marocaine et française, a saisi en juillet 2013 le juge français d'une requête en divorce ; que le juge aux affaires familiales conciliateur a dit la loi française applicable aux mesures provisoires ; que leur divorce a été prononcé en application de la loi française ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme B... fait grief à l'arrêt du 16 mars 2016 de dire la loi française applicable aux mesures provisoires, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 9 de la convention franco-marocaine relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire en date du 10 août 1981, la dissolution du mariage est prononcée selon la loi de celui des deux Etats dont les époux ont tous deux la nationalité à la date de la présentation de la demande ou, s'ils ne sont pas de même nationalité, de l'Etat où les époux avaient leur dernier domicile commun ; que ce texte établit une hiérarchie des critères de détermination de la règle de conflit de la loi ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que les époux avaient tous deux la nationalité marocaine le 5 juillet 2013, jour du dépôt de la requête en divorce ; que seule la loi marocaine était dès lors applicable en application de l'alinéa premier de l'article 9 de la convention susvisée ; qu'en se fondant sur la nationalité française de l'épouse, naturalisée en 2012, pour écarter le critère de rattachement tiré de la nationalité marocaine commune des époux à la date de la requête en divorce et retenir l'application de la loi française, la cour d'appel a violé l'article 9 de la Convention entre la République française et le Royaume du Maroc relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire en date du 10 août 1981 ;
2°/ qu'en tout état de cause, dans le cadre d'un conflit de nationalité, il n'y a pas lieu de faire prévaloir, par principe, la nationalité française ; qu'en l'espèce, la nationalité commune des époux est la nationalité marocaine ; qu'à la date de la requête en divorce qu'il a déposée devant le juge français, M. F... J... résidait au Maroc, ce, depuis septembre 2012 ; que le 2 janvier 2013, il y avait même déplacé les enfants ; que Mme I... Q... B... , qui seule avait été naturalisée française, se prévalait de sa nationalité marocaine et de l'application de la loi marocaine ; qu'en faisant primer la nationalité française de l'épouse sur la nationalité marocaine commune des époux, la cour d'appel a violé l'article 9 de la Convention entre la République française et le Royaume du Maroc relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire en date du 10 août 1981, ensemble l'article 3 du code civil ;
3°/ que les mesures provisoires applicables pendant toute la durée de la procédure de divorce ne constituent pas des règles de procédure, soumises à la loi du for, mais des règles de fond, soumises à la loi du divorce ; qu'en appliquant par principe les règles de la procédure française aux mesures provisoires qu'elle entendait prescrire pendant l'instance en divorce des époux F... Q..., la cour d'appel a violé l'article 3 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'à la date de la présentation de la demande, Mme B... possédait la nationalité française, tandis que M. F... J... avait la nationalité marocaine, la cour d'appel s'est justement référée à l'alinéa 2 de l'article 9 de la Convention franco-marocaine relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire du 10 août 1981 pour retenir que la dissolution du mariage était soumise à la loi de l'Etat où les époux avaient leur dernier domicile commun, soit la loi française ; que le moyen, non fondé en ses deux premières branches, est inopérant en sa troisième branche ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que Mme B... fait grief à l'arrêt du 30 août 2018 de prononcer le divorce aux torts partagés en application de la loi française, alors, selon le moyen :
1°/ que le jugement qui se borne dans son dispositif à ordonner une mesure provisoire n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée ; qu'une décision, rendue sur appel d'une ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales, en ce qu'elle retient l'application de la loi française aux mesures provisoires nécessaires pour assurer l'existence des époux et des enfants jusqu'à la date à laquelle le jugement de divorce prendra force de chose jugée, n'a pas l'autorité de la chose jugée au principal ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 16 mars 2016, rendu sur appel de l'ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales, en ce qu'il avait dit que la loi française était applicable aux mesures provisoires et en ce qu'il avait fixé, en application de cette loi, les mesures provisoires nécessaires durant la procédure de divorce, n'avait pas autorité de la chose jugée au principal ; qu'en jugeant que la compétence matérielle de la loi française