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14/11/2019 | FRANCE | N°18-21276

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 novembre 2019, 18-21276


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens,12 juin 2018), que M. et Mme J... ont pris à bail à long terme des parcelles, devenues propriété de Mme P..., qu'ils ont mises à la disposition de l'exploitation agricole à responsabilité limitée Ferme aux Lions (l'EARL) ; qu'ils ont demandé au tribunal paritaire des baux ruraux l'autorisation d'associer leur fille aux baux dont ils sont titulaires ;

Attendu que M. et Mme J... font grief à l'arrêt de rejet

er leur demande ;

Mais attendu qu'ayant retenu, exactement, que, lorsque les bien...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens,12 juin 2018), que M. et Mme J... ont pris à bail à long terme des parcelles, devenues propriété de Mme P..., qu'ils ont mises à la disposition de l'exploitation agricole à responsabilité limitée Ferme aux Lions (l'EARL) ; qu'ils ont demandé au tribunal paritaire des baux ruraux l'autorisation d'associer leur fille aux baux dont ils sont titulaires ;

Attendu que M. et Mme J... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande ;

Mais attendu qu'ayant retenu, exactement, que, lorsque les biens loués sont destinés à être exploités, dès l'association au bail, par mise à la disposition d'une société, l'activité de ce groupement doit être conforme à la réglementation sur le contrôle des structures et souverainement que M. et Mme J... ne justifiaient pas que l'EARL bénéficiait, de son propre chef, d'une autorisation administrative portant sur les terres qu'elle devait exploiter après l'opération projetée, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, sans méconnaître le principe de la contradiction, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme J... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme J... et les condamne à payer à Mme P... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. et Mme J...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR refusé à M. Y... J... et Mme K... N... épouse J... l'autorisation d'associer Mme Q... J... aux baux dont ils sont titulaires consentis par acte du 27 décembre 1976 et du 31 décembre 1986 ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande des époux J... N... à se voir autoriser à associer Mme Q... J... à leurs baux ; il résulte de l'emploi de la location « de même » qui introduit le second alinéa de l'article L.411-35 du code rural ci-dessus rappelé et qui traite de l'association au bail en qualité de co-preneur du conjoint, du partenaire du pacte civil de solidarité ou de l'un des descendants majeurs du preneur que contrairement à ce que plaident les époux J... N... le régime applicable à cette association est identique à celui de la cession ; que la faculté que se voit reconnaître par l'article L411-35 du code rural le preneur de céder son bail avec l'agrément du bailleur ou sur autorisation judiciaire notamment à l'un de ses descendants majeurs constitue une exception au principe d'incessibilité du bail rural et est réservée au preneur qui a strictement respecté l'ensemble des obligations nées du bail ; de plus, la cession projetée ne doit pas nuire aux intérêts légitimes du bailleur, entendus comme la garantie d'une bonne exploitation du fonds par le candidat cessionnaire, sans que n'aient à entrer en compte les projets personnels du bailleur sur les biens donnés à bail ; qu'il est de principe que la garantie de bonne exploitation du fonds par le candidat cessionnaire s'apprécie en fonction des conditions mises à la charge du bénéficiaire de la reprise par les articles L.411-58 et L.411-59 du code rural. C'est à la date de la cession projetée, soit celle où le juge statue que le candidat cessionnaire doit satisfaire à ces conditions ; qu'il résulte de l'article L.411-59 du code rural et des articles auxquels ce dernier texte renvoie ainsi que des dispositions réglementaires venant les compléter que le bénéficiaire de la reprise doit se consacrer à l'exploitation pendant au moins neuf ans en participant aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de l'exploitation, posséder le cheptel et le matériel nécessaires ou, à défaut, les moyens de les acquérir ; il doit occuper lui-même les bâtiments d'habitation du bien repris ou une habitation située à proximité et en permettant l'exploitation directe ; que le bénéficiaire de la reprise doit justifier par tous moyens qu'il satisfait aux conditions précitées et qu'il répond aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnées aux article L.331-2 à L.331-5 ou qu'il a bénéficié d'une autorisation d'exploiter ; que s'évinçant de l'article L.411-58 du code rural que l'opération de reprise doit être conforme à la réglementation sur le contrôle des structures, cette condition est requise de la cession projetée ; que les conditions tenant d'une part au strict respect par le preneur des obligations nées du bail et d'autre part aux garanties présentées par le candidat cessionnaire sont cumulatives ; que ces conditions devant s'apprécier à la date de la cession projetée, elles doivent être remplies au jour où le juge statue ; sur la condition de la bonne foi des preneurs (...) les biens pris à bail ont été mis à disposition de l'EARL B... et Y... J... qui est issue de la transformation par acte du 31 décembre 1986 du GAEC éponyme constitué entre B... et Y... J.... Le tribunal a retenu que cette mise à disposition remontait au 26 juin 1987, date que retiendra la cour à défaut d'élément contraire (...) ; que sur les conditions de bonne exploitation du fond par Mme Q... J..., candidate à l'association ; que Mme I... J... épouse P... conteste que l'association projetée soit conforme à la réglementation sur le contrôle des structures faisant valoir que la demande d'association des baux porte sur une superficie de 202ha 46a 74ca qui dépasse le seuil de déclenchement des cumuls ; que les époux J... N... font valoir que Mme Q... J... qui est déjà associée de l'EARL Y... J... à la disposition de laquelle les terres objet des baux sont mises à disposition n'a pas à justifier d'une autorisation personnelle et préalable d'exploiter et que la cession projetée ne conduisant pas à un agrandissement de l'exploitation, elle n'est pas soumise à autorisation. Ils produisent à l'appui un courrier émanant de la Direction départementale des territoires de l'Aisne en date du 24 août 2015 selon lequel l'installation de Mme Q... J... par la reprise de parts sociales n'est pas soumise à autorisation d'exploiter et un courriel émanant de la même direction en date du 9 mai 2017 adressée à leur conseil en réponse à sa question, selon lequel la cession de baux entre associés dont l'entrée dans la société remplit déjà les conditions fixées par la réglementation sur le contrôle des structures, n'est elle-même pas soumise à autorisation préalable au titre de cette réglementation ; que pour être autorisée judiciairement l'opération projetée (association de Mme Q... J... aux baux dont les époux J... N... sont titulaires) doit être conforme à la réglementation sur le contrôle des structures ; que la surface exploitée par l'EARL Y... J... devenue désormais Ferme aux Lions étant supérieure à 255 hectares au vu du relevé d'exploitation en date du 16 juin 2014 produit par les époux J... N..., elle excède le seuil de déclenchement du contrôle des structures fixé par l'arrêté du 29 juin 2016 portant schéma directeur régional des exploitations agricoles pour la Picardie à hauteur de 90 hectares de sorte que cette société est soumise de son propre chef à une autorisation préalable d'exploiter ; qu'il s'évince de l'interprétation a contrario de l'article L.331-2 3° a) du code rural que l'installation au bénéfice d'une exploitation agricole d'un de ses membres qui a la capacité professionnelle et qui n'entraîne pas une modification des superficies exploitées ne donne pas lieu en tant que telle à une autorisation d'exploiter ; que le fait que la Direction des territoires de l'Aisne ait considéré aux termes d'un courrier du 24 août 2015 que l'installation de Mme Q... J... qui satisfaisait à la condition de capacité professionnelle, étant titulaire d'un baccalauréat technologique, série sciences et technologies de l'agronomie et de l'environnement obtenu le 1er juillet 2004, par l'acquisition de 546 parts sociales de l'EARL Y... J... cédée par ses parents par acte du 23 décembre 2015 ne donnait pas lieu par elle-même à une autorisation personnelle d'exploiter dès lors que son installation n'aboutissait pas à un agrandissement de la superficie exploitée par la société ne signifie pas pour autant que cette société soit en conformité avec la réglementation sur le contrôle des structures ; qu'il est relevé que le courrier de la Direction des territoires de l'Aisne du 9 mai 2017 en réponse à la demande du conseil des époux J... N... est assortie d'une réserve tenant à la nécessité pour la société de remplir déjà les conditions fixées par la réglementation sur le contrôle des structures ; qu'à défaut pour les époux J... N... de justifier que l'EARL Ferme aux Lions bénéficie déjà de son propre chef d'une autorisation d'exploiter portant sur les terres que cette société est destinée à exploiter après l'opération projetée, il n'est pas établi que cette opération soit conforme à la réglementation sur le contrôle des structures de sorte qu'infirmant le jugement entrepris, les époux J... N... ne sauraient être autorisés judiciairement à associer aux baux dont ils sont titulaires Mme Q... J... ;

