LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 31 mai 2018), que M. T... a été engagé le 1er juin 2001 par l'association Santé au travail 72 en qualité de technicien hygiène et sécurité ; qu'il exerçait en dernier lieu en qualité d'intervenant en prévention des risques professionnels et de coordonnateur du pôle technique ; qu'il a été licencié pour cause réelle et sérieuse le 18 juin 2014 ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement du salarié ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, de le condamner en conséquence à payer certaines sommes alors, selon le moyen :
1°/ que la consultation du comité inter-entreprises ou de la commission de contrôle, notamment lors du licenciement d'un intervenant en prévention des risques professionnels ou d'un infirmier, n'a pas pour finalité la protection du salarié concerné, mais celle de l'organisation et du fonctionnement du service de santé au travail ; qu'elle ne peut donc être invoquée par le salarié licencié pour contester la régularité de son licenciement ; qu'en jugeant du contraire, la cour d'appel a violé par fausse application l'article D. 4622-31 du code du travail ;
2°/ qu'une irrégularité commise au cours de la procédure de licenciement, notamment si celui-ci intervient sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable ait été respectée, ouvre seulement droit à une indemnité au plus égale à un mois de salaire et ne prive pas nécessairement de cause réelle et sérieuse le licenciement ; qu'en déclarant dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de M. T..., au seul motif que la commission de contrôle n'avait pas été consultée préalablement, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1235-2 et L. 1235-3 du code du travail dans leur rédaction applicable à l'espèce, ensemble l'article D. 4622-31 du même code ;
Mais attendu que selon l'article R. 4623-37 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012, l'intervenant en prévention des risques professionnels assure ses missions dans des conditions garantissant son indépendance ; que selon l'article D. 4622-31 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2012-1247 du 7 novembre 2012, le comité interentreprises ou la commission de contrôle est consulté sur l'organisation et le fonctionnement du service de santé au travail, et notamment sur le licenciement d'un intervenant en prévention des risques professionnels ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes que la consultation du comité interentreprises ou de la commission de contrôle, préalablement au licenciement d'un intervenant en prévention des risques professionnels, constitue pour le salarié une garantie de fond dont la violation prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que le licenciement du salarié était intervenu sans la consultation préalable de la commission de contrôle, en a exactement déduit qu'il était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association Santé au travail 72 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Santé au travail 72 à payer à M. T... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour l'association Santé au travail 72
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur T... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, d'AVOIR, en conséquence, condamné l'AST 72 à lui payer les sommes de 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de lui AVOIR ordonné de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage perçues par le salarié, dans la limite de deux mois d'indemnités — ainsi que, en tant que de besoin, d'AVOIR débouté Monsieur T... de sa demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE « sur le licenciement : L'article D. 4622-31 du code du travail, dans sa version applicable au litige en vertu du décret du 30 janvier 2012, dispose que « le comité inter-entreprises ou la commission de contrôle est consulté sur l'organisation et le fonctionnement du service de Santé au Travail notamment sur : - 7° le licenciement d'un intervenant en prévention des risques professionnels (IPRP) ou d'un infirmier » ; que les statuts de l'association Santé au travail 72 prévoient, aux articles 18 et 19, que la Commission de Contrôle, organisme paritaire, est consultée en cas de licenciement d'un Intervenant en Prévention des Risques Professionnels ; qu'il ne fait pas de débat que M. T... dont la qualité d'Intervenant en Prévention des Risques Professionnels n'est pas contestée, bénéficiait des garanties renforcées en cas de licenciement prévues tant par l'article D 4622-31 du code du travail que par les statuts de l'association ; que la consultation d'un organisme chargé en vertu d'une disposition réglementaire et statutaire de donner un avis sur la mesure de licenciement envisagée par l'employeur constitue une garantie de fond pour le salarié. Le fait que le licenciement du salarié soit prononcé sans que l'organisme ait été préalablement consulté avant la notification de la mesure prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, la consultation de la commission de contrôle, tout comme celle du comité d'entreprise, est intervenue le 18 novembre 2014 après la notification du licenciement de M. T... le 18 juin 2014, plaçant de fait l'organisme de contrôle dans l'impossibilité de donner le moindre avis en amont de la mesure de licenciement et ce, en méconnaissance des textes susvisés ; que l'inobservation de la procédure statutaire par l'employeur constitue une irrégularité de fond dont la méconnaissance prive le licenciement de M.T... de cause réelle et sérieuse sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur les autres moyens soulevés par le salarié et sur le bien fondé des causes du licenciement ; que le jugement doit être en conséquence infirmé de ce chef » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la consultation du comité inter-entreprises ou de la commission de contrôle, notamment lors du licenciement d'un intervenant en prévention des risques professionnels ou d'un infirmier, n'a pas pour finalité la protection du salarié concerné, mais celle de l'organisation et du fonctionnement du service de santé au travail ; qu'elle ne peut donc être invoquée par le salarié licencié pour contester pla régularité de son licenciement ; qu'en jugeant du contraire, la cour d'appel a violé par fausse application l'article D. 4622-31 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, ET SUBSIDIAIREMENT, QU'une irrégularité commise au cours de la procédure de licenciement, notamment si celui-ci intervient sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable ait été respectée, ouvre seulement droit à une indemnité au plus égale à un mois de salaire et ne prive pas nécessairement de cause réelle et sérieuse le licenciement ; qu'en déclarant dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur T..., au seul motif que la commission de contrôle n'avait pas été consultée préalablement, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1235-2 et L. 1235-3 du Code du travail dans leur rédaction applicable à l'espèce, ensemble l'article D. 4622-31 du même Code.