La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/12/2019 | FRANCE | N°17-20230;17-20283

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 décembre 2019, 17-20230 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° R 17-20.230 et Y 17-20.283, qui attaquent le même arrêt ;

Sur les moyens uniques des pourvois, rédigés en termes identiques, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 mars 2017), que la société SEBM, ayant pour gérant M. Y... jusqu'au 15 décembre 2013, a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 9 octobre 2014 et 3 décembre 2014, la société R...-Z...-X... étant désignée liquidateur ; que cette dernière a poursuivi M. Y... en r

esponsabilité pour insuffisance d'actif ;

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° R 17-20.230 et Y 17-20.283, qui attaquent le même arrêt ;

Sur les moyens uniques des pourvois, rédigés en termes identiques, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 mars 2017), que la société SEBM, ayant pour gérant M. Y... jusqu'au 15 décembre 2013, a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 9 octobre 2014 et 3 décembre 2014, la société R...-Z...-X... étant désignée liquidateur ; que cette dernière a poursuivi M. Y... en responsabilité pour insuffisance d'actif ;

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société R...-Z...-X... la somme de 87 390,36 euros au titre de l'insuffisance d'actif durant sa période de gestion alors, selon le moyen :

1°/ que la recevabilité d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif suppose que soient connus le montant du passif admis et vérifié ainsi que l'actif existant au jour de l'ouverture de la procédure collective de la personne morale ; qu'à défaut, le montant de l'insuffisance d'actif n'est pas déterminé et n'est même pas certain ; que M. Y... faisait valoir que le montant du passif de la société SEBM dont le liquidateur judiciaire faisait état était imprécis, qu'il n'avait pas été vérifié, qu'aucune décision du juge-commissaire n'avait été rendue, et que ce passif seulement déclaré ne pouvait lui être opposable car il n'était plus gérant de la société au moment de l'ouverture de la procédure collective ; qu'en se bornant à relever, pour condamner M. Y... à payer au liquidateur judiciaire la somme de 87 390,36 euros, que les créances déclarées s'élevaient à 197 821,29 euros, dont 192 821,29 euros à titre échu et 5 000 euros à titre provisionnel, à 65 583,79 euros à titre privilégié et que la créance déclarée du bailleur était d'un montant de 126 578,68 euros, sans constater que ces créances déclarées avaient été vérifiées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

2°/ qu'un dirigeant retiré ne peut être condamné à payer une partie de l'insuffisance d'actif que si celle-ci existe à la date de la cessation de ses fonctions ; qu'en se bornant à affirmer que l'accumulation des dettes de loyers avait participé à la création de l'insuffisance d'actif constatée à l'ouverture de la procédure collective, sans préciser le montant de l'actif et du passif de la société SEBM à la date où M. Y... avait cessé de la diriger ni indiquer si l'insuffisance d'actif existait déjà à cette date, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

3°/ que seule la faute de gestion ayant conduit à l'insuffisance d'actif peut justifier la condamnation d'un dirigeant social à supporter tout ou partie de cette insuffisance ; que M. Y... faisait valoir qu'à la fin de ses fonctions de dirigeant, le passif de la société SEBM était limité et que le juge des référés, dans une décision du 6 février 2014, avait accordé un délai de vingt-trois mois pour se libérer de la dette de loyers, ce dont il s'évinçait que M. Y... n'avait nullement contribué à augmenter l'insuffisance d'actif de la société SEBM ; qu'en condamnant M. Y... à payer au liquidateur la somme de 87 390,36 euros au titre de l'insuffisance d'actif, sans rechercher si, au moment où M. Y... avait quitté ses fonctions, avait déjà été créée la situation qui devait conduire, presqu'un an plus tard, à la cessation des paiements de la société et à l'insuffisance d'actif invoquée par le liquidateur judiciaire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté, par motifs propres et adoptés, que les créances déclarées s'élevaient à 197 821,29 euros, dont 87 390,36 euros résultant d'une condamnation définitive au titre de loyers impayés, et qu'elles n'avaient pas été contestées tandis qu'aucun actif n'avait pu être recouvré et que l'inventaire de l'actif avait donné lieu à l'établissement d'un procès-verbal de carence ; que par ces constatations et appréciations, desquelles il résulte que l'insuffisance d'actif s'avérait certaine et au moins égale à la somme de 87 390,36 euros à laquelle elle condamnait M. Y... au titre de l'insuffisance d'actif, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder aux recherches non demandées invoquées par les deuxième et troisième branches, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société R...-X..., en qualité de liquidateur de la société SEBM, la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen identique aux pourvois n° R 17-20.230 et Y 17-20.283 produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a condamné monsieur S... Y... à payer à la SCP R... Z... X... la somme de 87.390,36 euros au titre des loyers impayés durant sa période de gestion de droit ;

