LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 7 septembre 2018), que la veuve de Q... J... (la victime), ancien salarié de la société Wendel Sidelor, aux droits de laquelle vient la société Arcelormittal France (l'employeur), décédé le [...] , a souscrit, le 27 juin 2011, une déclaration de maladie professionnelle pour une pathologie prise en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle ; que les ayants droit de la victime ont saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de constater que le désistement de son appel n'est pas parfait et n'a pas produit d'effet, et de confirmer le jugement reconnaissant sa faute inexcusable, alors, selon le moyen :
1°/ que le désistement de l'appel n'a besoin d'être accepté que s'il contient des réserves ou si la partie à l'égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente ; que seule la partie à l'encontre de laquelle les réserves ont été formulées peut accepter, ou refuser, le désistement ; qu'en revanche, le désistement est parfait à l'égard des intimés qui ne sont pas concernés par les réserves formulées, en l'absence d'appel incident ou de demande incidente ; que ne constituent pas des demandes ou appel incidents la demande de confirmation du jugement de première instance et la formulation d'une demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'au cas présent, il est constant que les réserves formulées par l'employeur, à savoir la renonciation, par les consorts J..., aux demandes formées contre elle et tendant à la reconnaissance de sa faute inexcusable, n'étaient dirigées que contre les consorts J..., qui ont accepté ce désistement ; que la cour d'appel a constaté que ces réserves ne concernaient pas la CPAM, de sorte qu'en l'absence d'appel incident ou d'une demande incidente formulée par la caisse préalablement au désistement, la CPAM ne pouvait s'opposer à ce dernier ; qu'il est constant que la caisse n'a pas formulé de demandes ou d'appel incident puisqu'elle s'est contentée, avant le désistement, de s'en remettre à l'appréciation de la cour sur la question de la faute inexcusable, de solliciter la confirmation du jugement sur la question de l'opposabilité de la décision de prise en charge et de formuler une demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en jugeant pourtant que la CPAM s'étant opposée au désistement, ce dernier n'était pas parfait et n'avait pas produit son effet d'extinction de l'instance, tandis que les réserves formulées par l'employeur n'étaient pas dirigées contre la CPAM qui, dès lors, ne pouvait pas s'opposer au désistement de l'appel et à la renonciation, par les consorts J..., au bénéfice du jugement en ce qu'il avait retenu la faute inexcusable de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant l'article 401 du code de procédure civile ;
2°/ que seuls la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ou ses ayants droit, peuvent agir devant le tribunal des affaires de sécurité sociale pour voir reconnaître l'existence d'une faute inexcusable et statuer sur les conséquences de cette faute ; qu'en cas de pluralité d'employeurs pouvant avoir commis une faute inexcusable, seuls la victime ou ses ayants droits déterminent contre qui ils dirigent leur action en reconnaissance de la faute inexcusable ; que la victime, ou ses ayants droits, peuvent renoncer à leur droit de poursuivre un des employeurs pour faute inexcusable ; que dès lors, ils peuvent se désister partiellement de leurs demandes à l'encontre d'un employeur et peuvent renoncer au bénéfice partiel d'un jugement favorable en acceptant le désistement d'appel de l'employeur ; que la caisse primaire d'assurance maladie ne dispose à l'encontre de l'employeur que d'une action récursoire, et non subrogatoire, lorsque la faute inexcusable de l'employeur a été reconnue par une décision de justice passée en force de chose jugée ; que la caisse primaire d'assurance maladie, qui n'est que partie intervenante à titre accessoire dans le litige portant sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, ne peut accepter ou refuser le désistement d'appel d'une partie intervenante à titre principal et ne peut agir seule en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; qu'au cas présent, l'employeur s'est désistée de son appel sous réserve de la renonciation par les consorts J... aux demandes formées contre elle et tendant à la reconnaissance de sa faute inexcusable ; que l'employeur faisait valoir que seuls les ayants droit de M. J... pouvaient accepter, ou refuser, le désistement d'appel de l'employeur relatif au litige recherchant sa faute inexcusable ; que la caisse, qui était partie intervenante à titre accessoire, ne pouvait s'opposer au désistement de l'employeur et à la renonciation, par les consorts J..., au bénéfice du jugement en ce qu'il avait retenu la faute inexcusable de l'employeur ; qu'en jugeant pourtant que le désistement n'était pas parfait en raison de l'opposition de la CPAM, qui était intimée, la cour d'appel a violé les articles 401, 330, et 31 du code de procédure civile ainsi que les articles L. 452-1 L. 452-3, L. 452-3-1 et L. 452-4 du code de la sécurité sociale ;
