LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 132-5-1 du code des assurances dans sa rédaction applicable au litige ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme O... et M... Y... ont, en qualité d'usufruitiers, et, pour chacun de l'un des contrats, un de leurs trois enfants, R..., W... et D..., en tant que nu-propriétaire, (les consorts Y... ) souscrit le 18 novembre 2005 auprès de la société Oradea vie (l'assureur) trois contrats d'assurance sur la vie dénommés « Oradea capitalisation », sur lesquels a été versée, pour chacun d'eux, la somme de 100 000 euros, investie sur des supports libellés en unités de compte ; qu'ils ont déclaré renoncer aux contrats le 19 juin 2013 en invoquant le non-respect par l'assureur de son obligation pré-contractuelle d'information ; que ce dernier ayant refusé de donner suite à leur demande, ils l'ont assigné en restitution des sommes versées ;
Attendu que pour condamner l'assureur à restituer aux consorts Y... la somme de 300 000 euros, avec intérêts au taux légal majoré, après avoir constaté que la note d'information sur le contrat remise à ces souscripteurs ne répondait pas aux exigences légales et qu'en particulier, l'information essentielle relative au risque de perte financière ne pouvait être considérée comme leur ayant été valablement donnée, puis relevé que les consorts Y... n'étaient pas des personnes averties, la circonstance qu'ils aient procédé à quelques rachats n'y suffisant pas, et que le fait qu'ils aient attendu de nombreuses années pour renoncer à leur contrat, alors en perte, ne permettait pas, à lui seul, de caractériser leur déloyauté dans l'exercice du droit de renonciation, l'arrêt retient que, dans ce contexte, et alors qu'il a été constaté qu'ils ne disposaient pas d'une information essentielle sur les caractéristiques de leurs investissements et qu'il n'est donc pas démontré qu'ils avaient parfaitement conscience des risques et avantages y étant associés, il n'est pas établi qu'ils aient commis un abus de droit en y renonçant ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher à la date de l'exercice de la faculté de renonciation, au regard de la situation concrète des consorts Y... , de leur qualité d'assurés avertis ou profanes, et des informations dont ceux-ci disposaient réellement, quelle était la finalité de l'exercice de leur droit de renonciation et s'il n'en résultait pas l'existence d'un abus de droit, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne MM. et Mmes O..., M..., R..., W... et D... Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Oradea Vie
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Oradea Vie à payer aux consorts Y... la somme de 300.000 euros assortie des intérêts au taux légal majoré de moitié du 19 juillet 2013 au 19 septembre 2013 puis au double de ce taux jusqu'au paiement, d'AVOIR ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du 23 octobre 2014, d'AVOIR dit que l'assureur versera cette somme entre les mains de la Société Générale dans la limite des sommes restant dues par les consorts Y... à cette dernière au titre du prêt pour la garantie duquel les contrats litigieux ont été nantis, et versa le solde entre les mains des demandeurs.