Aux motifs propres qu'aux termes de l'article L.651-2 du code de commerce, « Lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous ses dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables... » ;
Sur l'insuffisance d'actif : que les créances déclarées s'élèvent à 197.821,29 euros, dont 192.821,29 euros à titre échu et 5.000 euros à titre provisionnel, et 65.583,79 euros à titre privilégié ; que la créance déclarée par le bailleur est d'un montant de 126.578, 68 euros ; que ces créances n'ont pas été contestées, monsieur B..., gérant de la société SEBM, n'ayant pas répondu aux convocations adressées par le mandataire judiciaire ; qu'aucun actif n'ayant pu être recouvré, et le commissaire-priseur en charge de l'inventaire des actifs ayant dressé un procès-verbal de carence, l'insuffisance d'actif est certaine à hauteur de la somme de 192.821,29 euros ;
Sur la responsabilité de Monsieur Y... : que monsieur Y... a été le gérant de droit de la société SEBM de sa création le 28 décembre 2011 au 15 décembre 2013, date de la cession de l'intégralité des parts sociales à monsieur B... au prix de 10 euros ; que cet acte a été enregistré le 13 mai 2014 et le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire, actant le changement de gérant, a été déposé au greffe du tribunal de commerce de Nice le 3 juin 2014 ; que le mandataire judiciaire soutient que Monsieur Y... a continué à gérer la société après la cession des titres à monsieur B... gérant de paille selon lui ; toutefois qu'aucun élément du dossier ne démontre que monsieur Y... a continué à administrer et gérer la société en toute indépendance après cette cession, les courriers versés aux débats s'échelonnant entre le 16 janvier 2012 et le 3 décembre 2013 antérieurs à la cession ne pouvant l'établir ; que le fait que monsieur B... se soit désintéressé de la procédure et n'ait répondu à aucune des convocations du mandataire judiciaire ne peut établir la gestion de fait reprochée à monsieur Y... ; que par conséquent seules les fautes antérieures à la cession des parts peuvent être retenues à l'encontre de monsieur Y... ; qu'il est certain qu'il a laissé s'accumuler fautivement des dettes de loyers, l'ordonnance définitive de référé du 6 février 2014 rendue sur assignation délivrée par le bailleur le 23 juillet 2013 ayant retenu un montant d'arriérés locatifs de 87.390,36 euros ; que cette défaillance pendant plusieurs années a participé à la création de l'insuffisance d'actif constatée à l'ouverture de la procédure collective ; que la date de cessation des paiements, fixée par le tribunal au 9 octobre 2014, n'ayant pas fait l'objet d'une décision de report, et seule cette date pouvant être retenue par la Cour pour apprécier l'existence de la faute reprochée à monsieur Y..., il ne peut lui être utilement fait grief d'avoir tardé à déclarer la cessation des paiements de la société SEBM en sa qualité de gérant de droit ; que la démonstration de la poursuite d'une activité déficitaire ne peut résulter de la seule production de l'état de créances déclarées, non accompagnée des déclarations des créances ; que le jugement ayant condamné monsieur Y... à verser au mandataire judiciaire une somme de 87.390,36 euros au titre de l'insuffisance d'actif imputable à sa faute de gestion sera confirmé ; que si Me X... ès qualités demande dans le dispositif de ses écritures la condamnation solidaire de monsieur B... en qualité de gérant de droit au paiement de la somme de 197.821,29 euros, il ne précise ni ne détaille les fautes de gestion de monsieur B... à l'origine de l'insuffisance d'actif, argumentant sur les seules fautes personnelles de monsieur Y... ; que le jugement sera par conséquent confirmé en toutes ses dispositions ;

