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08/01/2020 | FRANCE | N°18-19103

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 janvier 2020, 18-19103


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. A..., engagé le 20 février 1992, en qualité de chargé de mission, par la société UAP, aux droits de laquelle vient la société Axa France Iard, a été expatrié à Singapour, du 1er mars 1992 au 31 mars 1994, puis en Thaïlande, du 1er novembre 1994 au 30 septembre 1998, avant de faire valoir ses droits à la retraite le 1er janvier 2013 ; qu'estimant que, au cours de ces périodes d'expatriation, avaient été exclus, à tort, par son employeur, de l'assiette des cotisati

ons à l'assurance complémentaire vieillesse des éléments de rémunération, ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. A..., engagé le 20 février 1992, en qualité de chargé de mission, par la société UAP, aux droits de laquelle vient la société Axa France Iard, a été expatrié à Singapour, du 1er mars 1992 au 31 mars 1994, puis en Thaïlande, du 1er novembre 1994 au 30 septembre 1998, avant de faire valoir ses droits à la retraite le 1er janvier 2013 ; qu'estimant que, au cours de ces périodes d'expatriation, avaient été exclus, à tort, par son employeur, de l'assiette des cotisations à l'assurance complémentaire vieillesse des éléments de rémunération, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le second moyen du pourvoi principal des sociétés Axa France Iard et Axa France Vie :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal des sociétés Axa France Iard et Axa France Vie :

Vu l'article L. 2261-8 du code du travail et les délibérations D5 et D17, dans leur rédaction applicable à compter du 1er janvier 1996, annexées à la convention collective nationale de prévoyance et de retraite des cadres du 14 mars 1947 ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que l'avenant portant révision de tout ou partie d'une convention se substitue de plein droit aux stipulations de la convention qu'il modifie et qu'il est opposable à l'ensemble des employeurs et des salariés liés par la convention ;

Attendu, selon le deuxième et le troisième de ces textes, que, pour les intéressés liés par un contrat de travail conclu ou signé sur le territoire français avec une entreprise sise sur ce territoire et exerçant une activité relevant de cette convention, envoyés par ladite entreprise dans tout établissement ou entreprise lui-même hors de ce territoire et au sein duquel sont accomplies des activités comprises dans le champ d'application de ladite convention, les cotisations sont calculées sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour des fonctions correspondantes, éventuellement augmenté de tout ou partie des primes et avantages en nature, ainsi que prévu dans le contrat d'expatriation ;

Attendu que, pour condamner les sociétés Axa France Vie et Axa France Iard à payer au salarié une certaine somme en indemnisation de la perte de chance de percevoir une retraite plus élevée, l'arrêt retient que l'employeur ne peut se prévaloir des dispositions de la délibération D5, dans sa rédaction applicable à compter de 1996, soit en cours d'exécution du contrat d'expatriation du salarié en Thaïlande, aucune pièce n'étant produite justifiant que M. A... ait été informé de la modification de ces dispositions ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions de la délibération D5, dans leur rédaction applicable à compter du 1er janvier 1996, se sont substituées de plein droit, à compter de cette date, aux dispositions antérieures de cette délibération et sont opposables au salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel du salarié :

Attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen du pourvoi principal rend sans objet le moyen unique du pourvoi incident éventuel qui critique l'arrêt en ce que celui-ci limite le montant du préjudice et de l'indemnisation du salarié ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour les sociétés Axa France Iard et Axa France vie, demanderesses au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR condamné les sociétés AXA France Vie et AXA France Iard à payer à Monsieur S... A... les sommes de 130.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de percevoir une retraite plus élevée et 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et rejeté les demandes de ces sociétés ;

AUX MOTIFS QUE
d'indemnisation ; que M. A... conteste l'assiette des cotisations de retraite complémentaire, appliquée par la société UAP, aux droits desquels se trouvent les sociétés AXA France, à hauteur de son salaire de référence en France lors de ses deux périodes d'expatriation ; qu'il considère en effet que les cotisations de retraite AGIRC auraient dû être calculées sur l'intégralité des rémunérations, avantages en nature inclus, qu'il a effectivement perçues durant son expatriation ; qu'il fonde son action en indemnisation du préjudice qu'il invoque, résultant selon lui de la perte de pensions de retraite complémentaire correspondant à l'insuffisance de cotisations auprès de l'AGIRC, sur les dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, qui fixent l'assiette des cotisations de sécurité sociale, la convention AGIRC du 14 mars 1917, sa délibération D17, définissant les différents cas d'extension territoriale, et sa délibération D5, fixant le mode de calcul des cotisations susceptibles d'être versées dans le cadre de ces extensions territoriales, la convention collective de retraite et de prévoyance du personnel des sociétés d'assurances du 5 mars 1962 et la convention collective nationale des sociétés d'assurance du 27 mai 1992 ; que les sociétés AXA France font valoir que ce sont uniquement les dispositions de la convention AGIRC et ses délibérations D5 et D17 qui, par renvoi des articles 6, 8 et 16 de la convention du 5 mai 1962, déterminent les conditions d'affiliation et l'assiette des cotisations du régime AGIRC pour les salariés travaillant à l'étranger, qu'or M. A... ne relevait pas de l'extension territoriale qu'il revendique, soit l'extension « cas A » prévue par la délibération D17 de la convention AGIRC, de sorte qu'il ne peut se prévaloir des dispositions de la délibération D5, laquelle prévoyait jusqu'en 1996 que les salariés bénéficiant d'une extension territoriale devaient cotiser sur la base de la rémunération effectivement perçue. Elles soulignent que la société anciennement UAP a pris un engagement strictement contractuel et individuel à l'égard de M. A... de maintenir en France ses cotisations retraite sur la base de son salaire de référence, engagement qui a été parfaitement respecté ; qu'en tout état de cause les sociétés intimées soutiennent qu'il faut distinguer les périodes d'expatriation de M. A... antérieure et postérieure au 31 décembre 2015, compte tenu de la modification de la délibération D5, applicable à compter de 1996, prévoyant que pour les salariés concernés par l'extension territoriale « cas A », les cotisations doivent être calculées, non plus sur le salaire effectivement versé mais sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour des fonctions correspondantes, ainsi que les primes ou avantages en nature, à condition que le contrat d'expatriation prévoit cette intégration dans l'assiette de cotisations ; que la convention de retraite et de prévoyance des sociétés d'assurance du 5 mars 1962 prévoit en son article 3, intitulé "personnel bénéficiaire", qu'elle s'applique obligatoirement au "personnel de tout grade...exerçant une activité en France métropolitaine ou dont le contrat de travail a été signé ou conclu sur le territoire de celle-ci, au service des employeurs et occupé par eux de façon permanente pour leurs besoins exclusifs, et qui répond en outre aux conditions exigées par chacun des régimes ainsi qu'il est dit ci-après » ; que l'article 4 de cette convention précise notamment qu'elle a pour objet de faire bénéficier de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 (AGIRC), dans les conditions fixées au titre III, le personnel Cadres, inspecteurs du Cadre ou personnel de direction visé à l'article 3, et de faire bénéficier le personnel Employés, Ouvriers, Agents de maîtrise, Cadres, inspecteurs du Cadre ou personnel de direction du régime professionnel de retraite complémentaire (RPRC) dans les conditions fixées au titre IV ; que l'article 6, intitulé "traitement de base", indique que, "pour chaque membre du personnel, le traitement pris en considération est le salaire réel total de l'intéressé tel qu'il résulte de la réglementation et des usages en vigueur et compte tenu des précisions apportées pour chacun des régimes ainsi qu'il est dit ci-après" ; que selon l'article 8, chaque employeur est tenu d'affilier aux différents régimes prévus à l'article 4 le personnel répondant aux conditions stipulées par chacun d'eux, et de verser dans les délais indiqués "les cotisations fixées par la présente convention" ; Que l'article 14 dispose :" Le personnel : cadre, inspecteur du cadre, personnel de direction visé à l'article 3 bénéficie du régime de retraite prévu par la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947. Les membres du personnel qui, bien que ne satisfaisant pas aux conditions prévues à l'alinéa 1 ci-dessus, et répondent à la définition des articles 4 et 4 bis de la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, sont régis par les dispositions de cette convention qui leur sont appliquées par l'IRCASA" ; Que l'article 16 précise que "le traitement servant de base au calcul des cotisations, déterminé comme il est dit à I 'article 5 de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, est la rémunération brute servant de base à la déclaration des traitements et salaires ... » ; Que la convention AGIRC du 14 mars 1947 distingue, quant à son champ d'application, les salariés détachés temporairement hors de France (article 3 § 2), qui doivent être affiliés, et les salariés expatriés (article 3 bis § 3), qui peuvent, sous certaines conditions, participer au régime AGIRC en application d'une extension territoriale ; qu'il est constant qu'en l'espèce M. A... a été mis à la disposition de filiales locales de la société UAP, aux droits desquelles se trouvent les sociétés intimées, du 1 er mars 1992 au 31 octobre 1994 à Singapour, puis du 1 er novembre 1994 au 30 7 septembre 1998 en Thaïlande, dans le cadre d'une expatriation ; que pour les salariés expatriés, la délibération D17 de l'AGIRC, qui définit le champ d'application territorial, prévoyait, dans sa rédaction applicable, que « les dispositions de la convention nationale du 14 mars 1974 peuvent être appliquées, dans les cas ci-dessous définis et suivant les modalités ci-après décrites, aux cadres ... de nationalité d 'un des États membres de la CEE, qui travaillent hors de France dans des conditions ne permettant pas la mise en oeuvre de la délibération D 16 » (relative aux salariés détachés) ; que le « cas A » concerne les salariés, ressortissant d'un État de la CEE dont le contrat de travail est conclu sur le territoire français avec une entreprise ayant son siège en France, et envoyés dans un établissement ou une entreprise situé en dehors du territoire ; qu'il est précisé que, pour que les dispositions de la convention de 1947 soient applicables à ces personnels, il faut que les entreprises : - fassent part de leur décision d'utiliser les possibilités ouvertes par cette délibération à une institution répondant aux conditions visées au dernier paragraphe de ce texte, apportent la preuve que la majorité des personnels en cause est d'accord pour participer au régime de la convention du 14 mars 1947, - s'engagent expressément à observer les dispositions de la convention pour la totalité des salariés qu'elles emploient ou emploieront, - fournissent régulièrement aux organismes la liste des salariés concernés et toute indication relative à leur rémunération, - versent les cotisations suivant les règles prévues par la convention, ses annexes et la délibération D5 à compter du 1 er jour de l'année civile au cours de laquelle la demande d'utilisation de la délibération a été formulée ; que la délibération D5 de l'AGIRC relative à l'assiette des cotisations énonçait, dans sa rédaction applicable avant le 1er janvier 1996 : « Lorsqu'il s 'agit d 'agents dont l'activité s 'exerce ou s 'est exercée hors de France, il y a, en principe, lieu de prendre en considération, pour la détermination de l'assiette des cotisations et la reconstitution des services passés, les appointements effectivement perçus convertis en francs sur la base du taux officiel de change, lors de cette perception. Les indemnités de résidence ne doivent pas être retenues dans les appointements dont il s'agit. (...) Toutefois, par voie d'accord conclu conformément à l'article 16 de la convention, il peut être décidé de se référer aux appointements qui seraient ou auraient été perçus en France pour des fonctions correspondantes » ; Que la rédaction de cette délibération a été modifiée pour la période postérieure au 31 décembre 1995, le texte disposant désormais : "Pour les agents dont l'activité s'exerce hors de France, les cotisations sont calculées : - pour les salariés concernés par une extension territoriale cas A : sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour des fonctions correspondantes, éventuellement augmenté de tout ou partie des primes et avantages en nature, ainsi que prévu dans le contrat d'expatriation." ; Que contrairement à ce que soutiennent les sociétés AXA France, l'extension territoriale « cas A » prévue par la délibération D17 annexée à la convention AGIRC du 14 mars 1947 est applicable à M. A... ; qu'en effet l'affiliation au régime AGIRC du personnel ayant signé son contrat de travail sur le territoire métropolitain mais exerçant ses fonctions en dehors de ce territoire est expressément prévue par la convention collective du 5 mars 1962 et il est constant que les sociétés intimées ont affilié ce personnel à ce régime et ont acquitté les cotisations afférentes ; que dès lors, en application de la délibération D5 de la commission paritaire de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 1996, selon laquelle il y a lieu, lorsqu'il s'agit d'agents dont l'activité s'exerce ou s'est exercée hors de France, de prendre en considération pour la détermination de l'assiette des cotisations les appointements effectivement perçus, l'employeur devait calculer les cotisations de retraite de M. A... sur l'ensemble des éléments de la rémunération perçue par ce dernier, sans que les sociétés intimées puissent opposer utilement un engagement contractuel de l'employeur de ne cotiser que sur un salaire de référence, cette assiette de calcul étant moins favorable que celle prévue par les dispositions conventionnelles applicables ; qu'il s'en déduit que pour toute la période d'expatriation de M. A..., soit du 1er mars 1992 au 30 septembre 1998, l'intéressé a subi un préjudice caractérisé par une perte de chance d'obtenir une retraite complémentaire plus élevée si les cotisations AGIRC avaient été réglées sur cette période avec comme assiette de calcul l'ensemble des éléments de la rémunération perçus par le salarié en ce compris les avantages en nature, étant relevé que l'employeur ne peut se prévaloir des dispositions de la délibération D5 dans leur rédaction applicable à compter de 1996, soit en cours d'exécution du contrat d'expatriation de M. A... en Thaïlande, aucune pièce n'étant produite justifiant que M. A... ait été informé de la modification de ces dispositions ; que considérant la durée de l'expatriation de M. A..., les revenus effectifs perçus par l'intéressé durant cette période, les avantages en nature dont il bénéficiait, qui doivent seuls être pris en considération à l'exclusion des remboursements de frais professionnels non soumis à cotisations, et au vu des rapports établis par les actuaires missionnés par chacune des parties, ainsi, pour M. A..., celui de M. V... P..., qui, après avoir précisé à titre liminaire que son rapport, établi le 8 mars 2014, est « basé sur les déclarations de M. A... », quant aux montants des salaires et avantages perçus par ce dernier, a estimé le « montant de la valeur actuelle probable du préjudice » subi par ce dernier à 592 123 €, et celui établi le 28 juillet 1994 par M. W... N..., actuaire des sociétés AXA France, qui après avoir relevé notamment une surestimation des avantages en nature dont bénéficiait M. A..., a retenu un préjudice « présumé » de 118 579 E, la cour estime, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une mesure d'expertise, qu'elle dispose des éléments d'appréciation suffisants pour indemniser le préjudice subi par M. A..., né de la perte de chance de percevoir une retraite plus élevée, qui doit être évalué à la somme de 130 000 €, au paiement de laquelle les sociétés AXA France seront condamnées à titre de dommages et intérêts ;

