LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 29 mars 2018) et les productions, que la société Soprema entreprises (la société Soprema) a souscrit auprès de la société Axa corporate solutions assurance (l'assureur) une police de responsabilité civile stipulant des limitations spécifiques et distinctes du montant des garanties pour les dommages matériels, d'une part, pour les dommages immatériels, d'autre part ; qu'à l'occasion de son intervention sur le chantier de construction de l'hôtel de région du Nord-Pas-de-Calais, la société Soprema a vu sa responsabilité engagée à la suite de l'explosion d'une bouteille de gaz propane lui appartenant, ayant occasionné de nombreux retards de chantier au détriment du maître de l'ouvrage et des différentes entreprises intervenantes ; que, d'un commun accord avec l'assureur, la société Soprema a mis en place un processus de gestion amiable des réclamations de ces tiers lésés non prises en charge par ailleurs, qui a donné lieu à la conclusion entre elle et ces derniers de plusieurs protocoles d'accords transactionnels, et à une prise en charge par l'assureur des indemnités payées en application de ces accords ; que ce dernier, indiquant avoir réglé un montant total d'indemnités supérieur aux plafonds contractuels de garantie, a refusé de prendre en charge de nouvelles indemnités fixées par voie transactionnelle ou par le juge administratif ; qu'estimant que la plupart des montants indemnitaires réglés par l'assureur ne correspondaient pas à des préjudices immatériels, et qu'ainsi le sous-plafond de garantie dédié n'avait pas été épuisé, la société Soprema a assigné celui-ci en paiement ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la première branche du moyen unique, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Et sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :
Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société Soprema diverses sommes au titre, tant des frais de conseil, que des protocoles conclus avec les société Satelec et EGIS, et des jugements rendus le 31 décembre 2013 au profit de la région Nord Pas-de-Calais et de la société CEGELEC, et le 27 janvier 2015 au profit des sociétés CRI et SDI, alors, selon le moyen :
1°/ que les plafonds de garantie qui concernent une assurance facultative sont valables et opposables à l'assuré ; qu'ainsi, à supposer même que les surcoûts liés à la reprise de l'ouvrage aient constitué des dommages matériels au sens de la police d'assurance, la cour d'appel devait appliquer aux dommages qu'elle avait elle-même qualifiés comme étant des dommages immatériels le sous-plafond de garantie d'1 million d'euros pour les dommages immatériels qui était prévu par la police ; qu'en effet, la cour d'appel avait elle-même relevé que les protocoles d'accords ayant fait l'objet d'une indemnisation par l'assureur et celui du 30 octobre 2014 au profit de la société Satelec indemnisaient chacun deux types de préjudices distincts, les uns matériels (les surcoûts liés à la reprise de l'ouvrage), les autres immatériels (notamment la perte de chiffre d'affaires ou de productivité) ; qu'en appliquant néanmoins à ces protocoles le plafond de garantie de tous les préjudices confondus de 7 millions d'euros, au motif que la lecture desdits protocoles ne permettait pas de déterminer pour chacun d'eux quelle somme couvrait les préjudices matériels et les préjudices immatériels, quand elle ne pouvait s'arrêter à l'imprécision des protocoles transactionnels et devait déterminer, par toute autre pièce ou méthode qu'elle estimait pertinente, la part des indemnités transactionnelles qui réparait les préjudices matériels et celle qui réparait les préjudices immatériels afin d'y appliquer les sous-plafonds de garantie correspondants, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;
2°/ que, subsidiairement, le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; qu'en statuant par les motifs précités, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil ;