relativement au divorce des époux F... Q... avait été définitivement tranchée par l'arrêt du 16 mars 2016 lorsqu'il avait statué sur les mesures provisoires, préalables à l'instance en divorce, et que l'application de la loi française ainsi décidée s'imposait également pour régler les effets personnels de la dissolution du mariage, la cour d'appel a violé l'article 482 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en tout état de cause, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; que si le jugement, qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée, c'est seulement relativement à la contestation qu'il tranche ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 16 mars 2016, rendu sur appel de l'ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales, a « dit que la loi française est applicable aux mesures provisoires », de sorte que l'autorité de la chose jugée ne pouvait être attachée qu'à la contestation tranchée, à savoir la loi applicable aux seules mesures provisoires ; qu'en jugeant que la compétence matérielle de la loi française relativement au divorce des époux F... Q... avait été définitivement tranchée par l'arrêt du 16 mars 2016 lorsqu'il avait statué sur les mesures provisoires, préalables à l'instance en divorce, et que l'application de la loi française ainsi décidée s'imposait également pour régler les effets personnels de la dissolution du mariage, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a statué en se référant à l'article 9 la Convention franco-marocaine du 10 août 1981, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que Mme B... fait grief au même arrêt de la condamner à verser à M. F... J... une prestation compensatoire de 110 000 euros et de rejeter sa demande de condamnation de ce dernier à lui verser une somme de 200 000 euros à titre de prestation compensatoire, alors, selon le moyen, que pour apprécier la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux et fixer le montant de la prestation compensatoire, le juge doit tenir compte du patrimoine propre dont dispose chaque époux au moment du prononcé du divorce, tant en capital qu'en revenu ; qu'il doit ainsi prendre en considération les droits certains de chaque époux dans la succession d'un ayant-cause décédé avant que le divorce ne devienne définitif ; qu'en l'espèce, les droits de M. F... J..., résultant de la succession de son père décédé au jour du prononcé du divorce, étant d'ores et déjà entrés dans son patrimoine propre au jour où la cour d'appel statuait, celle-ci devait en tenir compte, peu important l'affectation que M. F... J... avait entendu leur donner ; qu'en s'abstenant, pour décider qu'il existait au détriment du mari une disparité dans les conditions de vie respectives des époux, de tenir compte du patrimoine échu au mari au titre de la succession de son père, aux motifs inopérants que celui-ci justifiait n'avoir pour le moment perçu aucune somme puisque les fonds issus de la vente de l'immeuble successoral avaient été après déduction des frais et taxes, affectés à l'achat d'un logement pour sa mère, le solde ayant été placé sur un compte bancaire ouvert au nom de cette dernière, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que M. F... J... justifiait n'avoir perçu aucune somme dans la succession de son père dès lors que les fonds issus de la vente de l'immeuble successoral avaient été affectés à l'achat d'un logement pour sa mère, le solde ayant été placé sur un compte bancaire ouvert au nom de cette dernière, la cour d'appel a exactement décidé de ne pas tenir compte des droits successoraux de M. F... J... dans l'appréciation de la disparité des conditions de vie des époux ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme B... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. F... J... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour Mme B....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué du 16 mars 2016 d'avoir dit que la loi française était applicable aux mesures provisoires ;
aux motifs propres que « c'est par une exacte interprétation de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 10 août 1981, que le premier juge a fait application de la loi française, après avoir constaté que Mme Q... B... possédait la nationalité Française et que le dernier domicile commun était en France ; que de plus, les mesures provisoires, qui peuvent être prises lors de la conciliation, ne portent pas sur la dissolution du mariage et ne concernent que la procédure de divorce ; que les règles de la procédure française sont applicables à l'instance suivie en France ; qu'il en est ainsi notamment pour la pension alimentaire susceptible d'être accordée au titre du devoir de secours sur le fondement de l'article 255 du code civil, en tant que mesure provisoire » ;
