LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. F... a été engagé à compter du 1er août 2006 en qualité d'assistant administratif par la société Jeanne d'Arc de Vichy-Clermont métropole (la société) ; que le 17 juin 2010, il a été promu manager assistant chargé des opérations commerciales, statut cadre ; qu'il a été licencié pour motif économique par lettre du 23 septembre 2014 ; que le 23 janvier 2015, il a saisi la juridiction prud'homale pour contester son licenciement et obtenir le paiement de diverses sommes ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, qui est recevable :
Vu les articles 1.1., 9.3 et le chapitre 12 de la convention collective nationale du sport du 7 juillet 2005 ;
Attendu que, selon ces textes, si les stipulations spécifiques instaurées par le chapitre 12 de la convention collective nationale du sport et par les accords sectoriels pris pour son application dans le champ du sport professionnel ne concernent que les joueurs professionnels et les entraîneurs, les autres stipulations de la convention collective s'appliquent à toutes les relations entre les employeurs et les salariés des entreprises exerçant leur activité principale notamment dans l'organisation, la gestion et l'encadrement d'activités sportives ; que la catégorie 6 de la grille de classification de cette convention concerne soit les cadres salariés de structures dont l'effectif est de moins de six salariés équivalent temps plein, soit les cadres ayant moins de 2 ans d'ancienneté dans l'entreprise qui les emploie ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de rappels de salaires au titre de la classification au niveau 7 de la convention collective et dire qu'il devait être classé au niveau 6, la cour d'appel retient que lorsque la société qui employait le salarié évoluait en ligue professionnelle A et B, les joueurs relevaient de la convention collective du basket professionnel, laquelle était applicable aux seuls joueurs sous contrat et entraîneurs et que, pour la période antérieure au mois de juillet 2012, date à laquelle la société n'était plus soumise à la convention collective du basket professionnel, l'effectif relevant de la convention collective du sport était inférieur à six salariés, en sorte que M. F... relevait bien du groupe 6 et qu'aucun complément de salaire ne lui était dû ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'effectif à prendre en compte pour l'application de l'article 9.3 de la convention susvisée comprend la totalité des salariés, y compris les joueurs professionnels et entraîneurs, dont le statut conventionnel spécifique n'a pas pour effet de les exclure de l'effectif salarié de l'entreprise pour la période durant laquelle la société était simultanément soumise à la convention collective du basket professionnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe les sommes dues à M. F... à titre de rappels de salaire, de prime d'ancienneté, d'indemnité de licenciement et de congés payés, en application du niveau 6 de la convention collective nationale du sport, l'arrêt rendu le 19 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la société Jeanne d'Arc de Vichy-Clermont métropole aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. F... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. F..., demandeur au pourvoi principal
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société Jeanne d'Arc de Vichy Clermont Métropole à payer à M. F... les sommes de 9 430,75 euros à titre de rappel de salaire ;
AUX MOTIFS QUE l'employeur précise que lorsque le club évoluait en Pro A ou en Pro B, les joueurs relevaient de la convention collective du basket professionnel, laquelle est effectivement applicables aux seuls joueurs sous contrat et entraîneurs ; que c'est à bon droit que l'employeur en conclut que, pour la période antérieure au mois de juillet 2012, l'effectif relevant de la convention collective du sport était inférieur à six salariés, en sorte que M. F... relevait bien du groupe 6 et qu'aucun complément de salaire ne lui est dû ;
ALORS QUE, selon l'article 9.3 de la convention collective nationale du sport du 7 juillet 2005, relèvent du groupe 6 de la grille de classification des emplois les cadres salariés de structures dont l'effectif est de moins de six salariés équivalent temps plein ou ayant moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise qui les emploie et relèvent du groupe 7 les autres cadres ; qu'en considérant, pour retenir que le salarié avait relevé du groupe 6 jusqu'au mois de juillet 2012, que devaient être exclus du calcul de l'effectif de l'entreprise les joueurs et les entraîneurs qui, au cours de la période où le club avait évolué dans un championnat professionnel, avaient relevé de la convention collective du basket professionnel, la cour d'appel a violé les articles 9.2 et 9.3 de la convention collective nationale du sport du 7 juillet 2005. Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Jeanne d'Arc de Vichy-Clermont métropole, demanderesse au pourvoi incident
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit dénué de cause réelle et sérieuse le licenciement de M. F..., condamné la société Jeanne d'Arc de Vichy-Clermont Métropole à payer à M. F... les sommes de 18 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et 1 500 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, et d'AVOIR ordonné le remboursement par l'employeur aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du prononcé de la présente décision, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage,