Mais attendu, d'abord, qu'il incombait à l'assureur, qui s'en prévalait, de rapporter la preuve du dépassement des sous-plafonds de garantie ; qu'ensuite, la cour d'appel a relevé que l'assureur avait validé «en amont» l'ensemble des transactions et laissé à la société Soprema la faculté de les signer ; qu'elle a en outre procédé à un examen détaillé de certains de ces accords et constaté, dans l'exercice de son pouvoir souverain, qu'ils ne permettaient pas de déterminer ce qui relevait des dommages matériels ou immatériels ; qu'elle a pu en déduire qu'il convenait d'appliquer le plafond de garantie cumulé relatif aux deux types de dommages ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Axa corporate solutions assurance aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à la société Soprema entreprises la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Axa Corporate solutions assurance.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société AXA à payer à la société SOPREMA les sommes de 130.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, au titre du protocole conclu avec la société SATELEC, 101.233,50 euros au titre du protocole conclu avec la société EGIS, 187.671,85 euros au titre du jugement du 31 décembre 2013 au profit de la région Nord Pas-de-Calais, 110.958,92 euros au titre du jugement du 31 décembre 2013 au profit de la société CEGELEC, 46.499,70 euros et 68.898,55 euros au titre du jugement du 27 janvier 2015 respectivement au profit des sociétés CRI et SDI, 109.074,50 euros au titre des frais de conseil, le tout avec les intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2015 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « I - Sur la demande en paiement de la société Soprema : La société Soprema sollicite la garantie de son assureur, la société Axa, sur le fondement des dispositions du contrat de police responsabilité civile qu'elle a souscrit auprès de cette dernière et en vertu duquel sont garanties "les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant incomber à l'assuré en vertu du droit commun, en raison de dommages corporels, matériels et immatériels consécutifs ou non à un dommage matériel, causé à des tiers du fait de l‘exercice de ses activités et survenu tant en cours de travaux qu'après leur achèvement ". À ce titre le montant des principales garanties par sinistre est limité à : "tous dommages corporels, matériels et immatériels confondus : 10 millions d'euros dont limitation aux : - dommages matériels y compris d'incendie : 6 millions d'euros, - dommages immatériels : 1 million d'euros". Cette limitation de garantie, qui concerne une assurance facultative, est opposable à la société Soprema. Pour contester sa garantie, la société Axa soutient que l'intégralité des sommes qu'elle a versées au titre des protocoles d'accord correspond à des dommages immatériels de sorte que le plafond de 1 million d'euros relatif aux dommages immatériels a été atteint et que la société Soprema ne saurait dès lors réclamer une quelconque indemnité complémentaire. De son côté, la société Soprema fait valoir que les protocoles d'accord en cause ont indemnisé à la fois des préjudices à la fois matériels et immatériels. Elle en conclut que c'est le plafond de garantie fixé à 10 millions d'euros, pour toutes causes de préjudices, qui doit s'appliquer. Ce dernier n'ayant pas été atteint, elle s'estime bien fondée à solliciter l'indemnisation de la société Axa au titre des protocoles d'accord et indemnités résultant des jugements qu'elle a seule réglés. En l'espèce, l'accident survenu le 22 juillet 2005, dont est responsable de la société Soprema, a nécessité la reprise du chantier, générant des frais pour la région, maître d'ouvrage, mais également pour les entreprises ayant réalisé les ouvrages qui ont dû intervenir au titre de la reprise des désordres. Ces entreprises ayant été indemnisées seulement pour partie par l'assureur du maître d'ouvrage, la SMABTP, des surcoûts liés à la reprise des ouvrages, elles ont sollicité de la société Soprema l'indemnisation de leur préjudice qui n'avait pas été pris en charge par la SMABTP. II convient dès lors d'examiner quelles catégories de dommages ont été indemnisées par chaque protocole pour lequel Axa a donné sa garantie, afin de pouvoir apprécier si les plafonds de limitation de garantie ont été atteints et si la société Soprema est recevable à solliciter la garantie de la société Axa pour les protocoles et indemnités résultant des jugements et protocoles qu'elle a seule réglés. 