AUX MOTIFS QUE : « sur les manquements à l'obligation d'information. Aux termes de l'article L 132-5-1 du code des assurances, dans sa rédaction applicable au présent litige (contrats souscrits du 1/01/1994 au 1er mars 2006) : Toute personne physique qui a signé une proposition d'assurance ou un contrat a la faculté d'y renoncer par lettre recommandée avec demande d'avis de réception pendant le délai de trente jours à compter du premier versement. La proposition d'assurance ou de contrat doit comprendre un projet de lettre destiné à faciliter l'exercice de cette faculté de renonciation. Elle doit indiquer notamment, pour les contrats qui en comportent, les valeurs de rachat au terme de chacune des huit premières années au moins. L'entreprise d'assurance ou de capitalisation doit, en outre, remettre, contre récépissé, une note d'information sur les dispositions essentielles du contrat, sur les conditions d'exercice de la faculté de renonciation, ainsi que sur le sort de la garantie décès en cas d'exercice de cette faculté de renonciation. Le défaut de remise des documents et informations énumérés au présent alinéa entraîne de plein droit la prorogation du délai prévu au premier alinéa jusqu'au trentième jour suivant la date de remise effective de ces documents. Le contenu de la note d'information est précisé par le modèle annexé à l'article A-132-4 du code des assurances, l'annexe figure dans l'Arrêté du 21 juin 1994 relatif à la note d'information des contrats d'assurance vie et de capitalisation et est reproduit ci-dessous : ANNEXE, ENTREPRISE CONTRACTANTE (dénomination et forme juridique) ADRESSE (du siège social et, le cas échéant, de la succursale et nom de I'Etat membre) Note d'information 1° Nom commercial du contrat. 2° Caractéristiques du contrat: a) Définition contractuelle des garanties offertes; b) Durée du contrat; c) Modalités de versement des primes; d) Délai et modalités de renonciation au contrat, sort la garantie décès en cas de renonciation; e) Formalités à remplir en cas de sinistre; f) Précisions complémentaires relatives à certaines catégories de contrats: - contrats en cas de vie ou de capitalisation: frais et indemnités de rachat prélevés par l'entreprise d'assurance; - autres contrats comportant des valeurs de rachat: frais prélevés en cas de rachat; - capital variable: énumération des valeurs de références et nature des actifs entrant dans leur composition; - contrat groupe : formalités de résiliation et de transfert; g) Information sur les primes relatives aux garanties principales et complémentaires lorsque de telles informations s'avèrent appropriées; h) Précision quant à la loi applicable au contrat lorsque celle-ci n'est pas la loi française et indications générales relatives au régime fiscal. 3° Rendement minimum garanti et participation: a) Taux d'intérêt garanti et durée de cette garantie ; b) Indications des garanties de fidélité, des valeurs de réduction et des valeurs de rachat; dans le cas où celles-ci ne peuvent être établies exactement au moment de la souscription, indication du mécanisme de calcul ainsi que des valeurs minimales; c) Modalités de calcul et d'attribution de la participation aux bénéfices. 4° Procédure d'examen des litiges: Modalités d'examen des réclamations pouvant être formulées au sujet du contrat. Existence, le cas échant, d'une instance chargée en particulier de cet examen. Aux termes de l'article Al32-5, dans sa rédaction applicable à la date des contrats litigieux : "pour les contrats qui relèvent des catégories et 9 définies à l'article A. 344-2, l'information sur les valeurs de rachat au titre des garanties exprimées en unités de compte prévue par l'article L.732-5-l est donnée en nombre d'unités de compte. Ce nombre doit tenir compte des prélèvements effectués à quelque titre que ce soit sur la provision mathématique du contrat. Cette information est complétée par l'indication en caractères très apparents que l'assureur ne s'engage que sur le nombre d'unités de compte, mais pas sur leur valeur, et que celle-ci est sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse. Elle est également complétée par l'indication des modalités de calcul du montant en francs de la valeur de rachat". Le document intitulé "note d'information" qui a été remis aux consorts Y... se compose de 7 pages. La société Oradea Vie nie qu'il s'agisse en réalité des conditions générales du contrat, mais force est de constater qu'elle ne verse pas celles-ci aux débats en sorte qu'il ne saurait être affirmé que le contenu de la note d'information est distinct des conditions générales. Or, cette note contient effectivement plus d'informations