et aux motifs adoptés qu'« en application de l'article 9 de la convention franco-marocaine en date du 27 mai 1983 relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire : " La dissolution du mariage est prononcée selon la loi de celui des deux Etats dont les époux ont tous deux la nationalité à la date de la présentation de la demande. Si à la date de la présentation de la demande, l'un des époux a la nationalité de l'un des deux Etats et le second celle de l'autre, la dissolution du mariage est prononcée selon la loi de l'Etat sur le territoire duquel les époux ont leur domicile commun ou avaient leur dernier domicile commun. " ; qu'en l'espèce, M. F... J... est de nationalité marocaine et Mme Q... B... , outre la nationalité marocaine, est de nationalité française ; que le dernier domicile commun des époux est situé en France, il convient en conséquence de retenir l'application du droit français » ;
alors 1°/ qu' aux termes de l'article 9 de la convention franco-marocaine relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire en date du 10 août 1981, la dissolution du mariage est prononcée selon la loi de celui des deux Etats dont les époux ont tous deux la nationalité à la date de la présentation de la demande ou, s'ils ne sont pas de même nationalité, de l'Etat où les époux avaient leur dernier domicile commun ; que ce texte établit une hiérarchie des critères de détermination de la règle de conflit de la loi ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que les époux avaient tous deux la nationalité marocaine le 5 juillet 2013, jour du dépôt de la requête en divorce ; que seule la loi marocaine était dès lors applicable en application de l'alinéa premier de l'article 9 de la convention susvisée ; qu'en se fondant sur la nationalité française de l'épouse, naturalisée en 2012, pour écarter le critère de rattachement tiré de la nationalité marocaine commune des époux à la date de la requête en divorce et retenir l'application de la loi française, la cour d'appel a violé l'article 9 de la Convention entre la République Française et le Royaume du Maroc relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire en date du 10 août 1981 ;
alors 2°/ qu' en tout état de cause, dans le cadre d'un conflit de nationalité, il n'y a pas lieu de faire prévaloir, par principe, la nationalité française ; qu'en l'espèce, la nationalité commune des époux est la nationalité marocaine ; qu'à la date de la requête en divorce qu'il a déposée devant le juge français, M. F... J... résidait au Maroc, ce, depuis septembre 2012 ; que le 2 janvier 2013, il y avait même déplacé les enfants ; que Mme I... Q... B... , qui seule avait été naturalisée française, se prévalait de sa nationalité marocaine et de l'application de la loi marocaine ; qu'en faisant primer la nationalité française de l'épouse sur la nationalité marocaine commune des époux, la cour d'appel a violé l'article 9 de la Convention entre la République Française et le Royaume du Maroc relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire en date du 10 août 1981, ensemble l'article 3 du code civil ;
alors 3°/ que les mesures provisoires applicables pendant toute la durée de la procédure de divorce ne constituent pas des règles de procédure, soumises à la loi du for, mais des règles de fond, soumises à la loi du divorce ; qu'en appliquant par principe les règles de la procédure française aux mesures provisoires qu'elle entendait prescrire pendant l'instance en divorce des époux F... Q..., la cour d'appel a violé l'article du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué du 30 août 2018 d'avoir confirmé le jugement rendu par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Béziers le 6 juillet 2017 en ce qu'il a retenu l'application de la loi française et, en conséquence, prononcé le divorce aux torts partagés de Mme Q... B... I... et de M. W... F... J... , condamné Mme Q... B... I... à verser à M. W... F... J... une prestation compensatoire de 110.000 €, débouté les parties de leur demande de dommages intérêts et maintenu la résidence de l'enfant mineur S... au domicile de son père ;
aux motifs propres que « la cour rappelle qu'en application de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche ; qu'ainsi l'autorité de la chose jugée fait obstacle à ce qu'une seconde juridiction connaisse d'une contestation opposant les mêmes parties et présentant une identité de cause et d'objet avec celle sur laquelle il a été précédemment statué ; qu'au cas d'espèce, force est de constater que la compétence matérielle de la loi française relativement au divorce des époux F... Q... a été définitivement tranchée par l'arrêt rendu par la cour d'appel de Montpellier le 16 mars 2016 lorsqu'elle a statué sur les mesures provisoires, préalables à la présente instance en divorce ; qu'il est par ailleurs acquis, au regard de l'article 9 de la convention franco-marocaine du 10 août 1981, que la