1- Sur les protocoles d'accord ayant fait l'objet d'une indemnisation par la société AXA : En l'espèce, il n'est pas contesté que la société Axa a réglé la somme de 905 913,56 euros au titre des protocoles d'accord conclus au profit des sociétés Sapiso et Karpinski, des sociétés Constructions Métalliques K... Z..., PMN et Goyer, de la société Loison, des sociétés Eiffage Énergie Thermie Nord, venant aux droits de la société Crystal, et Delannoy Dewailly, de la société T..., de la société Icade Promotion et de la société Preventec. Elle a également réglé, au profit de la société Egis, la somme de 102 086,50 euros sur la somme de 203 320 euros figurant sur le protocole d'accord. À cet égard, les protocoles d'accord conclus au profit des sociétés Sapiso et Karpinski, des sociétés Constructions Métalliques K... Z..., PMN et Goyer, des sociétés Eiffage Énergie Thermie Nord, venant aux droits de la société Crystal, et la société Delannoy Dewailly, de la société T..., de la société Icade Promotion et de la société Preventec font référence à l'indemnisation de "tous chefs de préjudices [...] correspondant à un retard de chantier de 3,5 mois". Le protocole d'accord conclu au profit de la société Loison fait quant à lui référence à l'indemnisation du "préjudice matériel et immatériel". La rédaction de ces protocoles d'accord ne permet donc pas de savoir quels préjudices ont été indemnisés et plus particulièrement s'ils se rapportent à des préjudices matériels ou immatériels. Si ces protocoles n'entérinent pas le rapport d'expertise judiciaire, ils y font toutefois directement référence en se basant, comme critère d'indemnisation, sur un retard de chantier de 3,5 mois, là où l'expert avait retenu une durée de 8,5 mois. Il y a dès lors lieu d'examiner les préjudices retenus par l'expert dans son rapport d'expertise. À cet égard, il sera relevé que le rapport d'expertise déposé en septembre 2007 s'intitule "Étude des mémoires en réclamation concernant les préjudices immatériels suite au sinistre du 22 juillet 2005". L'expert se réfère ainsi à des "préjudices immatériels d'une durée de 8 mois et 15 jours". Toutefois, il détaille les préjudices subis de la sorte : - pour les sociétés Z..., PMN et Goyer : la somme TTC de 472 473,92 euros correspondant à l'encadrement du chantier, la perte de productivité, le compte prorata, et les travaux complémentaires, - pour la société T... : la somme de 225 074,57 euros TTC correspondant à l'encadrement du chantier, les frais généraux et amortissements, le compte prorata, - pour les sociétés Sapiso et Karpinski : la somme de 138 322 euros correspond au compte prorata, à l'encadrement de chantier, aux frais de chantier (bureau, abris, échafaudages et chef de chantier), le stockage des matériaux ainsi que le décalage du chiffre d'affaires, - pour la société Loison : la somme de 277.068,63 euros TTC correspondant à l'encadrement de chantier, la perte relative aux frais généraux, le compte prorata, - pour la société Crystal Delannoy Dewailly : la somme de 418 068,92 euros TTC correspondant au compte prorata, aux frais de chantier, à l'encadrement du chantier, à la prolongation de la garantie sur le matériel installé, au préjudice pour difficulté de manutention, à la mise en service et programmation GTC ainsi qu'au report du chiffre d'affaires, - pour la société Icade : la somme de 178.930,53 euros TTC pour le préjudice pour prolongation de la mission ainsi que pour la réception partielle du bâtiment GPA, - la société Preventec : la somme de 37.544,20 TTC correspondant au contrôle technique des travaux de réfection ainsi que la prolongation des délais d'exécution. La société Axa fait valoir qu'il s'agit là intégralement de préjudices d'ordre immatériel dans la mesure où ils ne répondent pas à la définition du dommage matériel prévu par les conditions générales du contrat d'assurance. À cet égard, les conditions générales du contrat d'assurance définissent les dommages matériels et immatériels de la sorte : "DOMMAGES MATÉRIELS : toute détérioration d'une chose ou substance, toute atteinte physique des animaux. DOMMAGES IMMATÉRIELS: tout préjudice pécuniaire résultant de la privation de jouissance d'un droit, de l'interruption d'un service rendu par une personne ou par un bien meubles ou immeubles, de la perte d'un bénéfice et entraîné directement par la survenance de dommages corporels ou matériels garantis par ce contrat. Le préjudice immatériel