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11/12/2019 | FRANCE | N°18-87121

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 décembre 2019, 18-87121


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

-
M. C... Q...,

contre l'arrêt de la cour d'assises de la HAUTE-LOIRE, en date du 18 octobre 2018, qui, pour meurtre, l'a condamné à vingt-huit ans de réclusion criminelle ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 novembre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. de Larosière de Champfeu, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de l

a chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de M. le conseiller de LAROS...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

-
M. C... Q...,

contre l'arrêt de la cour d'assises de la HAUTE-LOIRE, en date du 18 octobre 2018, qui, pour meurtre, l'a condamné à vingt-huit ans de réclusion criminelle ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 novembre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. de Larosière de Champfeu, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de M. le conseiller de LAROSIÈRE de CHAMPFEU, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire PHILIPPE ;

Vu les mémoires ampliatif et personnel produits ;

Sur la recevabilité du pourvoi formé le 19 octobre 2018 par l'intermédiaire d'un avocat :

Attendu que le demandeur, ayant épuisé, par l'exercice qu'il en avait fait le 19 octobre 2018, par déclaration au greffe de l'établissement pénitentiaire, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seul est recevable le pourvoi formé par le demandeur par déclaration au greffe de l'établissement pénitentiaire le 19 octobre 2018 ;

Sur le premier moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 378 et 593 du code de procédure pénale ;

en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que la cour a été assistée de Mme R... Z..., greffier, à l'exception du mercredi 17 octobre 2018 après-midi, où elle était assistée de M. T... F... (p. 1 et p. 13 et 14), et que Mme R... V... a seule signé le procès-verbal des débats ;

1°) alors qu'aux termes de l'article 378 du code de procédure pénale, le greffier dresse, à l'effet de constater l'accomplissement des formalités prescrites, un procès-verbal qui est signé par le président et ledit greffier ; qu'il en résulte que, si plusieurs greffiers se remplacent au cours des débats, il incombe à chacun d'eux d'authentifier, par sa signature, la partie du procès-verbal concernant les actes auxquels il a personnellement assisté ; que seule Mme V... a signé le procès-verbal des débats, M. F... n'ayant pas, par sa signature apposée au pied du procès-verbal, attesté de l'exactitude de celui-ci pour la partie des débats auxquels il a assisté ; que, dès lors, la cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer du respect du texte susvisé et du principe ci-dessus rappelé ;

2°) alors que l'arrêt pénal comporte, de manière contradictoire, la mention selon laquelle la cour et les jurés étaient « assistés lors des débats (
) de Mme Z... R..., Greffier », de sorte que la procédure ne fait pas preuve de sa régularité" ;

Vu l'article 378, alinéa 1er, du code de procédure pénale ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, le greffier dresse, à l'effet
de constater l'accomplissement des formalités prescrites, un procès-verbal
qui est signé par le président et ledit greffier ; qu'il en résulte que, si plusieurs greffiers se remplacent au cours des débats, il incombe à chacun d'eux d'authentifier, par sa signature, la partie du procès-verbal concernant les actes auxquels il a personnellement assisté ;

Attendu que le procès-verbal des débats constate qu'au cours
de l'audience tenue le 17 octobre 2018 dans l'après-midi, M. F... a remplacé, en qualité de greffier, Mme V... ;

Mais attendu que M. F... n'a pas, par sa signature apposée au pied du procès-verbal, attesté de l'exactitude de celui-ci pour la partie des débats auxquels il a assisté, seule figurant la signature de Mme V..., aisément identifiable au vu des autres mentions du procès-verbal ;

Que, dès lors, la Cour de cassation n'est pas en mesure de
s'assurer du respect du texte susvisé et du principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Sur le deuxième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 6, § 1, et 6, § 3, a) de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire du code de procédure pénale, 348, 349 et 351 du même code, ensemble violation des droits de la défense ;

en ce qu'il résulte de la feuille de questions que, alors que l'accusé était renvoyé du chef d'un meurtre, il a été posé à la cour et au jury cinq questions, auxquelles il a été répondu en défaveur de l'accusé : sur l'existence de violences volontaires, sur le fait qu'elles ont entraîné la mort, sur l'usage d'une arme, sur l'intention de donner la mort, sur l'existence chez l'accusé d'un trouble psychique ou neuropsychique ;

alors que d'après le procès-verbal des débats (p. 17), le président n'a donné lecture que « des questions posées dans les termes de l'ordonnance de mise en accusation » ; que les questions auxquelles il a été répondu ne sont manifestement pas celles résultant de l'ordonnance de renvoi, et qu'il ne résulte d'aucune mention du procès-verbal que ces questions auraient été considérées comme résultant des débats par le président qui n'en a au demeurant pas fait lecture après les plaidoiries de la défense (cf. procès-verbal des débats, p. 19) ; qu'ainsi, les questions ont été irrégulièrement posées et que l'arrêt a été rendu irrégulièrement en violation des droits de la défense" ;

