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27/11/2019 | FRANCE | N°18-19224

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 novembre 2019, 18-19224


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (Soc., 28 mai 2015, pourvoi n° 13-26.392 ), que Mme Y..., engagée par la société Electricité de France à compter du 1er décembre 1975 en qualité d'employée qualifiée au standard, a poursuivi sa carrière à différents postes et occupait en dernier lieu, depuis 2017, des fonctions de chargée de prestations immobilières ; qu'elle a été investie à compter de 2007 de différents mandats représentatifs ; qu'estimant être victime d'une discrim

ination dans l'évolution de sa carrière en raison de son appartenance syndical...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (Soc., 28 mai 2015, pourvoi n° 13-26.392 ), que Mme Y..., engagée par la société Electricité de France à compter du 1er décembre 1975 en qualité d'employée qualifiée au standard, a poursuivi sa carrière à différents postes et occupait en dernier lieu, depuis 2017, des fonctions de chargée de prestations immobilières ; qu'elle a été investie à compter de 2007 de différents mandats représentatifs ; qu'estimant être victime d'une discrimination dans l'évolution de sa carrière en raison de son appartenance syndicale depuis 1996 et de l'exercice de ses fonctions électives à compter de 2007, elle a saisi le 28 juillet 2011 la juridiction prud'homale en demandant notamment sa reclassification et des dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident de l'employeur, qui est préalable :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal de la salariée, pris en sa première branche :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt enjoint à la société de placer la salariée au GF 9 à compter du 1er janvier 2004 et au NR 130 à compter du 1er janvier 2012 et l'a condamnée au paiement des rappels de salaires consécutifs ;

Qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions soutenues oralement la salariée avait demandé, à titre principal, pour la période antérieure au 1er janvier 2017, soit de 1996 à 2016, une somme de 146 931 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice économique, et, à titre subsidiaire en l'absence de repositionnement du salaire au NR170 au 1er janvier 2017, la somme de 217 457 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice économique, subi durant la même période de 1996 à 2016, intégrant les conséquences sur ses droits à retraite, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a méconnu les exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi incident de l'employeur :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il enjoint à la société EDF direction de l'immobilier de placer Mme Y... au GF 9 à compter du 1er janvier 2004 et au NR130 à compter du 1er janvier 2012, condamne la société EDF direction de l'immobilier à payer à Mme Y... les rappels de salaire consécutifs et ordonne la remise des bulletins de salaire rectifiés, l'arrêt rendu le 2 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne la société EDF direction de l'immobilier aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR seulement enjoint à la SA EDF Direction de l'Immobilier de placer Mme V... Y... au GF 9 à compter du 1er janvier 2004 et au NR 130 à compter du 1er janvier 2012 et, en conséquence, d'AVOIR condamné la SA EDF Direction de l'Immobilier à payer à Mme V... Y... les rappels de salaire consécutifs ;

AUX MOTIFS QUE, sur les demandes indemnitaires de Mme Y... : - sur le repositionnement de carrière : il est établi que Mme Y... est restée classée en GF 4 NR 80 alors qu'elle a occupé le poste d'assistante commerciale du 1er janvier 2002 au 1er janvier 2003, poste classé en GF 9 NR 130 ; que compte tenu de la reconnaissance par la cour d'une discrimination syndicale à l'égard de Mme Y..., il convient de lui reconnaître le GF 9 à compter du 1er janvier 2004 ; que compte tenu de l'attente injustifiée pour bénéficier de la formation Excel, Mme Y... n'a pu valoriser et améliorer ses compétences, du fait que la cour ait reconnu qu'elle a été victime de discrimination et des aléas liés aux évolutions de carrière, il convient de lui attribuer le NR 120 à compter du 1er janvier 2012 ;

