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21/11/2019 | FRANCE | N°18-18165

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 21 novembre 2019, 18-18165


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 18 avril 2004, V... M..., qui circulait sur son cyclomoteur, a été victime d'un accident de la circulation à la suite duquel il est décédé ; qu'un chien appartenant à Mme S... avait fait irruption sur la chaussée et que V... M..., surpris par le freinage du véhicule qui le précédait, avait perdu le contrôle de son engin et avait été projeté sur un poteau électrique ; que M. R... M... et Mme O... U... , parents de la victime, M. L... M... et Mme D... M...,

épouse Y..., ses frère et soeur, cette dernière agissant en son nom perso...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 18 avril 2004, V... M..., qui circulait sur son cyclomoteur, a été victime d'un accident de la circulation à la suite duquel il est décédé ; qu'un chien appartenant à Mme S... avait fait irruption sur la chaussée et que V... M..., surpris par le freinage du véhicule qui le précédait, avait perdu le contrôle de son engin et avait été projeté sur un poteau électrique ; que M. R... M... et Mme O... U... , parents de la victime, M. L... M... et Mme D... M..., épouse Y..., ses frère et soeur, cette dernière agissant en son nom personnel et en qualité d'administratrice légale de sa fille mineure X..., ont assigné Mme S..., la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de Loire, son assureur responsabilité civile (l'assureur), et la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor (la caisse) en réparation de leurs préjudices ; que cette dernière a sollicité le remboursement des débours exposés pour M. R... M... au titre des frais médicaux du 12 décembre 2005 au 30 mars 2006 et des indemnités journalières du 13 décembre 2005 au 14 avril 2006 ainsi que l'allocation d'une indemnité forfaitaire de gestion ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que Mme S... et l'assureur font grief à l'arrêt de faire droit aux demandes de la caisse, alors, selon le moyen, que les caisses de sécurité sociale qui exercent contre l'auteur responsable de l'accident un recours en vue d'obtenir de l'indemnisation des préjudices qu'elles ont pris en charge sont tenues de mettre en cause la victime ; que la caisse demandait la condamnation de Mme S... et de l'assureur à lui rembourser les frais médicaux et indemnités journalières qu'elle avait exposés et versées à M. M... en soutenant que ces dépenses réparaient un préjudice consécutif à l'accident dont Mme S... était responsable ; qu'en accueillant cette demande bien que la caisse n'avait pas mis en cause en appel M. M..., la cour d'appel a violé l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que l'action en annulation du jugement prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale lorsque la caisse de sécurité sociale concernée a omis d'appeler en déclaration de jugement commun la victime ou ses ayants droit, ne peut être portée directement devant la Cour de cassation ;

D'où il suit que le moyen est irrecevable ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

Attendu, selon ce texte, que les recours subrogatoires des tiers payeurs s'exercent poste par poste sur les seules indemnités réparant des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel ; que cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ;

Attendu que, pour faire droit aux demandes de la caisse, l'arrêt retient qu'il résulte des pièces produites qu'à la suite au décès de son fils, M. M... a présenté une dépression réactionnelle qui a mené à un deuil pathologique comme le mentionnent expressément les différents arrêts de travail dont il a fait l'objet ; que s'il a fait le choix de ne pas solliciter judiciairement une indemnisation pour cet état consécutif à l'accident compte tenu de la prise en charge directement par son organisme social des frais médicaux devant être engagés à ce titre et du versement d'indemnités journalières, la caisse est cependant bien fondée à solliciter la condamnation au paiement des sommes qu'elle a ainsi réglées et qu'au regard des justificatifs produits, il doit être fait droit à sa demande, les frais médicaux et les indemnités journalières payés pour M. M... étant en lien direct avec l'accident ;

Qu'en statuant ainsi, sans évaluer préalablement, poste par poste, les préjudices de la victime soumis à recours et sans préciser quels postes de préjudice avaient été pris en charge par les prestations servies par la caisse ni procéder aux imputations correspondantes, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 avril 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor à payer à la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de Loire la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Bretagne Pays de la Loire et Mme S....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum Mme I... S... et la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Bretagne Pays de Loire à régler à la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes-d'Armor la somme de 3 902 euros au titre des frais médicaux et des indemnités journalières payées pour M. R... M... et celle de 1 037 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion pour le recouvrement de ces débours ;