Vu les articles 6, § 3, a et b de la Convention européenne des droits de l'homme, et 348 du code de procédure pénale ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que tout accusé a droit notamment à être informé de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui et doit disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;

Attendu, selon le second, que le président de la cour d'assises doit donner lecture des questions auxquelles la cour et le jury auront à répondre, cette lecture n'étant pas obligatoire si les questions sont posées dans les termes de la décision de mise en accusation, ou si l'accusé ou son défenseur y renoncent ;

Attendu que le procès-verbal des débats mentionne que le président, avant les plaidoiries, a donné lecture des questions auxquelles la cour et le jury auraient à répondre, ces questions étant posées dans les termes de l'ordonnance de renvoi ;

Attendu qu'il résulte des mentions de la feuille de questions que le président a posé à la cour et au jury, trois questions, sur le fait de savoir si l'accusé avait commis des violences sur la personne de G... X..., si ces violences avaient entraîné la mort et si l'accusé avait eu l'intention de donner la mort ; qu'il a été répondu par l'affirmative à ces trois questions, à la majorité de huit voix au moins ;

Que le président a aussi posé, à titre principal, deux autres questions à la cour et au jury sur le fait de savoir, d'une part, si ces faits avaient été commis avec usage d'une arme, d'autre part, si l'accusé était atteint d'un trouble psychique ou neuro-psychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes ; qu'il a été répondu par l'affirmative à la question relative à l'usage d'une arme et par la négative à celle portant sur l'atténuation de la responsabilité, ces deux réponses ayant été acquises à la majorité de huit voix au moins ;

Mais attendu qu'en procédant ainsi, alors que, d'une part, l'usage d'une arme, circonstance aggravante légale du crime de coups mortels mais non de celui de meurtre, ne faisait pas partie de l'accusation du chef de meurtre portée contre l'accusé et, d'autre part, aucune mention du procès-verbal des débats ne permet de s'assurer que l'accusé ait été en mesure de faire valoir ses arguments sur une éventuelle atténuation de sa responsabilité, le président, qui s'est abstenu de donner lecture aux parties des deux questions relatives à l'arme et à l'atténuation de responsabilité, en l'absence de toute renonciation de l'accusé et de son défenseur à cette lecture, a méconnu les textes susvisés ;

D'où il suit que la cassation est de nouveau encourue ;

Sur le troisième moyen de cassation du mémoire ampliatif et sur le moyen unique du mémoire personnel, pris de la violation de l'article 362 du code de procédure pénale ;

en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. Q... à une peine de 28 ans de réclusion criminelle du chef de meurtre ;

alors que lorsque le maximum de la peine encourue (ici trente ans) n'a pas obtenu la majorité qualifiée, il ne peut être prononcé une peine supérieure à vingt ans de réclusion criminelle ; que la peine prononcée est illégale et que l'arrêt doit être annulé" ;

Vu l'article 362, alinéa 2, du code de procédure pénale ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, si le maximum de la peine privative de liberté encourue n'a pas obtenu la majorité de huit voix, il ne peut être prononcé une peine supérieure à vingt ans de réclusion criminelle lorsque la peine encourue est de trente ans de réclusion criminelle ;

Attendu que l'arrêt attaqué, après avoir déclaré M. Q... coupable de meurtre, l'a condamné, à la majorité absolue, à vingt-huit ans de réclusion criminelle ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que le maximum de la réclusion criminelle encourue en l'espèce était de trente ans, la cour d'assises a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;

D'où il suit que la cassation est de nouveau encourue ;

Par ces motifs,

- Sur le pourvoi formé le 19 octobre 2018 par l'intermédiaire d'un avocat :

Le DÉCLARE irrecevable ;

- Sur l'autre pourvoi :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'assises de la Haute-Loire, en date du 18 octobre 2018, ensemble la déclaration de la Cour et du jury et les débats qui l'ont précédée ;

CASSE et ANNULE, par voie de conséquence, l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises du Rhône, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises de la Haute-Loire et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze décembre deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 18-87121
Date de la décision : 11/12/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'assises de la Haute-Loire, 18 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 déc. 2019, pourvoi n°18-87121


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.87121
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