1°) ALORS QUE Mme Y... sollicitait dans ses conclusions d'appel, reprises oralement à l'audience, l'allocation de dommages et intérêts réparant l'entier préjudice économique par elle subi pendant toute la durée de la discrimination, ce qui incluait notamment - outre la réparation de son préjudice salarial - une indemnisation au titre de la prime variable de 3 %, de l'intéressement et, en cas d'absence de repositionnement au NR 170 à compter du 1er janvier 2017, de la perte de droits à la retraite (cf. conclusions d'appel p. 35 à 37) ; qu'en repositionnant Mme Y... au GF 9 à compter du 1er janvier 2004 et au NR 130 à compter du 1er janvier 2012 et en lui allouant les rappels de salaire correspondants, à titre de réparation de son préjudice né de la discrimination, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige, violant l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en sanctionnant la discrimination syndicale par le seul repositionnement de Mme Y... au GF 9 à compter du 1er janvier 2004 et au NR 130 à compter du 1er janvier 2012 avec allocation des rappels de salaire correspondants, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°) ET ALORS, subsidiairement, QUE la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; que Mme Y... sollicitait dans ses conclusions d'appel, reprises oralement à l'audience, l'allocation de dommages et intérêts réparant l'entier préjudice économique par elle subi pendant toute la durée de la discrimination, ce qui incluait notamment - outre la réparation de son préjudice salarial - une indemnisation au titre de la prime variable de 3 %, de l'intéressement et, en cas d'absence de repositionnement au NR 170 à compter du 1er janvier 2017, de la perte de droits à la retraite (cf. conclusions d'appel p. 35 à 37) ; qu'en se bornant à repositionner Mme Y... au GF 9 à compter du 1er janvier 2004 et au NR 130 à compter du 1er janvier 2012 et à lui allouer le rappel de salaire correspondant, sans prendre en considération ces chefs de préjudice, la cour d'appel n'a pas réparé l'entier préjudice de la salariée, violant le principe de la réparation intégrale du préjudice, ensemble les articles L.1132-1, L.1134-1 et L. 2141-5 du code du travail. Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour la société Electricité de France - direction de l'immobilier

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir enjoint à la société EDF SA de placer Madame V... Y... au GF 9 à compter du 1er janvier 2004 et au NR 130 à compter du 1er janvier 2012, d'avoir condamné la société EDF SA à payer à Madame V... Y... les rappels de salaire consécutifs, d'avoir condamné la société EDF à payer à Madame Y... les sommes de 2 500 euros au titre du préjudice moral subi, 2 500 euros au titre de la violation des accords collectifs, 6 940,96 euros bruts au titre de la prime d'adaptation et 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, d'avoir ordonné la capitalisation des intérêts et d'avoir ordonné la remise des bulletins de salaires rectifiés ;