couvre donc un préjudice économique ou financier subi par un tiers alors que le préjudice matériel couvre les atteintes à l'ouvrage ainsi que les sommes nécessaires à sa reprise. En l'espèce, le préjudice subi par les sociétés intervenues sur le chantier au titre de la reprise de l'ouvrage correspond d'une part à un surcoût en termes de personnel, matériel ou consommation (postes "compte prorata", "encadrement de chantier", "frais de chantier", "stockage des matériaux", "réception" ou encore "contrôle technique des travaux de réfection") et, d'autre part, à une perte de bénéfices. La perte de chiffre d'affaires ou de productivité correspond ainsi à la perte d'un bénéfice entraîné directement par la survenance de dommages matériels, et donc à un dommage immatériel. En revanche, les surcoûts liés à la reprise des travaux ne correspondent à aucunes des trois hypothèses constitutives du préjudice immatériel selon les conditions générales du contrat d'assurance. Il s'agit là au contraire de sommes qui ont été payées pour la réfection des ouvrages et donc d'un dommage matériel. À ce titre, et contrairement à ce que soutient la société Axa, il est indifférent que l'assureur du maître de l'ouvrage, la SMABTP, ait réglé aux différentes entreprises une partie de leur préjudice matériel, étant relevé que la société Axa ne justifie pas de l'objet de ces règlements. Dès lors, et contrairement à la dénomination retenue par l'expert, il y a lieu de considérer que le rapport d'expertise, et donc le protocole d'accord, portent à la fois sur des dommages matériels et immatériels. Il n'est toutefois pas possible de déterminer pour chaque protocole quelle somme couvre les préjudices matériels et les préjudices immatériels. Dans ces conditions, il sera appliqué le plafond cumulé relatif aux dommages matériels et immatériels, soit la somme de 7 millions d'euros (le plafond de 10 millions d'euros incluant les dommages corporels). La société Axa ayant versé la somme totale de 1 008 000,06 euros dans le cadre des protocoles transactionnels, le plafond de garantie contractuelle n'a donc pas été dépassé. 2- Sur les protocoles d'accord et condamnations pour lesquels la société Soprema sollicite la garantie de la société Axa : - Sur le protocole d'accord avec la société Egis Bâtiments Management : Le protocole d'accord conclu avec la société Egis Bâtiments Management pour un montant de 203 320 euros porte sur le préjudice lié "au maintien des effectifs OPC pendant le retard de chantier". La société Axa a versé la somme de 102 086,50 euros au titre de ce protocole de sorte que la société Soprema a réglé la somme de 101 233,50 euros. À ce titre, les dépenses engagées pour des effectifs "organisations, pilotage et coordinations" ont été rendues nécessaire par la reprise de l'ouvrage et constituent donc un dommage matériel couvert par la police d'assurance, qui devait être pris en charge par la société Axa, puisque le plafond de 6 millions d'euros n'avait pas été atteint. La société Axa sera dès lors condamnée à payer à la société Soprema la somme de 101 233,50 euros. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2015, date de l'assignation devant le tribunal de commerce de Lille Métropole. - Sur le protocole d'accord transactionnel du 30 octobre 2014, au profit de la société Satelec : Le tribunal de commerce de Lille Métropole a condamné la société Axa à payer à la société Soprema la somme de 130 000 euros au titre du protocole transactionnel conclu avec la société Satelec le 30 octobre 2014. Pour contester cette condamnation, la société Axa considère que, soit le protocole visait à indemniser un préjudice immatériel et dans ce cas le plafond de garantie avait été atteint, soit il visait à indemniser un préjudice matériel et dans ce cas la société Soprema se devait de requérir l'agrément de la société Axa. À cet égard, il est mentionné que la somme de 130 000 euros est versée "pour solde de tous chefs de préjudices, SATELEC déclarant avoir renoncé à ses revendications purement immatérielles". II est indiqué dans le protocole que la société Satelec a sollicité la somme de 493 951,44 euros au titre de son préjudice immatériel, celle de 3 101 euros au titre du maintien du salaire d'un salarié absent, celle de 92 244 euros résultant de l'augmentation du taux de cotisation d'accidents du