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11/12/2019 | FRANCE | N°18-19132

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 décembre 2019, 18-19132


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Smash a conclu avec Z... Q... un contrat d'agent commercial stipulant qu'il serait rémunéré par une commission de 20 %, portée à 30 % par des avenants successifs, sous réserve d'atteindre un objectif d'activité déterminé, le taux appliqué étant, à défaut, de 25 % ; que Z... Q... étant décédé, son épouse, Mme Y..., et ses enfants, MM. D... et O... Q... (les consorts Q...), ont assigné en paiement d'une indemnité de cessation de contrat la société

Smash qui, reconventionnellement, a demandé le remboursement d'avances de commi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Smash a conclu avec Z... Q... un contrat d'agent commercial stipulant qu'il serait rémunéré par une commission de 20 %, portée à 30 % par des avenants successifs, sous réserve d'atteindre un objectif d'activité déterminé, le taux appliqué étant, à défaut, de 25 % ; que Z... Q... étant décédé, son épouse, Mme Y..., et ses enfants, MM. D... et O... Q... (les consorts Q...), ont assigné en paiement d'une indemnité de cessation de contrat la société Smash qui, reconventionnellement, a demandé le remboursement d'avances de commissions ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour dire prescrite la demande de remboursement d'avances sur commissions formée par la société Smash au titre de l'année 2006, l'arrêt énonce que la société Smash n'a pas discuté la date relative à la première demande invoquée par les consorts Q... comme étant de 2012 ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la société Smash faisait valoir, dans ses conclusions, qu'elle avait présenté sa demande devant le tribunal qui l'avait rejetée par un jugement du 6 décembre 2011, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 954 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt dit qu'au titre du montant de l'indemnité de cessation du contrat, les intérêts échus pour une année entière à partir du 28 juillet 2010 produiront eux-mêmes intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le dispositif des conclusions des consorts Q... ne comportait pas cette demande, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit prescrite la demande de remboursement d'avances sur commissions formée par la société Smash au titre de l'année 2006, en ce qu'il dit qu'au titre du montant de l'indemnité de rupture, les intérêts échus pour une année entière à partir du 28 juillet 2010 produiront eux-mêmes intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 6 février 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne Mme Y..., M. D... Q... et M. O... Q... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Smash la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Smash

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait qui fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré prescrite la demande de remboursement d'avances sur commission formée par la société Smash au titre des années 2005 et 2006 ;

AUX MOTIFS QUE le 15 novembre 1996, M. Z... Q... a conclu avec la société Smash un contrat d'agent commercial, qui a fait l'objet de plusieurs avenants au cours des années ; que M. Z... Q... est décédé le [...] ; que par acte du 28 juillet 2010, Mme W... Y... veuve Q... et ses deux enfants ont assigné la société Smash devant le tribunal de grande instance de Saintes pour obtenir le paiement de la somme de 74 614,08 € avec intérêt à compter du 17 novembre 2009 et capitalisation des intérêts ; que devant le premier juge, la société Smash a soutenu que le versement indu d'un taux de commission de 5% représentait la somme de 41 641 €, dont elle a demandé le remboursement aux demandeurs ; que par jugement du 6 décembre 2011, le tribunal de grande instance de Saintes a condamné la société Smash à payer aux consorts Q... la somme de 74 614,08 € au titre de l'indemnité de rupture avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2010, dit que les intérêts échus pour une année entière à partir du 28 juillet 2010 produiront eux-mêmes intérêts, et débouté la société Smash de ses autres demandes ; que par arrêt du 21 octobre 2014, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers rendu le 14 juin 2013 sur appel de ce