3°/ qu'en tout état de cause, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que dans une procédure orale, lorsque la cour fait expressément référence aux conclusions des parties, reprises oralement à l'audience, il convient de s'y référer pour déterminer l'objet du litige ; qu'au cas présent, à supposer que la CPAM ait pu s'opposer au désistement d'appel de l'employeur, les consorts J... faisaient valoir à titre principal qu'ils acceptaient de renoncer à toute demande formée contre l'employeur tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de cette dernière et que la demande de la caisse de reconnaître la faute inexcusable de l'employeur était irrecevable ; que l'employeur faisait quant à lui valoir qu'il acceptait le désistement d'instance des consorts J... et leur renonciation au bénéfice du jugement uniquement en ce qu'il avait constaté la faute inexcusable de l'employeur ; que la CPAM ne pouvait s'y opposer ; que la CPAM n'étant pas titulaire du droit d'agir en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la renonciation, par les consorts J..., de faire reconnaître la faute inexcusable de l'employeur et leur renonciation au bénéfice du jugement sur ce point empêchait la cour d'appel de se prononcer sur l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur, et des conséquences pécuniaires d'une telle faute ; qu'en confirmant cependant le jugement en ce qu'il avait retenu l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur et en ce que la CPAM pouvait exercer son action récursoire notamment à l'encontre de l'employeur, tandis que les consorts J..., seuls titulaires du droit d'agir en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, avaient renoncé à rechercher la faute inexcusable de l'employeur et renoncé au bénéfice du jugement sur ce point, la cour d'appel a modifié l'objet du litige, violant l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu que selon l'article 401 du code de procédure civile, le désistement d'appel n'a besoin d'être accepté que s'il contient des réserves ou si la partie à l'égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente ;
Et attendu qu'ayant constaté que la caisse s'opposait au désistement d'appel de l'employeur, fait sous réserve de la renonciation par les ayants droit à leur demande de reconnaissance de sa faute inexcusable, la cour d'appel en a exactement déduit, sans modifier les termes du litige, que ce désistement d'appel n'était pas parfait et que l'instance en reconnaissance de la faute inexcusable n'était pas éteinte ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt reconnaître sa faute inexcusable et de lui déclarer opposable la décision de prise en charge de la maladie de la victime, alors, selon le moyen, que l'article R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale dispose que lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1, le tribunal est tenu de recueillir préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du cinquième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que la CPAM avait pris en charge l'affection de M. J... après avoir recueilli l'avis du CRRMP de la région Nord-Est ; que l'employeur contestait l'origine professionnelle de la maladie prise en charge en faisant valoir notamment qu'aucun élément dans le dossier ne permettait de vérifier si les conditions du tableau n°30 bis étaient remplies de sorte qu'un CRRMP aurait dû être saisi ; que pour débouter l'employeur de sa demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge et retenir le caractère professionnel de la maladie, la cour d'appel a énoncé que contrairement à ce que soutenait l'employeur, la CPAM de Meurthe-et-Moselle justifiait avoir régulièrement instruit le dossier et avoir accordé le bénéfice de la législation professionnelle après avis du CRRMP de la région nord-est, l'employeur ayant pu discuter contradictoirement du caractère professionnel de la maladie et n'apportant aucun élément de nature à mettre en doute que les activités de la victime correspondaient à plusieurs des travaux limitativement énumérés au tableau n° 30 bis des maladies professionnelles ; qu'en statuant ainsi, sans demander l'avis d'un second CRRMP, cependant qu'il lui appartenait de réclamer d'office un second avis, dès lors que la caisse avait admis que la condition relative aux travaux limitativement énumérés par le tableau n° 30 bis n'était pas remplie et avait pris en charge la maladie après avis d'un CRRMP, et que le différend entre l'employeur, les consorts J... et la CPAM de Meurthe-et-Moselle portait sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie au titre des alinéas 3 et 4 de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé les articles R. 142-24-2 et L. 461-1du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des productions que l'employeur avait contesté le caractère professionnel de la maladie en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable, de sorte que la cour d'appel n'avait pas à recueillir au préalable l'avis d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Arcelormittal France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Arcelormittal France et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle la somme de 3 000 euros et aux consorts J... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Arcelormittal France