ALORS D'UNE PART QU' ayant retenu que la délibération D 5 de la commission paritaire de la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres AGIRC du 14 mars 1947, dans sa rédaction applicable postérieurement au 31 décembre 1995 dispose que « Pour les agents dont l'activité s'exerce hors de France, les cotisations sont calculées : - pour les salariés concernés par une extension territoriale cas A : sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour des fonctions correspondantes, éventuellement augmenté de tout ou partie des primes et avantages en nature, ainsi que prévu dans le contrat d'expatriation.", ce dont il ressort qu'à compter de cette date, l'employeur était fondé à cotiser, au titre du régime de retraite complémentaire français, sur la base du « salaire annuel de référence » correspondant au salaire que le salarié expatrié aurait perçu en France pour les mêmes fonctions, la cour d'appel qui retient que pour toute la période d'expatriation de M. A..., y compris celle postérieure au 31 décembre 1995, le salarié avait subi un préjudice caractérisé par une perte de chance d'obtenir une retraite complémentaire plus élevée si les cotisations AGIRC avaient été réglées avec comme assiette de calcul l'ensemble des éléments de la rémunération perçue localement par le salarié et non pas seulement, comme cela avait été contractuellement convenu, son « salaire annuel de référence », n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce, ensemble la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 et la délibération D 5 de la commission paritaire dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 1996 ;