AUX MOTIFS QUE La lettre de licenciement mentionne comme cause économique du licenciement la réorganisation rendue nécessaire afin de sauvegarder sa compétitivité du club, ce qui justifierait la suppression du poste occupé jusqu'alors par M. F... :
- Sur les comptes de l'entreprise : Le chiffre d'affaires net lors du licenciement de M. F... était de 757 512 euros contre 690 055 euros l'année précédente et un résultat de 64 000 euros contre - 41 000 euros l'année précédente (- 13 000 euros en 2012), les produits d'exploitation étant respectivement de 1 384 914 (2014) et 1 317 323 (2013) ; que M. F... établit que les dettes du Club n'ont cessé de diminuer depuis l'exercice 2011/2012 et qu'au jour de son licenciement celles-ci avaient baissé de 15 % environ par rapport à l'exercice précédent, que les dépenses du Club ont été stables au cours des trois derniers exercices, aux alentours de 1 400 000 euros par an, que les subventions de fonctionnement ont été en constante hausse, passant notamment de 519 000 euros en 2012/2013 à 644 000 euros en 2014/2015, que la masse salariale au 30 juin 2014 était de 438 000 euros, alors que deux ans auparavant elle était de 651 000 euros, qu'elle est repassée à 615 000 euros lors de l'exercice 2014/2015, exercice au cours duquel M. F... a été licencié, ce pour diminuer la masse salariale ; que ces éléments ne sont pas de nature à caractériser une menace pesant sur la compétitivité du club ;
- Sur les résultats sportifs ; M. F... fait justement observer que les résultats sportifs ne peuvent être avancés comme élément justifiant un licenciement pour motif économique d'autant que ces résultats évoluent d'une année sur l'autre et que le club était classé au niveau NM1 depuis la saison 2012/2013 ; que par ailleurs M. F... mentionne dans ses écritures sans être contredit que les subventions sont passées de 2011/2012 à 2014/2015 aux sommes suivantes : 607 000 euros, 519 000 euros, 634 000 euros et 644 000 euros ;
- Sur la constitution d'un fonds de réserve : cette obligation s'imposait à tous les clubs placés dans une situation identique à celui de l'intimée, la constitution de ce fonds s'étalait sur quatre années, au demeurant le club a pu rapidement réunir la somme de 45.000 euros pour satisfaire à cette obligation ; qu'enfin, les contraintes budgétaires inhérentes à toute entreprise ne peut constituer un motif de licenciement économique ;
Qu'il résulte de ce qui précède que l'existence d'un motif économique, à savoir la nécessité de sauvegarder sa compétitivité pour le club, à l'origine de la suppression du poste de M. F... ne peut être retenue ; qu'il en résulte que le licenciement prononcé est dénué de cause réelle et sérieuse. Eu égard à l'ancienneté, à l'âge (31 ans) au salaire moyen perçu par le salarié, dans une entreprise comptant plus de onze salariés, et tenant l'absence de tout justificatif de préjudice autre que la seule perte de son emploi par le salarié, il convient de fixer à la somme de 18.000,00 euros l'indemnisation revenant à M. F... ;
ALORS QU'une réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité ; que répond à ce critère la réorganisation mise en oeuvre pour prévenir des difficultés économiques, sans être subordonnée à l'existence de telles difficultés à la date du licenciement ; qu'il peut être tenu compte d'éléments postérieurs au licenciement pour apprécier l'existence, à la date de ce dernier, du motif économique de licenciement ; qu'en l'espèce, l'employeur soulignait qu'à l'issue de l'exercice clos le 30 juin 2015, durant lequel le licenciement était intervenu, la société avait de nouveau enregistré une perte de 39 000 €, après les pertes subies en 2012 (13 000 €) et 2013 (41 000 €) et la réduction considérable du chiffre d'affaires du club subie ces deux années (1 919 000 € au 30 juin 2012 contre 2 560 000 € l'exercice précédent, 1 317 000 € au 30 juin 2013) ; qu'il relevait également que si à la fin de l'exercice clos le 30 juin 2014, le club, dont le chiffre d'affaires avait à peine progressé (1 385 000 €), avait obtenu un résultat positif de 64 000 €, cela s'expliquait non par des recettes d'exploitation mais par un produit exceptionnel de 45 000 € provenant d'un apport complémentaire des administrateurs de la société, imposé par une évolution réglementaire obligeant les clubs à disposer d'un fonds de réserve de 73 000 € et que le club ne disposant d'aucune réserve et ses fonds propres étant négatifs, n'avait pu le constituer les années précédentes et avait dû, sur relance de la Fédération Française de Basket-Ball en juin 2014, faire appel à ses administrateurs pour apporter ces fonds ; qu'enfin l'employeur soulignait que la structure administrative du club avait été maintenue quasiment telle qu'elle existait lorsque le club était en pro-A, malgré sa relégation successive en pro-B puis en championnat amateur, nationale 1 et qu'aucun club de nationale 1 ne disposait de telles structures (conclusions d'appel, p. 3 à 6 ; prod. 6 à 9) ; qu'en excluant l'existence d'une menace sur la compétitivité de l'entreprise sur la base essentiellement de la légère amélioration de la situation constatée au 30 juin 2014, sans tenir compte, d'une part, de la perte enregistrée à l'issue de l'exercice suivant, durant lequel le licenciement avait pourtant été prononcé, d'autre part, du contexte des pertes et de la chute du chiffre d'affaires subies en 2012 et 2013, de troisième part, de la circonstance que le résultat positif obtenu au 30 juin 2014 s'expliquait en grande partie par un produit exceptionnel, et enfin, de l'inadaptation de la structure administrative du club à son statut, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail.