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06/11/2019 | FRANCE | N°19-82683

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 06 novembre 2019, 19-82683


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 19-82.683 FS-P+B+I

N° 2127

SM12
6 NOVEMBRE 2019

CASSATION

Mme DE LA LANCE conseiller le plus ancien faisant fonction de président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

CASSATION sur le pourvoi formé par le procureur génÃ

©ral près la cour d'appel d'Orléans, contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 28 f...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 19-82.683 FS-P+B+I

N° 2127

SM12
6 NOVEMBRE 2019

CASSATION

Mme DE LA LANCE conseiller le plus ancien faisant fonction de président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

CASSATION sur le pourvoi formé par le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 28 février 2019, qui, dans l'information suivie contre M. N... B..., du chef de proxénétisme aggravé, a infirmé les ordonnances de saisie pénale du juge d'instruction ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 septembre 2019 où étaient présents : Mme de la Lance, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Ascensi, conseiller rapporteur, Mmes Planchon, Zerbib, MM. d'Huy, Wyon, Pauthe, conseillers de la chambre, Mme Pichon, M. Ascensi, Mme Fouquet, conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Valat ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire ASCENSI, les observations de la société civile professionnelle BORÉ, SALVE DE BRUNETON et MÉGRET, avocat en la Cour et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle en date du 6 mai 2019 prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;

Vu les mémoires produits en demande en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 591, 593, 706-141 à 706-149, 706-153 à 706-156, du code de procédure pénale, et 131-21, 225-24-1° et 225-25 du code pénal, violation de la loi, défaut de motifs et manque de base légale ;

Vu les articles 706-141-1 et 706-153 du code de procédure pénale, et 131-21 du code pénal ;

Attendu qu'il résulte des deux premiers de ces textes qu'au cours de l'information judiciaire, le juge d'instruction peut ordonner la saisie des biens ou droits incorporels dont la confiscation est prévue par l'article 131-21 du code pénal ; que la saisie peut être ordonnée en valeur ;

Que le troisième de ces textes dispose que la confiscation porte notamment sur les biens meubles ou immeubles, quelle qu'en soit la nature, divis ou indivis, ayant servi à commettre l'infraction ou qui étaient destinés à la commettre, et dont le condamné est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition ; que la confiscation peut être ordonnée en valeur ;

Qu'il se déduit de ces textes que peuvent être saisis en valeur les biens ou droits incorporels dont le mis en cause est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, dont la valeur représente celle des biens ayant servi à commettre l'infraction ou qui étaient destinés à la commettre ;

Que, dans ce cas, il appartient au juge, d'une part, de s'assurer que les conditions de la confiscation de l'instrument de l'infraction prévues par le deuxième alinéa de l'article 131-21 du code pénal étaient réunies au moment de la commission des faits, d'autre part, de vérifier que la valeur du bien saisi n'excède pas celle de l'instrument de l'infraction, enfin, lorsqu'une telle garantie est invoquée, d'apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée au droit de propriété de l'intéressé au regard de la gravité concrète des faits et de sa situation personnelle ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, par acte du 28 novembre 2018, le juge d'instruction a ordonné la saisie, entre les mains du notaire, du produit de la vente par la société civile immobilière 146 Heurteloup, gérée par M. B..., mis en examen du chef susvisé, de deux ensembles immobiliers, ainsi que de lots d'un troisième ensemble immobilier, situés à Tours (37), pour un montant total de 2 418 668,25 euros ; que, le 11 décembre 2018, le juge d'instruction a rendu une seconde ordonnance prescrivant la saisie en valeur, entre les mains du même notaire, du solde créditeur de la vente de ces immeubles pour un montant total de 25 302,53 euros ; que la société 146 Heurteloup, notamment, a interjeté appel de ces décisions ;

Attendu que, pour infirmer les ordonnances attaquées, cantonner la saisie à la somme de 436 000 euros, et ordonner la restitution à la société 146 Heurteloup du surplus du produit de la vente, l'arrêt retient, après avoir relevé que M. B... encourt la saisie et la confiscation en valeur des biens lui appartenant ou dont il a la libre disposition, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, que les immeubles litigieux et le produit de leur vente sont à sa libre disposition, la société 146 Heurteloup ne pouvant être considérée comme propriétaire de bonne foi, et que ces immeubles constituent le lieu des faits de proxénétisme aggravé reprochés à M. B..., que pour qu'une saisie en valeur soit ordonnée, il est exigé que la valeur du bien dont la saisie est envisagée soit en corrélation avec le montant des gains issus de l'infraction susceptible d'être constituée ; que les juges ajoutent que les gains provenant des faits poursuivis pouvant être considérés comme s'élevant à la somme de 436 000 euros, la société 146 Heurteloup invoque à raison la disproportion des saisies pratiquées en valeur par le juge d'instruction, de sorte que la saisie en valeur doit être limitée à la somme de 436 000 euros ;

Mais attendu qu'en limitant la saisie au montant du produit de l'infraction, alors qu'elle avait constaté que, d'une part, les immeubles ayant servi à commettre le délit poursuivi, bien que cédés postérieurement aux faits, étaient lors de leur commission à la libre disposition de M. B... et que la société 146 Heurteloup n'était pas de bonne foi, d'autre part, les sommes saisies par le juge d'instruction représentaient la valeur de l'instrument de l'infraction, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans, en date du 28 février 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Angers, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six novembre deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 19-82683
Date de la décision : 06/11/2019
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CONFISCATION - Instrument du délit ou chose produite par le délit - Confiscation en valeur - Conditions - Valeur du bien n'excédant pas celle du produit - Proportionnalité - Défaut - Portée

Il se déduit des articles 706-141-1 et 706-153 du code de procédure pénale, et 131-21 du code pénal, que peuvent être saisis en valeur les biens ou droits incorporels dont le mis en cause est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, dont la valeur représente celle des biens ayant servi à commettre l'infraction ou qui étaient destinés à la commettre. Il appartient dans ce cas au juge, d'une part, de s'assurer que les conditions de la confiscation de l'instrument de l'infraction prévues par le deuxième alinéa de l'article 131-21 du code pénal étaient réunies au moment de la commission des faits, d'autre part, de vérifier que la valeur du bien saisi n'excède pas celle de l'instrument de l'infraction, enfin, lorsqu'une telle garantie est invoquée, d'apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée au droit de propriété de l'intéressé au regard de la gravité concrète des faits et de sa situation personnelle. Encourt la cassation l'arrêt de la chambre de l'instruction qui a retenu que la saisie en valeur d'un bien doit être en corrélation avec le montant du produit de l'infraction, alors qu'elle avait constaté que, d'une part, les immeubles ayant servi à commettre le délit poursuivi, bien que cédés postérieurement aux faits, étaient lors de leur commission à la libre disposition du mis en examen et que la titulaire de la créance saisie n'était pas de bonne foi, d'autre part, les sommes saisies par le juge d'instruction représentaient la valeur de l'instrument de l'infraction


Références :

articles 706-141-1 et 706-153 du code de procédure pénale

article 131-21 du code pénal

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans, 28 février 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 06 nov. 2019, pourvoi n°19-82683, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : Mme de la Lance (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 31/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:19.82683
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