jugement ; que devant la cour d'appel de renvoi, la société Smash demande que les consorts Q... soient condamnés à lui payer la somme de 41 641,01 € au titre des avances sur commissions ; que les parties sollicitent l'infirmation du jugement qui avait fixé le montant de l'indemnité compensatrice à la somme de 74 614,08 € avec intérêts au taux légale à compter du 28 juillet 2010 ; que les consorts Q... s'opposent aux demandes de la société Smash en invoquant la prescription par application de l'article 2224 du code civil pour 31 258 € ; qu'il convient de retenir les éléments suivants résultant des avenants faisant la loi des parties (gras et souligné par la cour) : [
] – le 19 septembre 2005, un avenant n°5 prévoyait : « sur la période du 1er septembre 2005 au 31 décembre 2005, dite « période de référence », les parties conviennent de porter le taux de commissionnement de l'agent au taux majoré de 30% du chiffre d'affaires – pour les ventes effectuées sans remise – sous réserve d'atteindre un objectif minimum de CA pris en commande sur ladite période de HT 102 000 euros, sur ladite période. A défaut, suivant le principe déjà retenu dans l'avenant n°3, c'est le taux de 25%, toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul des commissions versées sur la période de référence au taux majoré serait réactualisé sur le mois de janvier 2006 » - le 30 janvier 2006, un avenant n°6 prévoyait : « sur la période du 1er septembre 2005 au 30 juin 2006, dite « période de référence », les parties conviennent de porter le taux de commissionnement de l'agent au taux majoré de 30% du chiffre d'affaires – pour les ventes effectuées sans remise – sous réserve d'atteindre un objectif minimum de CA pris en commande sur ladite période de HT 202 000 euros, soit HT 100 000 € pour la période du 1er janvier au 30/06/2006. A défaut, suivant le principe déjà retenu dans les précédents avenants n°3 etamp; n°5, c'est le taux de 25%, toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul des commissions versées sur la période de référence au taux majoré serait réactualisé sur le 2e trimestre 2006 » - le 25 septembre 2006, un avenant n°7 prévoyait : « sur la période du 1er septembre au 31 décembre 2006, dite « période de référence », les parties conviennent de porter le taux de commissionnement de l'agent au taux majoré de 30% du chiffre d'affaires – pour les ventes hors textile effectuées sans remise – sous réserve d'atteindre un objectif minimum de CA pris en commande sur ladite période HT 100 000 €. En ce qui concerne la gamme textile, le taux de commissionnement de l'agent s'élèvera à 10% du chiffre d'affaires, pour les ventes effectuées sans remise. (
) A défaut, suivant le principe déjà retenu dans les précédents avenants n°3, n°5 etamp; n°6, c'est le taux de 25%, toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul de l'écart de commissions versées sur les périodes couvertes par les avenants détaillés supra (différence entre le taux majoré et le taux en vigueur entre les parties) serait réactualisé sur le 1er trimestre 2007, à compter du mois de janvier » - l'objectif d'activité a été revu par avenant n°9 du 17 septembre 2007 pour être porté à 110 000 € (période de référence du 1er septembre 2007 au 31 décembre 2007) mais modifie quelque peu la règle applicable convenue à défaut d'atteinte des objectifs comme suit : « à défaut d'atteinte de l'objectif d'activité défini supra, suivant le principe déjà retenu dans les précédents avenants – n°3, n°5 etamp; n°9, c'est le taux de 25% toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul de l'écart de commissions versées sur les périodes couvertes par les avenants détaillés supra (différence entre le taux majoré et le taux en vigueur entre les parties) serait réactualisé sur le 1er trimestre 2008, à compter du mois de octobre » (sic) ; - l'objectif d'activité a été revu par avenant n°10 du 3 mars 2008 pour être porté à 200 000 € (période de référence du 1er septembre 2007 au 31 août 2008) « soit 100 000 € » mais modifie quelque peu la règle applicable à défaut d'atteinte des objectifs comme suit : « à défaut d'atteinte de l'objectif d'activité défini supra, suivant le principe déjà retenu dans les précédents avenants – n°3, n°5 etamp; n°6, c'est le taux de 25%, toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul de l'écart de commissions versées sur les périodes couvertes par les avenants détaillés supra (différence entre le taux majoré et le taux en vigueur entre les parties) serait réactualisé sur le 4e trimestre 2008, à compter du mois de octobre 2008 » ; que ce faisant, cet avenant du 3 mars 2008 a augmenté le montant des objectifs à atteindre mais en augmentant la période de référence concernée laquelle intègre la période de référence visée par l'avenant n°9 ; qu'elle reporte de manière contractuelle l'appréciation du maintien ou non du taux majoré de 30% sur une actualisation à compter du mois d'octobre 2008 [