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté que le désistement d'appel de la société Arcelormittal France n'était pas parfait et n'avait pas produit d'effet et d'AVOIR, en conséquence, confirmé le jugement en ce qu'il a dit que la société Arcelormittal France, venant aux droits de la société Wendel Sidelor et de la société Sacilor, avait commis une faute inexcusable directement à l'origine de la maladie puis du décès de M. Q... J... et en ce qu'il a dit que la CPAM de Meurthe et Moselle récupèrera, après paiement, le montant des sommes qui seront versées aux consorts J... auprès des employeurs fautifs ;
AUX MOTIFS QUE sur le désistement, aux termes de l'article 401 du code de procédure civile, le désistement de l'appel n'a besoin d'être accepté que s'il contient des réserves ou si la partie à l'égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente ; qu'en l'espèce, la société Arcelormittal France, qui a interjeté appel de la décision rendue le 26 février 2015 par le TASS de Longwy, entend se désister de son appel sous réserve de la renonciation par les consorts J... aux demandes formées contre elle et tendant à la reconnaissance de sa faute inexcusable ; qu'il résulte des pièces de la procédure, notamment de la déclaration d'appel de la société Arcelormittal France, que les consorts J... et la CPAM de Meurthe-et-Moselle ont qualité d'intimés à la procédure ; que si les consorts J... déclarent accepter le désistement de la société Arcelormittal France, la CPAM de Meurthe-et-Moselle manifeste son opposition ; que dès lors que le désistement d'appel contient des réserves et qu'une des parties intimées est opposée au désistement, ce désistement n'est pas parfait et n'a pas produit son effet d'extinction de l'instance ; qu'il s'en déduit que le moyen soulevé par les consorts J... de l'irrecevabilité de l'appel incident de la CPAM de Meurthe-et-Moselle est inopérant ;
1°) ALORS QUE le désistement de l'appel n'a besoin d'être accepté que s'il contient des réserves ou si la partie à l'égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente ; que seule la partie à l'encontre de laquelle les réserves ont été formulées peut accepter, ou refuser, le désistement ; qu'en revanche, le désistement est parfait à l'égard des intimés qui ne sont pas concernés par les réserves formulées, en l'absence d'appel incident ou de demande incidente ; que ne constituent pas des demandes ou appel incidents la demande de confirmation du jugement de première instance et la formulation d'une demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'au cas présent, il est constant que les réserves formulées par la société Arcelormittal France, à savoir la renonciation, par les consorts J..., aux demandes formées contre elle et tendant à la reconnaissance de sa faute inexcusable, n'étaient dirigées que contre les consorts J..., qui ont accepté ce désistement ; que la cour d'appel a constaté que ces réserves ne concernaient pas la CPAM, de sorte qu'en l'absence d'appel incident ou d'une demande incidente formulée par la caisse préalablement au désistement, la CPAM ne pouvait s'opposer à ce dernier ; qu'il est constant que la caisse n'a pas formulé de demandes ou d'appel incident puisqu'elle s'est contentée, avant le désistement, de s'en remettre à l'appréciation de la cour sur la question de la faute inexcusable, de solliciter la confirmation du jugement sur la question de l'opposabilité de la décision de prise en charge et de formuler une demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en jugeant pourtant que la CPAM s'étant opposée au désistement, ce dernier n'était pas parfait et n'avait pas produit son effet d'extinction de l'instance, tandis que les réserves formulées par la société Arcelormittal France n'étaient pas dirigées contre la CPAM qui, dès lors, ne pouvait pas s'opposer au désistement de l'appel et à la renonciation, par les consorts J..., au bénéfice du jugement en ce qu'il avait retenu la faute inexcusable de la société Arcelormittal France, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant l'article 401 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE seuls la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ou