dissolution du mariage est prononcée selon la loi de l'état applicable au jour de la présentation de la demande, lequel s'entend de la date du dépôt de la requête en divorce et non du jour de l'assignation en divorce de sorte que la loi applicable aux mesures provisoires est nécessairement celle qui s'appliquera au prononcé du divorce et à ses conséquences dans les rapports personnels entre époux ; qu'il en découle que l'application de la loi française, décidée par la cour d'appel dans l'arrêt précité du 16 mars 2016, s'impose également pour régler les effets personnels de la dissolution du mariage ; qu'aussi, c'est par des motifs suffisants et pertinents que la cour adopte que le premier juge a, sans violer les dispositions invoquées des articles 455 et 458 du code de de procédure civile, écarté l'exception d'incompétence de nouveau soulevée par Mme Q... » ;
et aux motifs adoptés qu'« par ordonnance de non-conciliation en date du 3 février 2015, confirmée sur ce point par arrêt de la cour d'appel de Montpellier en date du 16 mars 2016, le juge aux affaires familiales a retenu la compétence territoriale du juge français ainsi que l'application du droit français en application des articles 11 et 9 de la convention franco-marocaine du 27 mai 1983 ; qu'il convient en conséquence de constater que ces points ont déjà été définitivement tranchés, et de retenir la compétence territoriale du juge français et d'appliquer la loi française » ;
alors 1°/ que le jugement qui se borne dans son dispositif à ordonner une mesure provisoire n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée ; qu'une décision, rendue sur appel d'une ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales, en ce qu'elle retient l'application de la loi française aux mesures provisoires nécessaires pour assurer l'existence des époux et des enfants jusqu'à la date à laquelle le jugement de divorce prendra force de chose jugée, n'a pas l'autorité de la chose jugée au principal ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 16 mars 2016, rendu sur appel de l'ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales, en ce qu'il avait dit que la loi française était applicable aux mesures provisoires et en ce qu'il avait fixé, en application de cette loi, les mesures provisoires nécessaires durant la procédure de divorce, n'avait pas autorité de la chose jugée au principal ; qu'en jugeant que la compétence matérielle de la loi française relativement au divorce des époux F... Q... avait été définitivement tranchée par l'arrêt du 16 mars 2016 lorsqu'il avait statué sur les mesures provisoires, préalables à l'instance en divorce, et que l'application de la loi française ainsi décidée s'imposait également pour régler les effets personnels de la dissolution du mariage, la cour d'appel a violé l'article 482 du code de procédure civile ;
alors 2°/ qu'en tout état de cause, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; que si le jugement, qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée, c'est seulement relativement à la contestation qu'il tranche ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 16 mars 2016, rendu sur appel de l'ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales, a « dit que la loi française est applicable aux mesures provisoires », de sorte que l'autorité de la chose jugée ne pouvait être attachée qu'à la contestation tranchée, à savoir la loi applicable aux seules mesures provisoires ; qu'en jugeant que la compétence matérielle de la loi française relativement au divorce des époux F... Q... avait été définitivement tranchée par l'arrêt du 16 mars 2016 lorsqu'il avait statué sur les mesures provisoires, préalables à l'instance en divorce, et que l'application de la loi française ainsi décidée s'imposait également pour régler les effets personnels de la dissolution du mariage, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué du 30 août 2018 d'avoir confirmé le jugement rendu par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Béziers le 6 juillet 2017 en ce qu'il a condamné Mme Q... B... I... à verser à M. W... F... J... une prestation compensatoire de 110.000 € et rejeté sa demande de condamnation de ce dernier à lui verser une somme de 200.000 € à titre de prestation compensatoire ;