] ; que c'est donc bien l'avenant n°10 qui est applicable au jour du décès de M. Q... sans qu'aucun élément ne permettre de considérer que la société Smash aient entendu renoncer à son droit de réclamer le différentiel entre le taux de base de 25% et celui majoré de 30%, les 5% étant réglés par avances sur commissions en application du contrat ; que la somme réclamée de 41 641,01 € correspondant aux avances perçues de 2003 à 2008 ; que la société Smash la réclame en exécution du dernier avenant conclu entre les parties le 3 mars 2008 ; que les consorts Q... opposent que la société Smash est prescrite pour partie des sommes réclamées en application de l'article 2224 du code civil pour 2003, 2004, 2005 et 2006, pour un montant totale de 31 258,87 € dès lors que la demande n'a été utilement invoquée que par le dépôt de conclusions signifiées en 2012 ; que la société Smash n'a pas fait valoir de moyens sur ce point ; qu'il résulte de l'article 2224 du code civil résultant de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer » ; qu'il ne résulte pas de l'avenant n°3 de dispositions contractuelles prévoyant une faculté de la société Smash à obtenir la réduction rétroactive du taux majoré de 30% pour la période d'objectifs antérieure au 1er septembre 2005 ; que cet avenant est donc applicable jusqu'à la période d'objectif débutant au 1er septembre 2005 ; que c'est en effet postérieurement à la lettre recommandée du 31 mars 2004 que les parties ont convenu d'un tel système tendant à généraliser un taux de 25% et à considérer que le taux majoré de 30% serait conditionné par la réalisation d'objectifs fixés ; qu'en conséquence, si la société Smash entendait voir juger qu'elle était en droit de diminuer le commissionnement de 30% prévu par l'avenant n°3, elle devait agir sur ce point dans le délai de cinq ans suivant la signature de l'avenant n°5 intervenu le 19 septembre 2005 soit avant le 19 septembre 2010 ; que les demandes de remboursement de sommes qualifiées d'indues pour les années 2003, 2004 et jusqu'au 1er septembre 2005 sont donc prescrites ; qu'à partir de l'avenant n°5, le point de départ de la prescription au sens de l'article 224 du code civil débute au 1er jour du mois d'actualisation contractuellement prévu lequel correspond au jour où la société Smash, titulaire du droit allégué a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer soit : – pour l'avenant n°5 le 1er janvier 2006 – pour l'avenant n°6 le 1er avril 2006 – pour l'avenant n°7 le 1er janvier 2007 – pour l'avenant n°9 le 1er janvier 2008 – pour l'avenant n°10 le 1er octobre 2008 ; que devant le tribunal de grande instance de Saintes, l'action a été engagée par Mme veuve Q... et ses enfants le 28 juillet 2010 ; que la demande reconventionnelle a été exercée en cours de procédure de première instance ; que la société Smash n'a pas discuté les points de départ ni la date relative à la première demande invoquée par les intimés comme étant de 2012 ; qu'en conséquence, les consorts Q... sont fondés à soutenir que les sommes réclamées (pièce 18 appelante) pour la période du 1er septembre 2005 au 31 décembre 2006 sont prescrites ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; que la société Smash soutenait que son action tendant au remboursement des avances sur commissions était soumise à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil, dont le délai pouvait être interrompu par l'une des causes prévues par l'article 2241 du même code, que, par acte du 28 juillet 2010, les consorts Q... l'avaient assignée devant le tribunal de grande instance de Saintes en paiement d'une indemnité compensatrice au titre de la rupture du contrat d'agent commercial et que, dans la même instance, elle avait formé une demande reconventionnelle en remboursement d'avances sur