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19/12/2019 | FRANCE | N°18-20658

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 décembre 2019, 18-20658


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. U... (la victime), salarié de la société française de coffres forts Caradonna (la société), a été victime, le 21 mai 2008, d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne (la caisse) ; que, convoquée le 7 décembre 2009 dans le cadre de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, la société ne s'est pas présentée ; qu'elle a

été condamnée, le 5 avril 2012, par jugement du tribunal correctionnel pou...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. U... (la victime), salarié de la société française de coffres forts Caradonna (la société), a été victime, le 21 mai 2008, d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne (la caisse) ; que, convoquée le 7 décembre 2009 dans le cadre de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, la société ne s'est pas présentée ; qu'elle a été condamnée, le 5 avril 2012, par jugement du tribunal correctionnel pour infraction à la réglementation sur l'hygiène, la sécurité et la santé au travail et blessures involontaires ; que la victime a saisi, le 4 octobre 2012, une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen en sa première branche, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le même moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte du dernier alinéa de ce texte qu'en cas d'accident susceptible d'entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la prescription biennale opposable aux demandes d'indemnisation complémentaire de la victime ou de ses ayants droit est interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ; que la convocation de l'employeur par le procureur de la République dans le cadre d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, constitue une telle cause d'interruption ;

Attendu qu'ayant constaté que la victime a perçu des indemnités journalières jusqu'au 19 octobre 2008, et qu'elle a saisi la caisse d'une demande en reconnaissance de faute inexcusable le 17 juillet 2012, puis énoncé que, pour l'application de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale, il doit exister un acte de saisine d'une juridiction à l'initiative soit du parquet soit de la victime, l'arrêt retient que la société, convoquée le 7 décembre 2009 en comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, n'a pas comparu devant le procureur de la République, et que le tribunal correctionnel n'a été saisi que le 8 février 2012 par citation, de sorte que le délai de prescription n'ayant pas été interrompu avant le 19 octobre 2010, l'action de la victime en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur est prescrite ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la convocation délivrée le 7 décembre 2009 par le procureur de la République dans le cadre de la procédure de reconnaissance préalable de culpabilité avait interrompu la prescription, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris, et remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société française de coffres forts Caradonna aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société française de coffres forts Caradonna à payer à la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, R... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille dix-neuf et signé par Mme Thomas, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour M. U...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable en raison de l'acquisition de la prescription depuis le 30 janvier 2011, l'action de M. P... U... en reconnaissance et indemnisation de la faute inexcusable de son employeur, la société Française de coffres forts Caradonna, à l'origine de l'accident du travail dont il a été victime le 21 mai 2008