1) ALORS QUE les juges du fond, qui doivent en toutes circonstances faire observer et observer eux-mêmes le principe du contradictoire, ne peuvent fonder leur décision sur un moyen qu'ils ont relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que dans ses conclusions d'appel oralement soutenues, Mme P... faisait valoir qu'il n'était pas justifié que la fille de M. et Mme J..., au profit de laquelle la demande d'association aux deux baux avaient été faite, ait obtenu une autorisation au titre de la législation sur le contrôle des structures en raison de la superficie affermée ; que dans leurs conclusions d'appel oralement soutenues, M. et Mme J... répliquaient que leur fille n'avait pas à justifier d'une autorisation préalable d'exploiter, dans la mesure où elle remplissait la condition de capacité professionnelle et que l'opération d'association au bail ne conduisait pas à un agrandissement de l'exploitation ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel M. et Mme J... ne justifiait pas de ce que l'EARL Ferme aux Lions bénéficiait déjà personnellement d'une autorisation d'exploiter les parcelles objet de l'association aux baux, sans avoir, au préalable, invité les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE les juges du fond, qui doivent en toutes circonstances faire observer et observer eux-mêmes le principe du contradictoire, ne peuvent fonder leur décision sur un moyen qu'ils ont relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de l'applicabilité au litige de l'arrêté du 29 juin 2016 portant schéma directeur régional des exploitations agricoles pour la Picardie, sans avoir, au préalable, invité les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3) ALORS en toute hypothèse QUE la société, exploitante par mise à disposition de terres affermées, est soumise à la législation relative au contrôle des structures dans sa rédaction applicable à la date de la mise à disposition ; qu'en l'espèce, pour refuser à M. et Mme J... l'autorisation d'associer leur fille, en qualité de co-preneuse, aux baux ruraux qui leur avaient été consentis, faute de justifier de ce que l'EARL Ferme aux Lions bénéficiait déjà d'une autorisation d'exploiter, la cour d'appel a retenu que la surface exploitée par cette dernière étant supérieure à 255 hectares, elle excède le seuil de déclenchement du contrôle des structures fixé par l'arrêté du 29 juin 2016 portant schéma directeur régional des exploitations agricoles pour la Picardie à hauteur de 90 hectares ; qu'en se plaçant à la date de cet arrêté pour apprécier la conformité de l'EARL Ferme aux Lions à la législation sur le contrôle des structures, cependant qu'elle avait constaté que la mise à disposition des parcelles affermées au profit de l'EARL Ferme aux Lions remontait au 26 juin 1987, la cour d'appel a violé les articles L. 411-35 et L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-21276
Date de la décision : 14/11/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 12 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 nov. 2019, pourvoi n°18-21276


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.21276
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