commissions versées, notamment, en 2005 et 2006, dont le tribunal de grande instance l'avait déboutée par jugement du 6 décembre 2011, de sorte que son action tendant à la restitution de ces avances n'était pas prescrite ; qu'en retenant que la société Smash ne faisait pas valoir de moyen sur la prescription de son action soulevée par les consorts Q... sur le fondement de l'article 2224 du code civil dès lors que, selon eux, la demande n'aurait pas été utilement formée par le dépôt de conclusions prétendument signifiées en 2012, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Smash et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la prescription d'une créance ne court qu'à compter de la date à laquelle elle est exigible ; qu'il résulte des propres constatations et énonciations de l'arrêt, d'une part, que la société Smash demandait le remboursement d'avances sur commissions en exécution de l'avenant n°10 du 3 mars 2008, aux termes duquel le calcul de l'écart de commissions versées au cours des « périodes couvertes par les avenants détaillés supra », et donc, notamment, des avenants n°5 et n°6, couvrant la période écoulée « du 1er septembre 2005 au 30 juin 2006 », serait « réactualisé sur le 4e trimestre 2008, à compter du mois d'octobre 2008 » et, d'autre part, que le point de départ de la prescription quinquennale applicable devait être fixé au premier jour du mois d'actualisation contractuellement prévu soit, « pour l'avenant n°10 », « le 1er octobre 2008 » ; qu'en retenant, néanmoins, que dès lors que la société Smash aurait formé sa demande de remboursement des avances en 2012, son action aurait été prescrite pour la période du 1er septembre 2005 au 31 décembre 2006, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, qu'où il résultait que la prescription n'avait pu courir qu'à compter du mois d'octobre 2008, date de l'actualisation, sur laquelle l'action était fondée, a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, ensemble les articles 2219 et 2224 du même code ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en va autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat d'agent commercial ; que, dès lors, la demande en justice tendant au paiement d'une indemnité compensatrice en cas de rupture du contrat d'agent commercial interrompt la prescription de l'action tendant au remboursement d'avances sur commissions versées à l'agent commercial exercée, dans la même instance, sur le fondement de ce même contrat ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que, par acte du 28 juillet 2010, les consorts Q... avaient saisi le tribunal de grande instance de Saintes d'une action en paiement d'une indemnité compensatrice à la suite de la rupture du contrat d'agent commercial conclu entre M. Z... Q... et la société Smash, de sorte qu'à cette date, la prescription de l'action en remboursement des avances sur commissions, versées à M. Q... en exécution des avenants au contrat d'agent commercial, formée par la société Smash au cours de la même instance, devant ce même tribunal, avait été interrompue ; qu'en retenant que le délai de prescription quinquennale de l'action en remboursement des avances sur commissions aurait été prescrite pour la période du 1er septembre 2005 au 31 décembre 2006, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 2224 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait qui fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré prescrite la demande de remboursement d'avances sur commission formée par la société Smash au titre de l'année 2006 ;

AUX MOTIFS QUE le 15 novembre 1996, M. Z... Q... a conclu avec la société Smash un contrat d'agent commercial, qui a fait l'objet de plusieurs avenants au cours des années ; que M. Z... Q... est décédé le [...] ; que par acte du 28 juillet 2010, Mme W... Y... veuve Q... et ses deux enfants ont assigné la société Smash devant le tribunal de grande instance de Saintes pour obtenir le paiement de la somme de 74 614,08 € avec intérêt à compter du 17 novembre 2009 et capitalisation des intérêts ; que devant le premier juge, la société Smash a soutenu que le versement indu d'un taux de commission de 5% représentait la somme de 41 641 €, dont elle a demandé le remboursement aux demandeurs ; que par jugement du 6 décembre 2011, le tribunal de grande instance de Saintes a condamné la société Smash à