que ne le prévoit l'article A 132-4 du code des assurances puisqu'y figurent des renseignements sur la programmation des versements, les avances, les arbitrages, la valeur des unités de compte, les modalités de changement de souscripteur, le dénouement automatique du contrat et la prescription ce qui altère la compréhension et la clarté de l'information légalement requise. Au surplus, en insérant un projet de lettre de renonciation dans la note d'information, la société Oradea Vie n'a pas respecté les dispositions de l'article L132-5-1 du code des assurances qui veut que le projet figure dans la proposition d'assurance matérialisée par le bulletin d'adhésion, seul document qui porte la signature de l'assuré. Le défaut de remise aux consorts C... d'une note d'information conforme aux prescriptions légales a entraîné la prorogation de plein droit du délai de renonciation. Sur l'exercice du droit de rétractation. Aux termes des arrêts de la Cour de cassation du 19 mai 2016, il est désormais de principe que si la faculté prorogée de renonciation prévue par l'article L 132-5-2 du code des assurances en l'absence de respect, par l'assureur, du formalisme informatif qu'il édicte, revêt un caractère discrétionnaire pour le preneur d'assurance, son exercice peut dégénérer en abus. La Cour a précisé que "ne saurait être maintenue la jurisprudence initiée par les arrêts du 7 mars 2006, qui, n'opérant pas de distinction fondée sur la bonne ou la mauvaise foi du preneur d'assurance, ne permet pas de sanctionner un exercice de cette renonciation étranger à sa finalité et incompatible avec le principe de loyauté qui s'impose aux contractants". L'introduction d'un contrôle de l'absence d'abus de droit dans l'exercice du droit de renonciation n'est contraire ni au droit des assurances, ni au droit communautaire. Si les intimés considèrent que ce contrôle va priver le dispositif prévoyant la prorogation du délai de renonciation de toute efficacité en lui retirant son automaticité, ils ne démontrent aucunement en quoi ledit contrôle constituerait une violation des textes du code des assurances. S'agissant du droit communautaire, la réglementation ne comporte aucune disposition spécifique prévoyant une sanction en cas de violation de l'obligation d'information et renvoie sur ce point aux réglementations nationales (article de la directive 2002/83 CE et de son annexe III), de sorte qu'il incombe aux Etats membres de prendre toutes mesures propres à garantir la portée et l'effectivité du droit communautaire dans les conditions de fond et de procédure conférant à la sanction un caractère effectif, proportionné et dissuasif, la finalité de cette directive étant de veiller à garantir au preneur d'assurance le plus large accès aux produits d'assurance en lui assurant, pour profiter d'une concurrence accrue dans le cadre d'un marché unique de l'assurance, les informations nécessaires pour choisir le contrat convenant le mieux à ses besoins. Dans ces conditions, l'introduction de l'appréciation, par le juge, de la loyauté des assurés et de l'absence d'abus dans le cadre de l'exercice du droit de renonciation ne contrevient pas au droit communautaire. Ainsi, le droit de renonciation demeure une faculté discrétionnaire, dont l'exercice n'est subordonné à aucun motif, mais n'est plus une prérogative dont l'exercice est insusceptible d'abus. Doit être sanctionné un exercice de la renonciation étranger à sa finalité et incompatible avec le principe de loyauté qui s'impose aux contractants. L'abus de droit est le fait pour une personne de commettre une faute par le dépassement des limites d'exercice d'un droit qui lui est conféré, soit en le détournant de sa finalité, soit dans le but de nuire à autrui. Contrairement à ce que soutiennent les intimés, il n'est donc nul besoin de faire la démonstration de l'intention de nuire de l'assurée, pas plus qu'il n'est nécessaire d'examiner si une intention maligne existait dès la souscription du contrat, l'abus dans l'exercice d'un droit s'appréciant lorsqu'il en est fait usage, en fonction de divers éléments dont certains peuvent être contemporains de la conclusion du contrat. C'est à la date de souscription du contrat que s'apprécie le contenu de l'information due par l'assureur. La charge de la preuve de la déloyauté des souscripteurs et de l'abus de droit dans l'exercice du droit de renonciation pèse sur l'assureur. La cour doit rechercher, au regard de la situation concrète du souscripteur, de sa qualité d'assuré averti ou profane et des informations dont il disposait réellement, quelle était la finalité de l'exercice de son droit de renonciation et s'il