ALORS D'AUTRE PART et en tout état de cause QUE les sociétés exposantes avaient fait valoir, sans être contestées sur ce point, que les lettres de mission de Monsieur A... prévoyaient de manière explicite que pendant la durée de son expatriation, l'employeur cotiserait auprès des organismes de retraite sur la base du « salaire annuel de référence » convenu, c'est-à-dire le salaire que Monsieur A... aurait perçu en France pour des fonctions correspondantes ; que les sociétés exposantes faisaient ainsi valoir que ces dispositions contractuelles étaient parfaitement conformes à celles de la délibération D 5 de la commission paritaire de la convention collective national de retraite et de prévoyance des cadres AGIRC du 14 mars 1947, dans sa rédaction applicable postérieurement au 31 décembre 1995, de sorte que la modification de ce texte n'avait apporté aucun changement dans l'exécution du contrat de travail, l'employeur continuant, comme il l'avait fait tout au long de la période d'expatriation, à cotiser au régime de retraite AGIRC sur la base du « salaire annuel de référence » (conclusions d'appel p 21 et 22) ; Que pour retenir qu'en dépit de la modification des dispositions de la délibération D 5 précitée dont il ressort que, pour la période postérieure au 31 décembre 1995, l'employeur était fondé à cotiser, au titre des régimes de retraite complémentaire français, sur la base du « salaire annuel de référence », soit le salaire que le salarié expatrié aurait perçu en France pour des fonctions correspondantes, Monsieur A... avait subi, y compris pour sa période d'expatriation postérieure au 31 décembre 1995, un préjudice caractérisé par une perte de chance d'obtenir une retraite complémentaire plus élevée si les cotisations AGIRC avaient été réglées avec comme assiette de calcul l'ensemble des éléments de la rémunération perçue par le salarié, la cour d'appel qui se borne à affirmer qu'« aucune pièce n'(est) produite justifiant que M. A... ait été informé de la modification de ces dispositions » de la délibération D 5 précitée, sans nullement préciser d'où il ressortait que l'employeur était tenu d'informer le salarié de cette modification du texte laquelle, au demeurant, n'avait entrainé aucune modification dans l'exécution du contrat de travail, l'employeur continuant à cotiser, conformément à ce qui était prévu dans la lettre de mission et comme il l'avait toujours fait, sur la base du salaire annuel de référence, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce ;

ALORS ENFIN QUE la délibération D 5 de la commission paritaire de la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres AGIRC du 14 mars 1947, dans sa rédaction applicable postérieurement au 31 décembre 1995 dispose que « Pour les agents dont l'activité s'exerce hors de France, les cotisations sont calculées : - pour les salariés concernés par une extension territoriale cas A : sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour des fonctions correspondantes, éventuellement augmenté de tout ou partie des primes et avantages en nature, ainsi que prévu dans le contrat d'expatriation.", ce dont il ressort qu'à compter de cette date, l'employeur était fondé à cotiser, au titre des régimes de retraite complémentaire français, sur la base du « salaire annuel de référence » correspondant au salaire que le salarié expatrié aurait perçu en France pour des fonctions équivalentes; Qu'en retenant qu'aucune pièce n'est produite justifiant que Monsieur A... ait été informé, en cours d'exécution de son contrat d'expatriation en Thaïlande, de la modification de la délibération D 5, pour en déduire que, y compris pour sa période d'expatriation postérieure au 31 décembre 1995, le salarié avait subi un préjudice caractérisé par une perte de chance d'obtenir une retraite complémentaire plus élevée si les cotisations AGIRC avaient été réglées avec comme assiette de calcul l'ensemble des éléments de la rémunération perçue par le salarié et non pas seulement, comme cela avait été contractuellement convenu, sur la base de son « salaire annuel de référence », la cour d'appel qui n'a pas caractérisé le rôle causal entre le défaut d'information du salarié sur la modification des dispositions de la délibération D 5 et le préjudice de perte de chance dont elle a ordonné la réparation, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce, ensemble la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 et la délibération D 5 de la commission paritaire dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 1996 ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR condamné les sociétés AXA France Vie et AXA France Iard à payer à Monsieur S... A... les sommes de 130.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de percevoir une retraite plus élevée et 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et rejeté les demandes de ces sociétés ;