payer aux consorts Q... la somme de 74 614,08 € au titre de l'indemnité de rupture avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2010, dit que les intérêts échus pour une année entière à partir du 28 juillet 2010 produiront eux-mêmes intérêts, et débouté la société Smash de ses autres demandes ; que par arrêt du 21 octobre 2014, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers rendu le 14 juin 2013 sur appel de ce jugement ; que devant la cour d'appel de renvoi, la société Smash demande que les consorts Q... soient condamnés à lui payer la somme de 41 641,01 € au titre des avances sur commissions ; que les parties sollicitent l'infirmation du jugement qui avait fixé le montant de l'indemnité compensatrice à la somme de 74 614,08 € avec intérêts au taux légale à compter du 28 juillet 2010 ; que les consorts Q... s'opposent aux demandes de la société Smash en invoquant la prescription par application de l'article 2224 du code civil pour 31 258 € ; qu'il convient de retenir les éléments suivants résultant des avenants faisant la loi des parties (gras et souligné par la cour) : [
] – le 19 septembre 2005, un avenant n°5 prévoyait : « sur la période du 1er septembre 2005 au 31 décembre 2005, dite « période de référence », les parties conviennent de porter le taux de commissionnement de l'agent au taux majoré de 30% du chiffre d'affaires – pour les ventes effectuées sans remise – sous réserve d'atteindre un objectif minimum de CA pris en commande sur ladite période de HT 102 000 euros, sur ladite période. A défaut, suivant le principe déjà retenu dans l'avenant n°3, c'est le taux de 25%, toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul des commissions versées sur la période de référence au taux majoré serait réactualisé sur le mois de janvier 2006 » - le 30 janvier 2006, un avenant n°6 prévoyait : « sur la période du 1er septembre 2005 au 30 juin 2006, dite « période de référence », les parties conviennent de porter le taux de commissionnement de l'agent au taux majoré de 30% du chiffre d'affaires – pour les ventes effectuées sans remise – sous réserve d'atteindre un objectif minimum de CA pris en commande sur ladite période de HT 202 000 euros, soit HT 100 000 € pour la période du 1er janvier au 30/06/2006. A défaut, suivant le principe déjà retenu dans les précédents avenants n°3 etamp; n°5, c'est le taux de 25%, toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul des commissions versées sur la période de référence au taux majoré serait réactualisé sur le 2e trimestre 2006 » - le 25 septembre 2006, un avenant n°7 prévoyait : « sur la période du 1er septembre au 31 décembre 2006, dite « période de référence », les parties conviennent de porter le taux de commissionnement de l'agent au taux majoré de 30% du chiffre d'affaires – pour les ventes hors textile effectuées sans remise – sous réserve d'atteindre un objectif minimum de CA pris en commande sur ladite période HT 100 000 €. En ce qui concerne la gamme textile, le taux de commissionnement de l'agent s'élèvera à 10% du chiffre d'affaires, pour les ventes effectuées sans remise. (
) A défaut, suivant le principe déjà retenu dans les précédents avenants n°3, n°5 etamp; n°6, c'est le taux de 25%, toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul de l'écart de commissions versées sur les périodes couvertes par les avenants détaillés supra (différence entre le taux majoré et le taux en vigueur entre les parties) serait réactualisé sur le 1er trimestre 2007, à compter du mois de janvier » - l'objectif d'activité a été revu par avenant n°9 du 17 septembre 2007 pour être porté à 110 000 € (période de référence du 1er septembre 2007 au 31 décembre 2007) mais modifie quelque peu la règle applicable convenue à défaut d'atteinte des objectifs comme suit : « à défaut d'atteinte de l'objectif d'activité défini supra, suivant le principe déjà retenu dans les précédents avenants – n°3, n°5 etamp; n°9, c'est le taux de 25% toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul de l'écart de commissions versées sur les périodes couvertes par les avenants détaillés supra (différence entre le taux majoré et le taux en vigueur entre les parties) serait réactualisé sur le 1er trimestre 2008, à compter du mois de octobre » (sic) ; - l'objectif d'activité a été revu par avenant n°10 du 3 mars 2008 pour être porté à 200 000 € (période