travail et celle de 14 000 euros au titre de frais de procédure. Il sera relevé que la somme de 413 951,44 euros, initialement qualifiée de préjudices immatériels, correspond en réalité à celle retenue par l'expert au titre de l'encadrement du chantier, la perte de productivité, le compte prorata, l'extension du délai de garantie, la désorganisation, la mise en service des équipements et le surcoût dû aux dommages corporels. Elle englobe dès lors des préjudices à la fois matériels et immatériels. En conséquence, il sera considéré que le protocole d'accord porte à la fois sur des préjudices matériels et immatériels et que le plafond de garantie de 7 millions d'euros n'a dès lors pas été atteint. Concernant la négociation et la signature de ce protocole, il y a lieu de relever que ce protocole figure dans le tableau des transactions établi par la société Axa (e-mail du 4 décembre 2012). Par ailleurs, par e-mail du 17 janvier 2014, la société Soprema a informé la société Axa des dispositions prévues dans ce protocole. Aucune réponse n'a été donnée à cet e-mail. La société Axa indique ne pas avoir expressément agréé ce protocole alors qu'il résulte des conditions générales du contrat d'assurance que "aucune reconnaissance de responsabilité, aucune transaction intervenant en dehors de [l'assureur] ne lui est opposable". Il apparaît toutefois que la signature de la société Axa ne figure sur aucun des autres protocoles qu'elle a pourtant accepté de régler. Elle ne justifie par ailleurs d'aucun agrément exprès d'une quelconque forme que ce soit. Dès lors, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la société Axa avait validé en amont l'ensemble des transactions et avait laissé à la société Soprema la faculté de les signer, de sorte que la société Axa se devait de garantir la société Soprema du paiement de la somme de 130 000 euros à ce titre. La société Soprema sollicite que cette condamnation soit assortie des intérêts à compter de la date de signature du protocole d'accord et non de l'assignation. Toutefois, il résulte des dispositions de l'article 1153 du code civil, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, que les intérêts moratoires courent à compter du jour où la sommation de payer le principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. En l'espèce, aucune mise en demeure n'est intervenue préalablement à la saisine du tribunal de commerce de Lille Métropole. Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il a condamné la société Axa à payer à la société Soprema la somme de 130 000 euros à compter de l'assignation en première instance. - Sur le jugement du tribunal administratif de Lille du 31 décembre 2013, au profit de la région Nord Pas-de-Calais : Par jugement du 31 décembre 2013, le tribunal administratif de Lille a condamné la société Soprema à payer à la région Nord Pas-de-Calais la somme de 1 182 771,55 euros TTC, sous déduction de la somme de 1 million d'euros versés à titre provisionnel par la SMABTP, ainsi que la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles, soit la somme totale de 187 771,55 euros. Cette somme correspond aux loyers et charges locatives supportés par la région pendant la reprise du chantier, la location d'aires de stationnement ainsi que le coût de déplacement des véhicules. Il s'agit donc d'un préjudice immatériel. La société Soprema sollicite à ce titre la condamnation de la société Axa à lui verser la somme de 187 671,55 euros. À cet égard, le plafond d'indemnisation de dommages immatériels de 1 million d'euros n'a pas été atteint. La société Axa sera dès lors condamnée à payer à la société Soprema la somme de 187 671,55 euros à ce titre, avec les intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2015, date de l'assignation devant le tribunal de commerce de Lille Métropole. - Sur le jugement du tribunal administratif de Lille du 31 décembre 2013, au profit de la société Cegelec Nord et Est :