AUX MOTIFS QUE
d'indemnisation ; que M. A... conteste l'assiette des cotisations de retraite complémentaire, appliquée par la société UAP, aux droits desquels se trouvent les sociétés AXA France, à hauteur de son salaire de référence en France lors de ses deux périodes d'expatriation ; qu'il considère en effet que les cotisations de retraite AGIRC auraient dû être calculées sur l'intégralité des rémunérations, avantages en nature inclus, qu'il a effectivement perçues durant son expatriation ; qu'il fonde son action en indemnisation du préjudice qu'il invoque, résultant selon lui de la perte de pensions de retraite complémentaire correspondant à l'insuffisance de cotisations auprès de l'AGIRC, sur les dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, qui fixent l'assiette des cotisations de sécurité sociale, la convention AGIRC du 14 mars 1917, sa délibération D17, définissant les différents cas d'extension territoriale, et sa délibération D5, fixant le mode de calcul des cotisations susceptibles d'être versées dans le cadre de ces extensions territoriales, la convention collective de retraite et de prévoyance du personnel des sociétés d'assurances du 5 mars 1962 et la convention collective nationale des sociétés d'assurance du 27 mai 1992 ; que les sociétés AXA France font valoir que ce sont uniquement les dispositions de la convention AGIRC et ses délibérations D5 et D17 qui, par renvoi des articles 6, 8 et 16 de la convention du 5 mai 1962, déterminent les conditions d'affiliation et l'assiette des cotisations du régime AGIRC pour les salariés travaillant à l'étranger, qu'or M. A... ne relevait pas de l'extension territoriale qu'il revendique, soit l'extension « cas A » prévue par la délibération D17 de la convention AGIRC, de sorte qu'il ne peut se prévaloir des dispositions de la délibération D5, laquelle prévoyait jusqu'en 1996 que les salariés bénéficiant d'une extension territoriale devaient cotiser sur la base de la rémunération effectivement perçue. Elles soulignent que la société anciennement UAP a pris un engagement strictement contractuel et individuel à l'égard de M. A... de maintenir en France ses cotisations retraite sur la base de son salaire de référence, engagement qui a été parfaitement respecté ; qu'en tout état de cause les sociétés intimées soutiennent qu'il faut distinguer les périodes d'expatriation de M. A... antérieure et postérieure au 31 décembre 2015, compte tenu de la modification de la délibération D5, applicable à compter de 1996, prévoyant que pour les salariés concernés par l'extension territoriale « cas A », les cotisations doivent être calculées, non plus sur le salaire effectivement versé mais sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour des fonctions correspondantes, ainsi que les primes ou avantages en nature, à condition que le contrat d'expatriation prévoit cette intégration dans l'assiette de cotisations ; que la convention de retraite et de prévoyance des sociétés d'assurance du 5 mars 1962 prévoit en son article 3, intitulé "personnel bénéficiaire", qu'elle s'applique obligatoirement au "personnel de tout grade...exerçant une activité en France métropolitaine ou dont le contrat de travail a été signé ou conclu sur le territoire de celle-ci, au service des employeurs et occupé par eux de façon permanente pour leurs besoins exclusifs, et qui répond en outre aux conditions exigées par chacun des régimes ainsi qu'il est dit ci-après » ; que l'article 4 de cette convention précise notamment qu'elle a pour objet de faire bénéficier de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 (AGIRC), dans les conditions fixées au titre III, le personnel Cadres, inspecteurs du Cadre ou personnel de direction visé à l'article 3, et de faire bénéficier le personnel Employés, Ouvriers, Agents de maîtrise, Cadres, inspecteurs du Cadre ou personnel de direction du régime professionnel de retraite complémentaire (RPRC) dans les conditions fixées au titre IV ; que l'article 6, intitulé "traitement de base", indique que, "pour chaque membre du personnel, le traitement pris en considération est le salaire réel total de l'intéressé tel qu'il résulte de la réglementation et des usages en vigueur et compte tenu des précisions apportées pour chacun des régimes ainsi qu'il est dit ci-après" ; que selon l'article 8, chaque employeur est tenu d'affilier aux différents régimes prévus à l'article 4 le personnel répondant aux conditions stipulées par chacun d'eux, et de verser dans les délais indiqués "les cotisations fixées par la présente convention" ; Que l'article 14 dispose :" Le personnel : cadre, inspecteur du cadre, personnel de direction visé à l'article 3 bénéficie du régime de retraite prévu par la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947. Les membres du personnel qui, bien que ne satisfaisant pas aux conditions prévues à l'alinéa 1 ci-dessus, et répondent à la définition des articles 4 et 4 bis de la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, sont régis par les dispositions de cette convention qui leur sont appliquées par l'IRCASA" ; Que l'article 16 précise que "le traitement servant de base au calcul des cotisations, déterminé comme il est dit à I 'article 5 de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, est la rémunération brute servant de base à la déclaration des traitements et salaires ... » ; Que la convention AGIRC du 14 mars 1947 distingue, quant à son champ d'application, les salariés détachés temporairement hors de France (article 3 § 2), qui doivent être affiliés, et les salariés expatriés (article 3 bis § 3), qui peuvent, sous certaines conditions, participer au régime AGIRC en application d'une extension territoriale ; qu'il est constant qu'en l'espèce M. A... a été mis à la disposition de filiales locales de la société UAP, aux droits desquelles se trouvent les sociétés intimées, du 1 er mars 1992 au 31 octobre 1994 à Singapour, puis du 1 er novembre 1994 au 30 septembre 1998 en Thaïlande, dans le cadre d'une expatriation ; que pour les salariés expatriés, la délibération D17 de l'AGIRC, qui définit le champ d'application territorial, prévoyait, dans sa rédaction applicable, que « les dispositions de la convention nationale du 14 mars 1974 peuvent être appliquées, dans les cas ci-dessous définis et suivant les modalités ci-après décrites, aux cadres ... de nationalité d 'un des États membres de la CEE, qui travaillent hors de France dans des conditions ne permettant pas la mise en oeuvre de la délibération D 16 » (relative aux salariés détachés) ; que le « cas A » concerne les salariés, ressortissant d'un État de la CEE dont le contrat de travail est conclu sur le territoire français avec une entreprise ayant son siège en France, et envoyés dans un établissement ou une entreprise situé en dehors du territoire ; qu'il est précisé que, pour que les dispositions de la convention de 1947 soient applicables à ces personnels, il faut que les entreprises : - fassent part de leur décision d'utiliser les possibilités ouvertes par cette délibération à une institution répondant aux conditions visées au dernier paragraphe de ce texte, apportent la preuve que la majorité des personnels en cause est d'accord pour participer au régime de la convention du 14 mars 1947, - s'engagent expressément à observer les dispositions de la convention pour la totalité des salariés qu'elles emploient ou emploieront, - fournissent régulièrement aux organismes la liste des salariés concernés et toute indication relative à leur rémunération, - versent les cotisations suivant les règles prévues par la convention, ses annexes et la délibération D5 à compter du 1 er jour de l'année civile au cours de laquelle la demande d'utilisation de la délibération a été formulée ; que la délibération D5 de l'AGIRC relative à l'assiette des cotisations énonçait, dans sa rédaction applicable avant le 1er janvier 1996 : « Lorsqu'il s 'agit d 'agents dont l'activité s 'exerce ou s 'est exercée hors de France, il y a, en principe, lieu de prendre en considération, pour la détermination de l'assiette des cotisations et la reconstitution des services passés, les appointements effectivement perçus convertis en francs sur la base du taux officiel de change, lors de cette perception. Les indemnités de résidence ne doivent pas être retenues dans les appointements dont il s'agit. (...) Toutefois, par voie d'accord conclu conformément à l'article 16 de la convention, il peut être décidé de se référer aux appointements qui seraient ou auraient été perçus en France pour des fonctions correspondantes » ; Que la rédaction de cette délibération a été modifiée pour la période postérieure au 31 décembre 1995, le texte disposant désormais : "Pour les agents dont l'activité s'exerce hors de France, les cotisations sont calculées : - pour les salariés concernés par une extension territoriale cas A : sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour des fonctions correspondantes, éventuellement augmenté de tout ou partie des primes et avantages en nature, ainsi que prévu dans le contrat d'expatriation." ; Que contrairement à ce que soutiennent les sociétés AXA France, l'extension territoriale « cas A » prévue par la délibération D17 annexée à la convention AGIRC du 14 mars 1947 est applicable à M. A.... En effet l'affiliation au régime AGIRC du personnel ayant signé son contrat de travail sur le territoire métropolitain mais exerçant ses fonctions en dehors de ce territoire est expressément prévue par la convention collective du 5 mars 1962 et il est constant que les sociétés intimées ont affilié ce personnel à ce régime et ont acquitté les cotisations afférentes ; que dès lors, en application de la délibération D5 de la commission paritaire de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 1996, selon laquelle il y a lieu, lorsqu'il s'agit d'agents dont l'activité s'exerce ou s'est exercée hors de France, de prendre en considération pour la détermination de l'assiette des cotisations les appointements effectivement perçus, l'employeur devait calculer les cotisations de retraite de M. A... sur l'ensemble des éléments de la rémunération perçue par ce dernier, sans que les sociétés intimées puissent opposer utilement un engagement contractuel de l'employeur de ne cotiser que sur un salaire de référence, cette assiette de calcul étant moins favorable que celle prévue par les dispositions conventionnelles applicables ; qu'il s'en déduit que pour toute la période d'expatriation de M. A..., soit du 1er mars 1992 au 30 septembre 1998, l'intéressé a subi un préjudice caractérisé par une perte de chance d'obtenir une retraite complémentaire plus élevée si les cotisations AGIRC avaient été réglées sur cette période avec comme assiette de calcul l'ensemble des éléments de la rémunération perçus par le salarié en ce compris les avantages en nature, étant relevé que l'employeur ne peut se prévaloir des dispositions de la délibération D5 dans leur rédaction applicable à compter de 1996, soit en cours d'exécution du contrat d'expatriation de M. A... en Thaïlande, aucune pièce n'étant produite justifiant que M. A... ait été informé de la modification de ces dispositions ; que considérant la durée de l'expatriation de M. A..., les revenus effectifs perçus par l'intéressé durant cette période, les avantages en nature dont il bénéficiait, qui doivent seuls être pris en considération à l'exclusion des remboursements de frais professionnels non soumis à cotisations, et au vu des rapports établis par les actuaires missionnés par chacune des parties, ainsi, pour M. A..., celui de M. V... P..., qui, après avoir précisé à titre liminaire que son rapport, établi le 8 mars 2014, est « basé sur les déclarations de M. A... », quant aux montants des salaires et avantages perçus par ce dernier, a estimé le « montant de la valeur actuelle probable du préjudice » subi par ce dernier à 592 123 €, et celui établi le 28 juillet 1994 par M. W... N..., actuaire des sociétés AXA France, qui après avoir relevé notamment une surestimation des avantages en nature dont bénéficiait M. A..., a retenu un préjudice « présumé » de 118 579 E, la cour estime, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une mesure d'expertise, qu'elle dispose des éléments d'appréciation suffisants pour indemniser le préjudice subi par M. A..., né de la perte de chance de percevoir une retraite plus élevée, qui doit être évalué à la somme de 130 000 €, au paiement de laquelle les sociétés AXA France seront condamnées à titre de dommages et intérêts ;