1) Aux motifs que, sur la discrimination syndicale, l'article L.1132-1 du code du travail dans sa version applicable au litige dispose qu'aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; que l'article L. 1134-1 du même code précise que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ;
qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que, sur l'évolution professionnelle ralentie, 1. sur l'absence de bénéfice du statut de remplaçant ou d'intérimaire, la Pers 90 prévoit que le remplacement intervient jusqu'à la désignation de l'intérimaire, en cas d'absence de courte durée ; que l'intérim joue en cas de décès de l'agent titulaire du poste et pour les absences de longue durée, parmi lesquelles le placement en longue maladie du titulaire du poste ; que, selon l'article 2, la durée de l'intérim ne doit représenter qu'un remplacement momentané et de courte durée ; que la circulaire Pers 212 réglemente les remplacements et les intérim de la façon suivante : un poste est dit « vacant », lorsque son titulaire l'a quitté pour l'une des causes énumérées par la circulaire Pers 90 au § 1b traitant de l'intérim : a) possibilité de remplacement en cas de vacance de poste. Outre les cas types de remplacement énumérés par la circulaire Pers 90 1a), le chef de l'exploitation ou du service peut, en cas de vacance susceptible de donner lieu à intérim, et s'il y a nécessité, désigner un remplaçant en attendant qu'il ait été procédé aux formalités de désignation du nouveau titulaire ou d'un intérimaire. Dans ce cas, la durée du remplacement ne pourra, en principe, excéder trois mois. Dans tous les cas la désignation du remplaçant est effectuée par le chef de l'exploitation ou du service sans avis préalable de la commission compétente. Le remplaçant ne bénéficie d'aucune priorité à la nomination ou à l'intérim. b) intérim. La désignation de l'intérimaire requiert l'avis préalable de la commission compétente. Pratiquement, trois situations peuvent se présenter s'il n'y pas affectation d'office d'un agent au poste vacant : 1) poste demeure vacant jusqu'au jour où le chef de l'exploitation désigne un nouveau titulaire après avis de la commission compétente sur les différents candidats ayant répondu à la publication de vacance. Dans ce cas, il n'y a pas d'intérim. 2) dans le même cas, le chef de l'exploitation peut mettre le candidat qu'il a retenu à l'essai, pour une période qui ne peut excéder trois mois. Durant la période d'essai, le candidat est rémunéré provisoirement sur la base du traitement correspondant au classement fonctionnel du poste vacant. Ce n'est que dans le cas où à l'issue de la période d'essai, et malgré la priorité qui lui est statutairement accordée, il ne serait pas reconnu comme titulaire du poste il sera considéré comme ayant effectué un intérim ; sa rémunération comme intérimaire sera rétablie pour toute la durée du remplacement qu'il aura effectué conformément aux dispositions de l'article 11 § 4 (salaire ou traitement de l'agent qu'il remplace, échelle et échelon). 3) le chef de l'exploitation a jugé nécessaire de désigner un remplaçant pour occuper le poste en attendant l'accomplissement des formalités qui lui permettront de retenir un candidat. Si le candidat retenu après ces formalités est le même que celui qui a effectué le remplacement, il peut ou non être mis à l'essai. Dans le cas où il est en définitive nommé comme titulaire du poste, sa nomination prend effet rétroactivement à partir de la date de sa désignation comme remplaçant ; que la circulaire Pers 90 précise les conséquences du remplacement et de l'intérim. En raison de la priorité à l'emploi ou à l'inscription au tableau d'avancement qui ne peuvent s'effectuer sans l'assentiment des commissions paritaires, l'intérimaire ne peut être désigné qu'après avis de cette commission. Au contraire, le remplaçant est désigné à la diligence du directeur de l'exploitation. a) conséquences du remplacement. Le remplacement n'ouvre droit à aucune priorité en faveur de l'agent remplaçant. Cependant, dans les cas de remplacements d'au moins six mois, si l'agent a donné satisfaction dans l'accomplissement de ses fonctions provisoires, il pourra obtenir une priorité en second après les agents intérimaires, sur avis de la commission. b) conséquences de l'intérim. - priorité à la nomination d'emploi et en cas d'égalité entre plusieurs prioritaires, il conviendra de les départager en fonction de la date de début de l'intérim, en cas de même date, ancienneté dans les services ; qu'il est établi que Madame Y... a bénéficié d'une convention d'immersion du 1er août au 31 décembre 2001 au Domaine commercial du groupe développement gaz tout en restant rattachée administrativement au Domaine collectivités territoriales d'EDF ; qu'elle a été maintenue au poste d'assistante commerciale, poste d'une salariée en longue maladie, jusqu'au 1er janvier 2003 ; qu'elle n'a pas bénéficié des règles statutaires correspondant aux Pers 212 et 90 ; qu'elle est restée en GF 4 NR 80 alors que la personne remplacée avait un poste GF 9 NR 130 et que le poste ne lui a pas été attribué lorsqu'il a été définitivement vacant ; qu'il n'est pas contestable que le poste de Madame Y... a été supprimé au début de l'année 2003 ; qu'ainsi, Monsieur W..., à l'époque chargé de mission du Domaine commercial du groupe développement gaz, dans son attestation explique que le poste a été supprimé en février 2003 à la suite de changement à la tête d'EDF-GDF, ce qui constitue un fait objectif excluant une discrimination ; que, cependant, la société EDF n'explique aucunement quel était le statut de Madame Y... entre la fin de la période prévue par la convention d'immersion et le 1er janvier 2003 ; que, de plus, elle affirme que le poste sur lequel se trouvait Madame Y... n'était pas vacant et ne pouvait donner lieu à l'application de la Pers 90 mais ne le démontre pas ; qu'en outre, elle estime que Madame Y... n'a pas subi de préjudice pendant la période « d'immersion » puisqu'elle a été maintenue en GR 4 NR 80 ; que néanmoins, le poste qu'elle a occupé était classé GF 9 NR 130 mais elle n'en a pas bénéficié, ce qui est bien constitutif d'un préjudice ; que, de surcroît, tant le compte-rendu de la réunion de la commission secondaire du personnel du 17 janvier 2002 que l'attestation de Monsieur W... indiquent que compte tenu du résultat positif du travail de Madame Y... son avancement était programmé ; que ces éléments ne constituent pas de faits objectifs excluant toute discrimination ;