Par jugement du 31 décembre 2013, le tribunal administratif de Lille a condamné la société Soprema à payer à la société Cegelec Nord et Est la somme de 110 958,92 euros TTC outre la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles. Cette somme correspond au préjudice résultant de la présence supplémentaire du chargé d'affaires, du conducteur de travaux et du magasinier durant la remise en état du site, du compte prorata, des frais d'extension de caution ainsi que des frais de location d'un bureau et d'un bungalow. Si les frais d'extension de caution constituent un préjudice matériel, le préjudice résultant de la présence supplémentaire de personnel pendant la reprise des travaux, du compte prorata et des frais de location d'un bureau et d'un bungalow constitue un préjudice matériel. Le plafond de 6 millions d'euros n'ayant pas été atteint, la société Axa sera dès lors condamnée à payer à la société Soprema la somme de 110 958,92 euros TTC et ce à compter du 14 octobre 2015, date de l'assignation devant le tribunal de commerce de Lille Métropole. - Sur le jugement du tribunal administratif de Lille du 27 janvier 2015, au profit des sociétés CRI et SDI ;
par jugement du 27 janvier 2015, le tribunal administratif de Lille a condamné la société Soprema à payer à la société SDI la somme de 63 708,83 euros TTC et à la société CRI la somme de 42 553,26 euros TTC, outre la somme de 1 000 euros chacune au titre des frais d'avocat. Au titre de ce jugement, la société Soprema a réglé la somme de 68 898,55 euros à la société SDI et celle de 46 499,70 euros à la société CRI. La somme de 63 708,83 euros correspond au préjudice subi du fait de la présence supplémentaire d'un conducteur de travaux et de deux chefs de chantier durant la remise en état du site, le préjudice tiré de la prolongation de la location d'un bungalow et le compte prorata. La somme de 42 553,26 euros correspond à la présence supplémentaire d'un conducteur de travaux d'un chef de chantier et d'un directeur de travaux durant la remise en état du site, la prolongation de la location d'un bungalow et le compte prorata. Ces dépenses, qui ont été rendues nécessaire pour la réfection des ouvrages, constituent un dommage matériel. Le plafond contractuel d ' un montant de 6 millions d'euros n' ayant pas été atteint, la société Axa sera dès lors condamnée à payer à la société Soprema les sommes de 68 898,55 euros et de 46 499,70 euros, avec les intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2015, date de l'assignation. Sur les frais et honoraires de conseil induit par ces protocoles et procédures à hauteur de 109 174.50 euros : La société Soprema sollicite la condamnation de la société Axa à lui verser la somme de 109 174,50 euros au titre des frais et honoraires de conseil induit par ces protocoles et procédures. À ce titre, le contrat d'assurance prévoit que : "Lorsqu'il est cité ou assigné à la suite d'un dommage garanti au titre du présent contrat, l'assureur s'engage à défendre l'assuré, selon les modalités prévues aux conditions générales, devant les juridictions civiles, commerciales, répressives ou administratives. Cette défense assumée par l'assureur, dans la limite des sommes fixées au chapitre '‘montant des garanties'', comprend les frais et honoraires d'enquête, d'instruction, d'expertise et d'avocat et les frais de procès". Les conditions générales du contrat d'assurance disposent par ailleurs que "les frais de procès, de quittances et autres frais de règlement ne viennent pas en déduction du montant de la garantie. Toutefois, en cas de condamnation à un montant supérieur, ils sont supportés par l'assureur et par l'assuré dans la proportion de la part de chacun dans la condamnation''. Pour dénier sa garantie à ce titre, la société Axa fait valoir que le plafond de garantie ayant été atteint, l'assureur n'est plus tenu de prendre en charge les frais de défense de son assuré. Toutefois, il résulte des développements précédents que le plafond de garantie n'a pas été atteint, de sorte que la garantie de la société Axa doit en l'espèce s'appliquer. La société Axa sera dès lors condamnée à payer à la société Soprema la somme de 109 074,50 euros au titre des frais de conseil. Cette somme portera les intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2015, date de l'assignation devant le tribunal de commerce de Lille Métropole » ;
ET AUX MOTIFS PARTIELLEMENT ADOPTES QUE « la Société SATELEC figurait sur le tableau des transactions établi par AXA ; par mail du 20 novembre 2013 AXA écrivait ‘