Et aux motifs adoptés que, concernant la faute de gestion de monsieur S... Y... : qu'il a créé la Sarl SEBM en décembre 2011 et en a assuré la gérance de droit jusqu'au 15 décembre 2013 ; qu'à cette même date, monsieur Y... a cédé à monsieur B... ses parts de la Sarl SEBM pour 10,00 € ; que suite à une assignation du bailleur (SCI Charmettes), en date du 23 juillet 2013, une ordonnance de référé ayant pour objet la résiliation du bail et le paiement des loyers impayés et annexes a été rendue par le tribunal de grande instance de Nice le 6 février 2014 ; que ces loyers impayés s'élevaient à 47.230,43 € en juillet 2013 et que la condamnation définitive sur ce chef s'établit à 87.390,36 € ; que cette somme porte intérêts et pénalités qui ont, de ce fait augmenté l'insuffisance d'actif ; qu'il y a lieu de considérer que durant la période où il a exercé la gérance de la Sarl SEBM, monsieur Y... en ne réglant pas les loyers a fait une faute de gestion caractérisée et que cette dernière a contribué à augmenter l'insuffisance d'actif de la Sarl SEBM ; en conséquence qu'il y a lieu de condamner monsieur Y... à payer à la SCP R...-Z...-X..., représentée par monsieur X..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la Sarl SEBM, la somme de 87.390,36 € pour les loyers impayés durant sa période de gestion, ce qui a contribué à augmenter l'insuffisance d'actif de la Sarl SEBM ;
Concernant la gestion de fait : que la gérance de fait serait constituée par des échanges de courrier entre monsieur Y... et la bailleresse postérieurement à la cession ; que les courriers versés aux débats sont datés d'une période comprise entre janvier 2012 et le 3 décembre 2013 ; que le mandataire n'apporte aucun élément concret et pertinent pour démontrer une gestion de fait de la part de monsieur Y... après la cession du 15 décembre 2013 ; qu'il y a lieu de débouter le mandataire de sa demande concernant la gestion de fait de monsieur Y... ;
Concernant le passif déclaré de 197.821,29 € : qu'il est fait état par le mandataire d'un passif de 197.821,29 € ; que ce passif est constitué essentiellement d'une créance du Crédit Mutuel pour un montant de 64.439,79 € et d'une créance vis-à-vis de la bailleresse pour un montant total de 126.578,68 euros ; que la créance du Crédit Mutuel est relative à un crédit dont monsieur Y... est caution et qu'il continue à régler ; en conséquence, qu'il y a lieu de ne pas en tenir compte ; que monsieur B..., gérant de droit depuis le 15 décembre 2013 ne s'est jamais présenté à aucune convocation ; qu'il y a lieu de considérer que son absence de coopération, constitue une faute de gestion, mais rien ne permet d'établir que cette faute a entraîné une augmentation de l'insuffisance d'actif ; en conséquence, il y a lieu de débouter la SCP R...-Z...-X..., représentée par Maître X..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la Sarl SEBM de sa demande visant à condamner monsieur B... au paiement de l'insuffisance d'actif ;

1°) Alors que la recevabilité d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif suppose que soient connus le montant du passif admis et vérifié ainsi que l'actif existant au jour de l'ouverture de la procédure collective de la personne morale ; qu'à défaut, le montant de l'insuffisance d'actif n'est pas déterminé et n'est même pas certain ; que monsieur Y... faisait valoir que le montant du passif de la société SEBM dont le liquidateur judiciaire faisait état était imprécis, qu'il n'avait pas été vérifié, qu'aucune décision du juge commissaire n'avait été rendue, et que ce passif seulement déclaré ne pouvait lui être opposable car il n'était plus gérant de la société au moment de l'ouverture de la procédure collective ; qu'en se bornant à relever, pour condamner monsieur Y... à payer au liquidateur judiciaire la somme de 87.390,36 euros, que les créances déclarées s'élevaient à 197.821,29 euros, dont 192.821,29 euros à titre échu et 5.000 euros à titre provisionnel, à 65.583,79 euros à titre privilégié et que la créance déclarée du bailleur était d'un montant de 126.578,68 euros, sans constater que ces créances déclarées avaient été vérifiées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.651-2 du code de commerce ;

2°) Alors qu'un dirigeant retiré ne peut être condamné à payer une partie de l'insuffisance d'actif que si celle-ci existe à la date de la cessation de ses fonctions ; qu'en se bornant à affirmer que l'accumulation des dettes de loyers avait participé à la création de l'insuffisance d'actif constatée à l'ouverture de la procédure collective, sans préciser le montant de l'actif et du passif de la société SEBM à la date où monsieur Y... avait cessé de la diriger ni indiquer si l'insuffisance d'actif existait déjà à cette date, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.651-2 du code de commerce ;

3°) Alors que seule la faute de gestion ayant conduit à l'insuffisance d'actif peut justifier la condamnation d'un dirigeant social à supporter tout ou partie de cette insuffisance ;que monsieur Y... faisait valoir qu'à la fin de ses fonctions de dirigeant, le passif de la société SEBM était limité et que le juge des référés, dans une décision du 6 février 2014, avait accordé un délai de 23 mois pour se libérer de la dette de loyers, ce dont il s'évinçait que monsieur Y... n'avait nullement contribué à augmenter l'insuffisance d'actif de la société SEBM ; qu'en condamnant monsieur Y... à payer au liquidateur la somme de 87.390,36 euros au titre de l'insuffisance d'actif, sans rechercher si, au moment où monsieur Y... avait quitté ses fonctions, avait déjà été créée la situation qui devait conduire, presqu'un an plus tard, à la cessation des paiements de la société et à l'insuffisance d'actif invoquée par le liquidateur judiciaire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.651-2 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-20230;17-20283
Date de la décision : 11/12/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 déc. 2019, pourvoi n°17-20230;17-20283


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Marlange et de La Burgade, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.20230
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award