n'en résultait pas l'existence d'un abus de droit. Il convient de rappeler les termes des lettres de renonciation que les consorts Y... ont adressées à l'assureur : Nous sommes extrêmement mécontents des conditions de mon adhésion à ce contrat. En relisant nos documents contractuels, nous avons constaté que vous n'avez pas respecté votre Obligation précontractuelle d'information telle que prévue par les articles L 132-5-1, A 132-4 et A 132-5 du code des assurances. Nous avons en effet notamment relevé que nous n'avions jamais eu communication des éléments d'information suivants : - la note d'information telle que visée à l'article L 312-5-1 du Code des Assurances - les valeurs de rachat de chacune des huit premières années au moins, sur la proposition de contrat - la mention sur le risque, - les conditions d'exercice de la faculté de renonciation dès lors qu'il n'est nullement indiqué que le délai de renonciation est prorogé en cas de modifications entre le contrat et l'offre originelle, - un projet de lettre de renonciation sur la proposition de contrat. Il convient de préciser que contrairement à ce que soutiennent les consorts Y... le tableau relatif aux valeurs de rachat sur huit années et la mention sur le risque n'ont pas à figurer dans le bulletin d'adhésion, mais seulement dans la note d'information. Il a été jugé plus haut que la note d'information ne répondait effectivement pas aux exigences légales s'agissant de son contenu, puisqu'y figuraient des informations supplémentaires par rapport à celles prévues, et force est de constater qu'une des informations essentielles qui doit être impérativement transmise, à savoir celle relative au risque de perte financière ne l'a pas été dans des conditions qui permettent de considérer qu'elle a bien été intégrée par les souscripteurs. En effet, si la phrase "l'assureur ne s'engage que sur le nombre d'unités de compte, mais pas sur leur valeur, et que celle-ci est sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse", a été mentionnée en caractères gras en page 5 de la note d'information, compte tenu du nombre de pages la composant et du fait que bien d'autres mentions figurent également en caractères gras, cette information essentielle qui doit apparaître en caractères très apparents ne peut être considérée comme ayant été valablement donnée. Par ailleurs, le fait que M O... Y... , désormais retraité, ait été avoué et qu'un de ses fils soit avocat ne suffit pas à considérer qu'ils étaient des personnes averties à savoir des personnes spécialisées dans le domaine financier, étant observé que les professions de Mme M... Y... et de sa fille D... Y... ne sont pas citées par l'assureur qui ne prétend pas qu'elles aient eu des compétences particulières. Si W... Y... ne pouvait prétendre ignorer le mécanisme du contrat de capitalisation en cause puisqu'il est consultant fiscaliste, il n'est pas le seul souscripteur du contrat et ses parents, usufruitiers, M et Mme Y... sont des profanes en sorte que la profession de leur fils ne peut régir les conditions d'exercice du droit de renonciation. La société Oradea Vie sousentend que la technicité de l'opération souscrite par les consorts Y... révélerait le caractère averti des consorts Y... . Cependant, et ainsi que l'indiquent les intimés sans être contredits, la société Oradea Vie, filiale de Sogecap, fait partie du groupe Société Générale, et celle-ci avait connaissance des contrats de capitalisation souscrits en sorte qu'il était assez naturel qu'elle sollicite en garantie du prêt contracté le nantissement desdits contrats, le démembrement de propriété ayant par ailleurs été conseillé par le notaire. Enfin, la circonstance que les intimés aient procédé à quelques rachats ne suffit pas pour les qualifier de personnes averties et le fait qu'ils aient attendu de nombreuses années pour renoncer à leurs contrats alors en perte ne permet pas à lui seul de caractériser leur déloyauté dans l'exercice du droit de renonciation. Dans ce contexte et alors qu'il a été constaté qu'ils ne disposaient pas d'une information essentielle sur les caractéristiques de leurs investissements et qu'il n'est donc pas établi qu'ils avaient parfaitement conscience des risques et avantages de ceux-ci, il n'est pas établi qu'ils aient commis un abus de droit en y renonçant. Leurs demandes sont donc bien fondées s'agissant de la restitution des sommes investies, augmentées des intérêts de retard, avec capitalisation ainsi que l'a jugé le tribunal. C'est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a débouté les consorts Y... de leurs demandes de dommages-intérêts pour résistance abusive. La décision des premiers juges sera également confirmée s'agissant du sort des dépens et frais irrépétibles. La société Oradea Vie qui succombe en appel sera condamnée aux dépens y afférents. Il n'y a pas lieu d'allouer aux consorts Y... une indemnisation au titre des frais irrépétibles exposés en appel »
