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19/12/2019 | FRANCE | N°18-25618

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 décembre 2019, 18-25618


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante de son désistement de pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la Sécurité Sociale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ancien salarié de la société Delamare, aux droits de laquelle vient la société Balas (l'employeur), Y... X... a déclaré, le 20 juillet 2013, auprès de la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis (la caisse) un cancer broncho-pulmonaire dont il est décédé le 11 février 20

14 ; que la caisse a pris en charge la maladie et le décès sur le fondement du t...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante de son désistement de pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la Sécurité Sociale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ancien salarié de la société Delamare, aux droits de laquelle vient la société Balas (l'employeur), Y... X... a déclaré, le 20 juillet 2013, auprès de la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis (la caisse) un cancer broncho-pulmonaire dont il est décédé le 11 février 2014 ; que la caisse a pris en charge la maladie et le décès sur le fondement du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles ; qu'ayant indemnisé les ayants droit de Y... X..., le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA), a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les première et deuxième branches du moyen unique annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le même moyen, pris en sa troisième branche :

Vu les articles L. 452-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que, saisi d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, le juge est tenu de recueillir au préalable l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles dès lors qu'il constate que la maladie déclarée, prise en charge par la caisse sur le fondement d'un tableau de maladie professionnelle, ne remplit pas les conditions de ce dernier et que sont invoquées devant lui les dispositions des troisième ou quatrième alinéas du second de ces textes ;

Attendu que pour rejeter la demande, l'arrêt retient que la condition de durée d'exposition fixée à dix ans par le tableau n° 30 bis n'est pas remplie au 21 mai 2013 et que si le FIVA sollicite, à titre subsidiaire, la saisine d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles afin qu'il se prononce sur le caractère professionnel ou non du cancer dont était atteint la victime, la pathologie de celle-ci a été prise en charge par la caisse sur le fondement des dispositions de l'article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale, au titre de la présomption d'imputabilité de sorte qu'aucun comité n'a été saisi ; que le FIVA sollicite la désignation d'un comité mais ne précise pas sur quel fondement il présente sa demande ; qu'il n'appartient pas au comité de se prononcer sur la réunion des conditions du tableau ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable le recours formé par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, l'arrêt rendu le 26 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Balas et la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint-Denis aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société Balas et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint-Denis et condamne la société Balas à payer au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille dix-neuf et signé par Mme Thomas, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué :

D'AVOIR debouté le FIVA de ses demandes tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de la société Delamare, aux droits de laquelle se trouve la société Balas, à l'origine de la maladie professionnelle et du décès de M. Y... X... et à l'indemnisation de celle-ci, de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à la désignation d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et de l'AVOIR condamné au paiement d'une somme de 1 500 euros à la société Delamare par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement d'un droit d'appel de 331,10 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'en l'espèce, la société fait valoir, comme elle l'a fait devant les premiers juges, que les conditions prévues par le tableau 30 bis des maladies professionnelles ne sont pas remplies au motif que la durée de 10 ans d'exposition au risque requise par le tableau n'est pas démontrée et qu'il n'est pas établi que dans le cadre de l'exercice de son activité, M. X... effectuait les travaux susceptibles de provoquer cette maladie ; que le FIVA produit devant la cour les mêmes pièces qu'en première instance ; qu'il ressort de l'enquête administrative diligentée par la caisse, que l'enquêtrice, dans ses conclusions, ne fait que rapporter les propos que lui a tenus M. X... lorsqu'elle l'a rencontré le 23 septembre 2013 ; qu'elle note qu'il lui a expliqué avoir travaillé sur différents sites qu'elle énumère : entre 1984 et 1986 au Crédit du Nord, [...] , de 1991 à 2002 sur le site des laboratoires [...][...] , en 2004 2005 dans des tours à la Défense, en 2008 sur la base de Balard, et qu'il lui a indiqué avoir fait de la dépose de calorifugeage, des travaux d'entretien et de maintenance sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante ; qu'elle en conclut que la durée d'exposition de 10 ans au 21 mai 2013 est respectée ; que force est cependant de constater que l'enquêtrice n'établit pas avoir accompli de vérifications lui ayant permis de parvenir à ces conclusions ; que le docteur B..., médecin du travail de l'entreprise Méresse (aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société Delamare) certifie avoir suivi M. X... de 1994 à 2013, que son activité de plombier puis de chef de chantier comportait l'usage habituel de plaques d'amiante utilisées comme protections du mur lors des travaux de soudo-brasure jusque dans les années 1983, ainsi qu'il en est attesté par les notes du médecin du travail en 1982 et 1983, qu'à partir de 1985, le médecin du travail a noté que les plaques d'amiante avaient été remplacées par des pare-flammes (non amiantés ) alors que les plaques d'amiante étaient encore très largement utilisées dans d'autres entreprises du BTP ; qu'elle ajoute que le 3 juillet 2006, un de ses collègues de travail lui a signalé qu'ils auraient travaillé en 2006 au métro Balard à la base aérienne de la porte de Sèvres dans « des locaux où il y avait du flocage d'amiante inerté par produit bleu et que parfois, ils travaillaient près du flocage où des "morceaux" se détachaient ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont déduit de cette attestation qu'à partir de 1985, la société avait pris les mesures nécessaires et que M. X... n'avait plus été exposé à l'amiante ; que s'agissant e l'activité exercée sur le site de Balard , le docteur B... indique qu'ils y "auraient" travaillé en 2006 ; que cependant elle ne fait que rapporter les propos d'un collègue dont le nom n'est pas communiqué ; qu'elle n'a rien constaté par elle-même et n'a fait aucune vérification ; qu'enfin, concernant les attestations des collègues de M. X..., il doit être retenu, à l'instar des premiers juges, qu'elles établissent son exposition à l'amiante jusqu'en 1985 mais pas au-delà ; que dans la mesure où une exposition au risque de M. X... est établie sur la seule période de 1977 à 1985, la condition de durée d'exposition fixée à 10 ans par le tableau 30 bis n'est pas remplie au 21 mai 2013 ; que sur la demande du FIVA de désignation d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; que le FIVA sollicite, à titre subsidiaire, la saisine d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnels afin qu'il se prononce sur le caractère professionnel ou non du cancer dont était atteint M. X... ; que la pathologie de M. X... a été prise en charge par la caisse sur le fondement des dispositions de l'article L 461-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale au titre de la présomption d'imputabilité de sorte qu'aucun CRRMP n'a été saisi ; que le FIVA sollicite la désignation d'un CRRMP mais ne précise pas sur quel fondement il présente sa demande ; que de plus, il n'appartient pas au CRRMP de se prononcer sur la réunion des conditions du tableau ; que cette demande sera donc rejetée ; qu'il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu que le caractère professionnel de la maladie de Y... X... n'était pas établi et qu'il y avait donc lieu de débouter le FIVA de sa demande de reconnaissance de faute inexcusable de la société Delamare ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' en l'espèce, la société Delamare conteste le caractère professionnel de la maladie de Y... X... ; qu'il convient de rappeler que la présomption d'imputabilité ne s'applique pas à la faute inexcusable et que l'employeur peut contester le caractère professionnel d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle au cours de la procédure de la faute inexcusable ; qu'en l'espèce, la société Delamare, venant aux droits de la société Méresse, émet des réserves sur le caractère professionnel de la maladie de Y... X... ; qu'en effet, la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis a procédé à une enquête avant la prise en charge de la maladie professionnelle de Y... X..., à l'issue de laquelle elle conclut au caractère professionnel de la maladie ; qu'il convient de constater que le FIVA ne produit que partiellement les pièces sur lesquelles la caisse s'est fondée pour prendre sa décision ; que le certificat médical établi par le docteur F... B..., médecin du travail de l'entreprise, est clair, précis et circonstancié quant à l'exposition à l'amiante de Y... X... pour la seule période courant de 1977 à 1985 ; qu'au-delà de cette période, les éléments de preuve sont plus aléatoires voire imprécis ; que c'est ainsi que ce médecin précise qu'à partir de 1985, un précédent médecin du travail note que les plaques d'amiante utilisées comme protections du mur lors des travaux de soudo-brasure utilisées jusqu'en 1983, ont été remplacées par la société par des pare flammes (non amiantés) à partir de 1985 ; que cela signifie donc qu'à partir de cette date, la société Delamare a pris les mesures nécessaires et que Y... X... n'était plus exposé à l'amiante par les matériaux utilisés par son employeur ; que si ce médecin précise « alors que les plaques d'amiante étaient encore très largement utilisées dans d'autres entreprises du BTP », cela ne démontre pas pour autant que Y... X... restait exposé à l'amiante à cause des matériaux utilisés par d'autres entreprises ; que, par ailleurs, si l'agent de la caisse semble confirmer qu'en 2008 Y... X... a travaillé sur la base de Balard, pour autant il ajoute que celui-ci est intervenu alors que le bâtiment venait d'être désamianté ; que cela démontre que Y... X... ne pouvait être exposé ; que la présence de pastilles mentionnée dans son rapport, sans autre analyse sur le sens à donner à la présence de ces pastilles, ne permet pas d'en tirer une analyse contraire ; que le dernier paragraphe du rapport de l'agent à partir de «de plus » jusqu'à «base d'amiante » semble n'être que la retranscription des déclarations de Y... X... et ne pas avoir fait l'objet de vérification de l'agent lui-même ; que l'attestation de T... K... (pièce 18) et celle de A... O... (pièce 21) n'apportent aucune contradiction aux remarques précédentes et démontrent a minima l'exposition jusqu'en 1985 mais pas au-delà ; qu'ainsi donc la condition de la durée d'exposition fixée à 10 ans par le tableau 30 bis n'était pas remplie au 21 mai 2013, date de première constatation médicale ; qu'enfin, il convient de relever que le FIVA faisait valoir à l'occasion de la procédure d'appel, le tabagisme actif de Y... X... à plus de 20 paquets années, responsable d'une broncho pneumopathie chronique obstructive ; que de l'ensemble, il en résulte que le caractère professionnel de la maladie de Y... X... n'étant pas établi, il convient de débouter le FIVA de sa demande en reconnaissance de faute inexcusable de la société Delamare ;

