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06/11/2019 | FRANCE | N°18-23999;18-24001;18-24002;18-24003;18-24004;18-24005;18-24006

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 novembre 2019, 18-23999 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° G 18-23.999, K 18-24.001, M 18-24.002, N 18-24.003, P 18-24.004, Q 18-24.005 et R 18-24.006 ;

Attendu, selon les jugements attaqués, rendus en dernier ressort, que M. A... et six autres salariés ont été engagés par la société La Toque angevine dans le courant de l'année 2015 ; que, se plaignant de ne pas avoir été remplis de leurs droits au titre de la prime conventionnelle d'ancienneté pour l'année 2016, ils ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de c

omplément de prime et de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Atte...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° G 18-23.999, K 18-24.001, M 18-24.002, N 18-24.003, P 18-24.004, Q 18-24.005 et R 18-24.006 ;

Attendu, selon les jugements attaqués, rendus en dernier ressort, que M. A... et six autres salariés ont été engagés par la société La Toque angevine dans le courant de l'année 2015 ; que, se plaignant de ne pas avoir été remplis de leurs droits au titre de la prime conventionnelle d'ancienneté pour l'année 2016, ils ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de complément de prime et de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 1153 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu que pour allouer des dommages-intérêts aux salariés pour résistance abusive, les jugements retiennent qu'au vu des pièces, et en particulier des jugements récents rendus par le conseil de prud'hommes sur la même problématique concernant l'année précédente, le conseil estime que l'employeur fait preuve de résistance abusive, en conséquence, il est fait droit à la demande au titre des dommages-intérêts pour résistance abusive ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'existence pour les salariés d'un préjudice indépendant du retard apporté au paiement par l'employeur et causé par sa mauvaise foi, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils condamnent la société La Toque angevine à verser à chaque salarié des dommages-intérêts pour résistance abusive, les jugements rendus le 4 septembre 2018, entre les parties, par le conseil de prud'hommes d'Angers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits jugements et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Saumur ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des jugements partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société La Toque angevine, demanderesse aux pourvois n° G 18-23.999 et K 18-24.001 à R 18-24.006

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief aux jugements attaqués d'AVOIR constaté la violation par la société La Toque Angevine des dispositions de l'article 41 de la convention collective nationale de l'industrie des produits alimentaires élaborés, d'AVOIR dit que les salariés avaient droit au paiement d'une prime annuelle au prorata de leur temps de travail pour l'année 2016, d'AVOIR condamné la société La Toque Angevine au paiement à chacun des salariés d'une certaine somme à ce titre avec intérêts au taux légal, d'AVOIR condamné la société La Toque Angevine à verser à ces salariés une certaine somme au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, avec intérêts au taux légal et d'AVOIR condamné la société La Toque Angevine à payer une somme de 500 € à chacun des salariés, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « sur le rappel de la prime annuelle 2016 : En droit, le salaire versé doit être conforme aux minimums légaux prévus par la loi, la convention collective et aux accords d'entreprise ainsi qu'au contrat de travail. L'article 41 de la convention collective des produits alimentaires élaborés dispose que : « il est institué dans chaque établissement, pour les salariés comptant au moins un an d'ancienneté, une prime annuelle qui se substitue à la prime de vacances et de fin d'année, et qui est calculée au prorata du temps de travail effectif de l'intéressé au cours d'une période de référence déterminée pour l'établissement... Cette allocation annuelle est égale à 100 % du salaire de base de l'intéressé ». Qu'aucune période de référence n'a été déterminée par l'employeur. Que Mr A... a été embauché par contrat CDD le 23/11/15 avec une reprise d'ancienneté au 01/09/15 selon les bulletins de salaire. Qu'à la date de versement de la prime, le 31 Décembre 2016, l'ancienneté d'un an exigée par la convention collective est acquise. Que l'employeur ne peut valablement soutenir à la lecture du texte conventionnel, que la période d'ouverture du droit constitue une "franchise" qui ne serait pas prise en compte pour le calcul du prorata. Qu'il n'appartient pas au Conseil de se positionner sur l'inégalité de traitement qui résulterait d'une embauche le 30 Décembre ou le 2 janvier. Que cette situation découle de la simple application du texte qui s'impose à tous, salarié, employeur et juge. Le Conseil juge qu'il convient de faire droit à la demande du salarié. Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive : Au vu des pièces, et en particulier des jugements récents rendus par le Conseil de prud'hommes sur la même problématique concernant l'année précédente, le Conseil estime que la société La Toque Angevine fait preuve de résistance abusive. En conséquence, le conseil fait droit à la demande au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive à hauteur de 250 €. Sur les demandes accessoires : Vu les articles 1153 et 1153.1 du code civil. En l'espèce et compte tenu de la nature de l'affaire, le Conseil dit que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation du défendeur devant le bureau de conciliation pour les indemnités de nature salariale et à compter du prononcé du présent jugement pour les indemnités à caractère indemnitaire. Le conseil constate que l'exécution provisoire est de droit s'agissant des salaires en application des articles R. 1454.28 et R. 1554.14 du Code du Travail dans la limite de 9 mois de salaire, calculée sur la moyenne des trois derniers mois que le conseil évalue à du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Le conseil condamne la société La Toque Angevine au paiement en faveur de M. A... de la somme de 500 €. La société La Toque Angevine, partie perdante, est condamnée aux dépens de l'instance » ;