aux motifs que « sur les revenus, M. F..., qui exerce des fonctions diplomatiques auprès du Royaume du Maroc, est depuis le mois de septembre 2017 affecté au Consulat du Maroc à Tarragone et cette situation a vocation à durer pendant une durée de quatre ans, renouvelable une fois ; qu'ainsi, il est acquis qu'à moyen terme ses revenus professionnels, (non imposables en France) seront de l'ordre de 4.700 € par mois auxquels s'ajoutent une indemnité journalière, outre divers avantages en nature consistant en une prise en charge des frais de carburants mais également de certains frais pour les enfants ; que ces avantages ne sont pas chiffrés, mais il ressort de diverses attestations versées au dossier, dont celles de M. Amarani Driss et de M. W... Q..., qu'il aurait, lors d'une réunion de famille déclaré percevoir 7.000 € par mois environ ; qu'à la lumière de ces observations, les charges de M. F... se trouvent considérablement réduites ; qu'en revanche, il convient de tenir compte de l'aléa attaché à la nature de ses fonctions, qui peuvent le rappeler à tout moment au Maroc où ses conditions de revenus sont nettement moins favorables (de l'ordre de 1.000 € par mois) ; que compte tenu de ces éléments, il convient de retenir des revenus mensuels disponibles à hauteur de 4.000 € par mois ; que de son côté, Mme Q... déclare avoir perçu au cours de l'année 2017, un revenu mensuel moyen de 6.472 € et affirme qu'ils diminueront en 2018 en produisant un compte de résultat prévisionnel faisant état d'un chiffre d'affaires de 194.800 € pour des charges s'élevant à 133.282 € soit un excédent de 61.818 € (représentant des gains mensuels de 5.151 €) ; que force est cependant de constater qu'elle ne verse aucun document officiel pour en justifier en s'abstenant notamment de produire ses derniers avis d'impositions sur les revenus ; que pour autant le dernier avis d'imposition produit par la partie adverse portant sur les revenus de l'année 2013 fait état d'un revenu annuel de 62.972 € qui est bien en cohérence avec ses déclarations, sur laquelle la cour s'appuiera en conséquence ; que compte tenu de la partie des revenus consacrés à l'entretien et l'éducation des enfants, à hauteur de 1.600 € par mois, ses revenus mensuels disponibles sont de 4.800 €, avec lesquels elle doit répondre des charges courantes ; qu'il ne sera pas tenu compte à ce stade des charges financières découlant des remboursements des divers prêts contractés par le couple pour l'acquisition des biens immobiliers indivis, dans la mesure où ces charges n'ont pas vocation à perdurer au-delà de la liquidation du régime matrimonial ; que compte tenu de leur âge respectif (52 et 53 ans), il est peu probable que leur situation de revenus évolue de manière significative à moyen terme ; que M. F... pourra prétendre à une retraite de 680 € par mois, Mme Q... percevra, selon l'âge auquel elle liquidera ses droits à une pension comprise entre 1.363 et 2.082 € par mois ; que sur le patrimoine, les époux se sont mariés au Maroc, dont le régime légal est la séparation de biens en octobre 2014 ; qu'il ressort des éléments figurant aux débats qu'ils ont acquis ensemble pendant le mariage divers biens immobiliers, à savoir, le 6 mai 2009 une villa située à Béziers, [...] , ancien domicile conjugal, occupé, depuis la séparation du couple par Mme Q..., qui en supporte toutes les charges (dont le remboursement du prêt à hauteur de 2.634 €), puis le 1er octobre 2003 une seconde villa, située à Béziers, [...] ; que l'acquisition de ce second immeuble a été également financée par un prêt dont les échéances mensuelles de 701,23 € sont actuellement prises en charge par Mme Q... ; que cet immeuble aurait été loué pendant un certain temps jusqu'à l'introduction d'une procédure d'expulsion en septembre 2017 ; que la première villa est évaluée à la somme de 650.000 €, et la seconde à 240.000 €, selon les estimations réalisées par l'agence immobilière Foncia à la demande de M. F... ; que le couple est également propriétaire d'un terrain nu, situé à Rabah estimé à 420.000 € par M. F..., et d'un appartement de 70 mètres carrés situés dans la banlieue de O... d'une valeur de l'ordre de 150.000 € ; que M. F... et Mme Q... seraient également associés au sein d'une SCI Bensam, détenue à 99% par l'épouse, étant observé que cette société est propriétaire depuis le 15 novembre 2007 de deux appartements dépendant d'une même copropriété, située à Béziers, financés à l'aide d'un prêt toujours en cours d'amortissement, l'un des deux appartements étant réservé à l'activité médicale de Mme Q..., tandis que le second serait loué de manière irrégulière ; que selon M. F..., ces appartements valent pour le premier entre 140.000 et 150.000 € et pour le second entre 107.000 et 110.000 € ; que les parties n'ayant pas fait le point sur le montant des capitaux restant dus au titre des divers prêts souscrits pour financer l'acquisition de ces biens, il n'est pas possible d'en dégager une valeur nette comptable ; qu'ainsi, bien que les droits des parties dans chacun de ces biens ne sont pas précisément connus à ce stade de la procédure, il est néanmoins possible de retenir une valeur globale de 1.707.000 € (650.000 + 240.000 + 420.000 + 150.000 + 140.000+ 107.000) et de considérer que Mme Q... aura des droit plus importants que ceux de son conjoint dans la liquidation, puisqu'elle détient la quasi-totalité des parts de la SCI Bensam et qu'elle aura des créances à faire