ses ayants droit, peuvent agir devant le tribunal des affaires de sécurité sociale pour voir reconnaître l'existence d'une faute inexcusable et statuer sur les conséquences de cette faute ; qu'en cas de pluralité d'employeurs pouvant avoir commis une faute inexcusable, seuls la victime ou ses ayants droits déterminent contre qui ils dirigent leur action en reconnaissance de la faute inexcusable ; que la victime, ou ses ayants droits, peuvent renoncer à leur droit de poursuivre un des employeurs pour faute inexcusable ; que dès lors, ils peuvent se désister partiellement de leurs demandes à l'encontre d'un employeur et peuvent renoncer au bénéfice partiel d'un jugement favorable en acceptant le désistement d'appel de l'employeur ; que la caisse primaire d'assurance maladie ne dispose à l'encontre de l'employeur que d'une action récursoire, et non subrogatoire, lorsque la faute inexcusable de l'employeur a été reconnue par une décision de justice passée en force de chose jugée ; que la caisse primaire d'assurance maladie, qui n'est que partie intervenante à titre accessoire dans le litige portant sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, ne peut accepter ou refuser le désistement d'appel d'une partie intervenante à titre principal et ne peut agir seule en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; qu'au cas présent, la société Arcelormittal France s'est désistée de son appel sous réserve de la renonciation par les consorts J... aux demandes formées contre elle et tendant à la reconnaissance de sa faute inexcusable ; que la société Arcelormittal France faisait valoir que seuls les ayants droit de M. J... pouvaient accepter, ou refuser, le désistement d'appel de la société Arcelomittal France relatif au litige recherchant sa faute inexcusable ; que la caisse, qui était partie intervenante à titre accessoire, ne pouvait s'opposer au désistement de la société Arcelormittal France et à la renonciation, par les consorts J..., au bénéfice du jugement en ce qu'il avait retenu la faute inexcusable de la société Arcelormittal France ; qu'en jugeant pourtant que le désistement n'était pas parfait en raison de l'opposition de la CPAM, qui était intimée, la cour d'appel a violé les articles 401, 330, et 31 du code de procédure civile ainsi que les articles L. 452-1 L. 452-3, L. 452-3-1 et L.452-4 du code de la sécurité sociale ;
3°) ALORS QU'en tout état de cause, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que dans une procédure orale, lorsque la cour fait expressément référence aux conclusions des parties, reprises oralement à l'audience, il convient de s'y référer pour déterminer l'objet du litige ; qu'au cas présent, à supposer que la CPAM ait pu s'opposer au désistement d'appel de la société Arcelormittal France, les consorts J... faisaient valoir à titre principal qu'ils acceptaient de renoncer à toute demande formée contre la société Arcelormittal France tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de cette dernière et que la demande de la caisse de reconnaître la faute inexcusable de la société Arcelormittal France était irrecevable (concl, p. 31) ; que la société Arcelormittal faisait quant à elle valoir qu'elle acceptait le désistement d'instance des consorts J... et leur renonciation au bénéfice du jugement uniquement en ce qu'il avait constaté la faute inexcusable de la société Arcelormittal France ; que la CPAM ne pouvait s'y opposer (concl, p. 6) ; que la CPAM n'étant pas titulaire du droit d'agir en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la renonciation, par les consorts J..., de faire reconnaitre la faute inexcusable de la société Arcelormittal France et leur renonciation au bénéfice du jugement sur ce point empêchait la cour d'appel de se prononcer sur l'existence d'une faute inexcusable de la société Arcelormittal France, et des conséquences pécuniaires d'une telle faute ; qu'en confirmant cependant le jugement en ce qu'il avait retenu l'existence d'une faute inexcusable de la société Arcelormittal France et en ce que la CPAM pouvait exercer son action récursoire notamment à l'encontre de la société Arcelormittal France, tandis que les consorts J..., seuls titulaires du droit d'agir en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, avaient renoncé à rechercher la faute inexcusable de la société Acelormittal France et renoncé au bénéfice du jugement sur ce point, la cour d'appel a modifié l'objet du litige, violant l'article 4 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que la société Arcelormittal France, venant aux droits de la société Wendel Sidelor et de la société Sacilor, avait commis une faute inexcusable directement à l'origine de la maladie puis du décès de M. Q... J..., d'AVOIR dit que la décision de prise en charge des affections présentées par M. Q... J... au titre de la législation professionnelle