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06/11/2019 | FRANCE | N°18-23331

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 novembre 2019, 18-23331


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 31 juillet 2018), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 15 décembre 2015, pourvoi n° 13-24.426), que M. J..., engagé en qualité de veilleur de nuit par l'association APEAI Font-Trouvée, devenue UNAPEI 34, d'abord selon contrat à durée déterminée du 17 février 1999 puis selon contrat à durée indéterminée à temps partiel du 12 mai 2000, a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir notamment la requalification de son contrat de

travail en un contrat de travail à temps complet et un rappel de salaire à ce ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 31 juillet 2018), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 15 décembre 2015, pourvoi n° 13-24.426), que M. J..., engagé en qualité de veilleur de nuit par l'association APEAI Font-Trouvée, devenue UNAPEI 34, d'abord selon contrat à durée déterminée du 17 février 1999 puis selon contrat à durée indéterminée à temps partiel du 12 mai 2000, a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir notamment la requalification de son contrat de travail en un contrat de travail à temps complet et un rappel de salaire à ce titre ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de requalifier la relation de travail à temps complet à compter du mois de septembre 2003 et de le condamner au paiement d'un rappel de salaire à ce titre alors, selon le moyen, que si les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet, même pour une durée limitée, de porter la durée du travail effectuée par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou de la durée fixée conventionnellement, l'employeur doit être autorisé à rapporter la preuve, lorsque cette durée a été ponctuellement atteinte, que le contrat de travail est redevenu à temps partiel, en établissant d'une part la durée à temps partiel hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, s'il était acquis aux débats qu'au cours d'un seul mois, en septembre 2003, la durée du travail du salarié avait dépassé la durée légale du travail, l'UNAPEI 34 faisait valoir et offrait de prouver que le contrat de travail n'avait cessé d'être à temps partiel depuis, en justifiant de la durée convenue et effectivement travaillée toujours inférieure à la durée légale, de ce que le salarié était parfaitement en mesure de prévoir son rythme de travail par ses plannings mensuels et les avenants à son contrat de travail, et de ce qu'il ne se tenait pas à la disposition permanente de l'UNAPEI 34 puisqu'il avait toujours travaillé pour d'autres employeurs ; qu'en requalifiant toute la relation contractuelle en un contrat à temps complet depuis le mois de septembre 2003 nonobstant ces circonstances qu'elle a jugées inopérantes, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-17 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel de renvoi ayant statué en conformité de l'arrêt de cassation qui l'avait saisie, le moyen, qui appelle la Cour de cassation à revenir sur la doctrine affirmée par son précédent arrêt, est irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association UNAPEI 34 aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association UNAPEI 34 à payer à M. J... la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'association UNAPEI 34.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR requalifié la relation de travail à temps complet à compter du mois de septembre 2003, et d'AVOIR en conséquence condamné l'Unapei 34 à verser à M. J... la somme de 156 147.58 euros bruts à titre de rappel de salaire d'octobre 2003 à juin 2017 inclus, augmentée de la somme de 15 614.75 euros bruts au titre des congés payés y afférents

AUX MOTIFS QUE « Selon les dispositions de l'article L. 212-4-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, énonce:
"Le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit.
Il mentionne la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations d'aide à domicile, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. Il définit en outre les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification. Toute modification doit être notifiée au salarié sept jours au moins avant la date à laquelle elle doit avoir lieu. Le contrat de travail détermine également les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié.
Le contrat de travail précise par ailleurs les limites dans lesquelles peuvent être effectuées des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat. Le nombre d'heures complémentaires effectuées par un salarié à temps partiel au cours d'une même semaine ou d'un même mois ne peut être supérieur au dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue dans son contrat. .
Les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail effectuée par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement.
Le refus d'effectuer les heures complémentaires proposées par l'employeur au-delà des limites fixées par le contrat ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement. Il en est de même, à l'intérieur de ces limites, lorsque le salarié est informé moins de trois jours avant la date à laquelle les heures complémentaires sont prévues.
Lorsque l'employeur demande au salarié de changer la répartition de sa durée du travail, alors que le contrat de travail n'a pas prévu les cas et la nature de telles modifications, le refus du salarié d'accepter ce changement ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement.
Lorsque l'employeur demande au salarié de changer la répartition de sa durée du travail dans un des cas et selon les modalités préalablement définis dans le contrat de travail, le refus du salarié d'accepter ce changement ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement dès lors que ce changement n'est pas compatible avec des obligations familiales impérieuses, avec le suivi d'un enseignement scolaire ou supérieur, avec une période d'activité fixée chez un autre employeur ou avec une activité professionnelle non salariée: Il en va de même en cas de changement des horaires de travail au sein de chaque journée travaillée qui figurent dans le document devant être transmis au salarié en vertu du premier alinéa.
Lorsque, pendant une période de douze semaines consécutives ou pendant douze semaines au cours d'une période de quinze semaines, l'horaire moyen réellement effectué par un salarié a dépassé de deux heures au moins par semaine, ou de l'équivalent mensuel de cette durée, l'horaire prévu dans son contrat, celui-ci est modifié, sous réserve d'un préavis de sept jours et sauf opposition du salarié intéressé, en ajoutant à l'horaire antérieurement fixé la différence entre cet horaire et l'horaire moyen réellement effectué."
Se prévalant du bulletin de paye du mois de septembre qui étaye utilement sa réclamation, Monsieur J... expose avoir travaillé au cours de ce mois 183 heures de travail, ce dont ne disconvient pas l'employeur, bien que les plannings et relevé mensuel d'activité communiqués fassent état d'un nombre d'heures effectivement accomplies inférieure à 151.67 heures, à savoir 107 heures. L'intimée, qui se borne à conclure que l'APEI ne saurait nier le fait que le bulletin de paie de septembre 2003 mentionne 183 heures de travail", ne prétend pas que la durée de travail effectivement accomplie durant ce mois ait été inférieure à 151.67 heures.