valoir au titre de la prise en charge des remboursements des divers prêts relatifs aux biens indivis ; que sur le patrimoine personnel des conjoints, M. F... a des droits dans la succession de son père décédé mais justifie n'avoir pour le moment perçu aucune somme puisque les fonds issus de la vente de l'immeuble successoral ont été après déduction des frais et taxes, affectés à l'achat d'un logement pour sa mère, le solde ayant été placé sur un compte bancaire ouvert au nom de cette dernière ; que de la même manière, Mme Q... est appelée à être saisie des droits dans la succession de son père décédé en 2014, de laquelle dépendraient plusieurs immeubles situés à Fes ; que l'évaluation de la succession et des droits de Mme Q... n'est pas connue à ce jour ; qu'en revanche, Mme Q... revendique la propriété exclusive sur un appartement situé à Guilherand, dans la région de Valence, qu'elle estime à 95.000 €, dont l'acquisition est financée à l'aide d'un prêt toujours en cours, remboursable par mensualité de 622,62 € ; que cet appartement est loué 9 mois par an pour un loyer mensuel de 550 € ; que ces éléments font ressortir une disparité significative dans les revenus (avec un écart de l'ordre de 800 € par mois) et dans une moindre mesure dans le capital en faveur de Mme Q... ; que compte tenu de l'âge respectif des conjoints, et de la durée du mariage (22 ans), de la plus grande vulnérabilité de M. F..., sur le plan médical, la somme de 110.000 € fixée par le premier juge et mise à la charge de l'épouse constitue la juste compensation de la disparité résultant de la dissolution du mariage, la cour écartant toute autre considération, notamment le moyen tiré du prétendu sacrifice auquel M. F... aurait consenti en abandonnant son poste au sein de ANHI, s'agissant d'un choix guidé par le seul intérêt de son fils ; que dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement frappé d'appel de ce chef et de condamner Mme Q... à verser à M. F... la somme de 110.000 € à titre de prestation compensatoire » ;
alors que pour apprécier la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux et fixer le montant de la prestation compensatoire, le juge doit tenir compte du patrimoine propre dont dispose chaque époux au moment du prononcé du divorce, tant en capital qu'en revenu ; qu'il doit ainsi prendre en considération les droits certains de chaque époux dans la succession d'un ayant-cause décédé avant que le divorce ne devienne définitif ; qu'en l'espèce, les droits de M. F... J... , résultant de la succession de son père décédé au jour du prononcé du divorce, étant d'ores et déjà entrés dans son patrimoine propre au jour où la cour d'appel statuait, celle-ci devait en tenir compte, peu important l'affectation que M. F... J... avait entendu leur donner ; qu'en s'abstenant, pour décider qu'il existait au détriment du mari une disparité dans les conditions de vie respectives des époux, de tenir compte du patrimoine échu au mari au titre de la succession de son père, aux motifs inopérants que celui-ci justifiait n'avoir pour le moment perçu aucune somme puisque les fonds issus de la vente de l'immeuble successoral avaient été après déduction des frais et taxes, affectés à l'achat d'un logement pour sa mère, le solde ayant été placé sur un compte bancaire ouvert au nom de cette dernière, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué du 30 août 2018 d'avoir confirmé le jugement rendu par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Béziers le 6 juillet 2017 en ce qu'il a maintenu la résidence de l'enfant mineur S... au domicile de son père ;
aux motifs propres que « la cour tenue de veiller à l'intérêt supérieur de l'enfant, observe que S..., vit avec son père depuis le mois de janvier 2013, sans qu'il soit établi de manière manifeste, que cette situation résulte d'un coup de force de sa part, ce transfert étant intervenu durant une période où Mme Q... avait quelques difficultés à gérer seule les deux enfants ; que ce transfert constituait à ce titre une solution adaptée pour apaiser les tensions tout en favorisant le réinvestissement de l'autorité paternelle ; que pour autant, le docteur L..., qui a effectué son travail en juillet et septembre 2015, a bien observé chez les deux enfants, un syndrome d'aliénation parentale avec un rejet massif et caricatural de leur mère, et dans une protection pour leur père qui vit celle-ci comme potentiellement dangereuse ; que l'expert, précise que les parents ne présentent pas de pathologie psychiatrique mais une relation pathologique liée à leur personnalité, et ajoute que c'est avant tout leur absence de coparentalité, de reconnaissance de la place de l'autre qui est délétère pour les enfants ; qu'il a ainsi relevé chez M. F..., en dépit d'une bonne volonté exprimée, un discours teinté de la dangerosité de la mère, dans une alliance sans recul vis à vis des plaintes de U... alors que les accusations de délaissement ou de violence des enfants à l'endroit de Mme Q... ne sont étayées par aucun élément objectif ; qu'en définitive, le docteur L... souligne la nécessité pour chacun d'être soutenu et aider pour retrouver sa place ; que les signes d'instabilité, les problèmes de comportements repérés en milieu scolaire et dans une moindre mesure les difficultés scolaires de S... sont vraisemblablement en lien avec ce conflit parental exacerbé qui ne lui permet pas de donner un place équitable à chacun de ses parents ; qu'en conséquence la cour retiendra des conclusions de l'expert la proposition de maintenir durant l'année scolaire 2018/2019 la résidence de S... au domicile de son père de manière à ne pas bouleverser ses repères et à permettre une reprise de lien apaisée avec sa mère dans le cadre de visites médiatisées, durant trois mois, délai à l'expiration duquel le droit de visite et d'hébergement pourra être élargi à deux fins de semaines par mois et la moitié des petites et grandes vacances scolaires » ;
et aux motifs adoptés qu'« par ordonnance en date du 8 décembre 2016 le juge de la mise en état a : -Pris acte que U... est majeur, -Rejeté la demande en transfert de la résidence habituelle de S... au domicile de la mère, -Dit que les relations entre Mme Q... B... et S... seraient organisées selon les modalités suivantes : *Pendant une durée de 6 mois à compter de la 1ère rencontre, un droit de visite médiatisé qui s'exercera une fois par mois, au sein de l'association Narjis La maison des jeunes, les Orangers à Rabat et choisi en accord entre les parties, les horaires étant à définir en fonction des disponibilités du service. *A l'issue de ce droit de visite médiatisé, et sous réserve que 6 rencontres se soient réellement exercées, un samedi et dimanche par mois à Rabat pendant une durée de trois mois, sauf meilleur accord entre les parties, le 1er samedi et le 1er dimanche de chaque mois de 10h00 à 18h00. *A l'issue de cette période et en l'absence de difficulté constatée, un droit de visite et d'hébergement pendant la première moitié des vacances scolaires les années paires et la seconde moitié les années impaires. *Concernant le premier été ce droit s'exercera la 1ère semaine des vacances du mois juillet et la 1ère semaine du mois d'août *le second été, ce droit s'exercera les 15 premiers jours de juillet et les 15 premiers jours d'août *le troisième été, et en l'absence de difficulté constatée, il s'exercera la première moitié les vacances d'été les années paires, et la seconde moitié les années impaires sous réserve que l'enfant regagne le domicile de son père 48h00 avant la rentrée des classes. -Dit qu'il appartiendra à Mme Q... B... d'assumer la totalité des frais liés à l'exercice de son droit de visite puis de son droit de visite et d'hébergement ; qu'en l'absence d'élément nouveau depuis la dernière décision rendue, il convient de maintenir la résidence de S... au domicile de son père, ainsi que le calendrier concernant le rétablissement des liens entre la mère et l'enfant » ;
alors 1°/ qu'en maintenant la résidence de l'enfant mineur S... au domicile de son père, sans répondre aux conclusions de Mme Q... B... faisant valoir que M. F... J... ne respectait pas l'exercice en commun de l'autorité parentale ni le droit de l'enfant à entretenir des relations avec ses deux parents et qu'il entravait ses droits de visite et d'hébergement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code civil ;
alors 2°/ qu'il est de l'intérêt de l'enfant d'être élevé par ses deux parents et, lorsqu'ils sont séparés, d'entretenir des relations personnelles avec chacun d'eux ; que le juge, lorsqu'il statue sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, doit notamment prendre en considération l'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé, d'une part, chez les deux enfants, un syndrome d'aliénation parentale avec un rejet massif et caricatural de leur mère, et dans une protection pour leur père qui vivait celle-ci comme potentiellement dangereuse, d'autre part, chez M. F... J..., un discours teinté de la dangerosité de la mère, dans une alliance sans recul vis à vis des plaintes de U... alors que les accusations de délaissement ou de violence des enfants à l'endroit de Mme Q... B... n'étaient étayées par aucun élément objectif et, enfin, l'impossibilité pour S... de donner un place équitable à chacun de ses parents ; qu'en maintenant la résidence de l'enfant mineur S... au domicile de son père, sans rechercher, ainsi qu'il lui était expressément demandé par Mme Q... B... , si le comportement de M. F... J... ne traduisait pas son refus de respecter le droit de l'enfant à entretenir des relations régulières avec sa mère, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 373-2, 373-2-6, et 373-2-11, 3°, du code civil.