de référence du 1er septembre 2007 au 31 août 2008) « soit 100 000 € » mais modifie quelque peu la règle applicable à défaut d'atteinte des objectifs comme suit : « à défaut d'atteinte de l'objectif d'activité défini supra, suivant le principe déjà retenu dans les précédents avenants – n°3, n°5 etamp; n°6, c'est le taux de 25%, toujours en vigueur entre les parties qui serait retenu. Dans ce cas, et le cas échéant, le calcul de l'écart de commissions versées sur les périodes couvertes par les avenants détaillés supra (différence entre le taux majoré et le taux en vigueur entre les parties) serait réactualisé sur le 4e trimestre 2008, à compter du mois de octobre 2008 » ; que ce faisant, cet avenant du 3 mars 2008 a augmenté le montant des objectifs à atteindre mais en augmentant la période de référence concernée laquelle intègre la période de référence visée par l'avenant n°9 ; qu'elle reporte de manière contractuelle l'appréciation du maintien ou non du taux majoré de 30% sur une actualisation à compter du mois d'octobre 2008 [
] ; que c'est donc bien l'avenant n°10 qui est applicable au jour du décès de M. Q... sans qu'aucun élément ne permettre de considérer que la société Smash aient entendu renoncer à son droit de réclamer le différentiel entre le taux de base de 25% et celui majoré de 30%, les 5% étant réglés par avances sur commissions en application du contrat ; que la somme réclamée de 41 641,01 € correspondant aux avances perçues de 2003 à 2008 ; que la société Smash la réclame en exécution du dernier avenant conclu entre les parties le 3 mars 2008 ; que les consorts Q... opposent que la société Smash est prescrite pour partie des sommes réclamées en application de l'article 2224 du code civil pour 2003, 2004, 2005 et 2006, pour un montant totale de 31 258,87 € dès lors que la demande n'a été utilement invoquée que par le dépôt de conclusions signifiées en 2012 ; que la société Smash n'a pas fait valoir de moyens sur ce point ; qu'il résulte de l'article 2224 du code civil résultant de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer » ; qu'il ne résulte pas de l'avenant n°3 de dispositions contractuelles prévoyant une faculté de la société Smash à obtenir la réduction rétroactive du taux majoré de 30% pour la période d'objectifs antérieure au 1er septembre 2005 ; que cet avenant est donc applicable jusqu'à la période d'objectif débutant au 1er septembre 2005 ; que c'est en effet postérieurement à la lettre recommandée du 31 mars 2004 que les parties ont convenu d'un tel système tendant à généraliser un taux de 25% et à considérer que le taux majoré de 30% serait conditionné par la réalisation d'objectifs fixés ; qu'en conséquence, si la société Smash entendait voir juger qu'elle était en droit de diminuer le commissionnement de 30% prévu par l'avenant n°3, elle devait agir sur ce point dans le délai de cinq ans suivant la signature de l'avenant n°5 intervenu le 19 septembre 2005 soit avant le 19 septembre 2010 ; que les demandes de remboursement de sommes qualifiées d'indues pour les années 2003, 2004 et jusqu'au 1er septembre 2005 sont donc prescrites ; qu'à partir de l'avenant n°5, le point de départ de la prescription au sens de l'article 224 du code civil débute au 1er jour du mois d'actualisation contractuellement prévu lequel correspond au jour où la société Smash, titulaire du droit allégué a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer soit : – pour l'avenant n°5 le 1er janvier 2006 – pour l'avenant n°6 le 1er avril 2006 – pour l'avenant n°7 le 1er janvier 2007 – pour l'avenant n°9 le 1er janvier 2008 – pour l'avenant n°10 le 1er octobre 2008 ; que devant le tribunal de grande instance de Saintes, l'action a été engagée par Mme veuve Q... et ses enfants le 28 juillet 2010 ; que la demande reconventionnelle a été exercée en cours de procédure de première instance ; que la société Smash n'a pas discuté les points de départ ni la date relative à la première demande invoquée par les intimés comme étant de 2012 ; qu'en conséquence, les consorts Q... sont fondés à soutenir que les sommes réclamées (pièce 18 appelante) pour la période du 1er septembre 2005 au 31 décembre 2006 sont prescrites ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; que la société Smash soutenait, devant la cour d'appel, que son action tendant au remboursement des avances sur commissions