1°) ALORS QUE pour apprécier l'existence d'un abus du souscripteur d'un contrat d'assurance-vie dans l'exercice de la faculté de renonciation prorogée prévue par l'article L 132-5-1 du code des assurances, il appartient au juge de rechercher, au regard notamment de la situation concrète du renonçant et des informations dont il disposait réellement, si celui-ci n'a pas exercé sa faculté de renonciation prorogée de façon déloyale et dans le seul but d'échapper à l'évolution défavorable de ses investissements (Civ. 2ème, 19 mai 2016, pourvoi n° 15-12768 ; Civ. 2ème, 19 mai 2016, pourvoi n° 15-12767) ; que pour retenir qu'il n'était pas démontré que les consorts Y... cherchaient à détourner leur faculté de renonciation de sa finalité et qu'ils avaient abusé de leur faculté de renonciation, la Cour d'appel a retenu qu' « une des informations essentielles qui d[evait] être impérativement transmise, à savoir celle relative au risque de perte financière ne l'a pas été dans des conditions qui permettent de considérer qu'elle a bien été intégrée par les souscripteurs » ; qu'en effet selon la Cour d'appel « si la phrase « l'assureur ne s'engage que sur le nombre d'unités de compte, mais pas sur leur valeur, et que celle-ci est sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse » a été mentionnée en caractères gras en page 5 de la note d'information, compte tenu du nombre de pages la composant et du fait que bien d'autres mentions figur[aie]nt également en caractères gras, cette information essentielle qui d[evait] apparaître en caractères très apparents ne p[ouvait] être considérée comme ayant été valablement donnée » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p.14s., 16s., p. 43s.), si les consorts Y... n'avaient pas, en fait, nécessairement connaissance du fait que l'assureur ne s'engageait pas sur la valeur des investissements réalisés, et que celle-ci était sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse, dès lors que les souscripteurs avaient reçu et signé un certificat de souscription leur rappelant que le montant de l'épargne en unités de compte n'était pas garanti mais évoluait à la hausse ou à la baisse en fonction des marchés, que ceux-ci avaient certifié avoir pris connaissance de l'annexe financière du contrat de capitalisation ORADEA CAPITALISATION décrivant les caractéristiques du support souscrit ainsi que les rythmes de cotations, que les souscripteurs avaient reçu pendant huit ans une information annuelle évoquant de manière très claire l'évolution de leurs contrats de capitalisation, et que la note d'information indiquait les valeurs de rachat en nombre d'unités de compte du contrat de capitalisation ORADEA CAPITALISATION sur les huit premières années, la Cour d'appel, qui était tenue de rechercher les informations dont les assurés disposaient réellement au moment où ils avaient renoncé à leurs contrats, près de huit ans après les avoir souscrits, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 132-5-1 du code des assurances ;
2°) ALORS en outre QU' en retenant que l'information selon laquelle « l'assureur ne s'engage que sur le nombre d'unités de compte, mais pas sur leur valeur, et que celle-ci est sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse » ne pouvait être considérée comme ayant été valablement donnée compte tenu du fait que d'autres informations figuraient en gras dans la note d'information et du nombre de pages (sept) que contenait cette note sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p.32s., p.3s.), si les souscripteurs n'avaient pas reconnu et certifié avoir pris connaissance des dispositions contenues dans la note d'information de sorte qu'importait peu la circonstance que la mention sur les risques figurait en gras au même titre que d'autres mentions et que la note d'information comportait sept pages, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 132-5-1 du code des assurances ;