il conviendra donc que l'assuré règle le différentiel (EGIS) ainsi que toute nouvelle transaction. Je mets à jour le tableau des transactions' ; par mail en date du 12 décembre 2013, AXA écrivait ‘Par ailleurs, nous attirons l'attention de notre assuré sur le fait que nous ne rembourserons plus désormais ses frais de défense, comme cela avait été convenu, une fois le plein atteint' ; bien que validant en amont l'ensemble des transactions AXA laissait la faculté à SOPREMA de les signer ; par mail en date du 27 mai 2009 qui avait pour objet : ‘Point des procédures en cours et décision stratégique à adopter
', position était prise par AXA quant à la procédure en cours contre SATELEC ; c'est volontairement qu'AXA a renoncé à se prévaloir des dispositions du contrat et contraint la Société SOPREMA à agir seule ; la société SOPREMA a indemnisé la Société SATELEC d'un montant de 130.000 €, la transaction précise : ‘La somme de 130.000 € est versée par SOPREMA pour solde de tous chefs de préjudices, SATELEC déclarant avoir renoncé à ses revendications purement immatérielles ; le tribunal condamnera AXA au paiement de la somme de 130.000 € à SOPREMA en remboursement du montant de la transaction, cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter de la présente assignation » ;
1) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des écrits qui lui sont soumis ; que les conditions générales de la police d'assurance souscrite par la société SOPREMA définissaient les dommages matériels comme « toute détérioration d'une chose ou substance, toute atteinte physique des animaux » et les dommages immatériels comme « tout préjudice pécuniaire résultant de la privation de jouissance d'un droit, de l'interruption d'un service rendu par une personne ou par un bien meuble ou immeuble, de la perte d'un bénéfice et entraîné directement par la survenance de dommages corporels ou matériels garantis par ce contrat » ;
qu'en énonçant que les surcoûts liés à la reprise de l'ouvrage constituaient des dommages matériels, quand ces surcoûts constituaient des préjudices pécuniaires résultant de l'arrêt du chantier et donc des dommages immatériels au sens de la définition qui en était donnée par les conditions générales précitées de la police, la cour d'appel a dénaturé lesdites conditions générales et ainsi violé le principe susvisé, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2) ALORS QUE, subsidiairement et en tout état de cause, les plafonds de garantie qui concernent une assurance facultative sont valables et opposables à l'assuré ; qu'ainsi, à supposer même que les surcoûts liés à la reprise de l'ouvrage aient constitué des dommages matériels au sens de la police d'assurance, la cour d'appel devait appliquer aux dommages qu'elle avait elle-même qualifiés comme étant des dommages immatériels le sous-plafond de garantie d'1 million d'euros pour les dommages immatériels qui était prévu par la police ; qu'en effet, la cour d'appel avait elle-même relevé que les protocoles d'accords ayant fait l'objet d'une indemnisation par la société AXA et celui du 30 octobre 2014 au profit de la société SATELEC indemnisaient chacun deux types de préjudices distincts, les uns matériels (les surcoûts liés à la reprise de l'ouvrage), les autres immatériels (notamment la perte de chiffre d'affaires ou de productivité) (arrêt p. 8 § 5 et suiv., p. 10 § 2) ; qu'en appliquant néanmoins à ces protocoles le plafond de garantie de tous les préjudices confondus de 7 millions d'euros (arrêt p. 9 §
2, p. 10 § 3), au motif que la lecture desdits protocoles ne permettait pas de déterminer pour chacun d'eux quelle somme couvrait les préjudices matériels et les préjudices immatériels (arrêt p. 7 § 6, p. 9 § 2), quand elle ne pouvait s'arrêter à l'imprécision des protocoles transactionnels et devait déterminer, par toute autre pièce ou méthode qu'elle estimait pertinente, la part des indemnités transactionnelles qui réparait les préjudices matériels et celle qui réparait les préjudices immatériels afin d'y appliquer les sous-plafonds de garantie correspondants, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;
3) ALORS QUE, également subsidiairement, le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; qu'en statuant par les motifs précités (arrêt p. 7 § 6, p. 9 § 2, p. 10 §§ 2 et 3), la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil. Sur la première branche IV. Il n'existe pas de définition légale des dommages matériels et immatériels au sens du droit des assurances.