Alors, de première part, que lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en ne recherchant pas, comme cela lui était demandé par la société EDF (conclusions devant la cour de renvoi, p. 16 et 17), si le maintien du rattachement de Madame Y... à la société EDF ne constituait pa s un fait objectif excluant toute discrimination de la salariée résultant de son placement au poste d'assistante commerciale au sein de la société GDF, poste d'une salariée en longue maladie de la société GDF, sans bénéficier du GF 9 NR 130 qu'avait la salariée absente, la cour de renvoi a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail ensemble les circulaires Pers 90 et 212 ;

Alors, en outre, de deuxième part, qu'en ne recherchant pas, comme cela lui était demandé par la société EDF (conclusions devant la cour de renvoi, p. 17 et 18), si, compte tenu de ses compétences et de son statut, Madame Y..., qui ne faisait pas partie du « collège maîtrise », pouvait néanmoins bénéficier des avantages réglementaires et financiers liés à l'occupation du poste d'assistance commerciale laissé vacant par une salariée en longue maladie, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail ensemble les circulaires Pers 90 et 212 ;

2) Aux motifs que, sur la formation professionnelle, il est établi que Madame Y... a été inscrite à quarante-deux formations de 1977 à 2017 ; qu'à compter de 2007, date du début de ses mandats électifs, elle a bénéficié de plus de vingt formations ; que de nombreuses formations ont concerné le secourisme ; qu'elle a bénéficié également de près de soixante-dix heures de formation pour lui permettre d'obtenir son baccalauréat ; qu'elle s'est désistée de cinq formations ; qu'elle a demandé à plusieurs reprises à bénéficier de la formation Excel et ne l'a obtenue qu'en 2016 ; qu'en indiquant que les formations qu'elle a suivies depuis 2007 sont sans lien avec son activité professionnelle, secourisme à sept reprises, formations liées à la santé au travail et aux accidents à six reprises et qu'elle n'a obtenu la formation Excel qu'en 2016 alors qu'elle l'avait demandée à de multiples reprises depuis l'évaluation pour l'année 2009, Madame Y... a établi un élément laissant présumer l'existence d'une discrimination ; que certes comme le souligne l'employeur, Madame Y... a bénéficié de nombreuses formations, ce qu'elle admet également, étant précisé qu'il ne peut lui être reproché de s'être désistée de cinq formations ; que force est néanmoins de constater que les formations suivies ne sont pas en lien direct avec ses activités et missions professionnelles ; que de même alors que Madame Y... a demandé une formation en bureautique, demandes soutenues par son supérieur hiérarchique comme mentionnées dans les comptes-rendus d'entretiens professionnels depuis 2010, elle ne l'a obtenue qu'en 2016 ; que la société EDF n'apporte aucun élément objectif de nature à justifier cette situation à l'égard de Madame Y... ; qu'en conséquence, il est retenu une discrimination syndicale à l'encontre de Madame Y... ;