ALORS D'UNE PART QUE le juge ne peut méconnaître les termes du litige, fixés par les prétentions respectives des parties ; Qu'en l'espèce, il résulte des conclusions d'appel du salarié que l'intéressé a demandé, à titre subsidiaire, que les sociétés exposantes soient condamnées à lui payer une somme de 500.000 euros « au titre de la perte de chance de s'assurer volontairement » (conclusions d'appel p 42) ; Qu'ainsi, M. A... n'avait nullement demandé l'indemnisation d'un préjudice lié à « la perte de chance de percevoir une retraite plus élevée »; Que, dès lors, en allouant à ce dernier la somme de 130.000 € en réparation du préjudice né de la perte de chance de percevoir une retraite plus élevée, la cour d'appel a méconnu les termes du litige dont elle était saisie en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur un moyen qu'il a relevé d'office, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; Qu'en l'espèce, il résulte des conclusions d'appel du salarié que l'intéressé a demandé, à titre subsidiaire, que les sociétés exposantes soient condamnées à lui payer une somme de 500.000 euros « au titre de la perte de chance de s'assurer volontairement » (conclusions d'appel p 42) ; Qu'en allouant à ce dernier la somme de 130.000 € en réparation du préjudice « né de la perte de chance de percevoir une retraite plus élevée », sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur ce préjudice spécifique qu'elle entendait réparer au terme d'un moyen qu'elle a relevé d'office, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile.