1. ALORS QUE l'article 41 de la convention collective des industries des produits alimentaires élaborés dispose qu'il est « institué dans chaque établissement, pour les salariés comptant au moins un an d'ancienneté, une prime annuelle (...) qui est calculée au prorata du temps de travail effectif de l'intéressé au cours d'une période de référence » ; qu'il résulte de ce texte que lorsque le salarié acquiert une année d'ancienneté à une date en cours d'année civile, la prime annuelle doit être calculée au prorata du temps de travail effectif entre cette date et le dernier jour de l'année civile en cours ; qu'au cas présent, les salariés ayant été embauchés en 2015, ils n'ont acquis une année d'ancienneté, qu'au cours de l'année 2016 ; qu'en considérant que les salariés pouvaient revendiquer le versement d'une prime annuelle complète correspondant à une période à laquelle ils avaient moins d'un an d'ancienneté cependant qu'il constatait que l'article 41 de la convention collective des industries des produits alimentaires élaborés conditionnait son versement à une ancienneté d'un an minimum, le conseil de prud'hommes n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte conventionnel susvisé ;

2. ALORS QUE l'article 41 de la convention collective des industries des produits alimentaires élaborés dispose qu'il est « institué dans chaque établissement, pour les salariés comptant au moins un an d'ancienneté, une prime annuelle (...) qui est calculée au prorata du temps de travail effectif de l'intéressé au cours d'une période de référence » ; que lorsqu'aucune période de référence n'a été prévue dans l'établissement, celle-ci correspond à la période s'écoulant entre le premier et le dernier jour de l'année civile en cours ; qu'il en résulte que, lorsque le salarié acquiert un an d'ancienneté en cours d'année civile, celle-ci correspond nécessairement à la période s'écoulant entre l'acquisition par le salarié d'une année d'ancienneté et le dernier jour de l'année civile en cours ; qu'en décidant néanmoins que la totalité de la prime annuelle était due aux salariés ayant acquis un an d'ancienneté en cours d'année, le conseil de prud'hommes a violé le texte conventionnel susvisé ;

3. ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en se bornant à relever qu'aucune période de référence n'avait été déterminée par l'employeur, pour en déduire que la totalité de la prime était due sans s'expliquer sur la période de référence finalement retenue, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article 41 de la convention collective des industries des produits alimentaires élaborés.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief aux jugements attaqués d'AVOIR condamné la société La Toque Angevine à verser aux salariés une certaine somme au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, avec intérêts au taux légal ;

AUX MOTIFS QUE « sur le rappel de la prime annuelle 2016 : En droit, le salaire versé doit être conforme aux minimums légaux prévus par la loi, la convention collective et aux accords d'entreprise ainsi qu'au contrat de travail. L'article 41 de la convention collective des produits alimentaires élaborés dispose que : « il est institué dans chaque établissement, pour les salariés comptant au moins un an d'ancienneté, une prime annuelle qui se substitue à la prime de vacances et de fin d'année, et qui est calculée au prorata du temps de travail effectif de l'intéressé au cours d'une période de référence déterminée pour l'établissement... Cette allocation annuelle est égale à 100 % du salaire de base de l'intéressé ». Qu'aucune période de référence n'a été déterminée par l'employeur. Que Mr A... a été embauché par contrat CDD le 23/11/15 avec une reprise d'ancienneté au 01/09/15 selon les bulletins de salaire. Qu'à la date de versement de la prime, le 31 Décembre 2016, l'ancienneté d'un an exigée par la convention collective est acquise. Que l'employeur ne peut valablement soutenir à la lecture du texte conventionnel, que la période d'ouverture du droit constitue une "franchise" qui ne serait pas prise en compte pour le calcul du prorata. Qu'il n'appartient pas au Conseil de se positionner sur l'inégalité de traitement qui résulterait d'une embauche le 30 Décembre ou le 2 janvier. Que cette situation découle de la simple application du texte qui s'impose à tous, salarié, employeur et juge. Le Conseil juge qu'il convient de faire droit à la demande du salarié. Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive : Au vu des pièces, et en particulier des jugements récents rendus par le Conseil de prudhommes sur la même problématique concernant l'année précédente, le Conseil estime que la société La Toque Angevine fait preuve de résistance abusive. En conséquence, le conseil fait droit à la demande au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive à hauteur de 250 €. Sur les demandes accessoires : Vu les articles 1153 et 1153.1 du code civil. En l'espèce et compte tenu de la nature de l'affaire, le Conseil dit que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation du défendeur devant le bureau de conciliation pour les indemnités de nature salariale et à compter du prononcé du présent jugement pour les indemnités à caractère indemnitaire. Le conseil constate que l'exécution provisoire est de droit s'agissant des salaires en application des articles R. 1454.28 et R. 1554.14 du Code du Travail dans la limite de 9 mois de salaire, calculée sur la moyenne des trois derniers mois que le conseil évalue à du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Le conseil condamne la société La Toque Angevine au paiement en faveur de M. A... de la somme de 500 €. La société La Toque Angevine, partie perdante, est condamnée aux dépens de l'instance » ;

ALORS QUE les dommages intérêts résultant du retard dans l'exécution d'une obligation au paiement d'une somme d'argent ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, lesquels ne courent que du jour de la sommation de payer ; que même sur le fondement de la résistance abusive, le juge ne peut allouer au créancier des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires qu'à la condition de caractériser, d'une part, la mauvaise foi du débiteur, d'autre part, l'existence d'un préjudice indépendant du retard de paiement ; que la cour d'appel qui a accordé aux salariés des dommages et intérêts sans caractériser ni la mauvaise foi du débiteur ni le caractère indépendant du retard du préjudice réparé, a violé l'article 1231-6 du Code civil (anciennement article 1153 du Code civil).


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-23999;18-24001;18-24002;18-24003;18-24004;18-24005;18-24006
Date de la décision : 06/11/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Angers, 04 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 nov. 2019, pourvoi n°18-23999;18-24001;18-24002;18-24003;18-24004;18-24005;18-24006


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.23999
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