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06/11/2019 | FRANCE | N°18-20837

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 novembre 2019, 18-20837


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 8 février 2018), que M. C..., engagé le 19 avril 2004 en qualité de conducteur d'engins polyvalents par la société Entreprise Hervé etamp;amp;amp; Cie (la société), a été victime d'un accident du travail survenu le 12 avril 2010 ; qu'à la date de consolidation du 28 mars 2011, la caisse primaire d'assurance maladie n'a pas retenu de séquelle indemnisable ; que le 14 septembre 2011, le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibi

lité de reclassement ; que par décision du 14 janvier 2015, la juridiction de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 8 février 2018), que M. C..., engagé le 19 avril 2004 en qualité de conducteur d'engins polyvalents par la société Entreprise Hervé etamp;amp;amp; Cie (la société), a été victime d'un accident du travail survenu le 12 avril 2010 ; qu'à la date de consolidation du 28 mars 2011, la caisse primaire d'assurance maladie n'a pas retenu de séquelle indemnisable ; que le 14 septembre 2011, le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; que par décision du 14 janvier 2015, la juridiction de sécurité sociale a dit que l'accident du travail était dû à la faute inexcusable de l'employeur et s'est déclarée incompétente pour statuer sur la demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la perte d'emploi consécutive au licenciement pour inaptitude ; que le salarié a ensuite saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de dommages-intérêts au titre de la perte d'emploi due à la faute inexcusable de la société, de la perte des droits à la retraite et du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de déclarer ces demandes irrecevables alors, selon le moyen, que dans les rapports entre salarié et employeur, la compétence du conseil de prud'hommes n'est exclue que lorsque la loi attribue à une autre juridiction une compétence particulière, telle la compétence de principe des juridictions de sécurité sociale en matière d'accidents du travail prévue par le code de la sécurité sociale ; que lorsque le salarié victime d'un accident du travail souffre d'une incapacité permanente, il peut bénéficier d'une rente qui répare notamment les pertes de gains professionnels et la perte des droits à la retraite ; qu'en cas de faute inexcusable de l'employeur, le salarié peut obtenir devant les juridictions de sécurité sociale la majoration de cette rente, ainsi d'ailleurs que la réparation des préjudices complémentaires de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale non couverts par la rente ; qu'en revanche, lorsqu'aucune incapacité n'est reconnue au salarié et qu'aucune rente ne lui est donc servie, la juridiction prud'homale retrouve sa compétence de principe pour statuer sur sa demande de réparation de sa perte d'emploi ainsi que de ses droits à la retraite ; qu'en l'espèce, considéré comme n'ayant pas de séquelle indemnisable au sens du droit de la sécurité sociale, M. C... n'a bénéficié d'aucune rente et a fortiori d'aucune majoration de rente malgré la faute inexcusable de son employeur ; qu'il ne pouvait donc obtenir que de la juridiction prud'homale la réparation de sa perte d'emploi ainsi que de ses droits à la retraite ; qu'en jugeant pourtant que seule la juridiction de sécurité sociale était compétente, peu important que le salarié n'ait pas bénéficié d'une rente, la cour d'appel a violé l'article L. 1411-1 du code du travail et les articles L. 451-1, L. 452-1, L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que, si la juridiction prud'homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail, relève, en revanche, de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, qu'ils soient ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ;

Et attendu qu'ayant constaté que sans contester le bien-fondé du licenciement, le salarié demandait en réalité la réparation de préjudices nés de l'accident du travail dont il avait été victime, la cour d'appel en a exactement déduit que, peu important que le taux d'incapacité du salarié lui permette ou non de bénéficier d'une rente, de telles demandes ne pouvaient être formées devant la juridiction prud'homale ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. C... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. C...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes présentées par M. C... au titre de l'indemnisation de la perte de son emploi, du manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité de résultat et de la perte de droits à la retraite ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la compétence du conseil de prud'hommes