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. A..., demandeur au pourvoi incident éventuel

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR limité le préjudice de M. A... à une simple perte de chance d'obtenir une retraite complémentaires plus élevée et D'AVOIR ainsi limité les dommages et intérêts alloués à ce titre à la somme de 130 000 € ;

AUX MOTIFS QUE la délibération D5 de l'AGIRC relative à l'assiette des cotisations énonçait, dans sa rédaction applicable avant le 1er janvier 1996 : « Lorsqu'il s 'agit d 'agents dont l'activité s 'exerce ou s 'est exercée hors de France, il y a, en principe, lieu de prendre en considération, pour la détermination de l'assiette des cotisations et la reconstitution des services passés, les appointements effectivement perçus convertis en francs sur la base du taux officiel de change, lors de cette perception. Les indemnités de résidence ne doivent pas être retenues dans les appointements dont il s'agit. (...) Toutefois, par voie d'accord conclu conformément à l'article 16 de la convention, il peut être décidé de se référer aux appointements qui seraient ou auraient été perçus en France pour des fonctions correspondantes » ; que la rédaction de cette délibération a été modifiée pour la période postérieure au 31 décembre 1995, le texte disposant désormais : « Pour les agents dont l'activité s'exerce hors de France, les cotisations sont calculées : - pour les salariés concernés par une extension territoriale cas A : sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour des fonctions correspondantes, éventuellement augmenté de tout ou partie des primes et avantages en nature, ainsi que prévu dans le contrat d'expatriation » ; que contrairement à ce que soutiennent les sociétés AXA France, l'extension territoriale « cas A » prévue par la délibération D17 annexée à la convention AGIRC du 14 mars 1947 est applicable à M. A... ; qu'en effet l'affiliation au régime AGIRC du personnel ayant signé son contrat de travail sur le territoire métropolitain mais exerçant ses fonctions en dehors de ce territoire est expressément prévue par la convention collective du 5 mars 1962 et il est constant que les sociétés intimées ont affilié ce personnel à ce régime et ont acquitté les cotisations afférentes ; que dès lors, en application de la délibération D5 de la commission paritaire de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 1996, selon laquelle il y a lieu, lorsqu'il s'agit d'agents dont l'activité s'exerce ou s'est exercée hors de France, de prendre en considération pour la détermination de l'assiette des cotisations les appointements effectivement perçus, l'employeur devait calculer les cotisations de retraite de M. A... sur l'ensemble des éléments de la rémunération perçue par ce dernier, sans que les sociétés intimées puissent opposer utilement un engagement contractuel de l'employeur de ne cotiser que sur un salaire de référence, cette assiette de calcul étant moins favorable que celle prévue par les dispositions conventionnelles applicables ; qu'il s'en déduit que pour toute la période d'expatriation de M. A..., soit du 1er mars 1992 au 30 septembre 1998, l'intéressé a subi un préjudice caractérisé par une perte de chance d'obtenir une retraite complémentaire plus élevée si les cotisations AGIRC avaient été réglées sur cette période avec comme assiette de calcul l'ensemble des éléments de la rémunération perçus par le salarié en ce compris les avantages en nature, étant relevé que l'employeur ne peut se prévaloir des dispositions de la délibération D5 dans leur rédaction applicable à compter de 1996, soit en cours d'exécution du contrat d'expatriation de M. A... en Thaïlande, aucune pièce n'étant produite justifiant que M. A... ait été informé de la modification de ces dispositions ; que considérant la durée de l'expatriation de M. A..., les revenus effectifs perçus par l'intéressé durant cette période, les avantages en nature dont il bénéficiait, qui doivent seuls être pris en considération à l'exclusion des remboursements de frais professionnels non soumis à cotisations, et au vu des rapports établis par les actuaires missionnés par chacune des parties, ainsi, pour M. A..., celui de M. V... P..., qui, après avoir précisé à titre liminaire que son rapport, établi le 8 mars 2014, est « basé sur les déclarations de M. A... », quant aux montants des salaires et avantages perçus par ce dernier, a estimé le « montant de la valeur actuelle probable du préjudice » subi par ce dernier à 592 123 €, et celui établi le 28 juillet 1994 par M. W... N..., actuaire des sociétés AXA France, qui après avoir relevé notamment une surestimation des avantages en nature dont bénéficiait M. A..., a retenu un préjudice « présumé » de 118 579 E, la cour estime, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une mesure d'expertise, qu'elle dispose des éléments d'appréciation suffisants pour indemniser le préjudice subi par M. A..., né de la perte de chance de percevoir une retraite plus élevée, qui doit être évalué à la somme de 130 000 €, au paiement de laquelle les sociétés AXA France seront condamnées à titre de dommages et intérêts ;

1°) ALORS QUE le préjudice né de la perte des droits correspondant à des cotisations de retraite non versées est un préjudice certain qui doit être intégralement réparé ; que la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si ce comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que M. A... n'avait pu bénéficier, en raison des manquements de son employeur, du versement de cotisations sur des éléments qui auraient dû être pris en compte dans le calcul de l'assiette des cotisations, tels les avantages en nature et les salaires perçus au-delà du salaire de référence, en sorte qu'il n'avait pu acquérir davantage de points pendant sa période d'expatriation et percevoir ainsi une retraite complémentaire plus élevée ; qu'en allouant à M. A... des dommages et intérêts limités à la réparation d'une simple perte de chance de bénéficier d'une retraite AGIRC plus élevée, la cour d'appel, qui n'a pas réparé l'intégralité du préjudice subi par l'intéressé, a violé l'article 1147 devenu 1231-1 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice ;

2°) ALORS QU'en se bornant à retenir que l'employeur avait seulement manqué à son obligation d'information pour la période postérieure au 31 décembre 1995 et à ne réparer que le préjudice résultant d'une perte de chance de percevoir une retraite complémentaire plus élevée sans répondre aux conclusions d'appel de M. Lecerf (p. 41 et 42) qui faisait valoir qu'après la modification de la délibération D5, les cotisations devaient être effectuées « sur la base du salaire qui aurait été perçu en France pour les fonctions correspondantes éventuellement augmenté de tout ou partie des primes ou avantages en nature, ainsi que prévu dans le contrat d'expatriation » mais que le salaire de référence sur la base duquel son employeur avait cotisé était bien inférieur à celui qu'il aurait perçu en France pour des fonctions de direction correspondantes à celles occupées à l'étranger, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-19103
Date de la décision : 08/01/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 mai 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jan. 2020, pourvoi n°18-19103


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.19103
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