1°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, dans son attestation, M. K... indiquait avoir travaillé sur divers chantiers avec M. X... en utilisant des plaques d'amiante sans protection jusqu'en 1985 et avoir travaillé sur des chantiers dont l'environnement était amianté de 2004 à 2008 ; qu'en énonçant que les attestations produites établissaient l'exposition de M. X... à l'amiante jusqu'en 1985 mais pas au-delà, la cour d'appel a dénaturé l'attestation de M. K..., méconnaissant le principe susvisé ;

2°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, dans son attestation, M. O... indiquait avoir travaillé avec M. X... sur le chantier de la base militaire de Balard en 2006 où il y avait de l'amiante dans le faux plafond et où ils devaient changer des canalisations dans tout le secteur sans système d'aspiration, ni de ventilation, ni équipement de protection ; qu'en énonçant que les attestations produites établissaient l'exposition de M. X... à l'amiante jusqu'en 1985 mais pas au-delà, la cour d'appel a dénaturé l'attestation de M. K..., méconnaissant le principe susvisé ;

3°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle désignée dans un tableau des maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime, après avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; qu'ayant considéré que la condition de durée d'exposition au risque de dix ans prévue par le tableau n°30 bis des maladies professionnelles n'était pas remplie, la cour d'appel qui, relevant que le FIVA sollicitait, à titre subsidiaire, la désignation d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles afin qu'il se prononce sur le caractère professionnel ou non du cancer de M. X..., a, pour rejeter cette demande, énoncé que la caisse avait pris en charge la pathologie de M. X... sur le fondement des dispositions de l'article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale de sorte qu'aucun comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles n'avait été saisi, a violé l'article L. 461-1, alinéas 3 et 5, dans sa rédaction antérieure à la loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017 ;

4°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'il appartient au juge, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et acte litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'ayant considéré que la condition de durée d'exposition au risque de dix ans prévue par le tableau n°30 bis des maladies professionnelles n'était pas remplie, la cour d'appel qui, relevant que le FIVA sollicitait, à titre subsidiaire, la désignation d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles afin qu'il se prononce sur le caractère professionnel ou non du cancer de M. X..., a, pour rejeter cette demande, énoncé que le FIVA ne précisait pas le fondement de sa demande et qu'il n'appartenait pas au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de se prononcer sur la réunion de conditions du tableau, a ainsi violé les articles L. 461-1 du code de la sécurité sociale, 12 et 946 du code de procédure civile, et R. 142-28 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-25618
Date de la décision : 19/12/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 26 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 19 déc. 2019, pourvoi n°18-25618


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.25618
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