était opposable à la société Arcelormittal France et d'AVOIR dit que la CPAM de Meurthe et Moselle récupèrera, après paiement, le montant des sommes qui seront versées aux consorts J... auprès de la société Arcelormittal France ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la faute inexcusable, selon les dispositions de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'accident ou la maladie est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitué dans la direction, la victime ou ses ayants droits ont droit à une indemnisation complémentaire ; qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles contractées du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens des dispositions de l'article susvisé, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'il incombe au salarié ou à ses ayants droits d'apporter la preuve de cette faute inexcusable par tous moyens ; qu'il résulte en l'espèce des certificats de travail et des bulletins de paie versés aux débats que M. Q... J... a travaillé en qualité de pontier pour la société Wendel Sidelor du 21 octobre 1957 au 16 septembre 1974 pour la société Laminoirs de Villerupt du 16 septembre 1974 au 1er mars 1986 ; qu'il a été rattaché à la société Unimetal après 1986, mais en dispense d'activité ; que les consorts J... produisent des attestations d'anciens collègues de travail de M. Q... J... qui démontrent que ce dernier était au contact de l'amiante au quotidien tant au sein de la société Wendel Sidelor que de la société Lamonoirs de Villerupt ; que dans les deux sociétés, les ouvriers fondeurs portaient notamment des protections en amiante pour se préserver de la chaleur, lesquelles se détérioraient et les exposaient à l'inhalation de poussières d'amiante ; que les société Wendel Sidelor et Laminoirs de Villerupt n'ont pas informé le salarié de la nécessité de ce protéger en permanence des poussières d'amiante et n'ont pas pris les mesures nécessaires à préserver sa santé du risque auquel il l'exposait, alors que les dangers de l'amiante étaient connus au début du 20ème siècle ; que dès le décret du 10 juillet 1913, modifié notamment par celui du 13 décembre 1948, une réglementation spécifique en ce qui concerne les mesures générales de protection et de salubrité était prise pour assurer notamment la ventilation et l'évacuation des poussières dans les sites industriels ; que la création du tableau 30 des maladies professionnelle en 1950, puis le décret n°77-949 du 17 août 1977 relatif aux mesures particulière d'hygiène applicable dans les établissements où le personnel est exposé à l'action des poussières d'amiante confirment que les dangers liés à l'inhalation des poussières d'amiante étaient connus et reconnus ; que les société Wendel Sidelor et Laminoirs de Villerupt ne pouvaient ignorer l'existence d'un tel risque alors que le salarié fondeur était habituellement exposé à l'inhalation des fibres d'amiante ; qu'à hauteur d'appel, la société Arcelormittal France ne conteste ni les conditions d'exposition aux poussières d'amiante telles que décrites ci-dessus ni la conscience du danger auquel était exposé le salarié et l'absence de mesures de protection adaptées ; qu'elle soutient que la maladie professionnelle de M. J... n'est pas due à une faute inexcusable de sa part au motif que le salarié ne travaillait plus à compter de sa mutation au sein d'Unimetal et qu'il n'a dès lors été exposé à aucun risque ; que s'il est exact que M. Q... J... n'a plus été exposé au risque de l'inhalation des poussières d'amiante à compter de son rattachement à la société Unimetal en 1986, la faute inexcusable de la société Arcelormittal France est établie en ce que cette société vient aux droits de la société Wendel Sidelor, laquelle vient aux droits de la société Sacilor ; qu'il convient dans ces conditions de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a dit que la maladie déclarée par M. Q... J... puis son décès étaient la conséquence de la faute inexcusable des sociétés Wendel Sidelor et Mainoirs de Villerupt et statué sur la majoration de la rente ainsi que sur l'indemnité forfaitaire ; qu'elle doit également être confirmée sur les conséquences que le TASS de Longwy a tirées de cette reconnaissance en ce qui concerne la réparation du préjudice subi par les ayants droits de M. Q... J..., selon des motifs pertinents et non contestés que la cour adopte ; que sur l'opposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle, la société Arcelormittal France demande à la cour d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle lui a déclaré inopposable la décision de la CPAM de Meurthe-et-Moselle de prise en charge des affections présentées par M. Q... J... au titre de la législation professionnelle ; que selon les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ; que le tableau n°30 bis des maladies professionnelles, relatif au cancer broncho-pulmonaire