Qu'il est de principe que la demande d'indemnisation de la perte, même consécutive à un licenciement du salarié pour inaptitude, tant de l'emploi que des droits à la retraite, correspond en réalité à une demande de réparation des conséquences de l'accident du travail qui relève de la compétence du tribunal des affaires de sécurité sociale ; que sur ce point, il est indifférent que le salarié, compte-tenu de son taux d'incapacité, puisse bénéficier d'une rente ou pas ;

Que de même, si la juridiction prud'homale est seule compétente pour connaître d'un litige relatif à l'indemnisation d'un préjudice consécutif à la rupture du contrat de travail, relève, en revanche, de la compétence exclusive du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail, qu'il soit ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ; qu'il a déjà ainsi été jugé qu'une cour d'appel avait violé les articles L. 451-1 et L. 142-1 du code de la sécurité sociale, en condamnant l'employeur à payer au salarié des dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité de résultat, alors qu'il résultait de ses constatations que, sous couvert d'une action en responsabilité pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, le salarié demandait en réalité la réparation d'un préjudice né de l'accident du travail dont il avait été victime ;

Qu'en l'espèce, par décision en date du 14 janvier 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Maine-et-Loire s'est déclaré incompétent pour se prononcer sur la demande d'indemnisation formulée par M. C... au titre de la perte d'emploi liée à son licenciement pour inaptitude causée par la faute inexcusable de l'employeur, au motif que cette éventuelle indemnisation était la conséquence non de l'accident du travail mais du licenciement ;

Que M. C... a fait appel de cette décision le 13 mars 2015, puis s'est désisté le 26 janvier 2016 (sic), alors que les principes précédemment énoncés avaient déjà été posés par la jurisprudence ;

Que M. C... avait, dès février 2015, saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la perte de son emploi due à la faute inexcusable de son employeur, d'une demande de dommages-intérêts en réparation de la perte des droits de retraite et d'une demande de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat ;
Que cependant, le conseil de prud'hommes ne pouvait ni indemniser M. C... quant au manquement de l'employeur à son obligation de résultat, ni au titre de la perte des droits à la retraite ni au titre de la perte de son emploi dans la mesure où il demandait en réalité la réparation d'un préjudice né de l'accident du travail dont il avait été victime ;
Que seul le tribunal des affaires de sécurité sociale est compétent dans ces domaines ;
Que par conséquent, il convient d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en toutes ses dispositions et de déclarer les demandes présentées par M. C... irrecevables » ;

ALORS QUE dans les rapports entre salarié et employeur, la compétence du conseil de prud'hommes n'est exclue que lorsque la loi attribue à une autre juridiction une compétence particulière, telle la compétence de principe des juridictions de sécurité sociale en matière d'accidents du travail prévue par le code de la sécurité sociale ; que lorsque le salarié victime d'un accident du travail souffre d'une incapacité permanente, il peut bénéficier d'une rente qui répare notamment les pertes de gains professionnels et la perte des droits à la retraite ; qu'en cas de faute inexcusable de l'employeur, le salarié peut obtenir devant les juridictions de sécurité sociale la majoration de cette rente, ainsi d'ailleurs que la réparation des préjudices complémentaires de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale non couverts par la rente ; qu'en revanche, lorsqu'aucune incapacité n'est reconnue au salarié et qu'aucune rente ne lui est donc servie, la juridiction prud'homale retrouve sa compétence de principe pour statuer sur sa demande de réparation de sa perte d'emploi ainsi que de ses droits à la retraite ; qu'en l'espèce, considéré comme n'ayant pas de séquelle indemnisable au sens du droit de la sécurité sociale, M. C... n'a bénéficié d'aucune rente et a fortiori d'aucune majoration de rente malgré la faute inexcusable de son employeur ; qu'il ne pouvait donc obtenir que de la juridiction prud'homale la réparation de sa perte d'emploi ainsi que de ses droits à la retraite ; qu'en jugeant pourtant que seule la juridiction de sécurité sociale était compétente, peu important que le salarié n'ait pas bénéficié d'une rente, la cour d'appel a violé l'article L. 1411-1 du code du travail et les articles L. 451-1, L. 452-1, L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-20837
Date de la décision : 06/11/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 08 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 nov. 2019, pourvoi n°18-20837


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent , SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.20837
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