AUX MOTIFS QUE la SA SFCC et la caisse primaire d'assurance maladie invoquent la prescription de 2 ans prévue par les articles L.431-2 et L.461-1 du code de sécurité sociale faisant valoir qu'en application des articles L.431-2, L.461-1 et L.461-5 du code de sécurité sociale, M. U... ayant perçu des indemnités journalières jusqu'au 19 octobre 2008, la prescription biennale expirait le 19 octobre 2010, que si l'article L.431-2 du code de sécurité sociale prévoit l'interruption de la prescription par l'exercice d'une action pénale, cela ne vaut que pour la saisine d'un juge, après engagement de l'action pénale ou sa mise en mouvement, que la société SFCC a été citée devant le tribunal correctionnel de Meaux le 8 février 2012, soit après l'expiration du délai, que si elle avait été convoquée en comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ( CRPC) avant le 7 décembre 2009, seule la saisine du juge par le procureur aurait alors pu interrompre la prescription, ce qui n'a pas été le cas ; que M. U... s'y oppose aux motifs que la convocation en CRPC du 7 décembre 2009 pour l'audience du 10 mai 2010 a suspendu le délai de prescription avant qu'il n'expire, que le procureur a décidé de poursuivre par voie de citation devant le tribunal correctionnel en janvier 2011, lui-même ayant reçu un avis à victime pour le 17 février 2011, qu'en l'absence de son représentant, l'affaire a été renvoyée au 13 octobre 2011, avant qu'elle ne soit retenue le 5 avril 2012, que c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu la procédure pénale diligentée contre l'entreprise et son dirigeant, la convocation en CRPC et l'audience fixée comme actes interruptifs de prescription, comme le prévoit l'article 7 du code de procédure pénale, que la comparution en CRPC est un acte de poursuite, le procureur proposant une peine à la personne majeure qui reconnaît sa culpabilité ; qu'il ressort de la combinaison des articles L.431-2 et L.461-1 du code de sécurité sociale que l'action en reconnaissance de faute inexcusable pour un accident du travail se prescrit par 2 ans, à compter du jour de l'accident ou de la date de cessation de paiement des indemnités journalières ; que la survenance d'une rechute n'a pas pour effet de faire courir à nouveau la prescription biennale ; que parallèlement, l'article L.431-2 du même code dispose que la prescription biennale est interrompue par l‘exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ; qu'il est donc nécessaire d'avoir un acte de saisine d'une juridiction à l'initiative soit du parquet, soit de la victime ; qu'en l'espèce, M. U... a perçu des indemnités journalières, suite à son accident survenu le 21 mai 2008, jusqu'au 19 octobre 2009 ; qu'il a saisi la caisse primaire d'assurance maladie en reconnaissance de faute inexcusable le 17 juillet 2012 ; que sauf cause d'interruption antérieure au 19 octobre 2011, la prescription était acquise à cette date ; que si la société SFCC a bien été convoquée par le parquet le 7 décembre 2009 pour l'audience du 10 mai 2010, c'est dans le cadre de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ; que, dans une telle procédure, seule la comparution du prévenu devant le procureur avec reconnaissance de culpabilité et acceptation de la peine proposée par le parquet, permet à ce dernier de saisir le juge en homologation ; que tel n'a pas été le cas en l'espèce, la société ne s'y étant pas fait représenter ; que M. U... produit un avis à victime du 17 février 2011 pour une audience du 7 avril 2011, mais il ne justifie pas d'une citation à l'encontre de la société SFCC pour cette date ; que par ailleurs, le tribunal correctionnel de Meaux qui a condamné le société le 5 avril 2012, a été saisi par la citation du 8 février 2012 remise le 10 à la société ; que seule une citation, antérieure au 19 octobre 2011, aurait pu interrompre le délai de prescription ; qu'à défaut, l'action de M. U... en reconnaissance de faute inexcusable doit être déclarée irrecevable comme étant prescrite ; que le jugement entrepris sera confirmé ;

ALORS D'UNE PART QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité, la contradiction entre les motifs et le dispositif équivalant à un défaut de motif ; que la cour d'appel qui a dit que, sauf interruption de la prescription antérieure au 19 octobre 2011, la prescription était acquise à cette date et qui a confirmé le jugement entrepris qui avait déclaré l'action de l'exposant irrecevable en raison de l'acquisition de la prescription depuis le 30 janvier 2011, s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE constitue une action pénale interruptive de la prescription biennale de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la procédure en comparution pour reconnaissance préalable de culpabilité engagée par le parquet à l'encontre de l'employeur pour les mêmes faits ; que l'action pénale est engagée par la convocation de l'employeur dans le cadre d'une procédure sur reconnaissance préalable de culpabilité suivie de sa citation devant le tribunal correctionnel ; qu'ayant énoncé que M. U... avait perçu des indemnités journalières jusqu'au 19 octobre 2009 et que sauf interruption antérieure au 19 octobre 2011 la prescription était acquise à cette date, la cour d'appel qui a constaté que la société Française de coffres forts Caradonna avait été convoquée par le parquet le 7 décembre 2009 pour une audience du 10 mai 2010 dans le cadre d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, puis que cette société avait été citée le 10 février 2012 devant le tribunal correctionnel de Meaux qui l'avait pénalement condamnée le 5 avril 2012, la cour d'appel qui a cependant dit prescrite l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, la société Française de coffres forts Caradonna, introduite le 17 juillet 2012, a violé les articles L. 431-2 et L. 452-1 du code de la sécurité sociale et l'article 495-12 du code de procédure pénale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-20658
Date de la décision : 19/12/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 octobre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 19 déc. 2019, pourvoi n°18-20658


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Ohl et Vexliard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.20658
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