3°) ALORS encore QUE lorsque les sommes versées sur un contrat d'assurance vie font l'objet d'un démembrement de propriété, la faculté de renonciation prorogée prévue par l'article L 132-5-1 du code des assurances ne peut être exercée lorsque le nu propriétaire, qui détient seul le pouvoir d'accomplir des actes de disposition sur ces sommes et qui est le destinataire légal des sommes restituées du fait de l'exercice de la faculté de rétractation, ne réunit pas en sa personne les conditions nécessaires à l'exercice de cette faculté ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que Monsieur W... C..., nu-propriétaire des fonds versés sur le contrat d'assurance-vie qu'il avait souscrit avec les époux C..., usufruitiers, ne pouvait, en sa qualité de consultant fiscaliste, « prétendre ignorer le mécanisme du contrat de capitalisation en cause » ; qu'il en résultait que Monsieur W... C... avait connaissance des risques auxquels il s'exposait, et que celui-ci entendait détourner la faculté de renonciation prorogée de sa finalité en l'utilisant non pas pour sanctionner un défaut d'information mais pour échapper à ses pertes ; qu'en jugeant toutefois que le droit de rétractation sur ce contrat avait été valablement exercé, au motif inopérant que les connaissances propres de Monsieur W... C... ne préjugeaient en rien des connaissances des époux C..., usufruitiers, la Cour d'appel a violé l'article L 132-5-1 du code des assurances, ensemble l'article du code civil ;
4°) ALORS en outre QU' en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée (v. conclusions, p.13 et 18), si Monsieur W... C..., consultant fiscaliste, n'avait pas nécessairement connaissance de l'information selon laquelle l'assureur ne s'engageait que sur le nombre d'unités de compte et que la valeur de ces unités était sujette à des fluctuation à la hausse ou à la baisse dans la mesure où celui-ci avait étudié à l'ICN Business School, Ecole supérieure de commerce et de management, ni rechercher si cette circonstance n'était pas de nature à faire échec à la restitution des sommes initialement versées sur le contrat d'assurance-vie qu'il avait souscrit, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 132-5-1 du code des assurances, ensemble l'article 578 du code civil ;
5°) ALORS en toute hypothèse QUE si les juges du fond doivent rechercher si l'exercice, par un assuré, de sa faculté de renonciation ne présente pas un caractère abusif en considération non seulement des informations dont il disposait réellement mais également de sa « situation concrète » et de sa qualité de « souscripteur averti », c'est en considération du fait que certaines personnes, du fait de leur expérience, de leur niveau d'instruction ou de leur profession, disposent nécessairement d'un certain nombre de connaissances fondamentales, notamment en matière financière ou assurantielle, et d'un degré de compréhension plus élevé que certains souscripteurs ; qu'en l'espèce, la société Oradéa Vie faisait précisément valoir que du fait de leur profession, Messieurs O... et R... C..., respectivement avocat et avoué, ne pouvaient sérieusement prétendre ignorer que les performances d'un support en unités de comptes et plus encore de supports en actions sont par essence aléatoires, étant précisé que les documents communiqués étaient clairs sur la nature et les caractéristiques des supports souscrits ; qu'en se bornant à relever sur ce point que la profession exercée par Messieurs O... et R... C... ne faisaient pas de ceux-ci des « personnes averties à savoir des personnes spécialisées dans le domaine financier », quand il lui appartenait de rechercher, comme elle y était invitée, si, compte tenu de leur situation concrète et de leur profession, Messieurs O... et R... C... ne savaient pas nécessairement que les performances de supports en unités de compte, et plus précisément de supports en actions, sont fonction de la fluctuation des cours, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 132-5-1 du code des assurances ;
6°) ALORS enfin QUE c'est à la lumière d'un faisceau d'indices qu'il appartient au juge de déterminer concrètement si l'assuré avait, au moment où il a exercé sa faculté de renonciation, conscience de longue date des caractéristiques de son contrat et de la portée de son engagement ; qu'en jugeant que le caractère abusif de l'exercice de la faculté de renonciation ne pouvait se déduire du seul écoulement du temps, ni de la seule profession de certains souscripteurs, ni de la seule circonstance qu'ils avaient activement géré leurs contrats en procédant à diverses opérations de rachat, sans rechercher s'il ne résultait pas de l'ensemble des éléments invoqués, analysés globalement, que les souscripteurs avaient parfaitement conscience de la portée de leur engagement et qu'en renonçant à leurs contrats, huit ans après les avoir conclus, ils avaient fait un usage déloyal de la faculté de renonciation qui leur était offerte, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 132-5-1 du code des assurances dans sa rédaction applicable à la cause ;