était soumise à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil, dont le délai pouvait être interrompu par l'une des causes prévues par l'article 2241 du même code, et que, devant le tribunal de grande instance de Saintes, elle avait formé une demande reconventionnelle en remboursement des avances sur commissions versées, dont elle avait été déboutée « par jugement du 6 décembre 2011 », de sorte que son action tendant à la restitution de ces avances n'était pas prescrite ; qu'en retenant que la société Smash ne faisait pas valoir de moyen sur la prescription soulevée par les consorts Q..., et qu'elle n'aurait pas contesté « la date relative à sa première demande invoquée par les intimés comme étant de 2012 », la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Smash et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la demande en justice interrompt le délai de prescription ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la société Smash avait formé sa demande de remboursement des avances sur commissions « au cours de la procédure de première instance » et qu'elle avait été déboutée de cette demande par jugement du 6 décembre 2011 ; qu'en retenant que, selon l'avenant n°7, l'actualisation des sommes versées pouvait être effectuée le 1er janvier 2007, point de départ de la prescription quinquennale, de sorte que l'action en remboursement des avances versées jusqu'au 31 décembre 2006 aurait été prescrite, quand il résultait de ses constatations que la prescription avait nécessairement été interrompue par la demande formée de ce chef avant le 6 décembre 2011, la cour d'appel a violé les articles 2224 et 2241 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait qui fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit qu'au titre de la somme de 67 504,32 € due par la société Smash aux consorts Q..., les intérêts échus pour une année entière à partir du 28 juillet 2010 produiraient eux-mêmes intérêts, conformément à l'article 1154 du code civil ;

AUX MOTIFS QUE par acte du 28 juillet 2010, les consorts Q... ont assigné la société Smash devant le tribunal de grande instance de Saintes pour obtenir le paiement de la somme de 74 614,08 € avec intérêt à compter du 17 novembre 2009 et capitalisation des intérêts ; que par jugement du 6 décembre 2011, le tribunal de grande instance de Saintes a condamné la société Smash à payer aux consorts Q... la somme de 74 614,08 € au titre de l'indemnité de rupture avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 2010, dit que les intérêts échus pour une année entière à partir du 28 juillet 2010 produiront eux-mêmes intérêts, et débouté la société Smash de ses autres demandes ; que par arrêt du 21 octobre 2014, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers rendu le 14 juin 2013 sur appel de ce jugement ; que devant la cour d'appel de renvoi, les parties sollicitent l'infirmation du jugement qui avait fixé le montant de l'indemnité compensatrice à la somme de 74 614,08 € avec intérêts au taux légale à compter du 28 juillet 2010 ; que l'indemnité compensatrice de rupture due par la société Smash aux consorts Q... en application de l'article L. 134-12 du code de commerce s'élève à la somme de 67 504,32 € ;

1°) ALORS QUE la cour de statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions d'appel ; qu'aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions d'appel, les consorts Q... ne demandaient pas que les intérêts produits par la somme due au titre de l'indemnité compensatrice produisent, eux-mêmes, intérêts ; qu'en ordonnant la capitalisation des intérêts, la cour d'appel a violé l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile ;

2°)ALORS QUE les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que les consorts Q... ne demandaient pas, devant la cour d'appel, que les intérêts produits par la somme due au titre de l'indemnité compensatrice produisent, eux-mêmes, intérêts ; qu'en ordonnant d'office la capitalisation des intérêts, la cour d'appel a violé l'article 1154 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-19132
Date de la décision : 11/12/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 06 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 déc. 2019, pourvoi n°18-19132


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.19132
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