Alors, par ailleurs, de troisième part, que lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, ce qui implique que le juge s'en assure ; qu'en ne recherchant pas, comme cela lui était demandé par la société EDF (conclusions devant la cour de renvoi, p. 29 pénultième §), si le fait que les formations suivies par Madame Y... n'étaient pas en lien direct avec ses activités et missions professionnelles provenait de ce que celle-ci n'avait justement accepté que ce type de formation, ne répondant pas aux autres offres de formation en lien avec ses activités et missions professionnelles, la cour de renvoi a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 du code du travail ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir enjoint à la société EDF SA de placer Madame V... Y... au GF 9 à compter du 1er janvier 2004 et au NR 130 à compter du 1er janvier 2012, d'avoir condamné la société EDF SA à payer à Madame V... Y... les rappels de salaire consécutifs, d'avoir condamné la société EDF à payer à Madame Y... la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, d'avoir ordonné la capitalisation des intérêts et d'avoir ordonné la remise des bulletins de salaires rectifiés ;

Aux motifs que, sur les demandes indemnitaires de Madame Y..., sur le repositionnement de carrière, il est établi que Madame Y... est restée classée en GF 4 NR 80 alors qu'elle a occupé le poste d'assistante commerciale du 1er janvier 2002 au 1er janvier 2003, poste classé en GF 9 NR 130 ; que, compte tenu de la reconnaissance par la cour d'une discrimination syndicale à l'égard de Madame Y..., il convient de lui reconnaître le GF 9 à compter du 1er janvier 2004 ; que, compte tenu de l'attente injustifiée pour bénéficier de la formation Excel, Madame Y... n'a pu valoriser et améliorer ses compétences, du fait que la cour ait reconnu qu'elle a été victime de discrimination et des aléas liés aux évolutions de carrière, il convient de lui attribuer le NR 120 à compter du 1er janvier 2012 ;

Alors que, dans ses écritures devant la cour de renvoi, la société EDF soutenait que : « En application de la prescription des articles L.3245-1 du code du travail et 2224 du code civil, les demandes de rappel de salaires antérieures à juin 2006 formulées par Madame Y... sont prescrites, Madame Y... ayant saisi le conseil de prud'hommes le 28 juillet 2011 » (conclusions EDF, p. 30 § 6) ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour de renvoi a entaché son arrêt d'un défaut de réponse à conclusions, en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir enjoint à la société EDF SA de placer Madame V... Y... au NR 130 à compter du 1er janvier 2012, d'avoir condamné la société EDF SA à payer à Madame V... Y... les rappels de salaire consécutifs, d'avoir condamné la société EDF à payer à Madame Y... la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, d'avoir ordonné la capitalisation des intérêts et d'avoir ordonné la remise des bulletins de salaires rectifiés ;

Aux motifs que, sur les demandes indemnitaires de Madame Y..., sur le repositionnement de carrière, [
] compte tenu de l'attente injustifiée pour bénéficier de la formation Excel, Madame Y... n'a pu valoriser et améliorer ses compétences, du fait que la cour ait reconnu qu'elle a été victime de discrimination et des aléas liés aux évolutions de carrière, il convient de lui attribuer le NR 120 à compter du 1er janvier 2012 ;

Alors que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut au défaut de motifs ; qu'en retenant qu'il convenait d'attribuer à Madame Y... le NR 120 à compter du 1er janvier 2012, la cour de renvoi, qui a enjoint à la société EDF de placer celle-ci au NR 130 à compter du 1er janvier 2012, a entaché son arrêt d'une contradiction entre motif et dispositif et donc méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-19224
Date de la décision : 27/11/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 02 mai 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 nov. 2019, pourvoi n°18-19224


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.19224
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