Ne serait-ce que pour une durée limitée à un mois, dès lors que, comme en l'espèce, l'accomplissement des heures complémentaires a eu pour effet de porter la durée du travail effectuée par le salarié au niveau de la durée légale ou conventionnelle du travail, Monsieur J... est bien fondé à réclamer la requalification de la relation de travail à temps plein à compter de septembre 2003.
L'Unapei 34 n'est pas fondée à invoquer le fait que « les heures complémentaires étaient parfois formalisées dans le cadre d'un avenant à durée déterminée », dans la mesure où en l'espèce, s'agissant du mois de septembre 2003, il n'est communiqué aucun avenant en ce sens.
Par ailleurs, c'est vainement que l'employeur objecte que le salarié, qui était avisé à l'avance de l'organisation de son emploi du temps, pouvait organiser son emploi du temps et n'était pas tenu de rester constamment à sa disposition, de sorte qu'il a pu cumuler un autre emploi sur lequel il s'est refusé à communiquer le moindre élément, nonobstant une injonction de communiquer qu'il n'a pas satisfaite, ce moyen étant parfaitement inopérant au constat du dépassement de la durée légale de travail.
Le contrat de travail signé par Monsieur J... précisant un horaire hebdomadaire (10 heures par semaine) et ne comportant nulle référence à une modalité d'aménagement pluri-hebdomadaire ou annuel de la durée de travail, l' Unapei 34 ne peut invoquer une prétendue organisation du travail par cycle, sur laquelle en toute hypothèse elle ne fournit aucune précision, ni d'élément précis permettant de constater que la durée légale n'aurai t, en réalité, pas été dépassée sur la durée d'un tel cycle.
De même, ni le fait pour l'association intimée d'avoir payé l'intégralité des heures complémentaires, ni le volontariat allégué de Monsieur J... pour l'accomplissement de ces heures complémentaires, ne prive ce dernier du droit de bénéficier de la requalification en temps complet.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il l'a débouté de la demande présentée de ce chef.
- sur le rappel de salaire
Cette requalification emporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié un rappel de salaire sur la base d'un taux plein sous déduction de la rémunération effectivement perçue par Monsieur J.... Au vu des bulletins de salaire et du tableau détaillé produit par le salarié (pièce n°39), ce dernier document n'étant pas discuté par l'employeur, Monsieur J... justifie du bien-fondé de sa réclamation salariale à hauteur de 156 147.58 euros d'octobre 2003 à juin 2017 inclus, augmentée de la somme de 15 614.75 euros au titre des congés payés y afférents.
L'association intimée n'est pas fondée à opposer au salarié le courrier qu'il lui a adressé en avril 2010 par lequel il exposait n'être pas disponible pour participer à une réunion mensuelle le mardi matin en raison de son cumul d'emploi dès lors qu'à cette date, Monsieur J..., lié par un contrat à temps partiel, sollicitait vainement le bénéfice d'une requalification à laquelle l'employeur s'opposait.
L'Unapei 34 sera donc condamnée à payer le rappel de salaire et l'indemnité de congés payés y afférente conformément à sa demande »

ALORS QUE si les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet, même pour une durée limitée, de porter la durée du travail effectuée par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou de la durée fixée conventionnellement, l'employeur doit être autorisé à rapporter la preuve, lorsque cette durée a été ponctuellement atteinte, que le contrat de travail est redevenu à temps partiel, en établissant d'une part la durée à temps partiel hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, s'il était acquis aux débats qu'au cours d'un seul mois, en septembre 2003, la durée du travail de M. J... avait dépassé la durée légale du travail, l'UNAPEI 34 faisait valoir et offrait de prouver que le contrat de travail n'avait cessé d'être à temps partiel depuis, en justifiant de la durée convenue et effectivement travaillée toujours inférieure à la durée légale, de ce que le salarié était parfaitement en mesure de prévoir son rythme de travail par ses plannings mensuels et les avenants à son contrat de travail, et de ce qu'il ne se tenait pas à la disposition permanente de l'UNAPEI 34 puisqu'il avait toujours travaillé pour d'autres employeurs ; qu'en requalifiant toute la relation contractuelle en un contrat à temps complet depuis le mois de septembre 2003 nonobstant ces circonstances qu'elle a jugées inopérantes, la cour d'appel a violé l'article L 3123-17 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-23331
Date de la décision : 06/11/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 31 juillet 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 nov. 2019, pourvoi n°18-23331


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.23331
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