primitif provoqué par l'inhalation de poussières d'amiante, prévoit un délai de prise en charge de 40 ans sous réserve d'une durée d'exposition de 10 ans, et fixe la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer cette maladie ; qu'il résulte en l'espèce des pièecs médicales versées aux débats que M. Q... J... est décédé le [...] des suites d'un adénocarcinome bronchique lobaire inférieur droit ; que contrairement à ce que soutient la société Arcelormittal France, la CPAM de Meurthe-et-Moselle justifie avoir régulièrement instruit le dossier de M. Q... J... et avoir accordé le bénéfice de la législation professionnelle après avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Nord-Est, lequel a considéré que « l'intéressé a présenté un cancer bronchique métastasé alors qu'il a été manifestement exposé à l'inhalation de poussières d'amiante lors des travaux effectués en sidérurgie de 1957 à 1986. Dans ces conditions, il existe un lien direct entre la maladie alléguée et les tâches exercées » ; que la société Arcelormittal France, qui a pu discuter contradictoirement du caractère professionnel de la maladie dans les conditions ci-dessus développées relatives à la faute inexcusable, n'apporte aux débats aucun élément de nature à mettre en doute que les activités de M. Q... J... correspondaient à plusieurs des travaux limitativement énumérés au tableau n°30 bis des maladies professionnelles, et étaient conformes aux délais de prise en charge et d'exposition au risque, en l'occurrence aux poussières d'amiante ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur l'exposition à l'amiante au sein de la société Wendel Sidelor SA – Usine de [...], les consorts J... produisent aux débats des attestations rédigées par d'anciens collègues de travail de M. Q... J..., aux termes desquelles il est établi qu'il a été exposé à l'inhalation de poussières d'amiante au sein de la société Wendel Sidelor SA usine de [...] de 1957 à 1972 ; qu'ainsi, M. P... déclare que M. J... était au contact de l'amiante au quotidien en sa qualité de fondeur ; que les protections dont il disposait (tableau, guêtres et gants) étaient en amiante et se détérioraient sous l'effet de la chaleur en poussières très fines ; qu'en tant que pontier par ailleurs, M. J... était exposé à l'amiante lors du démoulage des ligotières ; que ces propos sont confirmés par MM. D... et M..., lesquels attestent de ce que l'amiante était le matériau privilégié pour la protection des ouvriers ; que les consorts J... rapportent donc la preuve de l'exposition de M. Q... J... aux poussières d'amiante au sein de la société Wendel Sidelor SA usine de [...], aux droits desquels vient la société Arcelormittal France ;
ALORS QUE l'article R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale dispose que lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1, le tribunal est tenu de recueillir préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du cinquième alinéa de l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que la CPAM avait pris en charge l'affection de M. J... après avoir recueilli l'avis du CRRMP de la région Nord-Est (arrêt, p. 11 § 6) ; que la société Arcelormittal France contestait l'origine professionnelle de la maladie prise en charge en faisant valoir notamment qu'aucun élément dans le dossier ne permettait de vérifier si les conditions du tableau n°30 bis étaient remplies de sorte qu'un CRRMP aurait dû être saisi (concl, p. 12) ; que pour débouter l'employeur de sa demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge et retenir le caractère professionnel de la maladie, la cour d'appel a énoncé que contrairement à ce que soutenait la société Arcelormittal France, la CPAM de Meurthe-et-Moselle justifiait avoir régulièrement instruit le dossier et avoir accordé le bénéfice de la législation professionnelle après avis du CRRMP de la région nord-est, la société Arcelormittal France ayant pu discuter contradictoirement du caractère professionnel de la maladie et n'apportant aucun élément de nature à mettre en doute que les activités de M. Q... J... correspondaient à plusieurs des travaux limitativement énumérés au tableau n°30 bis des maladies professionnelles (arrêt, p. 11 § 6 et 7) ; qu'en statuant ainsi, sans demander l'avis d'un second CRRMP, cependant qu'il lui appartenait de réclamer d'office un second avis, dès lors que la caisse avait admis que la condition relative aux travaux limitativement énumérés par le tableau n°30 bis n'était pas remplie et avait pris en charge la maladie après avis d'un CRRMP, et que le différend entre la société Arcelormittal France, les consorts J... et la CPAM de Meurthe-et-Moselle portait sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie au titre des alinéas 3 et 4 de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé les articles R. 142-24-2 et L. 461-1du Code de la sécurité sociale.