AUX MOTIFS QUE M. R... M... et son épouse Mme O... U... , parents de V..., L... M... et D... M... épouse Y...), frère et soeur de V..., cette dernière agissant ès nom et ès qualités d'administrateur légal de sa fille X..., ont attrait Mme I... S..., la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Bretagne Pays de Loire dite Groupama Bretagne, son assureur responsabilité civile et la Caisse primaire d'assurance maladie des Côtes-d'Armor (CPAM) devant le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc en réparation de leurs préjudices respectifs par assignations en date des 15 et 18 novembre 2013 ; que par le jugement déféré, le tribunal a statué sur les indemnisations sollicitées et a débouté la CPAM de sa demande en remboursement des débours exposés pour M. R... M... au titre des frais médicaux du 12 décembre 2005 au 30 mars 2006 et d'indemnités journalières du 13 décembre 2005 au 14 avril 2006 au motif que l'imputabilité de ces débours aux conséquences de l'accident n'était nullement établie puisque seule figurait au dossier de la demanderesse une attestation de consultation de R... M... au centre médico-psychologique de Begard les 1er et 22 juin 2004 ; que le 31 août 2015, la Cpam des Côtes-d'Armor a interjeté appel de cette décision ; que, sur les sommes sollicitées par l'organisme social, l'appelante reproche au tribunal d'avoir rejeté sa demande alors que les pièces communiquées établissent qu'elle a réglé des frais médicaux et des indemnités journalières pour M. R... M... et suite à l'état dépressif qu'il a présenté depuis le décès de son fils V... ; que GROUPAMA Loire Bretagne et Mme S... soutiennent que ces demandes sont irrecevables alors que M. M... n'a jamais sollicité l'indemnisation de son préjudice découlant d'un deuil pathologique considérant ainsi ne pas subir un tel deuil et que son organisme social n'est subrogé que dans ses droits et actions ; qu'il résulte des pièces produites à la procédure que suite au décès de son fils V..., M. M... a présenté une dépression réactionnelle et qui a mené à un deuil pathologique comme le mentionnent expressément les différents arrêts de travail dont il a fait l'objet ; que si M. M... a fait choix de ne pas solliciter judiciairement une indemnisation pour cet état consécutif à l'accident compte tenu de la prise en charge directement par son organisme social des frais médicaux devant être engagés à ce titre et du versement d'indemnités journalières, la Caisse primaire d'assurance maladie des Côtes-d'Armor est cependant bien fondée à solliciter la condamnation au paiement des sommes qu'elle a ainsi réglées ; qu'en regard des justificatifs produits, il doit être fait droit à la demande de l'appelante tant en son principe qu'en son quantum, les frais médicaux (92 euros) et indemnités journalières (3 810 euros) payés pour M. M... étant en lien direct avec l'accident survenu le 18 avril 2004 ;

1°) ALORS QUE les caisses de sécurité sociale qui exercent contre l'auteur responsable de l'accident un recours en vue d'obtenir de l'indemnisation des préjudices qu'elles ont pris en charge sont tenues de mettre en cause la victime ; que la CPAM des Côtes-d'Armor demandait la condamnation de Mme I... S... et de la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Bretagne Pays de Loire à lui rembourser les frais médicaux et indemnités journalières qu'elle avait exposés et versées à M. M... en soutenant que ces dépenses réparaient un préjudice consécutif à l'accident dont Mme S... était responsable ; qu'en accueillant cette demande bien que la CPAM n'avait pas mis en cause en appel M. M..., la cour d'appel a violé l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

2°) ALORS QUE les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel ; qu'en se bornant à retenir, pour condamner Mme S... et la Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Bretagne Pays de Loire à rembourser à la CPAM le montant des frais médicaux et indemnités journalières qu'elle avait exposés et versées à M. M..., que la demande était justifiée tant en son principe qu'en son quantum, les dépenses étant en lien direct avec l'accident, quand il lui appartenait de déterminer préalablement les préjudices subis par la victime avant, éventuellement, d'accueillir le recours de la caisse dans la limite de l'assiette constituée par le montant préjudice ainsi déterminé, la cour d'appel a violé l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-18165
Date de la décision : 21/11/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 11 avril 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 21 nov. 2019, pourvoi n°18-18165


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.18165
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